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IMMACULEE CONCEPTION

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In honore mulris Domini alia prosa, P. L., i. clxxxix, col. 1019. Ce qui, toutefois, ne tranche pas nettement la question de savoir si le saint abbé doit être considéré comme un tenant de ! a pieuse croyance. Voir, dans le sens négatif, l’abbé Demimuid, Pierre le Vénérable, Paris, 1872, p. 207 ; dans l’autre sens, dom M. Lamey, prieur majeur des Bénédictins de Cluny, Compte rendu du Congrès Mariai, tenu à Lyon les 5, 6, 7 el 8 septembre 1900, t. il, p. 372. Bernard de Morlaix, moine de Cluny, (vers 1140), chante la Vierge toute belle et exempte de toute tache :

Pulchra Iota, sine nota

Cuiuscumque maculée.

Des psautiers de la Vierge, conservés dans des manuscrits du xiie siècle, présentent des idées ou des images semblables.

Ave plena gratia,

Speciosa tota.

Virgo prudens, Immilis

Sine sordis nota…

Ave mater grati »,

Mater benedicta,

Maiedictionibus

Evæ non astricta.

Psallerium beaise Marise V., auctore Stephano Cantuariensi. Brèves op. cit., i. xxxv, p. 154, 162, d’après un manuscrit de Laon.

Ave, totius criminis

Expers, pleua dulcedinis…

Ave, quae sine macula

Virgo mânes in sœcula.

Psallerium beaise Marix V., anonyme. Ibid., p. 190, 195, d’après le même manuscrit et un autre de Gratz, en Styrie.

Absalon, abbé de Springirsbach, au diocèse de Trêves († 1203), soustrait Marie à la loi de la purification. Cette loi s’applique « aux pécheresses, et non pas à celle qui fut sanctifiée dès le sein de sa mère : peccalrici, non ab utero sanctificalœ… Il n’y a pas lieu à purification, quand nulle tache du péché n’a précédé, ubi non prsecessit aliqun macula culpae. » Serm., xv7, in Puriflcatione, P. L., t. ccxi, col. 97 sq. Si l’idée de sanctification dans le sein maternel exclut en Marie celle de péché ou de tache spirituelle, c’est donc qu’aux yeux de cet écrivain la sanctification ne s’oppose pas à la conception, comme elle s’opposerait dans l’hypothèse où la conception se serait faite dans le péché.

L’école de Saint-Victor de Paris, à laquelle l’abbé Absalon appartenait, mérite une mention spéciale. Son chef, Hugues († 1141), n’a pas traité le problème dans ses œuvres authentiques. Seul YAppendix ad Hugonis opéra contient un sermon intitulé : In jestioUale Conceptionis B. Virginia, sed magis in desponsalione cujuslibet animie fidelis. Les paroles du Cantique : Tota pulchra es, etc., y sont dites adressées par Dieu à l’âme, mais à l’âme semblable à celle qu’on fêtait ce jour-là : Loquitur… Deus ad animam, et ad ialem qualis ista fuit cujus hodie solemnia celebramus. Serm., îx, P. L., t. cLxxvii, col. 918. Ce qui peut être une allusion à la beauté de l’âme de Marie au jour de sa conception. Ailleurs, la Vierge naissante est comparée à une aurore qui apparaît dans le monde resplendissante, in mundo velut aurora splendi/era. Serm., xxxiv, in Naiivitaie vel Assumptione B. M., col. 980.

L’autre gloire de l’école, Richard, écossais d’origine († 1173), attribue à la mère de Dieu la sanctification dans le sein de sa mère et l’immunité complète par rapport à tout péché actuel ; tel un aslre lumineux, in se lucida. Il la dit cependant purifiée au jour de l’annonciation, mais d’une purification

éminente, qui consista dans l’extinction de laconcupis cerne ou /ornes peccuti. In Canlic, c. xxvi, xxxix. P. L., t. cxcvi, col. 482, 957 : cf. De Emmanuele, 1. li. c. xxvii, col. 661. Est-il allé plus loin, à un moment donné de sa vie ? Il faudrait le reconnaître, si le Sermo de conccptione, publié sous le nom de Pierre Comestor, était réellement l’œuvre de Richard, suivant l’attri bution qui lui en est faite par Guillaume de Ware et quelques autres.

