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IMMACULEE CONCEPTION


ecclésiastiques ; enseignement qui sera développé plus loin. Quelques témoignages notables apparaissent dès le ive siècle avec les saints Éphrem, Ambroise et Épiphane. Mais le plus grand nombre se rapportent à la période postephésienne ; alors commencent à se dérouler ces litanies ou séries d’Ave, qui sont comme autant de commentaires oratoires de la salutation angélique. Contentons-nous ici d’énoncer quelques considérations générales qu’il importe de ne pas perdre de vue, si l’on veut apprécier exactement la valeur de la preuve fournie par les paroles de l’ange et celles d’Elisabeth, étudiées sous la lumière de la tradition active. Les Pères, même ceux des premiers siècles, comme Justin, Irénée, Éphrem, Épiphane, ont rapproché, nous l’avons vu plus haut, le dialogue qui s’établit, au jour de l’Annonciation, entre l’archange Gabriel et la Vierge Marie, de celui qui avait eu lieu, au paradis terrestre, entre le serpent tentateur et la première femme. Ce rapprochement leur a servi pour saisir dans toute sa portée la mystérieuse prédiction de la Genèse et y voir la nouvelle Eve à côté du nouvel Adam ; par une conséquence logique, Il y a pour eux comme une réaction du Protévangile sur la salutation angélique, et cette circonstance les aide à mieux comprendre la plénitude de grâces, l’union avec Dieu et la bénédiction propres à la nouvelle Eve, mère du Verbe incarné. En outre, dans leurs commentaires du texte ou leurs éloges de la bienheureuse Vierge, ils ne s’arrêtent pas au seul terme de z ; /apiT’» ; j. : vy|, ils pèsent aussi les autres mots, soit de la salutation angélique : Le Seigneur est avec vous, soit de la salutation d’Elisabeth : Vous êtes bénie entre les femmes, et le fruit de vos entrailles est béni ; alors le Fils et la mère leur apparaissent unis dans la bénédiction divine, de même qu’ils leur apparaissent unis, à titre de nouvel Adam et de nouvelle Eve, dans la lutte contre le serpent homicide et le relèvement du genre humain. Enfin cette plénitude de grâces, cette union spéciale avec Dieu, cette bénédiction singulière qui sont propres à Marie, mère du Verbe fait homme et nouvelle Eve, les Pères ne les rapportent pas, sauf quelques exceptions formellement désavouées par les autres, au seul moment où elle devient mère ; ils les considèrent comme des perfections préalables : Marie est déjà pleine de grâce, spécialement unie avec Dieu, singulièrement bénie, quand l’archange Gabriel la salue au nom du Très-Haut, et elle est telle, dans sa vie antérieure, en vertu de raisons ou de principes qui valent, non pour tel instant déterminé, mais indistinctement et indéfiniment pour toute la durée de son existence.

La conception immaculée de Marie est contenue dans cette doctrine d’une façon implicite ou équivalente, comme élément ou partie intégrante de cette plénitude de grâce, de cette union spéciale avec Dieu, de cette singulière bénédiction appelées en elle par son double titre de mère du Verbe incarné et de nouvelle Eve. Là s’insère naturellement le point de raccord entre l’interprétation patristique du texte de saint Luc et certaines considérations de théologiens modernes qui, prises spéculativement, pourraient paraître n’énoncer que de simples convenances ; soit, par exemple, ce passage de Newman, Du culte de la sainte Vierge dans l’Église catholique, trad. revue et corrigée par un bénédictin de l’abbaye de Farnborough, Paris, 1908, p. 68 sq. : « Est-ce trop inférer que Marie, devant coopérer à la rédemption du monde, avait reçu au moins autant de grâces que la première femme, qui fut, il est vrai, donnée comme aide à son époux, mais coopéra seulement à sa ruine ? Si Eve fut élevée au-dessus de la nature humaine par ce don moral intérieur que nous appelons la grâce, y a-t-il témérité à dire que Marie eut une grâce plus grande ?

Cette considération donne un sens à la parole de l’ange qui salue Marie « pleine de grâce » ; et cette explication du mot original est indubitablement Taie, aussitôt qu’on repousse l’hypothèse protestante, que la grâce est seulement une approbation ou acceptation extérieure, répondant au mot « faveur », tandis que, d’après l’enseignement des Pères, c’est une condition intérieure réelle ou qualité ajoutée à l’âme. Si Eve posséda ce don intérieur surnaturel dès le premier moment de son existence personnelle, peut-on nier que Marie n’ait eu pareillement ce don dès le premier moment de son existence personnelle ?

