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HYPOSÏASE


bien déterminée. Ils ont exprimé le dogme catholique. en insistant sur le caractère d’incominunicabilité. d’existence séparée, d’être complet et distinct, qui est celui de l’hypostase et de la personne ; mais ils ne semblent pas avoir poussé plus loin l’explication métaphxsique de l’union hypostatique. Toutefois, on ne peut nier que de leurs expressions il est facile de rapprocher la terminologie de l’école de Scot. Voir plus loin. Rien d’étonnant donc que des auteurs scotistes, comme Tipliaine et Franzclin, se réclament du patronage de ces anciens et vénérables théologiens. Cf. Tipliaine, De persona et hyposlasi, c. vi : Franzclin. JJe Verbo incamcilo, th. xxx. Sur la pensée de S. Thomas d’Aquin, voir col. 421 sq.

II. LES ÉCOLES.

i.es divergences d’écoles se sont produites parce que les théologiens, se laissant entraîner de plus en plus par le courant de la pensée latine, se sont demandé quel élément m.’laphysique donne à la nature concrète d’être une hypostase ou, en d’autres termes, lui confère la subsistence, en prenant ce mot dans un sens abstrait. De In. le problème de l’hypostase est devenu celui de la subsistence, non plus entendue au sens concret des grecs, mais au sens abstrait des théologiens postérieurs à saint Thomas et que saint Thomas lui-même accepte parfois. Ainsi la personne se présente à l’esprit comme le résultat de deux éléments : d’une part, la nature concrète, l’essence existante ; d’autre part, la subsistence distincte de la nature (soit réellement, soit en simple raison), et lui conférant l’existence en soi et l’incommunicabilité. A défaut d’ordre chronologique, l’ordre logique des systèmes apparaîtra avec clarté dans le schéma suivant :

1. comme >m élé ment négatif (école

, scotiste et nomina I liste).

Nature concrète

existante. (Sur la

composition de

cette nature, voir

Essence, t. v,

col. 842.)

1° Subsistence, dis tincte en simple

i raison et conçue

2° Subsistence, disi

I tincte réellement ^’et constituée par

2. comme un élé ment positif (école

de Tiphaine).

3. un mode sub stantiel (deux

écoles : Cajétan et

Suarez).

4. l’existence elle même, réellement

distincte de l’es sence (Capréolus).

Première école : la subsislencc est conçue comme ne se distinguant pas réellement de la nature concrète, à laquelle elle ajoute simplement la négation de dépendance vis-à-vis d’une autre réalité. — 1. Exposé. — Ce système, appelé système scotiste, est, en réalité, antérieur à Scot, puisque saint Thomas le réfute à plusieurs reprises. In IV Sent., t. III, dist. I, q. i, a. 3 ; Sum. Iheol., I », q. xxx, a. 4. Mais Duns Scot lui a apporté le relief et la notoriété qu’il a gardé depuis dans toute l’école scotiste et nominaliste. D’après le docteur subtil, la personnalité (subsistence) n’est pas autre chose que la substance individuelle considérée du point de vue de sa « non-assomption » par une autre personne. C’est donc un élément négatif qui constitue la subsistence ou la personnalité. Scot expose son système dans / ; i IV Sent., t. III, dist. I, q. i, n. 5 sq. ; dist. V. q. ii, n. 4. 5 ; cf. dist. VI, q. i ; t. I, dist. XIII, q. un, n. 9. 10 ; dist. XXIII, q. un., n.7, Quodlibcl XIX, a. 3. Voici les conclusions qu’on peuttirerdecet exposé : a) la nature individuée n’acquiert pas la personnalité par quelque chose de positif surajouté ; b) la personnalité n’est pas le résultat de la seule négation de dépendance actuelle ajoutée à la nature, car, en cette

