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gne qu'à ces hommes simples, pour qu’ils puissent et doivent croire de foi divine et infuse, suffît, comme certitude du fait de la révélation, celle qui, suivant l’ordre de la nature, est accommodée à leur capacité ; qu’il n’est pas nécessaire que cette certitude s’appuie sur un motif tout à fait infaillible, pourvu qu’elle rende impossible en eux un doute prudent ; si quelque erreur invincible venait à en résulter, elle ne leur nuirait pas davantage que les erreurs semblables en d’autres matières de précepte divin… Cette explication paraît absolument préférable à toute autre, comme plus sûre et répondant seule à ce qui se passe en pratique chez les fidèles, et à l’ordre naturel des choses. » De virtutibus, n. 148, 149, p. 265.

Enfin le cardinal Billot ajoute une lumineuse justification de cette doctrine de la certitude relative, en réfutant ceux qui la confondraient avec l’erreur sceptique de la vérité relative : « On appelle cette certitude respective, dit-il, en tenant compte de l'état d’imperfection intellectuelle dans laquelle se trouve quelqu’un. Non pas, certes, que les principes de la certitude varient suivant la diversité des personnes, comme si la vérité était autre pour moi que pour vous. Mais quand il s’agit de prudence dans les jugements, il y a une règle qui s’applique à l’un et non pas à l’autre, suivant les conditions différentes où se trouve chacun. .. Cette règle de prudence, c’est que dans les choses nécessaires où l’on ne peut voir par soi-même, on s’en rapporte à l’autorité de ceux que le cours naturel des choses a désignés comme instructeurs, pourvu que rien ne vienne soustraire la conscience à la direction de ces guides. De là vient que les enfants et les simples croient prudemment de foi humaine ce qu’ils apprennent de leurs parents ou du curé ou d’autres maîtres touchant l’histoire de la révélation, et se forment ainsi, d’après leur portée, un jugement certain sur la crédibilité de la doctrine chrétienne comme étant d’origine divine, et sur l’obligation de la foi. » De virtutibus infusis, thes. xvii, n. 3, Rome, 1901, p. 300, 301. Citons encore, parmi les auteurs récents, domLefebvre, L’acte de foi d’après la doctrine de S. Thomas, 2e édit., Paris, 1904, p. 378-382 ; le P. Gardeil, voir Crédibilité, t. iii, col. 2212, et dans la Revue pratique d’apologétique, 1908, t. vii, p. 187 sq.

En somme, d’après la constatation faite par de nombreux et graves théologiens depuis plusieurs siècles, et que chacun d’ailleurs peut vérifier par l’expérience, si l’on examine dans les âmes simples, non pas la grâce invisible qui les aide à donner leur assentiment et dont nous parlerons plus loin, mais ce qui apparaît à leur esprit en fait de preuve du fait de la révélation, en un mot, ce qu’on appelle les motifs de crédibilité, on reconnaîtra, au moins parfois et même souvent, une certitude qui ne manque pas de fermeté, mais qui manque d’infaillibilité, du moins à ne considérer que ces motifs qui, seuls, tombent sous l’expérience ; ce qui est la question présente, puisque nous parlons de la préparation rationnelle de la foi, qu’il ne faut pas embrouiller avec la préparation invisible et surnaturelle de la foi, comme on le fait trop souvent, le

Un tel motif peut-il être appelé « probable >? Oui, BU point de vue de l’observateur étranger, du critique qui en pesé la valeur, et le classe suivant l’effet « luit sur les esprits cultivés, bons juges de ce qu’on appelle une preuve probable ou certaine. Non, au point de vue des simples eux-mêmes, qui n’examinent ni ne classent ce motif, mais simplement en subirent l’impression suffisante a les convaincre, si donc on

entend par « probable > le motif qui produit « l’opinion.

qui, présentés l’esprit, l’incline à croire tout en lui laissant un doute dont il reconnaît la prudence (voir col. 98), on doit dire que le motif « le la certitude respective ne se présent* pas aux simples comme pro DICT. DE TIIÉOL. CATHOL.

