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FOI

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lus und St. Jacobus ilber die Rechlfertigung, dans Biblische Studien, Fribourg-cn-Brisgau, 1897, t. ii, fasc. 1, p. 30-31, 146-147.

Mais la solution même que nous venons d’indiquer à la difficile question des « œuvres » rejetées par saint Paul crée une difficulté nouvelle à notre interprétation du mot « foi » . Si à ces œuvres toutes judaïques la « foi » est seule opposée, « l’homme est justifié par la foi, à l’exclusion des œuvres de la loi, » Rom., iii, 28 — il faut qu’ici le mot « foi » signifie tout cet esprit intérieur, tous ces sentiments religieux qui manquaient aux Juifs charnels, et non pas seulement la foicroyance ; d’autant plus que, dans la doctrine catholique, la foi-croyance ne peut obtenir la justification et le salut qu’en se complétant par d’autres actes intérieurs, comme le repentir, l’espérance, la charité. Voir Justification. Quand donc saint Paul attribue la justification à la « foi » sans ajouter autre chose, les catholiques, eux aussi, doivent entendre ce mot dans un sens prégnant, et non plus comme une simple croyance. Voilà la difficulté.

a. Réponse indirecte. — Cette objection ne saurait guère profiter aux protestants, car elle tend à exiger comme condition de la justification, sous le nom de « foi » , non seulement la confiance au Christ qui est pour eux comme pour Luther l’élément essentiel, ma’s encore le repentir de nos péchés dont Luther ne voulait en aucune façon, voir Pénitence, et la charité, qu’il ne voulait pas faire entrer dans la foi justifiante, comme le rappellent Sanday, op. cit., p. 151 ; Prat, op. cit., p. 357, 358. Et bien des protestants, aujourd’hui encore, suivent Luther en cela. Tel M. Ménégoz : « Luther reconnut, dit-il, que la charité n’avait pas la vertu d’effacer les péchés… Cette vertu, Luther l’attribue exclusivement à la foi. » Le fldéisme, 1900, p. 28. Et p. 31, il ramène dans le rang libéral certains protestants qui cherchent un acte du cœur plus central, plus salutaire que la foi, et croient le trouver dans la charité, baptisée par quelques-uns du nom de « foi » pour sauver au moins la formule de Luther. « Sans s’en douter, dit M. Ménégoz, on retombe ainsi dans l’erreur juive et papiste du salut par l’accomplissement de la loi ; car c’est bien explicitement la Loi, et non l’Évangile, que Jésus-Christ a résumée dans ces paroles : Tu aimeras Dieu par-dessus toutes choses et ton prochain comme toi-même. » Et puis, c’est enseigner, « comme l’Église romaine, la justification par la foi et par la charité. » Encore si par « charité » on n’entendait que l’amour de Dieu ! « Mais grâce à la tendance naturelle du cœur humain, le libéralisme (protestant ) n’arrive que trop facilement à négliger la doctrine de l’amour de Dieu, pour n’enseigner que le salut par les œuvres de charité à l’égard du prochain, et à échapper ainsi, aussi bien que l’orthodoxisme, au douloureux renoncement à soi-même et à la consécration du moi tout entier à Dieu (par la seule foi-confiance). » Op. cit., p. 32, 33. Du reste, il y a peu de sincérité à prétendre que l’on suit Luther, et à faire entrer dans sa formule des ingrédients qu’il en a formellement exclus. Dès le premier siècle de la Réforme, des protestants, tout en défendant contre les catholiques la formule luthérienne de « la foi seule » suffisant au salut, introduisaient sous le nom de « foi » la charité et tout ce que nous demandons de dispositions pour la justification ; et le B. Pierre Canisius s’élevait contre cette dangereuse manière d’équivoquer : « Pourquoi donc alors tant batailler pour la formule sola fide, pourquoi ces déclamations tragiques contre nous ? d’autant plus qu’ils n’ignorent pas, et les faits le disent assez haut, combien cette formule, la foi seule, choque les pieux fidèles, combien elle pousse les âmes vulgaires à lâcher la bride à leurs passions et à négliger toute recherche de la vertu. » Commentarius de verbi Dei corrupielis, c. xii, Ingolstadt, 1583, t. i, p. 183. Sur quelques protestants de nos jours, qui identifient entre elles les vertus théologales, voir Espérance, t. v, col. G15.

