Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 6.djvu/37

Cette page n’a pas encore été corrigée

59

KOI

GO

De plus, la foi dont parle suint Paul doit être « confessée de bouche. » Quelle était la confession île foi des premiers chrétiens ? ce sera un commentaire historique et sûr des paroles de l’apôtre. La « profession de foi » exigée des catéchumènes avant le baptême, c’était le symbole, c’est-à-dire l’acceptation d’un certain nombre de dogmes. La « confession de foi » des martyrs devant les tribunaux, c’était la proclamation du monothéisme et de « Jésus comme Seigneur » . Tout cela suppose que la « foi » est une croyance. Quant à ce mot du texte : « Si tu crois dans ton cœur que Dieu l’a ressuscité, « etc., c’est en vain que les protestants y cherchent une objection. Quand même on y prendrait le mot « cœur » comme nous le prenons ordinairement, pour indiquer une affection, quand même on verrait dans ce corde creditur « un mouvement de tout l’homme intérieur, » Diclionary of the Bible de Hastings, t. i, p. 836, cela ne détruirait pas le sens déjà prouvé de foi-croyance, puisque la croyance elle-même naît d’une influence du cœur, de la volonté, et procède ainsi de l’âme tout entière. Voir Croyance, t. iii, col. 2365, 2375, 2385 sq. Mais d’ailleurs, rien ne prouve que « cœur » signifie dans ce texte la partie affective. Il en serait ainsi si « cœur » était oposé à « esprit » . Ici il est opposé à « bouche » ; c’est donc cet hébraïsme en vertu duquel on se sert du mot « cœur » , pour désigner vaguement l’intérieur, par opposition à l’exté-. rieur de l’homme : « croire de cœur » , c’est croire intérieurement et non pas seulement des lèvres. Bien plus, chez les Septante dont dépend saint Paul, xapSta, cœur, désigne parfois spécialement l’intelligence, le jugement, de même que les latins disaient : cordalus homo, un homme sensé. Ainsi Exod., xxxvi, 2 ; Deut., xxix, 4 ; I Reg., iv, 20 ; III Reg., ii, 44 ; Jer., vii, 31, etc. Cf. Hatch, Essays in biblical greek, Oxford, 1889, p. 98-108. Dans la même Épître, le mot « foi » se rencontre dans un sens spécial qui se ramène encore à une conviction intellectuelle : « Tout ce qui ne (se fait pas) de (bonne) foi est un péché. » Rom., xiv, 23. Le contexte fait voir que iuctti ; est ici la conviction que nous avons de la licéité de notre action : le célèbre anglican Sanday est ici d’accord avec saint Chrysostome et saint Thomas qu’il cite. The epislle to the Romans, dans The international crilical commentary, 4e édit., Edimbourg, 1900, p. 394.

Les Épîtres de la captivité montrent aussi une « foi » intellectuelle : « Marchez en lui…, affermis par la foi, telle qu’on vous l’a enseignée. » Col., il, 6, 7. Car aussitôt, expliquant cette » foi » par les ennemis qui la menacent : « Prenez garde, ajoute-t-il, qu’on ne vous séduise par la philosophie et par des enseignements trompeurs, » 8. La foi est donc affaire de vraie doctrine et de solide conviction, qui résiste à l’enseignement contraire de la fausse philosophie et de l’hérésie. Au ꝟ. 12, il parle encore de leur « foi à l’action de Dieu, qui a ressuscité (le Christ) d’entre les morts. » Foi dogmatique ! Aux Éphésiens, rapprochant foi et connaissance, il vante « l’unité de la foi et de la connaissance du Fils de Dieu, » iv, 13, et dans le contexte nous montre cette unité de foi produite et maintenue par les « apôtres, prophètes, évangélistes, pasteurs et docteurs…, afin que nous ne soyons plus des enfants, ballottés et emportés à tout vent de doctrine par la tromperie des hommes, par leur habileté à induire en erreur, » 14. Ailleurs il semble prendre comme synonyme la « science du Christ » et la « foi au Christ » , Phil., ni, 8, 9 : c’est une même chose qu’il préfère à tout.

