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elles ; la règle de foi nous fournit de la « matière à croire » . Le credo a été appelé « règle de foi « par Tertullien, voir col. 80, mais c’est une règle en abrégé, qui ne donne que quelques vérités principales de la révélation. L’Écriture, infaillible et immense collection de vérités révélées, est certainement une règle de foi ; cependant plusieurs vérités révélées n’y ont pas pris place et ont été gardées par la seule tradition. Voir Écriture sainte, t. iv, col. 2095-2097. L’Écriture et l’antique tradition sont donc des règles de foi : mais on les appelle « règles éloignées » , parce que, à raison de leur antiquité et de leur obscurité en bien des points, leur contenu, avec son exacte interprétation, demeure trop éloigné de notre connaissance certaine : il faut que l’Église infaillible vienne nous rassurer sur leur origine divine, sur l’étendue et la nature de leur inspiration ou de leur infaillibilité, sur le sens de tel ou tel passage. L’Église est donc, elle aussi, une règle de foi, c’est-à-dire un moyen général et infaillible de discerner les vérités révélées : mais une règle vivante, qui peut toujours s’expliquer elle-même, et adapter ses explications à toutes les mentalités de tous les siècles ; et une règle prochaine, plus à notre portée que l’Écriture et les anciens monuments de la tradition, qu’elle sert à rapprocher de nous. Elle ne supprime pas, en cflet, ces règles éloignées : elle doit, au contraire, puiser à ces sources, employer ces instruments de travail ; elle épargne ainsi à chaque fidèle une besogne difficile et même impossible, en la faisant pour eux, et son infaillibilité en garantit le succès.

Il n’y a pas là, comme l’ont dit les protestants, l’usurpation d’hommes qui se mettent au-dessus de la parole de Dieu ; c’est Dieu qui les met, non pas au-dessus de sa parole et de son Écriture, mais au-dessus des individus faillibles qui la méconnaîtraient ou l’entendraient mal. De ce qu’une vaisselle d’or ou d’argent ne peut être vendue sans le poinçon de l’expert, sa valeur n’est pas diminuée, mais assurée. Au reste, l’Église n’ayant pas le don de révélations nouvelles, l’Écriture garde toujours sa suprématie comme révélation et témoignage de Dieu. L’Église n’est règle suprême de la fui qu’en un sens seulement, et relativement a nous, comme plus accessible et plus claire cl disant le dernier mot sur les controverses.

Mais, nous dit-on, quand vous confrontez une formule, une doctrine, avec l’Écriture et l’ancienne tradition, ou bien elle y apparaît clairement contenue ou bien la question reste obscure. Dans le premier cas, l’intervention de l’Église est superflue, les règles i éloignées » se suffisent. Dans le seconr cas, l’Église qui, de votre aveu, ne petit tirer les vérités révélées que de ces règles anciennes, ne peut alors procéder prudemment a une définition, el son intervention est impossible. Pourquoi donc l’ajouter comme règle à ces anciennes régies de foi’.' Réponse. — Dans le premiei ca. ce qui peut être clair pour les érudits de l’exégèse, de la patristique et de la théologie, souvent ne l’est pas assez pour la multitude des fidèles ; et pour mettre en jeu la fui de toute une société, il faut que l’obligation < ! < croire ioil lus nettement et 1res publiquement promulguée ; donc l’intervention de ri iie m’( i pas superflue. Dans le second cas, ton ! dépend di ci que vous entendez par obscurité » . si telle du. ii me. même après de longues recherches de l’Église dans les sources de la révélation, ne lui parait tainement contenue, alors la prudi née ne lui permet pas de procéder à une définition. Mais pat ob’urité on peut entendre seulement les mit s de l’état « le controverse, le choc des affirmations et di

Itions parmi les savanls, le doule qui en résulte « hé/, beaucoup de fidèles, i n tel obscurcissement de la vérité révélée n’empêche pas toujours l’Église, par

DK.T. DI lin.ol.. catiioi.

