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rieure) qu’il ne faut pas imaginer ce don de la révélation « comme venant d’un dehors local ou spatial, à la manière d’un message qui nous arriverait par les sens externes, » et il se moque de la révélation « qui se fait entendre du haut des nuages. » Loc. cil. Puis il ajoute sans aucune preuve : « La révélation vient du dedans ; elle est individuelle et incommunicable. » Recevoir par l’intermédiaire de l'Église la doctrine, que Dieu a révélée autrefois, ce n’est donc pas recevoir la révélation corrélative à la foi ; pour lui, cette révélation est exclusivement intérieure et incommunicable : « On peut admettre intellectuellement toute la doctrine apologétique et théologique de l'Église, et néanmoins par manque de cette révélation intérieure, n’avoir pas plus de foi qu’un chien. » Loc. cit., p. 502. Ces aberrations montrent le danger qu’il y a à ramener la révélation à un prophétisme tout intérieur et à une communication de Dieu à l'âme sans aucun intermédiaire, ce que u’a pas fait saint Thomas dans ses questions sur la prophétie, puisqu’il a un article pour affirmer que la révélation prophétique se fait par les anges, q. clxxii, a. 2. Elles montrent aussi le danger qu’il y a à ne pas prendre la révélation corrélative à la foi pour ce qu’elle est, c’est-à-dire pour un témoignage de Dieu. Si Tyrrel avait compris qu’elle est un témoignage, il n’aurait pas dit qu’elle « vient du dedans » , ni qu’elle est « incommunicable » . Un témoignage est si bien communicable par la parole ou l'écriture que toute l’histoire est fondée sur d’anciens témoignages, transmis par l’historien qui les a recueillis. Si la révélation corrélative à la foi est un témoignage de Dieu, je puis, grâce à une transmission historique, la recevoir aujourd’hui, sans aucune « vision intérieure » et faire sur cette révélation un acte de foi. Mais, dit Tyrrel, vous ne pouvez faire un acte de foi, d’après les Pères, sans un pius credulilalis affectas, sans une « illumination surnaturelle » . Loc. cit., p. 503. C’est vrai : il faut la grâce de Dieu pour faire un acte de foi ; mais cette grâce n’est nullement une révélation, comme vous le dites ; cette grâce est invisible, indiscernable, du moins ordinairement ; ce n’est donc pas une « vision intérieure » , encore moins un témoignage de Dieu. J’y trouve un secours pour agir, et non pas une raison de croire ni surtout un motif où intervienne la véracité de Dieu. La révélation sur laquelle est basée la foi, étant un témoignage où la véracité de Dieu est engagée, ne peut donc aucunement consister dans le pius credulilalis af/cclus ou désir de croire, ni dans cette illuminalio Spirilus Sancti ou ins pi ratio qui doit précéder non seulement l’acte de foi, mais encore tous les actes salutaires, tous les actes méritoires des fidèles, d’après le concile d’Orange, eau. 7, Denzinger, n. 180, et celui de Trente, sess. VI, can. 3. Denzinger, n. 813. Nous n’avons pourtant pas une révélation, < Inique fois que nous faisons une lionne action, méritoire devant Dieu ! Reste donc que cette révélation sur laquelle est basée notre foi consiste Uniquement dans ce1 ancien témoignage de Dieu, historiquement transmis jusqu'à nous, lequel nous recevons par la foi sans aucune ision. mis aucun phénomène extraordinaire comme ceux des prophètes et des mystii Cf. Études du.') avril 1908, p. 39-41.

i* conséquence : la révélation corrélative a la foi contient dis énoncés, des affirmations divines, i énoncés sont l’objet direct de notre foi. Dans tout e, l’objel attesté, l’objet que l’on croit sur l.i parole du témoin ou di i émoins, c’i il ; ment un énon< é, une formule, une proposition : J’ai vu commettre tel meurtre. Les sources du Nil tel endroit. Donc la révélation qui s’adresse à notre foi, et notre fol elle-même, cet deux cho et corréla. doivent avoir pour objet dlred un énoncé

COmn le tés ; nous ressusciterons. »

DICT, DE Tlli’oi. CATIIOI.

