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FOI
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qu’elle appartient intrinsèquement à l’acte de foi et qu’elle est son élément principal. Mais elle a un mode accommodé à notre nature, nobis connaturalem, parce que dans cette vie mortelle toutes nos opérations surnaturelles ont le même mode objectif que nos opérationsnaturelles. » Op. cit., thés, xxvi, p. 206. Et plus loin : « Cette connaissance est contenue dans l’acte de foi comme son fondement et son principe, elle est donc nécessairement surnaturelle. Elle n’a donc pas pour origine (du côté du sujet) la lumière naturelle de la raison (la faculté non élevée), mais la lumière surnaturelle de la foi (l’habitus fidei). Or une connaissance qui i pour origine la lumière surnaturelle diffère ontologiquement et par son entité même d’une connaissance produite par la seule nature. » Op. cit., thés, xxix. p. 22 !. Il en conclut que, si l’on compare la connaissance de l’auctoritas Dei revelantis telle qu’elle dans les préliminaires de la foi et telle qu’elle est maintenant dans l’assentiment même de foi, il y a eu formation dans l’entité de la connaissance, secundum suum esse, et qu’on est en droit de l’appeler « une connaissance nouvelle » due à la lumière de foi. Loc. cit. Franzelin avait déjà fait la même remarque. Loc. cit., p. 654. « Mais cette connaissance surnaturelle, ajoute Stentrup, ne diffère pas de la naturelle selon le mode objectif de connaître. » quoi qu’en disent plusieurs théologiens, qui veulent la rendre entièrement nouvelle, aussi bien du côté du mode d’atteindre l’objet que du côté du principe agissant dans le sujet.
« Ces théologiens, dit-il, avouent comme les autres,
qu’avant la foi il faut une connaissance rationnelle et certaines des motifs (de crédibilité)… Mais ils enseignent que dans l’acte même de foi une nouvelle connaissance du témoignage divin est donnée, indépendante et distincte de la précédente, ayant un autre mode de connaître que celui de la raison naturelle (même du côté de l’objet). Quelle raison ont-ils de faire cette hypothèse ? Aucune, si ce n’est qu’ils ne peuvent trouver d’autre expédient pour arrêter l’analyse à l'auctoritas Dei revelantis… C’est aussi la seule cause qui a amené Lugo à inventer sa connaissance immédiate de celle autorité. » Loc. cit., p. 222. A quoi reviendra ce mode nouveau d’atteindre l’objet qu’ils exigent ? Ou auctoritas Dei revelantis sera crue sur la parole de Dieu (Suarez), ou elle sera vue, c’est-à-dire immédiatement connue (Lugo). Nous avons réfuté l’un et l’autre. » Loc. cit. ; cf. p. 231. Il ne reste donc plus qu’une porte ouverte devant nous, c’est de laisser continuer la première connaissance, rationnelle et
« médiate » (tout en la rendant ontologiquement surnaturelle).
Loc. cit., p. 222. Cela ne nuira ni à la liberté, ni a la surnaturalité de la foi. « Le commandement de la volonté peut atteindre aussi bien un assentiment médiat, qu’un assentiment immédiat… Une connaissance médiate peut aussi bien être surnaturelle qu’une autre. » Thés, xxx, p. 223. Cet assentiment surnaturel, puisqu’il est médiat, porte non seulement sur lauctoritas Dei revelantis, mais encore sur le medium qui éclaire celle-ci (les motifs de crédibilité), p. 225. Naturellement Stentrup regarde l’acte de foi comme discursif ; et même avec Lugo il admet la possibilité d’un discursus formel. Thes, v. p. 25. « L’acte de foi n’est pas seulement l’assentiment à la conclusion (le mystère) mais il renferme tout le discursus, formel ou virtuel. » Loc. cit., p. 26. Il porte même sur la légitimité du raisonnement, bonitas illationis, p. 28. Quant au P. Hurter, il ne fait guère que reproduire des passages de Stentrup dans sa Theologia generalis, 9° édit., 1890, Inspruck, n 488 p. 498.
