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le modernisme explique-t-il, pour la plus large part, révolution des dogmes, ainsi distingue-t-il un Christ de l’histoire et un Christ de la « foi » . Cf. encyclique Pascendi, édit. des Questions actuelles, p. 13-45 ; Denzinger, n. 2076, 2096. Il peut y avoir aussi en cela une influence de Ritschl. Voir Expérience religieuse, t. v, col. 1801.

2. La voix de la conscience ; la vie morale. — C(tte forme de la révélation naturelle est très voisine de la précédente, puisque l’acte de concevoir un idéal moral est très voisin des actes plus détaillés de la conscience, par lesquels nous jugeons telle ou telle de nos actions, avant de la faire ou après l’avoir faite, moralement bonne ou moralement mauvaise, obligatoire ou prohibée, quelle que soit la théorie psychologique que l’on adopte sur ce fonctionnement de la conscience morale. On peut concéder, en un sens large, que Dieu nous parle par cette « voix » et que par elle il se révèle à nous comme être souverainement moral et comme auteur de la loi naturelle. — C’est à cet oracle de la conscience que certains protestants rationalistes ont réduit la « révélation » et ils ont appelé « foi » l’attention et la libre acceptation qu’on lui donne. De même, M. Loisy ; pour lui l’expérience religieuse, qui est la « révélation » du modernisme, paraît se réduire à « l’expérience morale » dont les progrès successifs sont « une véritable illumination de l’intelligence et un affermissement de la conscience. Cette expérience n’est pas autre chose que la vie morale. » Simples réflexions, p. 246.

3. L’idée d'être, ou d’infini. — Le rationalisme cartésien et ontologiste de l'école de Cousin aimait à employer en philosophie les mots de « révélation » et de « foi » et à présenter la raison humaine, qu’il exaltait outre mesure, comme une parole descendue du ciel, probablement pour suggérer aux catholiques « éclairés » une transformation de leur religion, qu’on pourrait débarrasser de tout « mysticisme » et ramener à la « religion naturelle » de Jules Simon. « La vie intellectuelle, écrit Cousin, est une suite continuelle de croyances, d’actes de foi à l’invisible révélé par le visible, à l’interne révélé par l’externe. Toute pensée, toute parole est un acte de foi, un hymne, une religion tout entière. » Fragments philosophiques, 3e édit., 1K65, t. I, p. 225. Nous croyons fermement, même avec le doute philosophique sur les lèvres, à l’existence réelle de tous les objets que (la raison) nous représente, de la substance dans les phénomènes, de la cause dans les effets, de l’unité dans la variété, de l’identité dans les changements successifs. Chaque idée de la raison est en même temps un acte de foi, et au delà de toutes ces idées…, nous sommes forcés d’admettre encore l’existence de l’incompréhensible, de l’inconnu…, de l’infini en un mot, regardé à tort comme une idée distincte de la raison, tandis qu’il en est le fonds commun, et l’objet immédiat de la foi… C’est ainsi que la foi se trouve au fond même de la raison qui lui doit son unité, son subbine commerce avec l’infini, son autorité irrésistible. Elle fait de la raison une parole vivante descendant du ciel dans l'âme humaine… UI1 véritable médiateur entre Dieu et l’homme. = Ad. Franck, Dictionnaire des sciences philosophiques, 2 édit., 1875, art. Foi, p. 545.

De cet ontologisme qui n’avait de chrétien que l’apparence, on peut rapprocher l’ontologisme d’un véritable chrétien et d’un saint homme, mais mal servi par sa philosophie, Rosmini : i I.'étrc indéterminé. indéniablement connu de toute intelligence, est < quelque chosi de divin qui est manifesté à l’homme dans la nature. Prop. 4' condamnée pat Léon XIII, ! > nzingcr-liannv. art. n. 1894. - L’ordre surnaturel 'institué par la manifestation de l'être, etc. Prop. 16. n. i

