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IMMACULÉE CONCEPTION


sivenient celui-ci : « Fcle de la conception d’Anne. » Si ce litre a prévalu, en fait, dans les éditions modernes des livres liturf^iques, l’aulre titre : « Fêle de la conceplion de la niùre de Dieu » était fréquent pendant tout le moyen âge non seulement en pays grec, mais aussi en pays slave.

Et cela n’a rien d’étonnant, puisque, si des titres des pièces nous passons à leur contenu, nous constatons ce fait indéniable qu’aussi bien dans les textes liturgiques que dans les documents oratoires, la conception passive, c’est-à-dire Marie conçue, Marie venant à l’existence tient beaucoup plus de place que l’annonce miraculeuse de la conception, ou le miracle de la conception activ-e réalisé dans un sein stérile. Et cela était inévitable. Du moment qu’il s’agissait de la venue à l’existence de la mère de Dieu, c’est principalement sur sa personne que devait se porter la pensée des poètes sacrés comme celle des orateurs. Le reste n’est qu’accessoire, comme il est facile de s’en convaincre en parcourant les textes. La liturgie parle continuellement de la conception de la mère de Dieu, de la conception de la Vierge tout-immaculée, / ; a’jXÀT|’| ;  ; -y, ; Ci-ipaaniao-j -aoOivou, de la sainte conception de la Théotocos, de la vénérable conception de la seule pure, /, aîr.-’r^ C’jÀ/, t, ’|'.ç -y, ; [j-ovy, ; âvvy, ;, et elle célèbre en termes magnifiques celle qui est conçue. Les orateurs font de même, et non pas seulement les plus récents, mais les tout premiers. Voir le texte de Jean d’Eubée cité plus haut, col. 921, et celui d’Eutliyme, col. 930. Dans l’homélie de ce dernier, le miracle qui a fait cesser la stérilité d’Aune n’est même pas signale. La pensée de l’orateur ne s’arrête que sur Marie. La fête du 9 décembre est pour lui la première de toutes, celle où l’humanité a reçu la substance et le principe des bienfaits divins : Ta’JTTjV ouv TYjV r|aipav ouy oj ; 7 : p(ÔTY|V à-âvffov iootôjv Et’sSsêoasOa ; où/ w ; to y.£sâÀa : ov y||J^ïv twv ayaOùJv -po^EviaouTav âvaYy.aÀ ! < ; (.)[j.sOa ; et si Georges de Nicomédie appelle la même fête non seulement la première de toutes, mais la base et le fondement des autres, oiov [iâs ;  ;  :  ;  ; za ; y.ç^rir.l ; aJ^aV ; j-OTjOî’.ij.ivvi, Homil., Il, in Conccplionem, P. G-, t. c, col. 355, c’est certainement à cause de la conception passive, à cause de la venue à l’existence de la mère de Dieu.

Que conclure de là ? Ceci que l’objet de la fête grecque est complexe et qu’on peut y distinguertrois points de vue : 1° l’annonce de la conception par un ange ; 2° le miracle de la conception active dans un sein stérile ; 3° la conception passive, la venue à l’existence de la future mère de Dieu. Le premier élément a sans doute déterminé l’introduction de la solennité dans le cycle liturgique ; car ce n’est point pour un motif d’ordre dogmatique ; ce n’est point expressément pour célébrer l’exemption de Marie de la faute originelle que la fête a été établie ; c’est simplement pour compléter le cycle des fêtes mariales. Le Protévangile de Jacques foui-nissait le thème premier aux allures historiques : l’annonce par un ange de la conception miraculeuse. Mais les deux autres éléments se sont unis spontanément et naturellement à ce noyau primitif, et c’est le troisième qui, en fait, a toujours occupé la place principale dans la pensée des poètes et des orateurs. Prêtant peu d’attention aux données plus ou moins légendaires qui ont accompagné le fait de la conception, ils ont célébré surtout la venue à l’existence de la future mère de Dieu, et, dans la mère, ont aperçu déjà le Fils et son œuvre rédemptrice. Ils ont parlé d’une intervention toute spéciale de la Trinité sainte pour préparer le palais du Verbe fait chair. La fête leur a fourni l’occasion de manifester leur croyance à la sainteté perpétuelle de la Toute-Sainte. C’est bien, en fait, la Vierge immaculée, exempte de toute souillure dès le premier instant de

