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FRÈRES PRÊCHEURS (LA THEOLOGIE DANS L’ORDRE DES ;


cardinal, en commerce littéraire avec Érasme, commença sous l’influence de ce dernier à commenter l’Épître aux Romains. L’œuvre parut à Lyon, en 1535. Elle n’évita pas la censure romaine. Déjà Sadolet dépasse Érasme en imprudence, car, sans fil conducteur, il tend à être plus systématique. Il abandonne, en la critiquant vivement, la doctrine de saint Augustin, pour se mettre à la remorque du commentaire de Chrysostome sur saint Paul, dont le texte grec venait d’être publié à Vérone (1529). S. Ritter, Un umanista ieologo, Jacopo Sadolelo (1477-1547), Rome, 1912. L’exemple de Sadolet entraîna le bénédictin Lucien de Otobonis de Mantoue qui publia, Brescia, 1538, des commentaires aux sermons de saint Jean Chrysostome sur l’Épître aux Romains in eos, qui Clirysoslomum divinam exténuasse gratiam, arbilriique libertatem supra modum extulisse suspicantur et accusant. L’ouvrage de Lucien de Mantoue fut mis à l’index par Paul V (1559). Albert Pighius, un autre humaniste, dédia à Sadolet un De libero hominis arbitrio et divina gratia, Cologne, 1542, où il dépasse encore son maître, et n’hésite pas à qualifier l’opinion de saint Augustin sur la prédestination ut parum probabilem, nec divines bonilalis dulcedini admodum congruentem, fol. 134. I.insenmann, Albertus Pighius und seine theologischer Slandpunkt, dans Tùbinger theologische Quarlalschrifl, 1866, p. 571. Quelques autres auteurs entrèrent encore dans la même voie, tel l’auteur anonyme qui publia les Commentarii in Pauli ad Romanos et Galatas Epistolas, Lyon, 1544.

Mais ce fut Ambroise Catharin qui concentra, à lui seul, tout ce mouvement de désertion à l’égard de la théologie traditionnelle. Avec son absence de sens théologique et son audace, rassuré par les amis et les liantes protections qu’il possédait à la cour romaine, il synthétisa la nouvelle théorie sans la couvrir de restrictions et de faux-fuyants, avouant, sans scrupules, ce que les autres avaient omis ou dissimulé. Il commença à exposer sa doctrine dans son De prsescientia, providentiel et prædeslinatione Dei, Paris, 1541, et il revint à plusieurs reprises plus tard sur ces matières et d’autres qui y sont connexes. Le fond i doctrine, c’est qu’en matière de salut les hommes forment un double ordre : celui des prédestinés et relui.les non-prédestinés. Les premiers, très peu nombreux, reçoivent des grâces de telle nature qu’il ne peut pas advenir qu’ils ne se sauvent pas. Leur nombre est déterminé il ne peut être augmenté ni diminué, tant par rapport à la prescience qu’à la providence divine, et cette condition ne détruit pas le libre arbitre. Les non prédestinés peuvent se i bien que leur nombre soit déterminé dans la science divine, il ne l’est pas dans l’ordre providence de Lien, autrement le libre arbitre rail détruit. Ainsi Dieu permet que diverses choses qu’il n’a pas pourvu d’une façon cerà leur existence, et cela a lieu spécialement qui dépend de notre libre arbitre. Il est à in de faire observer les contradictions dont doctrine et le manque de notions

philosophiques qu’elle implique.