C’est pourquoi le verbe « croire » dans l'Écriture a souvent pour complément grammatical une proposition, bien que cette proposition puisse ailleurs être brièvement rendue par des équivalents plus vagues. Voir col. 63. Dieu témoigne : c’est un jugement tout fait qui nous arrive, un énoncé sur les choses de ce monde ou celles de l’autre vie ; à ce jugement nous conformons le nôtre, nous acceptons les vues de Dieu, nous croyons ce qu’il dit parce que c’est lui qui le dit, voilà la foi. Les protestants antidogmatiques et agno tiques, et après eux les modernistes, ont donc tort de dire que la foi chrétienne a pour objet la chose en soi et non la formule, laquelle ne serait qu’un produit de notre esprit, un pur symbole de l’inconnaissable ; c’est à cet inconnaissable seul que tendrait notre foi, c’est lui seul qui serait vaguement révélé. « C’est des choses qu’il y a révélation, dit Tyrrel, et non de mots ou de symboles de choses. » Loc. cit., p. 501. Non, la formule même, que vous appelez « symbole de chose >, appartient au donné révélé ; c’est bien sur la formule, sur l'énoncé, que portent et la révélation divine et notre foi. Quant à la chose en soi, elle aussi est objet de révélation et de foi, mais moins directement, et par l’intermédiaire de l'énoncé que Dieu nous a donné ; c’est à elle comme à un dernier terme que la formule nous conduit, mais en nous la faisant connaître, et non pas en nous donnant un pur symbole d’une chose inconnaissable. « Si nous formons des énoncés, cnunliabilia, dit saint Thomas, ce n’est que pour connaître par eux les choses elles-mêmes, qu’il s’agisse de la science ou de la foi. » Sum. theol., II » II a >, q. i, a. 2, ad 2°'". L'énoncé n'étant qu’un moyen d’atteindre la chose en soi, dernier terme de l’intellect, on peut réserver à celle-ci le nom d' « objet de la foi » à un titre spécial. Mais il ne faudrait pas avoir l’air d’exclure les énoncés, en disant, par exemple : « Les propositions de la foi ne sont pas l’objet de la foi, » do m A. Lefebvre, L’acte de foi d’après la doctrine de S. Thomas, 2e édit., 1904, p. 276, ce qui ne pourrait se justifier que par une figure de style, une antonomase, dont le sens serait : Les propositions de la foi ne sont pas l’objet par excellence de la foi. Or, il est à craindre, surtout à une époque de modernisme, quc ce style figuré ne soit mal compris, et ne donne lieu à une exclusion erronée. Et saint Thomas dit formellement : Objectant fidei duplicilcr considerari potest. Uno modo… est aliquid incomplcxiun. sciliect rcs ipsa de qua /iiles habetur. Alio moi objectant jidci est aliquid complexum per modum enunliabilis. Sum. theol., II » II", q. i, a. 2. Et ailleurs : Alii dixerunt quod… fides non est de enuntiabili, sed de rc… Sc<l hoc falsum apparet : quia cum creden dical assensum, itoit potest esse nisi de compositions, in qua verunt et falsum inveniiur. Qumsi. disp., /)< veritate, q. auv, a. 12. Croire ne peut porter que sur un énoncé, sur cette synthèse du sujet et de l’attribut que saint Thomas appelle Compositio. Il n’est d’ailleurs pas exact de donner seulement i les cho comme objet aux sciences : les sciences physiques et

mathématiques n’ont-elles pas pour objet direct les lois qui sont des énoncés, les théorèmes, les Formules algébriques, etc.'.' Tout cela a une vraie valoir ol lire, en restant mêlé île subjectif, Car l'énoncé plus

ou moins complexe, comme le remarque s. mit Tho

mas, est pour L’homme si manière SUbje< tive et nécessaire de connaître les réalités, même la réalité divine parfaitement simple. Loc, cit. La révélation d’ic s’adapte à cette manière de connaître ; la vision intuitive de Dieu n’ama plus besoin de cet Intermédiaire d.- la formule, i Dana la vision de la patrie, ajoute i n. nous verrons Dieu comme il est en lui-même. I Joa.,

Ill, 2. Aussi (elle vision ne se fera point par manière d'énoncé, mail par manière de simple Intelligence.

Mais la foi ne saisit p ; is Dieu, Vérité pn ml< n.. omine

M. - :.