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Vierge, les apôtres, etc., ont dû avoir en même temps cette évidence et la loi : il doit donc y avoir un moyen de les concilier. Et notez qu’il suffirait d’un seul fait semblable pour pouvoir ainsi conclure ; les adversaires doivent donc les réfuter tous, s’ils veulent montrer que cette conciliation est impossible. — b) Directement, en expliquant le comment, en proposant un moyen de conciliation. Mais comme plusieurs ont été proposés, nous renvoyons à l’examen que nous ferons des systèmes sur la liberté de la foi.

Un autre fait bien constaté tend à montrer aussi la possibilité de cette conciliation. C’est ce qu’on peut appeler la foi confuse, ou, comme disent quelques-uns, « subjectivement implicite » . Voici le fait. Les pieux fidèles, ignorants ou instruits, « vivent de la foi, » Heb., x, 38, et multiplient ces actes de foi : souvent Ce ne sont pas des actes à pari, et nettement formulés, mais à l'état confus, à l'état implicite, contenus dans les actes d’autres vertus qui supposent la foi, par exemple, dans l’acte intérieur d’adoration qui accompagne une génuflexion devant le tabernacle, dans le regard jeté alors vers Jésus-Christ ; comment adorerais-je l’hostie consacrée, si la révélation ne m’avait appris et la présence réelle et la divinité du Christ, et si je n’y avais foi ? L’expérience montre que le fidèle, alors, n’a souvent pas la possibilité pratique de douter du fait de la révélation, cette possibilité que les adversaires de ï'evidentia attestanlis exigent pour la liberté de la foi et vont chercher même dans la sainte Vierge et les anges, afin que l’intelligence reste en suspens jusqu'à ce que la volonté libre la détermine à affirmer plutôt qu'à douter. Pourquoi le fidèle n’a-t-il pas alors la possibilité de douter du fait de la révélation ? Parce que, dans cet acte rapide, il ne considère distinctivement ni la révélation, ni à plus forte raison les motifs de crédibilité qui la prouvent : il prend la présence réelle comme un fait acquis, il se souvient confusément de l’avoir toujours admise pour une excellente raison qu’il ne saurait préciser en ce moment, mais qui est en réalité le motif spécifique île la foi. Ce motif, avec ses preuves qui rendent la foi raisonnable, est suffisamment visé par ce souvenir confus pour spécifier l’acte et en faire un acte de foi divine, et raisonnable en même temps. Voir col. 17<H. Mais comme il n’est visé que sous un concept très rapide et très vague — « l’excellente raison que j’ai eue d’admettre cela et qui me rend certain il ne lionne pas au doute et à la crainte, formido, le temps ni l’occasion de surgir. Car enfin il faut une occasion et au moins une apparence de preuve à ce jugement qui exprime la formula : « Je suis en danger de nie tromper. Voir col. 95. Ou manque tout motif même apparent, l’intelligence est dans l’impossibilité positive e< absolue de juger ainsi du moins, Aie et mine dans le concret : quelle que soit la possibilité abs e qui reste, en supposant d’autres circonstances que celles qui existent. Dans d’autres circonstances,

i dire si je considérais distinctement le motif rpie j’ai d’admetl re ici la présence du Christ, si la révélation de l’eucharistie, l'Écriture qui la contient, l'Église qui la propose, les miracles qui la prouvent, défilaient devant mon esprit, sans parler de la dlfllCUlté ii. ! mm èque du mystère qui pourrai ! me venir à la pensée, la crainte trouverait, ici ou là, l’occasion

élever. Mais dans les circonstances présentes

lion n’existe pas : j’adore une présence ruinée. i|in |i uis accoutumé a reconnaître, comme l’cnfanl lent la prtf enec de mère dans la chambre voisine

1 1 oir. Ainsi le fidèle, sans même que sa volonté libre ait, i intervenir de nouveau pour déterminer un

I en uspens, va d’emblée : i cet assenlinienl Implicite de foi dont bien des actes précédents lui ont raccourci et facilité le chemin, sans oublier la

grâce qui l’aide. Dire qu’il ne fait pas alors un véritable acte de foi, ce serait rendre beaucoup plus rare l’exercice de ces vertus théologales, destinées à la vie quotidienne des âmes ; un théologien n’a pas le droit d’imposer arbitrairement des conditions aussi restrictives de la vie chrétienne.