un travail difficile mais surnaturellement aidé, d’arriver à une solution qui lui paraisse assez sûre pour être définie. Dieu, d’autre part, en vertu de son assistance promise, ne permettrait pas que cette définition s’accomplît, si elle était erronée, et il a mille moyens de l’arrêter. Quand se produit le fait de la définition, ainsi revêtu de la permission divine, c’est donc un fait nouveau qui se suffit à lui-même pour trancher la question d’une manière absolue, quelle qu’ait été, du reste, la prudence des juges, laquelle échappe par ailleurs à notre appréciation, quel qu’ait été l’ensemble de preuves tirées des sources anciennes qui a pu faire impression sur les auteurs de la définition. Ainsi une question de science ou d’exégèse compliquée, discutée, difficile, sera remplacée par une simple question de fait, et de fait contemporain et indiscutable, grâce à l’intervention de la règle vivante.

De là deux méthodes pour se procurer les vérités révélées, matière de l’acte de foi. La méthode analytique recourt à l’analyse difficile et personnelle des sources, des règles éloignées ; la méthode synthétique recourt à la synthèse commode qu’en fait l’Église par ses définitions, par ses professions de foi. Le protes tantisme, au nom du libre examen, ne reconnaît que la première ; toutefois, par une heureuse faute de logique, il emploie la seconde pour l’instruction de ses fidèles, des enfants surtout, en leur donnant la synthèse commode d’un catéchisme, ou d’une confession de foi. Les catholiques donnent a la méthode synthétique une place prédominante. 1, eurs théologiens, il est vrai, par un usage modéré de la méthode analytique, pourront et devront chercher dans l’Écriture et les Pères ce qui se rapporte à chaque dogme. En montrant ainsi leur respect pour ces sources antiques, dont la fréquentation est d’ailleurs si bienfaisante, ils pourront montrer aussi que l’Église n’a pas créé le dogme de toutes pièces, mais n’a fait que le développer ; ce qui est une sorte d’apologie de ses définitions ; car, suivant la remarque du P. Janvier, l’Église « ne définit pas une vérité sans provoquer des cris et des colères : qu’elle parle de l’infaillibilité du pape ou de l’immaculée conception, ses ennemis l’attaquent au nom des croyances d’autrefois. » I.or. cit. Mais cette espèce d’apologie, si utile qu’elle soit, n’est pas nécessaire pour nous convaincre de la justesse des définitions : il est pour cela une autre voie qui consiste à nous convaincre d’abord de l’infaillibilité de l’Église ; dès qu’on la connaîtra comme infaillible, on saura « pie le développement du dogme a dû se faire normalement et sans déviation, et que tous les dogmes catholiques sont surs de rejoindre l’ancienne révélation. Cette voie est

suffisante a larigueur, et pratiquement la seule possible

a la grande multitude des fidèles. Les vérités de la foi, fermement acceptées comme la parole de Dieu même, doivent servir le plus tôt possible à éclairer et a diriger notre vie, c’est leur but. Or la méthode analytique les donne lentement, Une a une, avec un travail scien

tiiîquc différent pour chacune, et des recherches diffî ciles dans les sources ; bien plus tôt on connaîtra l’Église, et alors par la méthode synthétique on rece

yra d’eÙe toutes les vérités révélées dont on a besoin, toutes en bloc sous la même garantie de son infailli bilité une fois prouvée, la vie est < oui le, el les OCCU

pations absorbantes ne permettent pas a beaucoup d’esprits le luxe de la méthode analytique, c’est -à dire

de l’exégèse, de la théologie positive et de l’hi

dogmi. choses d’ailleurs tics compliquées dans les qui lies ils se mu. rftii ni. La méthode analytique a son rôle dans l’Église, oui. mais elle appartient a cette ice. a ( ette i M ]ms, - que les Pères conseillaient d’ajouter à la foi quand on en est capable et qu’on en a

le loisir, el après avoir longtemps auparavant coin

mencé pai croire. Voii Clément d’Alexandrie, Strom.,

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