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nihil mereri ? De prædesl. sanctorum, c. ii, P. L., t. xliv, col. 962.

3. Les conciles.

a) Le concile de Trente, énumérant les actes qui servent de dispositions aux pécheurs pour obtenir le pardon divin, assigne en premier lieu un acte de foi, qu’il décrit ainsi :

Excitati divina gratia et adjuti, fidem ex auditu (Rom., x, 17) concipientes, libère moventur in Deum, credentes vera esse, quae divinitus revelata et promissa sunt. Sess. VI, c. vi, Denzinger, n. 798.

Excités et aidés par la grâce divine, recevant en eux la foi par l’audition (du témoignage divin qui leur est transmis), ils ont un libre mouvement vers Dieu, et croient à la vérité de ce qu’il a révélé et promis.

b) Le concile du Vatican, sess. III, c. m. — A propos de la surnaturalité de l’acte de foi, nous l’avons cité, disant que cet acte est une œuvre salutaire « par laquelle l’homme rend à Dieu une libre obéissance, en consentant et en coopérant à sa grâce, à laquelle il pourrait résister. » Voir col. 360. La « liberté » est expliquée très nettement par le consentement donné à l’inspiration de croire tandis qu’on pourrait lui résister. C’est le mot de saint Augustin : Suasionibus agit Deus, ut velimus et ut credamus… ; sed consenlire vel dissentire propriæ voluntatis est. De spirilu et liltera, c. xxxiv, P. L., t. xliv, col. 240. Comparez le concile de Trente, sess. VI, c. v, Denzinger, n. 797, et can. 4, n. 814.

c) Le concile du Vatican, can. 5. De fide.

Si quis dixerit assensum fidei chiistianae non esse liberum, sed argumentis humanae rationis necessario produci…, anathema sit. Denzinger, n. 1814.

Si quelqu’un dit que l’assentiment de la foi chrétienne n’est pas libre, mais qu’il est produit nécessairement par les arguments de la raison humaine…, qu’il soit anathème.

Une erreur d’Hermès est ici visée. Nous le savons par le discours du rapporteur du nouveau schéma : Canon quinlus contra scholam Hermesianam, Collcctio lacensis, t. vii, col. 87 ; par le discours du rapporteur des amendements : Quinlus canon vindicat libertalem fidei, et quidem contra Hermesium… Primus error Hermesii eral, quod fides producatur demonslratione scientifica et quidem necessariis, necessario cogenlibus argumentis scientiæ humanæ ; ila ut non liber sit aclus fidei, sed ut sit aclus necessarius. Op. cit., col. 184. Dans la langue théologique, « nécessaire » est souvent opposé à « libre » . Nous avons cité Hermès, s’efforçant d’abord de douter de tout, et sur chaque point de la religion ne se rendant qu'à « une absolue nécessité de la raison. » Voir col. 282, 283. L’assentiment ainsi arraché par les arguments rationnels était nomme par les hermésiens « la foi de connaissance » ou foi « passive » . Ils réservaient la liberté et la grâce pour « la foi du cœur » , c’est-à-oire la foi vive ou jointe à la charité : seconde erreur, condamnée à la fin du canon 5. Voir la note des théologiens romains, Colleclio lacensis, col. 529.

2° Conclusion théologique certaine : il faut admettre dans la foi une liberté spéciede, c’est-à-dire une influence spéciale de la volonté qui n’existe pas dans la science. — L’assentiment de foi est libre, c’est chose définie. Mais quelle est cette liberté? Avant d’en venir aux conceptions systématiques, plus précises, mais aussi plus discutables, il est un point certain sur lequel tous doivent s’accorder, comme étant une conclusion rigoureuse des documents positifs. Pour l'établir, nous examinerons : 1. l’influence de la volonté dans la science même ; 2. les preuves d’une influence plus grande et toute spéciale dans la foi.

