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FULBERT


de pratiquer la médecine, mais il continua d’enseigner.

Il joua un rôle important dans les affaires de l’Église et de l’État, et correspondit avec les rois, les évêques, les moines. Signalons seulement ses relations avec le duc d’Aquitaine, Guillaume, qui le nomma trésorier de Saint-Hilaire de Poitiers, avec les rois Robert, de Fiance, Etienne, de Hongrie, Canut, de Danemark, avec les archevêques ou évêques de Rouen, de Reims, de Sens, de Tours, de Bourges, de Laon, etc., avec les abbés Abbon, de Fleury, Odilon, de Cluny, etc. Il siégea 21 ans et G mois et mourut le 10 avril 1028. La France tout entière le pleura, comme si l’étude de la philosophie et l’honneur des prêtres avaient péri avec lui, dit le biographe d’Odilon. Tous les historiens du temps firent son éloge. Historiens de France, t. x, p. 47, 129, 247, 225, 177, etc. Ses disciples répandirent partout sa gloire, plusieurs lui élevèrent de pieux monuments sous forme de chants ou d’épitaphes. Ils inscrivirent son nom, avec son panégyrique, dans le martyrologe de Notre-Dame de Chartres. A Poitiers, au xiie siècle, il fut représenté avec l’auréole de la sainteté sur une fenêtre de l’église Saint-Hilaire. Dans la suite, le nom de saint lui fut souvent donné : et depuis la restauration de la liturgie romaine, il est honoré comme tel, dans les diocèses de Chartres et de Poitiers.

II. Œiviils. — On peut les ranger en quatre catégories. — 1° Il forma de nombreux élèves, dont plusieurs nous sont connus par le poème rythmique de l’un d’entre eux. Adelman, écolâtre de Liège, puis évêque de Brescia. Notices et documents, publiés par la Société d< l’histoire de France, à l’occasion du 50e anniversaire île sa fondation, p. 83. On en connaît encore plus de cinquante par leurs noms, appartenant à tous les pays, 18 de Chartres, 3 d’Orléans, 2 d’Angers, 4 de Tours, 2 de Poitiers, 1 de Montmajour, 2 de Paris. 1 de Manies, de Beauvais, de Fougères, ô de Rouen et de la Normandie, 1 de Saint-Riquier, de Gembloux, de Besançon, 6 de Liège, 1 de Cologne. Parmi eux, il faut signaler Bérenger, le fameux archidiacre de Tours, les Chartrains Hildegaire, Sigon, ses disciples favoris, puis Ascelin, Arnoul et Hugues, plus tard [ue île Langres, qui prirent pari à la controverse eucharistique, avec Adelman : de même Albert, l’un des plus grands abbés de Marmoutiers, Bernard, historien des miracles de sainte Foy, Angelran, abbé de Saint-Riquier, Olbert, abbé de Gembloux, les écolâtres ib : id de Cologne et Rodolphe de Liège, dont nous avons une correspondance scientifique, etc.

2° Fulbert a composé des sermons dont plusieurs roulent sur la Nativité de la sainte Vierge, solennité qu’il vulgarisa dans les Gaules, entre autres celui qui commence par ces mots : Approbalse consitetudinis. Le premier en Occident, il signala le second remaniement latin du Protévangile de Jacques, sur l’enfance de la sainte Vierge. Il faut y joindre une homélie sur 00 passage du C. XII des Ailes des apôtres, et Irois traités contre les juifs. /’. /… t. cxli, col. 278-340. Mais, il fnil lui retirer deux sermons, reproduits parmi les sermons douteux de saint Augustin, sous 191 et 208, dont l’un contient la prière : Sancta Maria tuecurre miscris. Ces dcu sermons sont plutôt d’Ambroisc Autpci t,

Il a compose des pietés de poésie latine de divers rythmes Mir les saints ou les fêtes, sur les différents -ir/s libéraux, rhétorique, philosophie, comput, arltli inéliquc, soi des sujets moraux, spécialement sur sa

P. /.., t. cxli, col. 310 352. Non aussi Pfl ter et llauréau, Notices il extraits dt quelques manuscrits de la liibliolhèque nationale, 1893, I. m.

