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FRÈRES DU LIBRE ESPRIT


clusion de ces doctrines, c’est d’abord que l’homme uni à Dieu n’a que faire de l’Église. Hérétique, il est dans la bonne voie (20). Il n’a pas besoin du prêtre (16 ; cf. 3, 17, 116), spécialement pour la rémission des péchés, car il ne doit pas songer aux péchés commis (87), ni s’en repentir (119), ni confesser les péchés mortels à un prêtre, sous peine de péché (41, 50, 64, 79), mais simplement les avouer à un homme de bien ou dire dans le secret devant Dieu : « J’ai péché » (108, 115) ; cela étant, il est clair que la confession des péchés véniels n’est pas nécessaire (9). L’homme uni à Dieu n’a cure des fêtes de l’Église (32) et des préceptes du jeûne et de l’abstinence (44, 50, 52, 105, 114). Il voit un obstacle à la perfection dans les œuvres de mortification (110) et la prière (44, 50). Il ne fait pas les prières promises (1, 34) ; il n’offre pas des suffrages pour les morts (8), pas même pour ses parents, et il ne s’afflige pas de la perte de son père et de sa mère (68). Autant que vis-à-vis de ceux de l’Église il est libre vis-à-vis des commandements de Dieu (83) ; admis à l’cmbrassement de la divinité, il a le pouvoir de faire ce qui lui plaît (72), et il est meilleur de parvenir à cet état de perfection que de fonder cent monastères (73). Le mensonge est licite (4, 38, 69). Prendre le bien d’autru » est légitime (43, 92, 113). Le travail est condamné (111). Les plaisirs inférieurs du corps ne souillent pas l’âme du juste (63, cf. 97), la fornication n’est pas répréhensible (53, 81), et tout homme uni à Dieu peut assouvir audacieusement la convoitise de la chair de toute manière (106). L’homme uni à Dieu a toute liberté : la liberté mauvaise, le repos et la satisfaction corporelle préparent en l’homme une demeure à l’Esprit-Saint (121). Naturellement la secte se cache et dogmatise dans le mystère(l, 35, 71). Elle se prétend en possession de la vérité (88). Il semble qu’elle admette une initiation graduelle, et que la liste des propositions, avec ses redites, ses confusions, ses contradictions apparentes, présente pêle-mêle les divers degrés d’enseignement correspondant aux catégories différentes des initiés. Ainsi « nous lisons (44) que l’homme uni à Dieu ne doit ni jeûner ni prier ; quelques lignes plus bas (52), il nous est dit qu’il est permis d’apporter des adoucissements aux jeûnes prescrits par l’Eglise ; évidemment la seconde règle est pour les nouveaux venus, à qui l’on ne veut pas encore montrer que le chemin où ils s’engagent les mène si loin de l’orthodoxie. Il en est de même pour la confession : une proposition (9) établit qu’il n’est pas nécessaire de confesser les fautes vénielles, l’autre que l’homme uni i I lieu ne doit pus confesser même ses péchés mortels. La première est une préparation et n’est imposée qu’aux néophytes. Le mauvais ordre où apparais les propositions prouve qu’elles sont plutôt le résultat d’interrogations, d’enquêtes, d’aveux et de dépositions que le résumé d’un traité dogmatique ; » rail une sorte de formulaire Inquisitorial constitué par Albert b— Grand au hasard (les questions et « les réponses. II. Délai u sur U mysticisme

eulalif in Allemagne au xtv* tiicle, p. II. La filiation m l’i mu dus nt&Rss nu libre iii. Sous le nom de secte des frères du libre la sinriius Ubertalis, liberl splrllus, de nom tptrihl, <lr allô ipiritu), les anciens hérésiologues et la plupart des historiens modernes ont désigné une seele unique si— propageant pendanl des siècles, livrant d’une génération.i l’autre un credo substantielli Identique, dont le fond serait, au point de vue métaphysique, le panthéisme et, d ; ms là pratique, une 11bei i mt, au moins dans l’ensemble,

i des doctrines immorales et antisociales. La se

mou md jour de l’histoire, < u Souabe, dans la

onde moitié rlu. Il. i possible de fixer

I ll> pioi éde dm i tement des ortlibiens

DICT. in liiMH. C&THOI.

