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GANDULPHE DE BOLOGNE

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1769-1772, t. i, p. 295 ; ni la nouvelle édition de cet ouvrage par Albicini et Malagola, De Claris archigymnasii Bononiensis professoribus, Bologne, 1888, t. i, p. 369, n’ont ajouté quelque chose à l’histoire de sa vie.

Nous en sommes réduits à quelques rares données, disséminées chez les glossateurs et les commentateurs de Gratien venus après Gandulphe : à l’aide de ces renseignements épars, l’on peut fixer approximativement la date de son activité littéraire ; mais aucune de ces gloses n’affirme nettement que Gandulphe ail occupé une chaire à Bologne, bien que l’ensemble des témoignages rende hautement vraisemblable le fait de cet enseignement.

Une note attribuée à Simon de Bisiniano, qui écrivait entre 1174 et 1179, semble-t-il, cf. von Schulte, Geschichte der Qucllen, t. i, p. 142, nous dit le grand renom de Gandulphe à son époque : Cujus magna est in Ecclesia Dei aucloritas ; mais, en réalité, ces mots ne proviennent pas de Simon de Bisiniano, ce que croyait von Schulte ; ils sont d’une main postérieure qui les a ajoutés, comme le fera remarquer Heyer, de Bonn. Cf. von Schulte, Zur Geschichte der Literatur ùber das Dekre.t, I, dans les Silzungsberichie der k. Akademie der Wissenschaflen, Philos, histor. Klasse, Vienne, 1870, t. lxiii, p. 131 ; J. de Ghellinck, Le mouvement théologique du xiie siècle. Études, recherches et documents, Paris, 1914, p. 179, note 1.

Les deux principaux auteurs qui nous rendent service dans la question chronologique sont Huguccio et Jean de Fænza. Le premier, glossateur canoniste de la fin du xiie siècle, évêque de Ferrare en 1190 et mort en 1210, cite fréquemment l’avis de Gandulphe. Or, sa Summa fut achevée sans doute avant son épiscopat, mais il y travaillait encore sous Grégoire VIII, en 1187. Von Schulte, Geschichte der Quellen, t. i, p. 130-131, 161-163 ; Gillmann, Die Siebenzahl der Sakramente bei den Glossatoren des Dekrels, dans Der Kalholik, 1909, extrait, p. 24 ; voir aussi, du même, Archiv fur katholisches Kirchenrechl, janvier 1914, cela fixe le terminus ad quem, ou la date avant laquelle il faut placer l'œuvre de Gandulphe. S’il faut admettre que Gandulphe a été le maître de Huguccio — ce que concluait von Schulte de l’expression dicebat mag. G. qui introduit plusieurs fois des citations, et de l’absence de polémique chez le disciple vis-à-vis des idées du maître, op. cit., t. i, p. 156 — l’on serait porté à placer l’activité de Gandulphe vers le troisième quart du xiie siècle. Mais l’expression dicebat, etc., n’a pas la portée que lui donnait von Schulte, comme l’a montré Denifle, Archiv, t. i, p. 623, note 5, et en réalité Huguccio combat sans cesse l’avis de Gandulphe. De Ghellinck, Le mouvement théologique, p. 226, note 1. Gillmann, qui prépare l'édition de la Summa de Huguccio, n’a trouvé aucun passage où Huguccio nomme Grandulphe son maître II n’y a aucune raison à l’appui de l’avis de Denifle qui plaçait l’enseignement de Gandulphe « pas beaucoup plus tard que celui de Roland Bandinelli. » Die Sentenzen Abxlards und die Bearbeilungen seincr Theologia vor Mitte des XII Jahrhunderls, dans Archiv fur Literatur und Kirchengeschichle des Miltelallers, 1885, t. i, p. 621.