T’n est, elle devait cependant inspirer

ns qui s’appliquèrent à en

1 à en marquer les lacunes,

modifier cependant notablement le fond.’" prmd., t. ii, p. 144 ; J. Sdrwelzer, Ambm lilus (1484-1553), Munster, 1910. uliers de Louvain, à cette

de ce qu’il v a d’exti

lin, mais c’est au prix

cai ils n’arrivent ps

ifluences augustlno-thoml

n i Irculatlon par les théolo giens humanistes dont nous avons parlé. Tels sont Jean Driedo († 1535), De gratia et libero arbitrio ; De concordia liberi arbitrii et prædeslinalionis divinæ, Louvain, 1537 ; Ruart Tapper (1559), Explicationes arliculorum ven. facultalis S. Iheologise Lovaniensis circa dogmata ccclesiastica ab annis triginla quatuor controversa, Anvers. Louvain, 1545-1547 ; et Jean de Bologne, De œterna Dei pnrdestinatione et reprobatione, Louvain, 1544. M. de Bæts, Quæsliones de operibus divinis quæ respiciunt creaturas, Louvain, 1903.

V. LES l &&RES PRÊCHEURS ET LE CONCILE DE TRENTE.

— Les frères prêcheurs prirent une part importante au concile de Trente, tant par le nombre et la qualité des prélats et des théologiens que l’ordre fournit que par le rôle doctrinal prépondérant que joua saint Thomas d’Aquin dans les discussions théologiques et la rédaction des décrets conciliaires.

Le personnel que l’ordre fournit au concile se répartit entre les archevêques et évêques, les procureurs de prélats absents, les théologiens désignés par les papes et les princes, les théologiens des évêques, et quelques autres qui y parurent à des titres spéciaux. Le maître général de l’ordre eut voix délibérative comme les évêques. Les prêcheurs présents à Trente furent plus ou moins nombreux selon les trois périodes du concile dont le nombre des membres fut assez différent. Sous Paul IV (1545-1549), le concile compta dix archevêques ou évêques dominicains dont la plupart déployèrent une grande activité, tel Sébastien Lecavella, archevêque de Xaxos, Thomas Stella, évêque de Salpe, Jacques Nacchianti, évêque de Chioggia, Ambroise Catharin, évêque de Minori, Pierre Bertano, évêque de Fano, Thomas Casclla, évêque de Bertinoro. Le général de l’ordre, François Roméo de Castiglioni assista à une partie seulement des sessions. Barthélémy de Carranza et Dominique Soto furent délégués par l’empereur Charles-Quint, et trois autres frères prêcheurs furent députés au concile au nom de Jean III, roi de Portugal. Une quinzaine d’autres théologiens dominicains furent aussi présents à des titres divers. Sous Jules III (1551-1552), le concile eut moins d’importance et l’ordre n’y compta que trois Pères et une douzaine de théologiens. Parmi ces derniers, avec le maître général déjà nommé, Barthélémy de Carranza et Melchior Cano, délégués par Charles -Quint. Sous Pic IV (1562-1564), nous trouvons au concile cinq archevêques et une vingtaine d’évêques dominicains, et plus de trente théologiens dont quatre délégués par le pape, deux par Philippe II et deux par le roi Sébastien de Portugal. Dom de Barthélémy des Martyrs, évêque de Bragæt pri mat de Portugal, prit avec Pierre de Soto, l’ancien confesseur de Charles-Quint, une part prépondérante dans la question de la résidence de droit divin des évêques.

A aucun moment l’école thomiste n’eut des intérêts plus graves engagés au concile que pendant la première période. C’est à ce moment, en effet, que fin il traitées les questions dogmatiques relatives à la justification, un point central de la théologie qui confinait a un grand nombre d’autres. Il est vrai que le concile avait déclaré vouloir définir la foi catholique pour repousser les erreurs luthériennes et non pour prendre position parmi les op in ion s des docteurs catholiques. Mais par la foi ce même des choses on ne pouvait approfondir une qucsl ion sans être en présence des opinions des docteurs cal Indiques et, en particulier.

Iles de saint Thomas. La situation pour I thomiste tirait sa gravité de ce fait qu’un certain nom

bre de personnages présents au concile étaient nette ment malveillants a l’égard des doeti mes de saint Thomas. Ambroise Catharin, le transfuge dominicain, était présent au concile, bien quc le chapitre général de l’ordre, tenu a Rome, en L642, eût (ait extraire