b. Réponse directe. — Saint Paul dit que nous sommes « justifiés par la foi, » Rom., v, 1, etc., et non « par la foi seule, » comme le lui faisait dire Luther dans sa version allemande et comme le croient beaucoup de protestants. Voir Feinc.cité par le P. Prat, op. cit., IIe partie, p. 359. Cf. Prat, l’e partie, 4e édit., p. 237, 238. Rien ne prouve qu’en prononçant le mot « foi » l’apôtre s’écarte du sens de foi-croyance dont il a donné tant d’exemples, voircol. 58-60 ; rien ne prouve qu’il entende par « foi » l’ensemble de tous les sentiments religieux, de tous les actes intérieurs conduisant à la justification, y compris la charité. L’Écriture, n’étant pas un traité didactique, ne fait nulle part une énumération complète des conditions du salut, mais en donne une ici, une autre là, Gn sorte que la doctrine intégrale ne peut résulter que de l’ensemble des textes recueillis çà et là. Ainsi l’apôtre : si dans les textes objectés il attribue la justification ou le salut à la foi, sans rien ajouter, il s’en explique d’ailleurs, quand il ajoute à la foi, pour qu’elle soit vraiment efficace, la « charité » , Gal., v, 6, remplacée dans un texte parallèle par « l’observation des commandements de Dieu. » I Cor., vii, 19. Ailleurs encore, il représente la charité comme tellement nécessaire que sans elle tout le reste n’est rien, ne sert à rien. I Cor., xiii, 1-3. Ailleurs, c’est la grâce qui justifie, Rom., iii, 24 ; c’est le baptême. Eph., v, 26 ; Tit., iii, 5. Complétez ces textes les uns par les autres, vous y trouverez toutes les conditions de justification et de salut ; et dans ceux où il parle seulement de la foi, vous ne serez pas obligés d’enfler indûment le sens de ce mot. De même dans les Évangiles, tantôt le Christ ne mentionne, comme condition de salut, que la foi, paraissant négliger le reste, Joa., ni, 16 ; tantôt l’observation du décalogue, paraissant négliger la foi, Matth., xix, 16 sq. ; tantôt le secours de la grâce, Joa., vi, 44 ; xv, 5 ; tantôt la pénitence, Matth., iv, 17, la pénitence avec la foi, Marc, i, 15 ; tantôt le baptême, Joa., ni, 5, le baptême avec la foi, Marc, xvi, 16 ; tantôt la persévérance finale. Matth., x, 22. Dans un passage où le salut est promis d’une manière générale à une espèce d’actes, il faut toujours sous-entendre les autres conditions de salut indiquées ailleurs. Telle est la solution classique, donnée très nettement déjà par saint Augustin, De fide et operibus, c. xiii, P. L., t. xl, col. 210 ; cf. c. xxiii, puis par les exégètes et controversistes catholiques : « Les promesses ne doivent être prises qu’avec cette limitation et cette condition : si les autres conditions requises se rencontrent, si rien ne fait obstacle ; ainsi le salut éternel est promis à la foi, à l’espérance, à l’invocation de Dieu. Rom., x, 13. » Bonfrère, In Script, sacram præloquia, c. xxi, reg. xii, pour l’explication de l’Écriture, dans Migne, Cursus Scripluræ sacræ, 1. 1, col. 290. « Ces promesses universelles (comme Joa., iii, 16) doivent toujours être entendues sous les conditions exprimées dans un autre endroit de l’Écriture… Nous lisons : Tous ceux qui demandent reçoivent. Matth., vii, 8. Entendez : si leur prière s’accompagne des conditions nécessaires… Vous demandez et vous ne recevez pas, parce que vous demandez mal. Jac, iv, 3. » Les frères de Walenburch, De juslificationc, c. lxxv, n. 27, Traclalus de conlroversiis fidei, Cologne, 1671, t. ii, p. 475. » Lorsque plusieurs causes concourent à la production d’un effet, l’Écriture attribue cet effet tantôt à l’une, tantôt à l’autre, et ne veut pas dire par là qu’une de ces causes puisse suffire sans les autres. » Bellarmin, De juslificationc, 1. I, c. xx, Opéra, Paris, 1878, t. vi, p. 196. Cf. c. xxil. Ainsi, dans la phrase paulinienne « justifiés par