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FRATICELLES


que la pauvreté ait la valeur absolue que lui reconnaissaient les frères mineurs, ni qu’on l’envisageât comme l’équivalent de la perfection évangélique, ni que la règle de saint François fût au-dessus du pouvoir du pape. Il pensa qu’une définition dogmatique et générale terminerait les agitations franciscaines. Avant de prononcer sa sentence, il consulta les plus hautes autorités de l’Église, demandant que chacun donnât son avis et répondit aux objections des adversaires. Finalement, par la bulle Ad condilorem (8 décembre 1322), Extravagantes, tit. xiv, c. 3, il révoqua la bulle Exiit qui seminat de Nicolas III. Critiquant l’expédient de ses prédécesseurs qui consistait à attribuer à l’Église la propriété et aux frères mineurs l’usage de.s biens de l’ordre, il remarquait qu’il y a des choses qui se détruisent par l’usage même et qui, partant, ne peuvent avoir un propriétaire distinct de celui qui en fait usage ; aussi le pape renonçait-il à la propriété des biens des frères mineurs, les biens stables et les mobiliers d’églises exceptés, et par là, bon gré mal gré, les franciscains devenaient propriétaires. Les franciscains eurent beau objecter que le pape rompait avec la tradition de l’Église, de Grégoire IX à Clément V ; Jean XXII ne s’arrêta pas en route. Par la décrétale Cuni inler nonnullos (12 novembre 1323), Extravagantes, tit. xiv, c. 4, il condamna comme hérétique la doctrine, soutenue au chapitre général des frères mineurs à Pérouse, d’après laquelle le Christ eFles apôtres n’ont rien possédé en propre ni en commun. Le lu novembre 1324, la bulle Quia quorumdam, Extravagantes, tit. xiv, c. 5, condamnait ceux qui avaient attaqué les deux bulles précédentes.

Ce n’est pas le moment d’apprécier la conduite de ir.m XXII qui, en somme, « mis en demeure de déclarer le fond de sa pensée, répondit par la seule réponse qu’il eût à faire, par un anathème, » ’dit C. Mobilier, Revue historique, Paris, 1890, t. xliii, p. 416, ni d’étudier la question dogmatique soulevée par les délies de Jean XXII et d’élucider la difficulté qui résulte de leur opposition avec les décrétâtes Exiit qui si ruinât de Nicolas lll et Exivi de paradiso de Clément V. Bornons-nous a constater que, loin d’apaiser 1rs esprits, comme il en avait eu le dessein. Jean ii déchaîna un orage formidable. Après s’être contenté d’agir contre Jean XXII sans rompre ouvertement avec lui, Michel de Césène, chef des conventuels et général de l’ordre, mandé auprès de Jean x 1 1 qui l’a< câbla de reproches, s’enfuit nuitamment, en compagnie de Guillaume Occam, auprès de Louis de Bavière, dont il embrassa le parti. Beaucoup de conventuels se révoltèrent, à son exemple, contre Jean xxii.

Les michaéliti s eurent donc en commun avec les traticelles la doctrine <f l’évangélicité de la règle franine il le rejet des décisions de Jean XXII sur la pauvreté religieuse. Pour tout le reste, ils en diffèrent complètement. Les opposants les plus déclarés de lean ll furent précisément les plus fougueux addi s spirituels et des fraticelles : tels.Michel de le, Occam, Bonagrazia, c le. Les michaélites, s’ils ut triomphé, auraient certainement manifesté ipirituels et aux frati< elle ! leur antique aversion. De son côté, Clareno n’avait pas < onnance en eux ; ni il réjouit d< l’élection ni il ne s’attrista de l’abdi i de l’antipape Nl< olas (le conventui l PI irvara) ; il savait bien que, si Pierre s’était affermi sur le siège pontifical, les frati< elles n’auraient pas eu de lui l’autorisation di éparei d< l’ordre. Voir sa

hllippi ii< Majorque, dans F. Tocco, Sludit

francescani, p. 298. Les traticelles ne se rallièrent pas à rc, ne se rendirent pas auprès de lui, si en exceptons Hubertin de Casale ; et encore

Hubertin n’est-il pas un/vrai fraticelle.^lui qui n’avait pas appartenu au groupe des ermites du pape Célestin nommés plus tard traticelles et qui, s’il les a défendus, a fini par déposer, avec une dispense pontificale, l’habit des frères mineurs pour revêtir celui des bénédictins. Cf. F. Callæy, L’idéulisme franciseain spirituel au XIVe siècle. Élude sur Uberlin de Casale. Couvain, 1911, p. 51, 218-221, 239-253. Bref, on a eu tort de confondre fraticelles et michaélites et d’annexer à l’histoire du fratieellisme la lutte de Louis de Bavière et de ses partisans franciscains contre Jean XXII.

