Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 7.1.djvu/464

Cette page n’a pas encore été corrigée
913
914
IMMACULEE CONCEPTION


originelle de la mère de Dieu, ce n’est point parce qu’ils étaient opposés h cette doctrine ; ce n’est point parce qu’ils ignoraient l’existence du péché originel, dont ils font si souvent mention ; c’est parce que, pour eux, l’absolue sainteté de Marie allait de soi ; qu’elle s’imposait à leur esprit à l’égal d’un axiome. Il aurait fallu une controverse pour les amener à énoncer plus explicitement ce qu’ils supposaient comme une vérité incontestable. Ils ne sont pas les seuls à donner cette impression : c’est celle qui se dégage de toute la littérature mariologique des byzantins.

2° Pérès des ri’el VII'e siècles. — Le célèbre mélode saint Romanos, qui vivait sous le règne de Justinien, a laissé sur la naissance de Jésus-Christ un beau cantique, dans lequel nous relevons l’expression suivante : Le Christ a levé la malédiction par l’intermédiaire de la Vierge et a rétabli Adam dans son premier état, -’jv’Aoà’j. àvazaXsaa ;. Tipsv âpàv Sii vrapOsvou. Pitra, Anaieda sacra, Paris, ’1876, t. i, p. 226. Dans un autre cantique sur la naissance de Marie, que conserve encore la liturgie grecque, la Vierge est déclarée un temple saint dès sa naissance, Cràp/st ?. tî/Ôîïaa, vaoç iy.oç. « Ibid., p. 199. Les tribus d’Israël apprennent qu’Anne a enfanté l’Immaculée, 0-. : "É-HLsv "Avva -r, ’/ à/pav-iv. Ibid. « Dans ta sainte naissance, ô immaculée, Joachim et Anne ont été déUvrés de l’opprobre de la stérilité, et Adam et Eve de la corruption de la mort, Lai’.à ; j. La ! EJ’a Èx tt ; ç çôopàç Toù OavaTO’j fiÀsuOsocôGrpav, àyoav’s. èv Tr ; âyi’a yîvvr^aE’. co-j. » Ibid., p. 198. Pour saisir toute la portée de ces dernières paroles, il faut se rappeler qu’à l’époque de Romanos, on ne distinguait pas encore entre la fête de la ConcciUioii et la fête de la Nativité proprement dite. Celle-ci célébrait la venue au monde de la Vierge, aussi bien sa conccption d’une mère stérile que son enfantement et le terme de yivvï.c ;  : désigne ces deux moments. La venue au monde de la Vierge est sainte. Elle ne fait pas seulement cesser l’opprobre de Joachim et d’Anne ; elle délivre encore Adam et Eve, c’est-à-dire la nature humaine, de la corruption de la mort, c’est-à-dire de la tare originelle. Le premier sujet de cette délivrance n’est-il pas Marie elle-même au jour de sa sainte naissance (= conception et enfantement) ?

Saint Anastase I"’, patriarche d’Antioche († 599), dans son troisième discours dogmatique, écrit cette phrase : j Le Verbe, voulant se faire homme, parce que l’homme ne pouvait être sauvé autrement, descendit dans un sein virginal et exempt de toute corruption ; car Marie était une vierge chaste de corps et d’esprit. » Orat., iii, de incarnadone.Q, P. G., t. Lxxxix, col. 1338. On remarquera qu’Anastase ne parle pas seulement de la virginité corporelle, mais aussi de la virginité spirituelle, de la sainteté. L’exemption de toute corru’ttion s’applique donc et au corps el à l’âme, et c’est cette pureté totale qui a valu i Marie d’être choisie par le Verbe. Dans la première homélie sur l’Annonciation qui est attribuée au même auteur, nous lisons le passage suivant : Salut, pleine de grvce ; le Seigneur est avec toi, parce que tu es devenue pour nous la vole du salut, qui conduit au ciel… C’est pourquoi avec toutes les générations nous te proclamons bienheureuse seule parmi toutes les femmes, toi en qui le soleil n’a point allumé la flamme de la volupté et h qui la lune n’a point fait sentir, pendant la nuit, son Influence déprimante. Car tu n’as point laissé chanceler le pied de ton âme (Ps. cxx, 3), mais tu l’as posé sur le rocher, et tu es demeurée inébranlable. Et le Seigneur t’a gardée, r, v ojI. èçÉLau^Ev v.îoç, rfiovi, ; ÇAÔya JrayMv crJO : vjLto :.’jiXr]/r, pof.lOT, ; ï[ ; Xa’}£ 5ûvaij. ; ç. » iSerm., ii, in Annunt. Deiparæ, P. G., ibid., col. 1377. Dans un second discours pour la même fête, Anastase salue en Marie la « seule parmi les vier ges qui ait été remplie de grâce, » et l’appelle « la belle, l’immaculée, la sainte », tV// ; j.o’vT|V àv -apOivotç I. ; /apiTO)[j.£VTjV, TT|V zaÀrJv, TrjV aa ;  : iÀov, ’ï, v ayfav. Serm., iii, in Annunt., ibid., col. 1388. Si Marie a ignoré les suites du péché originel comme la concupiscence et certaines autres misères, si elle n’a point péché, si Dieu l’a gardée, si elle est l’immaculée, la sainte par excellence, si elle a été exempte de toute corruption, cela ne signifie-t-il point qu’elle a ignoré cette souillure de l’âme et du corps qui atteint tout homme venant en ce monde ?