hypolhêsc. l’àme séparée serait mie personne ; c) la personnalité résulte de deux négations, négation de dépendance actuelle et négation de dépendance « ap<(/(irf(nc//r « . Scot distingue trois sortes de dépendance : la dépendance potentielle, qui est constituée par la simple non-repu^aance, au point de vue naturel, de deux termes à unir ; la dépendance actuelle, qui marque l’union réellement existante d’une réalité à une autre réalité plus parfaite ; la dépendance aptitudinellc, qui marquelatendanceinnéed’une réalité vers l’union avec une autre réalité pour ne former qu’un seuletmêmesujet : Tàme et le corps sont en dépendance aptitudinellc l’un vis-à-vis de l’autre pour former le composé humain. Seules les négations de dépendance actuelle et de dépendance aptitudinelle confèrent la personnalité. Toutefois, dans l’union de la nature humaine au Verbe, il faut concéder que la nature humaine possède, par rapport à la personne divine, la négation de dépendance aplitudinelle : autrement, elle serait en état violent par rapport à sa personnalité propre. En Jésus-Christ donc, la nature humaine n’est pas une personne, parce qu’en définitive, elle dépend actuellement de la personne même du Fils de Dieu.

Cette théorie, exprimée d’ailleurs assez conft^sément par Scot, est reprise par toute l’école nominaliste. Les théologiens de cette école considèrent que la non-dépendance constitue la raison formelle de la personnalité, de la supposante : « Le suppôt, dit Occani, est l’être complet (par là, on exclut les parties et les principes constitutifs de l’être), incommunicable par identité (par là, on exclut non seulement l’espèce qui se retrouve dans les individus, mais encore la substance divine elle-même), et non sustenté par une autre substance (par là on exclut la nature humaine de Jésus-Christ). » Quodlibet IV, q. xi. D’autres auteurs appellent cette dépendance, dont la négation constitue la personnalité, dépendance suppositale, c’est-à-dire dépendance d’une nature sustentée par rapport au suppôt qui la sustente, dependentia suppositalis sive suslentificati aut sustentai i ad sustentificans. G. Biel, In IV Sent., t. III, dist. I, q. i ; cꝟ. t. I, dist. XXX, q. IV. Et pour mieux faire saisir la nature de cette dépendance, ils prennent comme terme de comparaison la dépendance de l’accident vis-à-vis de son sujet, de la forme vis-à-vis de la matière, moins cependant les imperfections inhérentes à ces deux sortes de dépendance. Cf. Wirceburgenses, De incarnatione, n. 257. En plus des auteurs cités, voir, pour l’exposé de cette opinion, Henri de Gand, Quodlibet V, q. viii ; In IV Sent., I. III, dist. I, q. iii, a 4°’" ; Pierre d’Ailly, t. III, dist. I, q. i, m ; Richard de Middietown, In I V Sent., t. III, dist. V, a. 2, q. ii ; Gilles de Rome, In IV Sent., t. III, q. iv, p. iii, q. un., a. 2 ; F. Mayronis, In IV Sent., t. III, dist. I, q. xi ; Bassolis, In IV Sent., t. III, dist. I, a. 1, q. i ; Pontius, Curs. philos., t. III, disp. XVIII, n. 91 ; Mastrius, Disputationes me/ap/jiLs., disp. XI, q. iv, n. C2 ; AVadding, De incarnatione, disp. IV, dub. ii ; et, en général, les théologiens de l’école franciscaine ; parmi les jésuites, Mohna, In Sum. S. Thomæ, I », q. xxix, a. l, disp. II ; Cosme Alemanni, Snmma philosophica, q. xxv, a. ô ; Mayr, Philos, périt., pars ultima, n. 1131 sq. ; De Benedictis. Philos, perip., Mctaph., t. II, q. i, c. m ;

Iendive, Untologia. n. 367. Voir dans Tiphaine, op.

cit., ç. VI, et dans Urraburu, Onlologia, p. 849-850, d’autres références. On trouvera un bon exposé moderne de ce système dans Dubois, Le concept de la personnalité, dans la Revue du cierge français, l* octobre 1904.

2. Critique.

Les raisons invoquées par l’école scotiste pour étayer ce système sont principalement d’ordre théologique et empruntent toute leur valeur à la nécessité d’expliquer dans le Christ l’union des