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FRANC-MAÇONNERIE

IV. Obligation absolue de s’éloigner des sociétés secrètes. — 1° Conduite des fidèles à l’égard de la Franc-Maçonnerie. — La conclusion qui ressort des considérations précédentes est que tout catholique doit éviter soigneusement de s’affilier à la Maçonnerie et à toute société secrète. La nature intrinsèquement mauvaise de la Franc-Maçonnerie, les sanctions réitérées, fulminées contre elle par les vicaires de Jésus-Christ, les actes contre la société religieuse et civile qu’on peut lui attribuer à bon droit ne laissent planer aucun doute sur un pareil devoir. C’est la conclusion formelle de Léon XIII dans son encyclique Humarum genus du 20 avril 1884. Denzinger, Enchiridion, n. 1859.

Pour lutter efficacement, contre ces sociétés perverses, il faut l’union des catholiques, sous l’obéissance à la hiérarchie sacrée. L’ennemi en donne l’exemple, par l’organisation de ce réseau de convents, placés sous la direction de chefs souvent occultes, mais toujours déterminés.

Aussi, à la fin de son encyclique Humanum genus, Léon XIII fait un appel émouvant aux évêques, aux rois et aux peuples. Il signale la manière dont ces sectes clandestines s’insinuent dans la confiance des princes, sous le prétexte fallacieux de protéger leur autorité contre la domination de l’Église. En réalité, c’est afin de saper tout pouvoir, comme le prouve l’expérience. Le pontife dénonce ensuite la façon dont ces hommes fourbes flattent les multitudes, faisant miroiter à leurs yeux une prospérité, dont les rois et l’Église seraient les seuls ennemis En définitive, ici aussi, ils précipitent les nations dans l’abîme de tous les maux, dans les agitations révolutionnaires et la ruine matérielle. A la suite de ce tableau, le pape conclut : les rois et les peuples devraient se coaliser avec l’Église pour briser les assauts des francs-maçons, et ne pas s’allier aux francs-maçons, pour paralyser l’action salutaire de l’Église : Quibus cognitis, hoc esset civili prudentiæ admodum congruens, et incolumitati communi neccssarium, principes et populos, non cum massonibus ad labefactandam Ecclesiam, sed cum Ecclesia ad frangendos massonum impetus conspirare.

Conduite du confesseur à l’égard des affiliés à la Franc-Maçonnerie. — En conséquence de la condamnation des sectes maçonniques sous peine d’excommunication, non seulement les théologiens moralistes, mais les Congrégations romaines, ont réglé en détail la manière dont les confesseurs devaient agir, au tribunal de la pénitence, à l’égard des francs-maçons.

Le premier devoir du confesseur, à l’égard d’un pénitent affilié à la Franc-Maçonnerie, est de s’informer si son pénitent connaît les prohibitions pontificales et les censures ecclésiastiques édictées contre les sociétés secrètes.

Si, par impossible, le confesseur jugeait que le pénitent se trouve dans la bonne foi, résultant de l’ignorance invincible, il lui resterait à examiner si, en l’instruisant de l’obligation de quitter la Franc-Maçonnerie, il l’amènera à obéir aux lois de l’Église. Si les dispositions du pénitent permettent d’espérer une solution favorable, le confesseur ne doit pas hésiter à exiger : 1. que le pénitent renonce définitivement à la secte ; 2. qu’il remette à l’évêque ou au confesseur les insignes, les livres, les manuscrits maçonniques ; 3. qu’il subisse une pénitence salutaire. Il lui recommande ensuite instamment de fréquenter le sacrement de pénitence. Ces conditions posées et acceptées, le simple confesseur peut donner l’absolution, le pénitent est censé, à raison de sa bonne foi, n’avoir pas encouru la censure.

Si le confesseur prévoit l’inutilité de la monition, selon la doctrine communément reçue, il absoudra le pénitent de bonne foi, sans lui faire de monition. L’intérêt spirituel du pénitent exige qu’on lui fasse éviter le péché formel, en tolérant le péché matériel.

Dans deux circonstances, néanmoins, le confesseur est absolument tenu à faire la monition requise : 1. si le pénitent l’interroge lui-même sur le caractère moral de son affiliation à la secte, car son interrogation est un indice qu’il se trouve dans un doute vincible, non invincible ; 2. dans le cas où le bien public exigerait que le pénitent fût instruit, par exemple, si la réception des sacrements, de sa part, devait provoquer un scandale dans la population, qui le sait affilié à la Franc-Maçonnerie. Les solutions que nous venons d’indiquer sont extraites de la réponse du Saint-Office, en date du 15 juin 1870.

Mais à la suite des actes multipliés du Saint-Siège, des avis si fréquents et si répandus de l’épiscopat catholique, le cas de l’ignorance invincible n’est pas ordinaire. Il s’agit bien plus fréquemment de savoir quelle doit être l’attitude du confesseur à l’égard du pénitent, ayant encouru l’anathème, pour participation consciente aux actes des associations clandestines. Si le confesseur n’a pas de pouvoirs spéciaux pour absoudre ces pénitents, il doit recourir à l’évêque. En vertu d’un induit triennal de la S. Pénitencerie, l’évêque peut absoudre les francs-maçons et même déléguer ce pouvoir, moyennant l’observation des clauses insérées dans la concession.

Si le confesseur est nanti du pouvoir d’absoudre il doit se conformer aux conditions générales de l’induit triennal concédé aux évêques : ut a respectiva secta omnino se separent, eamque abjurent : libros, manuscripta, ac signa sectam respicientia, in confessariorum manus tradant, ad ordinarium quamprimum caute transmittenda, si juslse gravesque causæ id postulent comburenda : injuncta pro modo culparum, gravi pænitentia salutari, cum frequentatione sacramentatis confessionis.

Au sujet de la première condition : se omnino separent, eamque abjurent, il suffisait autrefois que le pénitent s’engageât à ne plus assister aux conciliabules maçonniques et abjurât les doctrines de la secte. Mais comme, en ces derniers temps, une loi scélérate a donné valeur légale aux engagements souscrits pour le moment de la mort et les funérailles, la rétractation privée ne suffit pas. Le cas échéant, le confesseur doit exiger une pièce authentique, établissant la révocation des engagements antérieurs.

Le confesseur doit encore prévenir le pénitent, qui a déclaré connaître les noms des grands-maîtres de la Maçonnerie, qu’il est obligé de les dénoncer, sous peine d’excommunication.

Les règles sont obligatoires même pour l’heure de la mort. Ainsi, un membre de la Franc-Maçonnerie, connaissant les défenses de l’Église, doit se rétracter, s’il veut recevoir les sacrements. S’il est de bonne foi. la monition doit lui être faite eu ce moment. Le 8 juillet 1874, la S. C. de l’Inquisition a déclaré qu’en général il ne fallait pas absoudre dans ces cas. sans avoir fait la monition requise par les décrets. Lorsqu’il s’agit d’enfants ou de mourants matériellement enrôlés, il suffit d’une exhortation générale à se soumettre à l’autorité et aux décisions de la sainte Église. L’avertissement canonique doit être adressé, si on prévoit qu’il réussira.

En tout état de cause, l’instruction de la S. C. de l’Inquisition recommande de réparer le scandale qui pourrait survenir en accordant les honneurs de la sépulture à un affilié des loges qui ne s’est pas rétracté. D’autant que les solidaires voudraient manifester autour du cadavre. Pour obvier à ce double inconvénient, le confesseur doit se munir d’un écrit, ou convoquer des témoins qui certifieront la vérité