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GALLICANISME


le consentement des évêques a toujours été estimé nécessaire, non que la sentence du pape fût regardée comme définitive et irréformable.

Il serait fastidieux de reproduire la série des textes invoqués par Tournély pour prouver l’absolue nécestité des conciles, depuis la lettre du clergé romain à saint Cyprien (firmum decrelum esse non posse quod non plurimorum videbitur habuisse consensum, Epist., xxxi), jusqu'à l’indiction du concile de Lyon par Grégoire X (quod cum ipse solus (pontifes romanus) non possit sufficere ad propulsanda mala quæ cxorla fucrant, levât oculos in montem, monte m quidem Dei, id est, ajoute le théologien gallican, ad coneilium générale Ecclesiæ quæ est mons Dei) ; de même on peut passer rapidement sur l’argument emprunté à l’examen en concile des décisions déjà portées par les pontifes romains, en notant cependant l’observation sur laquelle insiste ce théologien : à savoir que si l’on trouve bien des exemples de définitions pontificales soumises à cette procédure, on n’en rencontre pas un seul de définitions conciliaires ; sur ces dernières on ne revient pas pour les examiner de nouveau, on les relit, on les répète, on les confirme, jamais on ne les discute.

Le consentement des évêques a toujours été estimé nécessaire pour qu’un jugement du souverain pontife fût regardé comme irréformable : saint Irénée, ('.ont. hser., 1. III, c. iv, demande qu’on consulte les Églises anciennes dans toutes les controverses ; Tertullien, De prsescripl., c. xxi, professe la même doctrine, ainsi que les papes Jules I er, Célestin, Léon le Grand, Gélase, Martin I pr, etc. ; saint Cyrille d’Alexandrie et saint Augustin font écho aux déclarations de ces anciens témoins de la tradition primitive. Peu importe, ajoute Tournély, que ce consentement soit antécédent ou conséquent, exprès, tacite ou même interprétatif ; l’opposition même d’un certain nombre d'évêques ne doit pas entrer en ligne de compte et si par extraordinaire, ils se divisaient en parties presque égales, la vérité serait nécessairement du côté de crx qui adhéreraient au souverain pontife. Isla enim melior ac sanior pars tenseri deberel, et Ecclesiam sufficienter referre. Ecclesia siquidem corpus est visibile capiti suo romano pontifici adunatum et ipse romanus pontifex est centrum unitatis et communionis ecclesiaslicæ. Ecclesia, inquit S. Cyprianus, Epist., i.xix, ad l’upianum, est plebs sacerdoli adunata et paslori suo grex adhwrcns… atquc Ecclesia est in episcopo et episcopus in Ecclesia. C’est la doctrine prudente, remarque Tournély, de l’Assemblée même de L682 qui, malgré les instances de Gilbert de Choiseul, refusa de dire : le jugement du souverain pontife n’est pas irréformable tant que ne s’y ajoute point le consentement de riù/Iisi rivF.RSELLE ; notre clergé s’en tint à une formule qui ne dépassait point celle qu’avait proposée en 1663 la faculté de Paris : Non esse doctrinam facullatis, quod summus pontifex, nuli.o accedente Ecclefte consensu, sit infallibilis.

. Les arguments du troisième groupe sont empruntés à l’histoire de certaines controverses
la

controverse paschale entre saint Polycarpe et le pape Vnicet, les évêques d’Asie et le pape Victor. Saint ait si peu a l’infaillibilité personnelle du

pape qu’en ici le ne < asion il prit la défense des Asiates

que Victor qualifiai ! pourtant </< rebelles à lu vraie foi. La controverse baptismale entre saint Cyprien cl le pape Etienne et le jufement qu’en porte saint lin fournissent une induct ion dans le même sens : le « raiid docteur d’Hippone excuse la révolte de

[ue de Carthage, quia plenarium hac de re conci Hum Ecclesia nondum habebat. De baptismo, I. IV. c. vi.