Après la mort de Jean XXII (1334), les fraticelles et les béguins étaient affaiblis, mais non prêts à disparaître ; tous les papes d’Avignon s’occupèrent de les réduire sans y réussir. Leur quartier général fut la Marche d’Ancône. Ils furent nombreux aussi dans le royaume de Naples, où ils jouirent de la protection du roi Robert et de la reine Sancia ; quand Louis de Duras risqua son infructueuse tentative de révolte contre la reine Jeanne (1362), la popularité des fraticelles lui parut un appoint tel qu’il afficha publiquement des sympathies pour eux. Ils subsistaient un peu dans toute l’Italie. On en découvrit en France, en Espagne, en Allemagne. Ils tenaient bon outre-mer, en Arménie, en Perse, en Egypte, en Syrie, en Crimée, en Grèce, partout où ils avaient réussi à s’implanter. Les papes excitèrent contre eux le zèle des inquisiteurs. Tout ce qui paraissait avoir quelques traits de ressemblance avec le fratieellisme devenait aisément suspect. Le vieil historien du bienheureux Jean Colombini, Feo Belcari, Vita del b. Giovanni Colombini da Sicna, c. xxxviii, dans ses Prose, édit. O. Gigli, Rome, 1843, t. i, p. 111 ; cf. G. Bonafede, // colombino di Giesù overo vita, virtù, miracoli e dotlrina del b. Colombino da Siena fondalore del særo ordinc de’Giesuati, c. xiv, Rome, 16 12, p. 144, raconte qu’au temps où Colombini et ses petits pauvres les jésuates vinrent à Vilerbc, faisant cortège à Urbain V, des cardinaux, des évêques, des frères mendiants les accusèrent de n’être pas étrangers à l’hérésie des fraticelles de l’opinion ; Urbain V, qui les connaissait et qui les aimait, dut les défendre. Les troubles occasionnés par le grand schisme d’Occident profitèrent peu a la cause des fraticelles ; également opposés au pape d’Avignon et à celui de Borne, l’un et l’autre les combattirent. Martin Y et Eugène IV redoublèrent d’efforts contre la secte. Saint Jean de Capislran et le bienheureux Jacques de la Marche reçurent, en 1426, la mission de ramener à [’Église tous ces dissidents ; en outre, Jean de Capislran était nommé Inquisiteur, sans limitation territoriale, avec plein pouvoir de choisir des délégués, pour avoir raison de leur résistance. L’action de ces deux observant ins s’exerça pendant plus d’un quart de siècle. <>n retrouve îles fraticelles dans la Marche, en 1 166. En 1 171. des fraticelles sont découverts à Piombino et sur le littoral de la Toscane ; c’est la dernière fois qu’ils apparaissent dans l’histoire. Les fraticelles dont parle Florimond de Rœmond, L’histoire de la naissance, progrei < I >i<t<i<iciu<’de l’here sie de ce siècle, I. ii, c. xvi. il. b. Paris. 1655, p. Kit b, et qu’on a vus, dit-il, ’dans Posvanie en notre siècle, sont plutôt une des sectes issues du protestantisme qui renouvelèrent la secte du libre esprit. Voir FRÈRES nr l.linil ESPR1 i.

tout en condamnant avec insistance les frai icelles,

parce qu’ils appuyèrent trop souvent leurs revendications sur des doctrines suspeeles OU subversives, empruntées au jo.iehimisnie. manquèrent de mesiii. de justice envers les frères mineurs qui ne pensaient

pas comme eux, et en vinrent Jusqu’à répudier l’auto rite du pape. l’Église eut de l’indulgenci pour ces hommes bibles a garder un Idéal très haut et dont quelques-uns furent de saintes gens. Clément V leur