(voir ce mot), dont le chef, Ortlieb de Strasbourg, fut condamné par Innocent III. Les ortlibiens viennent des amalriciens, lesquels se rattachaient à Amaury de Bène dont ils avaient développé les doctrines, voir t. i, col. 937-939, et à Jean Scot Ériugène de qui se réclamait Amaury. Voir t. v, col. 431. Par delà Ériugène, la secte remonte au néoplatonisme. Avec les hérétiques de Souabe, elle cesse d’être désignée par un nom d’homme pour l’être par le plus essentiel de ses principes ; ses adeptes s’intituleront désormais frères du nouvel esprit et bientôt frères du libre esprit. « C’est probablement de la Souabe que partent dans toutes les directions les missionnaires qui courent à la conquête ou plutôt à la « libération » des âmes. » Ils pullulent, au xive siècle, en Allemagne et surtout dans les pays rhénans ; ils se montrent dans les Pays-Bas et au nord de la France : béghards et béguines hétérodoxes, turlupins, hommes de l’intelligence, autant de synonymes, divers selon les temps et les lieux, de frères et sœurs du libre esprit. Au xve siècle, les traces de l’hérésie sont plus difficiles à saisir. Son travail souterrain nous échappe. Mais le libre esprit a sa part dans les mouvements populaires qui, à partir du milieu du siècle, troublent l’Allemagne et qui ont fini par la grande convulsion de 1525. La secte renaît au commencement du xvie siècle. Beaucoup d’anabaptistes et des membres de sectes protestantes des Pays-Bas, d’Angleterre, de France, sont ses « héritiers directs. R. Allier, Les frères du libre esprit, dans Religions cl sociétés, p. 115-122, 136-141. Cette thèse est, avec des nuances, celle de C. U. Hahn, Ccschichle der Kelzcr im Miltelalter, Stuttgart, 1847, t. ii, p. 470-481, , ">1 I537 ; C. Schmidt, Précis de l’histoire de l’Église d’Occident pendant le moyen âge, Paris, 1885, p. 177-178, 225228, 306-308 ; A. Jundt, Histoire du panthéisme populaire au moyen âge, Paris, 1875 ; II. C. Lea, Histoire de l’inquisition au moyen âge, trad. S. Reinach, Paris. 1901, t. ii, p. 379-388, 419-452, 485-487 ; II. Delacroix, Essai sur le mysticisme spéculatif en Allemagne au XIVe siècle, p. 2, 52, 73, 131-132 ; cf. T. Huyssen, dans la Revue de métaphysique et de morale, Paris, janvier 1901, p. 103 ; A. Auger, dans la Revue d’Iiisloirc ecclésiastique, Louvain, juillet 1901, p. 608-609, etc. Les tenants de cette opinion s’accordent à admettre l’unité de la secte du libre esprit, quilles à diverger dans l’appréciation des différences qui existent entre ses formes multiples.

Cette manière de voir n’est plus maintenant aussi générale. En premier lieu, on a refusé de rapprocher de la sorte les ortlibiens et les frères du libre esprit.. Pregcr, Gcschichte der Myslik im Miltelalter, t. i, p. 195, a expliqué l’ortlibianisme par des influences cathares. K. Mûller, Die Waldenser und ihre cinzelnen Gruppen bis zum Anfang des i.lahrhunherls, Gotha, 1886, p. 130-132, 166-172 ; cf. P. Alphandéry, Les idées morales chez les hétérodoxes latins au début du m° siècle, Paris, 1903, p. 158-160, note, en a fait une secte vaudoise. II. Delacroix n’a pas adopté ces conclusions. Il ne conteste pas les analogies qui existent entre la morale des cathares, d’une part, et, d’autre part, des va u doi s, et celle des ortlibiens. Mais d estime que « les principes nettement panthéistes des ortlibiens les rattachent a la doctrine du libre esprit. On a, pour les distinguer des frères du libre esprit, tiré un argument de leur ascétisme ; niais, remarque t-il ingénieuse ! n enl. rcsl un lail que son ent ila même 1 béorie donne naissance a des pratiques Opposées, et m l’ascétisme ni son contraire ne découlent nécessairement des principes panthéistes. I.a libellé en Dieu

peut être conçue aussi bien comme l’affranchissement de tout désir que comme le droit de laisser en le ca ur affluer tout b— désir ussi est il d’avis que la différent e d’s principes moraux des ortlibiens et des ii, res

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