ces i en 'ajoutent ceux des dl>

1 randes universités. Bessarion, au nom

disait au concile de Florence : Quontam

igitur quanlacunquc facultate polleat romana Ecclesia, minus tamen pollct synodo œcumenica. Les Africains ont exprimé plusieurs fois, notamment dans l’affaire du prêtre Apiarius, leur opinion contre les prétentions romaines ; l'Église d’Allemagne n’a pas hésité à en appeler du pape au concile, de même l'Église de Belgique en 1497 et l'Église gallicane en plusieurs occasions. L’université de Paris, par la bouebe de Pierre d’Ailly en 1387, a qualifié d’hérésie les propositions infaillibilistes du dominicain Jean de Monzon ; elle a appelé plusieurs fois du pape au concile, et condamné souvent les doctrines ultramontaines.

s. Enfin beaucoup de gallicans tirent argument des erreurs commises par les souverains pontifes ou des définitions contradictoires rendues, ou encore des aveux faits par eux : Tournély n’est pas du nombre. Il examine un à un les cas proposés et montre qu’en ces différentes espèces ou bien la foi n'était pas en cause, ou bien les décisions n’avaient pas été libres, ou bien n’avaient pas été portées dans les conditions requises pour qu’on les regardât comme des décisions ex cathedra.

A cette argumentation positive, ce théologien joint une réfutation très étendue des preuves alléguées par les ultramontains en faveur de l’infaillibilité pontificale. C’est Bellarmin qui est, comme de juste, l’adversaire mis en cause quand il s’agit de l’interprétation des textes scripturaires et conciliaires ; c’est à Antoine Charlas, l’auteur du Traclatus de libertatibus Ecclesia' gallicanes, que Tournély s’en prend quand il est question des textes patristiques ou d’aveux favorables aux thèses ultramontaines que Cbarlas a eu la malice d’emprunter aux théologiens français.

Il suffit de noter les principes de solution que les gallicans opposaient aux preuves et objections alléguées par leurs adversaires.

Les promesses faites par Jésus-Christ à saint Pierre ne sont pas considérées par l’unanimité de la tradition catholique comme assurant des privilèges passant à ses successeurs, ni comme contenant autre chose qu’un primat d’bonneur et de juridiction auquel n’est pas nécessairement jointe l’infaillibilité doctrinale indépendamment du consentement de l'Église. Ainsi beaucoup de Pères déclarent-ils que la prière faite par le Sauveur, pour que la foi de Pierre ne défaille point, ne vise que la personne de l’apôtre et la tentation particulière que fut pour lui la passion du Sauveur,

Beaucoup d’autres ne reconnaissent en l’apôtre que le représentant de l'Église universelle : il reçoit le premier et au nom des autres ce que les autres reçoivent ensuite eux-mêmes,

Pierre n’est le fondement de l'Église que s’il demeure uni à cette Eglise ; s’il s’en séparait, il ne serait qu’une pierre isolée, qui ne porterait rien. Voici le développement de cette idée maîtresse : « Pierre est appelé par le Cbrist de ce nom de Pierre à cause de la foi ferme et sans diminution que conservent et sa personne et ses successeurs, tant que cette pierre el cette foi restent adhérentes et unies à l'édifice total qu’est l'Église… Mais non pas si cette pierre se séparait de tout l'édifice, si cette foi venait à abandonner la foi de toute l'Église… ; une pierre n’est fondamentale que si elle est sous la maison et lui est unie, ainsi le pape n’esi le fondement de l'Église que s’il la supporte, l due s’il lui est joinl dans le consentement en une même foi et doctrine. I.a comparaison de la pierre fondamentale et de la maison pnsc matériellement est Inadéquate a notre sujet, parce que la solidité

de la ma, son matérielle dépend de la sol dit.' du fondement sur lequel elle l’appuie, tandis que la solidité du fondement de l'Église vient du seul Christ, qui l’a

acquise de son sang et qui est son fondement essentiel,