Les Épîtres pastorales montrent également la « foi » comme une adhésion intellectuelle à la véritable doctrine, tandis que les hérétiques détruisent la foi en s’éloignant de la vérité : « Hyménée et Alexandre ont fait naufrage dans la foi. » I Tim., i, 19. « Hyménée et Philête se sont éloignés de la vérité… et renversent la foi de plusieurs. » II Tim., Il, 17, 18. « Dans les temps à venir, plusieurs abandonneront la foi pour s’attacher à des esprits séducteurs et à des doctrines diaboliques. » I Tim., iv, 1. « Reprends-les sévèrement, pour qu’ils aient une foi saine, et qu’ils ne prêtent pas l’oreille à des fables judaïques. » Tit., i, 13, 14. Toujours la « foi » dans l’ordre intellectuel, en antagonisme avec les fausses doctrines. Un autre signe de l’intellectualité de la foi dans saint Paul, c’est qu’il la met en opposition avec l’ignorance. « Je l’ai fait par ignorance, quand je n’avais pas la foi. » I Tim., i, 13.

Dans les textes précédents, la « foi » était plutôt prise au sens premier et subjectif, comme un acte du sujet : d’autres la prennent au sens dérivé et objectif, comme une doctrine qui est l’objet de cet acte. Citons quelques-uns de ces textes, qui tous prouvent notre thèse, puisque jamais le mot tJ.ut :  ; n’arriverait à signifier une doctrine, si l’acte de croire n’était pas l’adhésion à une doctrine. « Celui qui nous persécutait naguère prêche maintenant la foi, » c’est-à-dire l’Évangile, les vérités de la religion. Gal., i, 23. Lightfoot remarque ici le sens objectif, Galatians, p. 86, ainsi que dans Gal., ni, 23 ; vi, 10. « Nourri des leçons de la foi et de la bonne doctrine. » I Tim., iv, 6. « Tu n’as point renié ma foi, » etc. Apoc, ii, 13.

2. Exemples du verbe « croire » employé dans notre sens.

Plusieurs, au moins, des constructions de ce verbe donnent l’idée d’une simple croyance, et font abstraction des sentiments religieux qui peuvent s’y ajouter. Ainsi : a) avec le datif de personne (construction fréquente) irtcrrs-ja) a très clairement ce sens. Quand Jésus dit à la Samaritaine : « Croyezmoi, l’heure vient, » etc., Joa., iv, 21, lui demanda-t-il pour le moment autre chose qu’une simple croyance à sa prophétie ? De même aux Juifs : « Si je dis la vérité, pourquoi ne me croyez-vous pas ? » Joa., viii, 46 ; cf. v, 46 ; x, 37, 38. « Quand ils eurent cru à Philippe qui leur prêchait le royaume de Dieu et le nom de Jésus-Christ, hommes et femmes furent baptisés. » Act., viii, 12. Et cette foi exigée pour le baptême est expliquée par « recevoir (accepter) la parole de Dieu. » Ibid., 14 ; cf. xxvi, 27. b) Avec le datif de chose : croire à la parole de quelqu’un, à son témoignage, à l’Écriture, etc. Ce cas revient au précédent, dont il n’est qu’une paraphrase. « Tu seras muet…, parce que tu n’as pas cra à mes paroles. » Luc, i, 20. Saint Jean parle de croire « à l’Écriture, » ii, 22, « à la parole que Jésus avait dite, » iv, 50, « aux écrits de Moïse, » v, 47. Saint Paul croit « à tout ce qui est écrit dans la loi et les prophètes. » Act., xx, 14. Il annonce que Dieu jugera ceux « qui n’ont pas cru à la vérité. » IIThess., ii, 11. c) Avec l’accusatif de chose : « Je suis la résurrection et la vie… Croyez-vous cela ? » Joa., xi, 26. Simple croyance, évidemment. Marthe répond : « Oui, Seigneur, je crois que vous êtes le Christ, » etc. d) Avec la conjonction que (Stc, etc.) suivie d’une proposition. Cas fréquent, réductible au précédent : la proposition exprime une vérité, croire une vérité est un acte intellectuel, une croyance : « Afin que le monde croie que vous m’avez envoyé. » Joa., xvii, 21 ; cf. xvi, 27 ; xx, 31. » Nous croyons que Jésus est mort et ressuscité, » I Thess., iv, 14 ; cf. Rom., x, 9, 10, où une semblable foi est présentée comme servant à la justification et au salut, e) Avec l’infinitif. Cette construction, où le que est retranché, équivaut à la précédente : « C’est par la grâce de Jésus-Christ que nous croyons être sauvés. » Act., xv, 11. Cf. Rom., xiv, 2.

Nous avons surabondamment réfuté l’opposition radicale à la thèse catholique.

Opposition modérée.

D’autres protestants, tout en concédant que l’Écriture, et même saint Paul, emploient souvent les mots « foi, croire » pour une simple croyance à la parole de Dieu, soutiennent pourtant