1. Influence de la volonté libre dans la science même. — Nous ne considérons pas ici, sous le nom de « science".

les hypothèses scientifiques seulement probables, où il est trop manifeste que la volonté peut jouer un rôle ; nous prenons seulement les démonstrations évidentes, auxquelles les scolastiques réservent le nom de « science » et où il semble que la volonté n’ait rien à faire ; et nous disons que, même dans l'étude de la géométrie, par exemple, il y a une influence légitime de la volonté sur l’intelligence. Elle consiste dans ce fait psychologique qu’on appelle l’attention : la volonté faisant effort pour appliquer l’intelligence à l'étude, et pour l’y retenir. Cette application soutenue est d’autant plus nécessaire que les questions sont plus difliciles, les raisonnements plus longs et plus pénibles. Au milieu du torrent d’images et d’idées qui tend à nous envahir par le canal de nos sens extérieurs, au milieu des jeux fantastiques de l’imagination et de la rêverie, notre pensée s'égarerait vers des occupations plus faciles et plus agréables, si la volonté, attirée par une fin supérieure, ne retenait l’esprit dans la ligne droite de la démonstration commencée, dans les recherches entreprises, quelque fastidieuses qu’elles puissent paraître à certains moments. Voir Certitude, t. ii, col. 2162, 2163. Eu égard à cette influence de la volonté, le travail scientifique, malgré la nécessité qui impose ses conclusions, peut justement être considéré comme libre, et par suite comme louable et méritoire, en supposant d’ailleurs les conditions voulues pour le mérite, par exemple, du côté de l’intention. La certitude des résultats dépend elle-même, quant à son existence, de cette influence de la volonté, puisque la conclusion finale serait nulle, si l’on ne s’appliquait pas à la démonstration et si l’on n’allait pas jusqu’au bout par l’effort de la volonté. Et lors même que l’on a fait autrefois la démonstration entière et qu’on la possède de façon habituelle, si l’on évite librement ce la repasser actuellement dans sa mémoire, on peut arriver à douter des conclusions évidentes que l’on avait. Kleutgen, Théologie der Vorzeit, 2e édit., Munster, 1874, t. iv, n. 226, p. 432. On voit que cette liberté de considérer les preuves ou de ne pas les considérer influe vraiment sur la certitude de fait qu’on a de la science même. On pourrait ajouter une autre influence de la volonté, quand la certitude d’une vérité est déjà acquise : se complaire dans cette vérité acquise comme en un bien de l’esprit, lui donner une place de choix dans nos connaissances, la prendre comme point de départ pour d’autres acquisitions, etc. Voir Certitude, col. 2163, 2164. Mais cet attachement particulier de la volonté n’intervient pas dans toute certitude scientifique ; c’est pour la science quelque chose de contingent et d’accidentel. On peut donc réduire le rôle essentiel de la volonté dans la science à une influence qui applique l’esprit à considérer ou à ne pas considérer actuellement l’objet de science, comme le réduit saint Thomas : Consideralio actualis rei scita' subjacet libero arbitrio ; est enim in potestate hominis considerare vel non considerare ; et ideo consideralio scientiæ potest esse meritoria. Sum. theol., IIa-IIæ, q. il, a. 9, ad 2um.

Cette influence de la volonté est commune à la science et à la foi, puisque la foi suppose elle-même une préparation rationnelle où l’attention est bien nécessaire. Voir col. 171 sq. Mais il faut admettre, de plus, une influence libre qui soit propre à la foi seule. Kleutgen, loc. cit. « Ils sont loin de la vérité, dit le P. Pesch, ces philosophes qui n’admettent d’autre influence de la volonté sur l’intelligence que celle qui commande une attention persévérante de l’esprit. Une telle attention peut appartenir même aux actes de la science : mais l’acte de foi possède une liberté intime qui ne se trouve pas dans l’acte de science, Prxlectiones dogmaticæ, 3e édit., 1910, t. viii, n. 140, p. 62, en note.