Quelques passages de Jean de Fænza, dont M. Saltet a tiré parti, Les réordinations, Paris, 1907, p. 318-321, ont plus de chance de donner la vraie solution : l’enseignement de Gandulphe se serait produit à peu près en même temps que l’activité littéraire de Jean de Fænza, mais l'œuvre de Gandulphe aurait été quelque peu postérieure à celle de l'évoque de Fænza ; celle-ci se place vers 1170, mais n’est pas achevée avant 1171, bien que l’auteur soit

évêque dès 1160. Von Schulte, Die Geschichte der Quellen, t. i, p. 137-138 ; Gillmann, dans Der Kalholik, 1909, p. 17. Or des extraits conservés par un traité anonyme inédit (ms. de Bamberg P. II. 4), qui voit le jour peu après 1190, Anongmi quæstiones décrétâtes ad Compilalioncm I compositæ c. a. 1190 (von Schulte, Die Literalurgeschichle der Compilaliones anliquæ, besonders der drei ersten, dans les Sitzungsberichle de Vienne, 1871, t. lxvi, p. 58-64), montrent Gandulphe rejetant l’avis de Jean de Fænza (extraits dans Saltet, op. cit., p. 319-321) ; d’autre part, Jean de Fænza cite lui aussi Gandulphe au moins une fois, Summa, ms. de Bamberg, P. II, 27, comme l’a fait remarquer Maassen, Beilrdge zur Geschichte der juristichen Literatur des Mittelalters, insbesondere der Decrctisten-Litcratur deszwôljten Jahrhunderts, dans les Sitzungsberichle de Vienne, Philos, histor. Classe. 1857, t. xxiv, p. 31, note 4, et von Schulte, DieGeschichte der Quellen, t. i, p. 132, n. 8 ; en outre, cette citation est introduite par le mot dicit, tandis que les exemples apportés pour Rufin et Etienne de Tournai, qui écrivent l’un vers 1157-1159 très vraisemblablement, l’autre dans les années 1160 (von Schulte, ov. cit., passim ; Gillmann, loc. cit., p. 7 et 10), portent dicebat. Gandulphe aurait donc encore été en activité vers 1170.

Il semble même que sa carrière se soit prolongée jusque vers 1185 ; car le premier des continuateurs de Huguccio, qui fait allusion à un événement de cette année, cite encore Gandulphe parmi les vivants : Gandulphus adhuc est in ea opinione. Gillmann, Das Ehehinderniss der geistlichen Verwandlschaft aus der Busse, dans Der Katholik, 1910, t. xc, extrait, p. 19, et dans Archiv fur katholisches Kirchenrecht, 1912, t. xcii, p. 367.

Du texte de Pierre le Mangeur, qui se rencontre dans le résumé des Sentences de Gandulphe (ms. de Bamberg, B. IV, 29, fol. 131 r), il n’y a rien à conclure, voir Saltet, Les réordinations, p. 318 ; ce texte ne figure pas dans les chapitres correspondants de l'œuvre originale. Quant à l'évêché de Coventry, auquel fait allusion von Schulte, Die Summa Decreti Lipsiensis des Codex 986 der Leipziger Universitâlsbibliolhek, dans les Silzungsberichte de Vienne, 1871, t. lxviii, p. 43-54. ce doit être une confusion dans les sigles qui a produit cette erreur ; car dans la citation apportée par von Schulte, le sigle G. désigne sans doute Gérard Pucelle qui est, en effet, évêque de Coventry (septembre 11 83janvier 1184), vers le moment où est composée cette Summa super Decrelum, ordinairement appelée Summa Lipsiensis. J. de Ghellinck, Le mouvement théologique, p. 224, note 5.

Chez les contemporains, Gandulphe doit avoir eu la réputation d’un canoniste ferme et tranché dans ses avis. On lui a reproché, dans la suite, du laxisme dans les opinions par suite de son énoncé sur le debilum conjugal. Von Schulte, Die Geschichte der Quellen, t. i, p. 132, note 7 ; Sarti-Fattorini, op. cit., Bologne, 1888, t. i, p. 369, note 1 ; Philipps, Kirchenrechl, Ratisbonne, 1851, t. iv, p. 175. Huguccio, en outre, l’a accusé en une occasion » de prendre des vessies pour des lanternes ; » d’autre part, le renom de Gandulphe devait être assez répandu pour qu’en s'écartant de son avis, Huguccio ait éprouvé le besoin de dire : sed quidquid Gandulphus dicat, non credo. Ms. de la bibliothèque de Cambrai, 612, fol. 307 et 26 ; de Ghellinck, op. cit., p. 226, note 1. Au xiv « et au xve siècle, le grand nombre des annotations qui mentionnent Gandulphe dans les marges du Lifter Sententiarum de Pierre Lombard pourrait faire croire à la persistance de ce renom ; mais nous avons établi ailleurs, op. cit., p. 223-240, que ces mentions proviennent presque toutes d’une seule et même source.