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dans ce soin qu’il a de garder sa foi, voir col. 386, 387 ; résolution qui, par un contre-coup direcl sur l’assentiment intellectuel de foi, lui communique le degré souverain d’adésion, caractéristique de la foi divine. Voir col. 380, 490. Ainsi la volonté, comme puissance purement exécutrice, aide l’intelligence à atteindre la suprême adhésion que méritent, qu’exigent, que mesurent l’autcrité et la parole de Dieu comme objet formel. ( >n voit que les traits distinctifs <ie l’assentiment de foi dérivent non pas de notre connaissance subjective et des prémisses que nous pouvons aligner, mais directement de Vaucloritas Dei revelantis prise objectivementetensoi ; celle-ci reste donc l’objet formel, auquel doit s’arrêter l’analyse quand elle est à la recherche de cet objet.

C’est trop élargir le concept d’« objet formel » , objectera-t-on peut-être, que de étonner ce nom à des attributs divins en tant qu’ils produisent ou exigent en nous un effet que nous ne voyons pas, une infaillibilité dans notre acte, laquelle ne tombe pas sous la conscience. Le motif d’un acte ne doit-il pas être connu et son influence et son effet ne peuvent-ils être connus au moins par réflexion ? Précisons le vrai concept d’« objet formel » . Grégoire de Valence, après avoir distingué Vobjectum formate quod et Vobjectum formate quo, comme nous l’avons fait, col. 377, parle ainsi du second qui nous occupe en ce moment : « Pour qu’une chose soit objet formel de la foi. ce n’est pas assez que la foi en dépende d’une manière quelconque : il faut qu’elle en dépende comme de sa forme (extrinsèque) c’est-à-dire de son exemplaire (archétype). » Il explique ainsi cette dépendance : Non seulement « la toi, par sa nature, ne peut adhérer à aucune proposition sans que la divine révélation la lui ait montrée, » mais encore « la foi, dans son infaillibilité et sa certitude, imite la divine révélation comme son exemplaire et son modèle. » Car « de même que la révélation est infaillible en ce qu’elle dit, de même il faut que la foi soit toujours infaillible dans son assentiment. » Commentarii Iheologici. Lyon, 1603, t. iii, disp. I, q. i, p. i, § 5, p. 26. C’est donc à la « cause exemplaire » que ce grand théologien, invoquant le sentiment commun des docteurs, ramène la causalité propre de l’objet formel. Un spécimen classique de la cause exemplaire, c’est le plan tracé par l’architecte. Ce plan reste extérieur à l’édifice, mais l’édifice se construira d’après lui, y trouvera sa forme, ses proportions et ses mesures ; toute la construction est réglée d’avance par le plan, lui donnera son caractère, sa physionomie, son espèce. De même un acte reçoit de son objet formel ses traits distinctifs, est mesuré, réglé, « spécifié » par lui. Aussi saint Thomas représente-t-il les vertus théologales comme « mesurées et réglées » par leurs objets formels : Mensura et régule virtutis theologicse est ipse Deus : fuies enim noslra regulatur secundum verilatem divinam, caritas autem secundum bonitatem ejus, spes autem secundum magniludidem omnipotentiæ et pielalis ejus, Sum. tkeol., Ia-IIæ , q. lxiv, a. 4 ; on voit ici l’énumération sommaire des divers attributs divins fini sont regardés comme les « objets formels » des diverses vertus théologales. Notons que la cause exemplaire n’exécute pas elle-même ce qu’elle règle, ce qu’elle mesure, ce qu’elle détermine : l’exécution revient à une ou plusieurs causes efficientes. Le plan de l’architecte ne construit pas la maison : il demande un entrepreneur, des tailleurs de pierre, des maçons, des charpentiers, etc. Quand donc nous disons que l’autorité et la révélation de Dieu, prises en elles-mêmes, donnent à l’assentiment de foi ses traits distinctifs, nous entendons qu’elles les donnent comme peut les donner une cause exemplaire. Ce qu’a réglé, mesuré, déterminé cet objet formel et spécificateur, diverses causes efficientes devront le réaliser. Ainsi la toute-puissance divine, intervenant immédiatement, élèvera notre intelligence pour produire l’assentiment, soit en mettant en elle l’habilus fidei, soit en excitant par sa grâce act m Ile cel habitus à agir, de manière à rendre l’assentiment intrinsèquement surnaturel, selon que l’exige la révélation objectivement vraie. La volonté humaine (leva, elle aussi, intervenir sous l’influence de la grâce, pour réaliser cette adhésion.super omnia et cette fermeté souveraine, qui est à la mesure de l’autorité ou infaillibilité divine considérée en elle-même. Ce que détermine cette révélation infaillible comme modèle, des intermédiaires qui n’agissent point par voie syllogistique, la grâce et la volonté, sont chargés de l’exécuter : l’assentiment, recevant par elles son infaillibilité et sa fermeté spéciales, n’est donc pas discursif, au moins dans ce qu’il a de spécifique, et ce ne sont pas des « prémisses » qui peuvent revendiquer la fonction d’être son objet formel et spécificateur. D’ailleurs, nous ne nions pas que la chaîne du raisonnement préalable ne figure, elle aussi, parmi les intermédiaires qui transmettent quelque chose à l’assentiment de foi. ainsi que nous l’expliquerons plus bas : mais cette chaîne syllogistique n’est qu’un intermédiaire d’exécution, elle ne transmet, du reste, rien de distinctif ni de spécifique, elle n’a donc aucun titre à faire partie de 1’« objet formel » , quand bien même on voudrait la faire entrer partiellement dans le concept plus vague et plus général de < motif » . Ces deux concepts ne se confondent pas absolument. Le motif n’agit que par l’intermédiaire de la connaissance : l’objet formel peut se servir, comme nous l’avons vii, d’autres intermédiaires que celui de la connaissance. Le motif, c’est en général ce qui, étant connu, meut la faculté à produire son acte, mais ce n’est pas toujours la cause exemplaire et spécificatrice de cet acte : l’objet formel est cette cause.