4. La connaissance naturelle de Dieu ; l’enseignement d’hommes providentiels. — Un professeur de théologie protestante à l’univers té de Halle, grand ennemi du « surnaturalisme » , Wegscheider, voulut appliquer méthodiquement à toute la théologie le « rationalisme chrétien » , inauguré en Allemagne à la fin du xviii siècle par Reimar et Lessing, comme il le remarque lui-même. Instilutiones theologise christianæ dogmaticæ, 8e édit., Leipzig, 1844, p. 39. Son rationalisme « simple et sobre » , dit-il, qu’on a voulu ridiculiser « en l’appelant vulgaire, maigre, rustique, se met sous le patronage du sens commun… et diffère de ce rationalisme mystique de Schleiermacher et de son école, qui restreint l’usage de la raison et prend pour guide un certain sens immédiat. Il diffère aussi du rationalisme contemplatif que les adeptes de Schelling et de Hegel habillent diversement, à l’aide de la philosophie spéculative dont ils ont plein la bouche, et surtout de leur théorie de Dieu arrivant à prendre conscience de lui-même dans les âmes des hommes… Divisés entre eux, ils s’accordent pour attaquer notre rationalisme et prédire sa mort précoce. » Op. cit., p. 53. Et de fait le pauvre Wegscheider, qui manquait de métaphysique nébuleuse, n’est pas arrivé à la célébrité de ces gens-là ; mais il faut lui reconnaître la clarté un peu terre à terre dont il fait profession. D’après lui, il n’y a de solidement prouvée que la « révélation naturelle » . Elle se divise en « universelle et particulière » . La première, qui éclaire tout homme suffisamment développé, se fait subjectivement par les facultés naturelles de l'àme, objectivement par les œuvres de Dieu dans la nature, dont le spectacle amène nos facultés à la connaissance et au culte de Dieu. La révélation particulière « consiste en ce que la providence de Dieu, mais toujours par le cours naturel des événements, suscite de loin en loin des hommes mieux doués que le commun de l’humanité à l’effet de pénétrer les principes de la vraie religion, et de les répandre autour d’eux avec un singulier succès. » Ce sont les envoyés divins, leurs noms sont dans l’histoire, ils ont fait l'éducation religieuse du monde. Et comme le [dus parfait de tous est le Christ : « voilà, conclut-il, l’intime et éternelle alliance du christianisme avec le rationalisme ! » Op. cit., p. 58, 59.

La révélation « universelle » de Wegscheider pourrait aussi s’appeler une révélation par les choses, la révélation « particulière » une révélation par les hommes. M. Hamack, de nos jours, a rejeté la première et retenu la seconde. « Il n’y a pas, écrit-il, de révélation par les choses. Ce sont des personnes, et avant tout les grands hommes, qui sont les révélateurs de Dieu à l’humanité. » Dans un article de revue, à propos d’une lettre de Guillaume II sur la révélation (février 1903) ; cité par Iloutin, La question biblique au v.V siècle, p. 17.

3°La révélation naturelle, sous ses diverses formes, ne peut suffire à la foi chrétienne. — Pour le montrer, nous n’irons pas chercher d’autre preuve que celle-ci : la révélation nécessaire à la foi chrétienne, c’est la révélation-témoignage de Dieu, nous l’avons déjà prouvé : la seulement peut intervenir le motif spécifique de la foi, la véracité divine. Or par ces diverses formes de la révélation naturelle, Dieu ne témoigne pas : elles ne peuvent donc suffire. Cette preuve a l’avaude rattacher toute cette question difficile à un seul et même concept, déjà solidement établi. Appliquons-la successivement aux diverses formes de la révélation naturelle que l’on a exploitées < antre nous, en nous servant de la division assez commode de Wegscheider.

1. Révélation universelle, prise plutôt du côté

subjectif : la raison, la voix de la conscience, les fa cultes de l’homme. Dieu. pal le fait qu’il crée et conserve ces (acuités, nous fail eoneevoir leurs objets, mi