Le cas de la « foi confuse » que nous venons de voir est-il le même que celui de Yevidenlia alleslantisl Pas précisément : celle-ci suppose l’intelligence parfaitement éclairée sur le motif de la foi et les preuves qui l’appliquent, au moment où elle va croire ; et ce motif intellectuel rend alors toute crainte impossible par la perfection de sa manifestation, tandis que, dans la foi confuse, c’est par Y imperfection même de son apparition qu’il rend le doute impossible. Malgré cette différence, il y a un point commun dans les deux cas : c’est l’impossibilité réelle et pratique de douter dans la circonstance. Or ce point est le seul important dans la question présente de la liberté de la foi, le seul qui amène Banez et Lugo à rejeter Yevidentia attestanlis. Concluons que, si la liberté essentielle de la foi peut se concilier avec la foi confuse, elle peut aussi se concilier avec l'évidence parfaite des préambules. L’assimilation partielle entre les deux cas permet de comparer l’apparition du motif dans la foi confuse à une sorte d'évidence, mais plutôt à celle évidence apparente et provenant pour une bonne part d’un élément négatif, d’une imperfection intellectuelle qui ne saisit pas les difficultés et les raisons de douter, telle que nous la rencontrons surtout chez les simples. Voir Véga, Gormaz, Mayr cités à l’article Croyance, t. iii, col. 2373.

Systèmes sur la liberté de la foi.

Non seulement

il est intéressant de voir les ciïorts faits en tous sens pour résoudre un problème des plus ardus ; mais la question exige d’autant plus une sérieuse étude que dans la plupart des traités et manuels elle se présente d’une manière bien incomplète et obscure. On s’est embrouillé souvent dans les mots ; on a pris comme décision de l'Église ce qui n’en était pas. Nous voudrions faire le dépouillement des textes et des opinions théologiques sur la question, et fournir ainsi des matériaux à une étude plus approfondie et à une solution plus éclairée.

1. Système du despotisme de lu volonté. - Nous le voyons apparaître dès le xiv siècle. « t’n homme qui n’a pas la foi entend dire à un prédicateur : Il y a un seul Dieu en trois personnes ; qui l’aura cru. aura la Vie éternelle. Peut-il aussitôt, sans aucune autre évidence de la raison, donner un libre assentiment à cette proposition ?… Peut il. par le seul coniinandenient de

sa volonté, croire qu’elle est vraie ou qu’elle est

fausse ? " En posant cette question, et en soutenant la négative contre des théologiens qu’il ne nomme pas. un célèbre dominicain, professeur à Oxford.

Robert llolcot († 1349), nous apprend qu’il > avait des lors des défenseurs de « système qui attribue à la volonté une action absolument despotique sur l’intelligence ; on a parfois cité Ockam, in i Sent.,

1. Il.disl. XXV. On voit dans quel sens llolcot nie que i croire soil en noire libre pouvoir. Super IV liliros Sent, queestiones, Lyon, 1510, I. I. q. t, a. 1, C Cans pagination). On l’a souvent acciisé lui-même d’avoir nié la liberté spéciale de la foi. en cet endroit, mais surtout a l’art. 6, ou il résout les difficultés qu’on lui fait. Voir Crédibilité, t m. col. 2280, 2281. H ne

donne certainement pas sm cette liberté tOUS les

rclSSementS désirables. Cl dans ses réponses aux

adversaires il va paifois trop loin en sens oppose.

connue il arrive dans les polémiques ; mais on doit

dire a sa décharge que ce qu’il se propose uniquement d’attaquer, c’est un système évidemment outrancler ; aussi quelques-uni onl Us pris sa défense, comme