Corollaires et conclusions. Le rôle complet des motifs de crédibilité et du raisonnement dans la foi. L’analyse apologétique. —

Ce que nous avons dit pour exclure de la dignité d’objet formel les « prémisses » , ou jugements spéculatifs de crédibilité : Dieu est souverainement véridique, il a fait telle révélation, on doit le dire à plus forte raison des « motifs de crédibilité » . Car les jugements spéculatifs de crédibilité, présupposés par l’assentiment de foi au dogme révélé, sont liés de plus près à cet assentiment : les motifs de crédibilité, présupposés par ces jugements cemme leurs preuves, lui sont rattachés de plus loin. Les deux jugements spéculatifs de crédibilité sont exigés invariablement chez tous les fidèles : les motifs de crédibilité ne sont pas exigés de la même manière, ils peuvent varier étonnamment d’un fidèle à l’autre : chez beaucoup d’entre eux, ce sera simplement l’autorité du curé, du catéchiste, ou du moins l’autorité de l’Église comme grande société humaine. Voir col. 150, 221 sq., 231 sq. Comment une autorité humaine pourrait-elle spécifier l’assentiment de foi divine ? Les motifs de crédibilité ne peuvent donc constituer même partiellement l’objet formel de la foi ; ils ne sont par rapport à cet objet qu’une condition applicatrice. Voir ce que nous avons dit contre le système de Lugo, col. 486.

Cela n’empêche pas que d’un autre point de vue on puisse leur reconnaître une certaine causalité à l’égard de l’assentiment de foi. On peut appeler « cause » ce qui donne à l’effet au moins une de ses propriétés essentielles : la simple « condition » ne donne par elle-même rien de semblable, elle est seulement requise pour que la cause donne l’être ou quelque propriété de l’être. Une des propriétés essentielles de l’assentiment de foi, c’est d’être raisonnable. Or, ce sont précisément les motifs de crédibilité qui lui donnent cela, d’après le concile du Vatican : « Pour que l’hommage