son existence, façonnée par Dieu avec des attentions spéciales dans un sein stérile, qu’ils ont chantée et louée. Tel a été le rôle dogmatique de la fête de la Conception en Orient. Elle n’est))as née, elle ne s’est pas développée sous rinfluence de préoccupations théologiques, au milieu de luttes et de controverses, comme cela s’est produit en Occident. C’est un phénomène de la piété mariale éclos en son temps, et qui a tout naturellement donné occasion à des manifestations d’ordre dogmatique, notamment à des déclarations expresses sur la sainteté initiale de la mère de Dieu, doctrine admise bien avant la fête. Et comme la doctrine, la fête n’a jamais été l’objet d’aucune controverse, du moins pendant toute la période bj’zantine. Du point de vue liturgique et quant à leur origine, la fête de la conception d’Anne et la fête de la conception de saint Jean-Baptiste se ressemblent ; mais du point de vue théologique et quant à leur terme et quant à leur objet principal et quant aux manifestations doctrinales auxquelles elles ont donné lieu, elles diffèrent autant que Marie diffère d ; Jean, que la mère de l’Époux de l’ami de rÉjioux.

2 » Les textes liturgiques. — On trouve dans les divers livres liturgiques de l’Église grecque bien des passages exprimant d’une manière plus ou moins claire la perpétuelle et absolue sainteté de la mère de Dieu. De ces passages nous avons déjà produit quelques-uns, en parlant de Romanos le Mélode, d’André de Crète et de Joseph l’Hymnographe. Nous n’avons que peu de chose à ajouter sur ce sujet. C’est un fait digne de remarque que les textes liturgiques, tout en donnant à la Toute-Sainte les éloges les plus magnifiques, fournissent rarement une formule satisfaisante de la doctrine de la conception immaculée. Ils restent presque toujours dans le vague et l’indéterminé. Les témoignages implicites y abondent, mais les explicites y sont très rares. Cela ne signifie point que ceux qui les ont écrits ne croyaient point d’une foi explicite à la sainteté oiginelle de Marie, puisque la majeure partie d’entre eux sont dus à la plume de mélodes ayant vécu entre le vu" ; et le xe siècle, et que. parmi ces ftiélodes, saint Jean Damascène, saint Théodore Studite et son frère Joseph de Thessalonique occupent une place d’honneur. Mais cela vient de ce que l’absolue et perpétuelle sainteté de la mère de Dieu ne faisait de doute pour personne, que c’était un axiome pour la pensée byzantine, et que, dès lors, on ne songeait point à la formuler en termes techniques. Appeler Marie la Toute-Sainte, y, -avavioi, la Tout-Immaculée leur suffisait. A nous ces épithètes ne suffisent que dans la mesure où nous avens par ailleurs des témoignages plus précis de la croyance de ceux qui les ont employées. En d’autres termes, la plupart des textes empruntés aux livres liturgiques considérés en eux-mêmes ne nous livrent que des formules implicites de la doctrine. Pour recevoir une valeur et une clarté plus grandes, ils ont besoin d’être insérés dans la chaîne de la tradition exprimée dans d’autres documents.

A propos des épithètes mariologiques, un choix sévère s’impose au théologien. Plusieurs visent directement la virginité corporelle de Marie et n’ont rien à voir avec la doctrine de la conception immaculée. On ne peut accorder une grande valeur théologique aux épitlictes simplement affirmatives ou négatives disant de Marie qu’elle est toute sainte et toute pure, vu que la liturgie grecque prodigue ces épithètes à d’autres qu’à la mère de Dieu. Qu’on en juge par un exemple. Dans l’office du 24 novembre en l’honneur de sainte Cécile, celle-ci est appelée « le sanctuaire tout saint du Christ », Xo’.g-o’j zavivjov -iuivo :, « le temple très pur du Christ », Xp : aTo2 va : y.aÛapwTaTî, « un jardin fermé et une fontaine scellée », y.r-.o ; y.i-