Achard, abbé de Saint-Victor (1155), puis évoque d’Avranches (1161-1171), soutient résolument la sanctification de Marie dès le sein de sa mère : adhuc ez ulero matris suæ, al crcdimus, fuit sanctificata. Si Jérémie, si Jean-Baptiste ont joui de ce privilège, comment n’en aurait-il pas été de même pour Marie, quomodo non Maria ? A supposer qu’il y ait eu en elle quelque tache, ce n’est pas à la naissance, mais à 1r conception qu’elle l’aurait contractée. Assertion qu ; n’a rien, comme on le voit, de catégorique ; elle n’est qu’hypothétique : Vel, si aliquam habuit maculant, non ex nutivilate, sed conceplione eam contraxit. Sermoi ; ms. de Naiivitaie, signalé et cité par le P. Noyon, Note bibliographiques, avril 1911, p. 183.

Avec d’autres Viclorins, nous sommes sur un terrain mieux assuré. Gauthier († 1180) s’en prend au Maître des Sentences d’avoir restreint au temps qui suivit l’incarnation du Verbe l’affirmation de saint Augustin sur l’absence de péché dans la mère de Dieu ; il lui reproche d’avoir faussé la pensée du grand docteur par l’introduction dans le texte des tenues e-t tune : Cerlum est ergo quod Augusiinus non ex tuniscd absolute quandocumque de peccatis agitur, dcieiminat illam omni medo et tempore debcre excipere. contraria istis scholasticis evidenlissime definiens. D ; son côté, il affirme que Marie fut singulièremeii remphe du Saint-Esprit dès le sein de sa mère, san. opposer aucunement la sanctification à la conception : Spiritu Sanclo adhuc ex ulero malris suæ singularilei repleta. Excerpla ex libris contra quatuor labyrinihos Francise, P. L., t. cxctx, col. 1155. Il va plus loin el refuse d’admettre que Marie ait jamais été fille de colère : Nec arbitror quod aliquando fuerit filia iræ. Sermo in Naiivitaie B. V., Paris, Bibl. nat., ms. lat. 3578, fol. 87, signalé par le P. Noyon, loc. cit.

Adam, le poète de l’école de Saint-Victor († 1177), reprend les anciennes images de la fleur qui pousse au milieu des épines, sans en être atteinte.

Salve Verbi sacra parens. Nos spinetum, nos peccati Flos de spinis spina carens, Spina sumus cruentati, Flos spineti gloria. Sed tu spinæ nescia.

Sequentiæ, Axxv, In Asumptione B. M. V., P. L., t. cxcvi, col. 1502 ; cf. Dreves, Anakcta hynmica. t. Liv, p. 384, pour divers manuscrits des xii « et xme siècles, où cette prose se retrouve. D’où cette remarque d’un récent historien : » La prose de l’Assomption, Salve mater Salvatoris, est émaillée de traits qui, sans formuler expressément l’immaculée conception, ne se comprennent bien que si on les entend en ce sens. » H. Lesètre, oji. cit., p. 40.

Enfin « le docteur universel », Alain de Lille († 120.^), écarte de la sainte Vierge tout péché avant et apréb^ l’annonciation : Nullum crcdimus in Virgine ante et post conccptioncm fuisse peccatum. Il nous la présente surgissant comme l’aurore, toute sainte de corps et d’âme : El vcre quasi aurora surgens, id est tota simul surgens, quia tota fuit sancta, ci corpore et spiritu splendens. Elucidatio in Cantica, c. iv, vi, P. L., t. ccx. col. 80, 94.

Il y eut donc au xiie siècle un progrès notable dans le développement de la croyance à la sainteté originelle de la mère de Dieu, mais il s’en faut de beaucoup que cette croyance ait été alors commune ou