bable, n’agit pas sur eux comme probable. Somme toute, pour ne pas éveiller l’idée qu’un doute prudent subsisterait chez les simples, ou que leur certitude relative manquerait de fermeté, mieux vaut ne pas appeler leurs motifs > probables » , mais « relativement suffisants » , comme le remarque M. Bainvel, dans la Revue pratique d’apologétique, 1908, t. vi, p. 169. Mais peut-on dire avec le même auteur que de tels motifs, comme l’autorité des parents, ne sont pas simplement probables, mais « valables en soi, objectivement valables, réellement valables, » loc. cit., p. 170, 174, 178? cl i ! semble bien qu’on entend : valables pour une vraie certitude. Cela paraît excessif. La raison qu’on en donne — l’ordre providentiel qui rend les enfants dociles et les fait dépendre de l’enseignement des parents, intéressés eux-mêmes à ce que cet enseignement soit vrai et, malgré de fréquentes exceptions, atteignant la vérité en bonne règle et en principe — cette raison fournit bien aux simples une maxime de prudence dont tout le monde doit reconnaître la valeur pratique et, en ce sens, la légitimité : mais elle ne fait pas, au point de vue spéculatif, que le seul témoignage d’Une autorité aussi faillible soit un motif valable en soi pour la vraie et infaillible certitude. Amicus disait mieux au xviie siècle : « Une telle présentation de la révélation n’est pas suffisante en soi, normalement, per se, à obliger les simples à la foi, mais seulement par rencontre, per accidens. La proposition de la révélation est suffisante per se, quand elle implique des motifs capables de produire en toute intelligence l'évidence de crédibilité ; per accidens, quand elle la produit à cause de la disposition d’esprit de celui auquel elle est appliquée, et de son manque de capacité. » Cursus llieologicus, De fide, disp. III, n. 38, Anvers, 1650, t. iv, p. 59. Et les autres théologiens que nous avons cités indiquent assez que la fermeté d’adhésion au fait attesté par ce genre de témoignage dépend de circonstances subjectives, d’un état d’imperfection intellectuelle, et non pas de la valeur objective et réelle de ce témoignage. La pensée de M. Bainvel s’accentue encore dans l’article suivant, où l’on voit qu’il veut donner aux simples plus qu’une certitude relative : « Comment, dit-il, produire cette évidence (de crédibilité ) avec des arguments probables ? » Loc. cit., p. 327. Rappelons qu’aux simples ils n’apparaissent pas comme probables, comme laissant un doute prudent sur la chose qu’ils prouvent. « Avec des probabilités, ajoutc-t-il, on ne fait pas la certitude. » Avec des probabilités connues comme telles (et en dehors de certains cas de convergence), oui, mais avec des probabilités non connues comme telles, et certaines circonstances subjectives étant données, on peut obtenir une certitude non pas absolue et infaillible, mais relative et ferme. Et même, d’une certitude relative sur le fait de la révélation, on peut passer à une certitude absolue sur la prudence qu’il y a de croire, en quoi consiste proprement l'évidence de crédibilité ; et il n’y pas, dans ce passage, d’infraction à la règle logique pejorem scquitur conclusio parlem, par la bonne raison que le jugement spéculatif sur le fait de la révélation, jugement qui est ici ferme mais non infaillible, n’est pas une prémisse d’où se déduise comme une conclusion le jugement pratique de crédibilité ; c’est un simple présupposé, a la suite, duquel, Invoquant un principe de prudence, ou raisonne ainsi : « Dans les choses nécessaires où l’on ne peut voir par soi même, il est prudent de s’en rapporter au témoignage de ceux qui nous sont ilonnés pour guides. <>r c’est un fait que je ne puis voir par moi-même si Dieu a révélé ce mstère, et que ceux qui m’ont été donnés pour guides me témoignent qu’il l’a révélé. Donc, il est prudent pour moi de tenir ce mystère pour révélé de Dieu, et de le croire parce que Dlen l’a dit.. Dans ce syllo VI.