Plazza, op. cit., Act. i, a. 2, n. 145-169 ; Passaglia, op. cit., sect. V, c. IV ; Palmieri, De Dec créante, th. Lxxxviii ; De peccato origin., th. xxiv ; Malou.op. cit., c. viii, a. 1 ; Al. Schàfer, op. cil., p. 122-127 ; Knabenbauer, Comment, in Evangel. sec. Liicam, Paris, 1896, p. 60-64 ; L. Janssens, op. cit., p. 5658 ; M. Jugie, Le témoignage de saint Luc sur l’immaculée conception, dans Notre-Dame, 1911, 1. 1, p. 67-69.

Textes inefficaces ou secondaires.

1. L’épouse

sans tache ; la cité sainte ou la sagesse créée par Dieu lui-même. — A ces idées ou autres semblables se rattachent un certain nombre de textes de l’Ancien Testament empruntés au Cantique des cantiques, aux psaumes et aux livres sapientiaux.

Cant., Il, 2 : Sicut lilium Comme un lis au milieu inter spinas, sic amica mea des épines, telle est ma bienaimée parmi les jeunes filles.

Quelle est celle-ci qui monte du désert, comme une colonne de fumée, exhalant la myrrhe et l’encens, tous les aromates du parfumeur ?

Que vous êtes belle, mon amie, que vous êtes belle ! … Vous êtes toute belle, mon amie, et il n’y a point de tache en vous… C’est un jardin fermé que ma sœur fiancée, une source fermée, une fontaine scellée, un bosquet où croissent les grenades avec les fruits les plus exquis.

Ouvrez-moi, ma sœur, mon amie, ma colombe, mon immaculée…

Quelle est celle-ci, qui apparaît comme l’aurore, belle comme la lune, pure comme le soleil, mais terrible comme une armée en bataille ?

Dieu est au milieu d’elle : elle est inébranlable ; de bon matin Dieu vient à son secours.

Des choses glorieuses ont été dites sur vous, cité de Dieu… C’est le Très-Haut qui l’a fondée.

Levez-vous, Seigneur, venez au lieu de votre repos, vous et l’arche de votre sainteté !

Dès le commencement et avant tous les siècles j’ai été créée.

Le Seigneur m’a possédée au commencement de ses voies, avant ses œuvres les plus anciennes.

La sagesse a bâti sa maison, elle a taillé ses sept colonnes.

La sagesse n’entre pas dans une âme méchante, et n’habite pas dans un corps esclave du péché.

Tous ces textes ont été appliqués à Marie immaculée, quelques-uns rarement, d’autres fréquemment.

inter filias.

III, 6 : Qu » est ista quæ ascendit per desertum sicut virgula fumi ex aromatibus myrrhae et thuris et univers ! pulveris pigmentarii ?

IV, 1, 7, 12, 13 : Quampulchra es, amica mea, quam pulchra es ! … Tota pulchra es, amica mea, et macula non est in te… Hortus conclusus soror mea, sponsa, hortus conclusus. Ions signatus. Emissiones ture paradisus malorum punicorum, cum pomorum îructibus..

V, 2 : Aperi mihi, soror mea, sponsa, columba mea, immaculata mea…

VI, 9 : Quæ est ista, quae progreditur quasi aurora consurgens, pulchra ut luna, electa ut sol, terribilis ut castrorum acies ordinata ?

Ps. xLv, 6 : Deus in medio ejus : non commovebitur ; adjuvabit eam Deus mane diluculo.

Lxxxvi, 3, 5 : Gloriosa dicta sunt de te, civitas Dei… Ipse fundavit eam Altissimus.

cxxxii, 8 : Surge, Domine, in requiem tuam, tu et arca sanctificationis tuse !

Eccli., xxiv, 14 : Ab initio et ante sæcula creata sum.

Prov., viii, 22 : Dominus possedit me m initio viarum suarum. antequam quidquam faceret a principio.

IX, 1 : Sapientia aedificavit sibi domum. excidit columnas septem.

Sap., I, 4 : In malevolam animam non introibit sapientia, nec habitabit in corpore subdito peccatis.