Critique du système..
a) Il est supérieur au précédent
dont il rejette un point très caractéristique mais
généralement regardé comme insoutenable.
b) Il distingue encore plus nettement ce terme équivoque
« la lumière de la raison » , qui peut signifier, ou bien
le « mode objectif » , le procédé logique, la manière dont la raison atteint l’objet formel, ou bien la faculté de la raison non élevée : il fait atteindre l’objet formel par la lumière de la raison dans le premier sens, et non dans le second. Il distingue pareillement le mot équivoque
« la lumière de la foi » . qui peut signifier, ou
bien du côté de l’objet le procédé logique de la foi, le
motif d’autorité et de révélation, ou bien du côté du
sujet le principe surnaturel qui élève la faculté, c’est le
sens auquel saint Thomas entend le mot lumen fidei.
Voir col. 240. Le système fait atteindre l’objet formel
par la « lumière de la foi » dans le second sens, non dans
le premier. Du reste, dans cet appel au lumen fidei.
qui fait au surnaturel sa part légitime, Stentrup et
Egger ne diffèrent aucunement de Lugo, bien que
M. Bainvel semble indiquer le contraire. La foi….
2e édit., p. 52. en note. —
c) Mais en disant que, dans
l’assentiment de foi lui-même, la connaissance de
l’objet formel est non seulement rationnelle mais
encore médiate, ils donnent toute son acuité à la difficulté
classique de l’analyse de la foi. Voir col. 489. —
Pourquoi, leur dira-t-on, l’analyse devra-t-elle s’arrêter
à l’auctoritas Dei revelantis. médiatement connue,
comme au seul motif spécifique de la foi ? Pourquoi,
dans votre système, n’est-on pas obligé de remonter
en dernière analyse jusqu’à ces motifs de crédibilité,
fondements de cette connaissance médiate que vous
admettez, et qui, d’après vous, sont affirmés surnaturellement
par l’assentiment même de foi, tout aussi
bien que cette autorité et cette révélation qu’ils prouvent
(Stentrup, thés, xxx, p. 225) ? — A cette question
délicate, ils répondent que les motifs de crédibilité
n’entrent pas dans le motif spécifique de la foi, parce
qu’ils sont une simple application de ce motif, qui sert
à les faire connaître. « Le motif de l’assentiment de foi
considéré dans son exercice, in actu secundo, dit Stentrup.
ce n’est sans doute pas le témoignage infaillible
de Dieu considéré absolument en lui-même, mais c’est
ce même témoignage considéré relativement à l’esprit
qu’il doit mouvoir, et par suite, revêtu de tout ce qui
le rend connaissable à notre esprit. Mais ce qui le
revêt ainsi (les motifs de crédibilité), ce qui le rend
ainsi connaissable, appartient au motif de la foi non
pas comme quelque chose qui le constitue, mais
comme quelque chose qui le manifeste. En conséquence,
(les motifs de crédibilité)… n’ont pas en propre
de force motrice, vim movendi, à l’égard de l’assentiment
de foi, mais toute leur efficacité aboutit à la
connaissance du témoignage infaillible de Dieu (connaissance
qui n’est, elle-même, qu’une application) ;
ils ne peuvent donc empêcher l’assentiment de foi de
s’appuyer sur ce seul témoignage. » Op. cit., thés. xxxi.
p. 230. « Toute la force motrice, dit Egger, est dans
l’autorité divine. Si un général d’armée, recevant par
un messager une lettre munie du sceau royal, constate
ainsi la volonté du roi et s’y soumet, il ne le fait pas à
cause du messager et de la lettre, mais uniquement à
cause du respect qu’il a pour le prince. dont la volonté
est manifestée par le porteur de la lettre. De même
dans notre cas. » Loc. cit., n. 153, p. C30.
Nous ne disons pas que celle réponse soit mauvaise, mais elle demanderait à être plus approfondie et plus solidement justifiée. Ce sera l’œuvre du dernier système qu’il nous reste à exposer. Il aura d’ailleurs le même avantage que celui ci, de rendre l’acte de fol raisonnable, d’éviter tout vice de logique. Même il laissera, comme celui, l’objet formel apparaître pendant l’acte même de foi avec ses preuves rationnelles plus ou moins confusément perçues, et par une connaissance médiate. Mais d’autre part, il l’emportera par sa simplicité. Car, quel que soit le mérite de cette adaptation du système de Lugo, que nous venons de