Dans son homélie sur la fête de la Dormition, le patriarche de Jérusalem, saint Modeste († 634), proclame la Théotocos toute sainte, ravayîa, plus sainte et plus glorieuse que les chérubins et les séraphins, P. G., t. lxxxvt, col. 3280, et lui donne le second rang après Dieu. Ibid., col. 3281. Le Christ la choisit entre toutes les créatures raisonnables et spirituelles pour en faire sa mère toute sainte, et il la remplit de grâce au suprême degré, » èLÀ£Ça[j.svov ysvÉoOa-. zavaytav jXTiTipa aÙTOu La ! ’j-joTscav to3 -avxo ; /^^p’-TfôaavTa aùi : iv, col. 3284. Il la sanctifia pour qu’elle devînt son séjour, ày’.ac ; a ; aj-r, v sivat Osooo/ov ywpîov. Ibid. ; cf. col. 3280, ŒôOsv Tpa^uivï). Quand s’est produite cette sanctification, cette /apÎTfDi’.ç ? Modeste ne le dit pas expressément, mais il l’insinue suffisamment quand il dit que la Vierge est un propitiatoire construit par Dieu lui-même, iXaaTr ^lpiov GsoiocuTov, col. 3305. et qu’elle est la porte orientale dans laquelle le mensonge n’a jamais eu accès, Èv r, TO i^-êûôoç où 7 : pciac-£Àa3sv, col. 3301. Quant à la préservation du corps de Marie de la corruption du tombeau, le patriarche hiérosolymitain l’attribue directement à la toute-puissance du Sauveur, col. 3293. Ajoutons enfin que Modeste n’oublie pas de signaler le rôle de Marie dans la rédemption de l’humanité : « Ballottée sur l’océan de ce monde, l’humanité a été sauvée en toi, et par toi a recouvré les dons et les biens éternels, » r, àvOp(o7 : o’- : r| ; osaucTa ; Èv aot y.al O’.'x œo5 à’/rL-.rliix-o /apîajj.ata Y.a.1 at’tov.a àyaOa, Col. 3305.

Le successeur immédiat de saint Modeste sur le siège de Jérusalem, saint Sophrone († 638), célèbre en termes magnifiques la sainteté de la mère de Dieu tant dans sa Lettre synodique à Sergius que dans ses homélies, spécialement dans la longue homélie sur l’Annonciation. Notons tout d’abord que Sophrone affirme très souvent et d’une manière très explicite l’existence de la faute originelle et de ses suites pour tous les descendants d’Adam. Il parle de notre chute en Adam, de la condamnation de notre nature â cause de notre désobéissance en Adam. Encomium in S. Joanncm Bnpiistam, P. G., I. Lxxxvii, col. 3328. En faisant tomber Adam, le diable a rendu tous les honmies transgresscurs du divin commandement. Orat.w, in Anniintiationem, ibid.. col. 3244. « Nous tenons d’Adam un corps mortel [larcc que nous contractons la souillure du même Adam, notre premier père. » Orat, iii, de Hypapantc, ibid., col 3298-3299. Sur les suites du péché originel, voir l’homélie sur l’Annoncialion, col. 3229-3232. Voir aussi col. 3202-3203, 3736, 3160.

La lettre dopmatique envoyée par saint Sophrone à Sergius de Constantinople et aussi aux autres patriarches, après le synode de Jérusalem de 634. est un document Ihéologique de grande valeur tant purce qu’elle est rédigée sous la forme d’une profession de foi que parce qu’elle reçut l’approbation des Pères du Vl’concileœcuménique, à la XPsession. Mansl, C.oncH., t. XI. col. 461-508. La doctrine de la perpétuelle sainteté de la mère de Dieu y est clairement insinuée dans le passage suivant : Au sujet de l’incarnation, je crois que Dieu le Verbe, le Fils unique du Père…, pris