! On a encore de Fulbert 128 lettres, toutes très

l’Ilistoin i Ni..ni publiées dans Mir.nr,

t. cxli, et pourraient être utilement rééditées d’après le ms. latin de la Bibliothèque nationale 14167 (xie et xiie siècle) et d’après un autre du Vatican encore inutilisé (reine Christine, 278, du xii° siècle). Il y a deux autres manuscrits, l’un à la Bibliothèque nationale, fonds latin 2872, xie siècle, et l’autre à Durham, en Angleterre. Quelques autres œuvres de nature incertaine qui lui sont attribuées sont perdues. Voir Clerval, Les écoles de Chartres, p. 43.

4° Enfin l’une de ses œuvres les plus intéressantes, c’est la cathédrale qu’il rebâtit après l’incendie de 1020 et qui fut dédiée par son successeur Thierry en 1037 : il n’en reste malheureusement que la crypte.

III. Doctrine théologique.

Les chroniqueurs contemporains de Fulbert louent sa sainteté, sa sagesse, sa science, mais aussi sa philosophie et sa connaissance des lettres divines : il était acer philosophus, dit Durand de Troarn, P. L., t. cxlix, col. 1405 ; lu divina, lu humanu excolebas dogmala, dit Adelman.

En philosophie, Fulbert et son école paraissent avoir connu les deux courants qui devaient se partager les écoles, à l’occasion des universaux. Le plus grand nombre de ses élèves, à sa suite, cultivait les tendances idéalistes et spirilualistes de Platon : quelques-uns, comme Bérenger, s’attachaient davantage aux procédés critiques et sensualistes d’Aristote.

Les premiers lisaient Denys l’Aréopagite. Scot Érigène, saint Augustin. Fulbert, dans sa lettre à Adéodat, Hugues de Langres et Adelman de Brescia, dans leurs lettres à Bérenger, distinguaient, au-dessus des sens, deux facultés, la raison et la foi, et au-dessus des objets visibles deux sortes d’objets invisibles, les essences relevant de la raison et les substances spirituelles relevant de la foi. Dans leur pensée, ces deux catégories d’objets étaient également réelles. Fulbert souhaitait à Abbon, Epist., Il, P. L., t. cxli, en le qualifiant de grand philosophe, la jouissance de l’essence de Dieu d’abord, superessentiam Dei, el eusuite la possession des essences philosophiques (c’est le mot qu’il emploie), tant de celles que l’on dit être, que de celles que l’on dit n’être pas. A ses yeux, donc, ces deux sortes d’essences, dont les unes existaient el dont les autres ne jouissaient pas de l’existence, avaient une réalité objective égale : car non content de les souhaiter au même titre que l’essence de Dieu, il affirmait des unes et des autres qu’elles avaient quelque chose d’éternel et conséquemment d’agréable aux sages. Ainsi dans ce passage qui respire d’ailleurs le néoplatonisme et paraît Imité de saint Denys ou de Scot Érigène. Fulbert prêtait une certaine réalité aux essences purement rationnelles qui sont les objets des idées. Hugues de Langres complétait sa pensée, lorsqu’il écrivait que l’esprit ne fait pas les essences, mais se contents de les juger : est enim intcllicliis essenliarum disCUSSOr, non opifex : judex. non inslilutor. /’. /.., I. exi u. col. 1327. (/est la formule du réalisme dans la question des universaux : c’est la pure théoi ie platonicienne.

Bérenger. conl rail cnient a Fulbert, apparaît connue le tenant de l’aristotélisme et du nominalisme dans l’école de Chartres. Lui aussi aime Platon et se réclame sans cesse de Scot Érigène, mais son esprit Inquiet,

raisonneur, subit par-dessus tout l’impression du lo( i

eisme d’Aristote. Au lieu de subordonner les sens a la raison et la raison a la foi. il se mélie mime de la raison pure et la BOUIllCl aux sens, taisant de l’expci ience

sensible l’unique moyen sur de la connaissance. M est m. u qu’il attribue aux sens le pouvoir de percevou.< la fois l’accident 1 1 la substance, comme s’ils étaient

Inséparables : d’après lui, l’œil en saisissant la couleur saisit le crdon’-. Mais Cette extension même du pnu

voir accordé aux sens confirma son principe sensua liStC II a’CXistl. Ion lui, qUI ce que l’on Voll i I ie que