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HIPPOLYTE (SAINT ;


romain. A peu près à la même époque, Léonce de Byzance mentionne parmi les Pères anténicéens Ignace, Irénée, Justin, et les évêques romains Clément et Hippolyte. P. G., t. lxxxvi, col. 1213. Quelques années plus tard, vers 578, Eustrate de Constantinople renvoie au commentaire sur Daniel composé par Hippolyte, martyr et évêque de Rome. Vers la fin du vie siècle, Etienne Gobar, au dire de Photius, Bibliotheca, cod. 232, P. G., t. ciii, col. 1104-1105, cite à trois reprises l’autorité d’Hippolyte. On trouvera dans Harnack et dans Lightfoot, loc. cit., les autres références des auteurs byzantins, assez nombreuses entre le viie et le xiie siècle. Les plus importantes sont celles données par Photius. Le célèbre érudit analyse sommairement, Bibliotheca, cod. 48, P. G., t. ciii, col. 8485, un ouvrage intitulé : EUpt toû Traytoç, ou encore Ilept Tïjç xou zavTo ; aÎTta ;, ou encore Ilspi xfjç tou rcavrà ; oûaîaç, attribué par certains manuscrits au juif Josèphe. Il n’a pas de peine à montrer l’inexactitude de cette attribution, et, cherchant à identifier l’auteur, il hasarde le nom de Caius, un prêtre ( ?) qui résidait à Rome et à qui l’on attribuait également le Labyrinthe. A la fin de ce dernier traité, sur lequel nous reviendrons, l’auteur déclarait avoir également composé un livre sur l’essence de l’univers. L’attribution (fautive d’ailleurs) à Caius du Labyrinthe entraînait donc aussi la composition par ce même auteur du Ilepi to3 -avTôç. Le cod. 121 de la Bibliothèque, ibid., col. 401, donne le signalement d’un ouvrage qui est marqué expressément comme étant d’Hippolyte, un disciple d’Irénée. C’est un traité contre trente-deux hérésies, commençant par les dosithéens et allant jusqu’à Noët et les noétiens. Enfin le cod. 202, ibid., col. 673, mentionne le commentaire d’Hippolyte, évêque et martyr, sur Daniel et le traité sur le Christ et l’Antéchrist dont Photius analyse rapidement le contenu.

On voit par ces diverses références que les Byzantins n’avaient pas complètement perdu de vue le grand docteur romain. Au xive siècle, Nicéphore Calliste, H. E., 1. IV, 31, P. G., t. cxlv, col. 1052, pouvait donner un catalogue de ses œuvres plus complet que ceux d’Eusèbe ou de saint Jérôme. Les Orientaux de diverses langues avaient traduit depuis longtemps les ouvrages d’Hippolyte ; c’est partiellement par des versions syriaques, arabes, arméniennes, coptes, slavonnes, géorgiennes, que nous pouvons aujourd’hui restituer une partie de l’œuvre de cet écrivain. A la fin du xme siècle, le nestorien Ebed-Jesu, au n. 7 de son catalogue, signalait les œuvres principales d’Hippolyte, dans Assémani, Bibliotheca orientalis, t. iii, p. 15 ; il est très vraisemblable que les œuvres signalées étaient à l’époque traduites en syriaque. Un siècle avant lui, Denys Barsalibi, dans un commentaire encore inédit sur l’Apocalypse, citait cinq fragments d’un ouvrage d’Hippolyte contre Caius.

C’est au xvie siècle qu’une découverte inattendue attire soudainement l’attention des critiques ecclésiastiques sur Hippolyte et son œuvre. En 1551, on mit au jour dans le Cimetière d’Hippolyte, sur la voie Tiburtine, une statue représentant le docteur romain, en costume de philosophe, assis sur une cathedra de forme antique. La tête de la statue avait disparu ; mais sur diverses surfaces du siège on pouvait lire des inscriptions qu’on a fini par identifier. Voir dans P. G., t. x, col. 881-885, une reproduction de la statue, d’ailleurs fortement restaurée, telle qu’on la voit au musée du Latran ; pour les inscriptions, le meilleur texte dans Harnack, Altchristliche Litteratur, p. 606-610. La statue est certainement du iiie siècle ; elle a été érigée peu de temps sans doute après la mort d’Hippolyte, peut-être même de son vivant, par les admirateurs du maître. Ils n’ont pas voulu que la postérité ignorât les titres du docteur à leur reconnaissance, et ils ont gravé,

d’abord sur les deux côtés du siège, le cycle pascal imaginé par Hippolyte, ensuite sur la partie incurvée du dossier, à main droite d’un observateur regardant dans la même direction que la statue, une liste, volontairement incomplète, de ses ouvrages. La sagacité des épigraphistes et des critiques s’est exercée sur cette liste, sans jamais la tirer complètement au clair. C’est en combinant les données de l’inscription avec celles que fournissaient Eusèbe, Jérôme et Nicéphore Calliste qu’on a commencé à se rendre un compte plus exact de l’activité d’Hippolyte. En 1716 et 1718 J. A. Fabricius donnait une première édition d’ensemble, que Migne a reproduite, P. G., t. x, col261-962. Mais l’on peut dire que, si le théologien commençait à réapparaître dans ces fragments souvent informes, l’homme restait toujours aussi profondément inconnu ; et les conjectures allaient leur train sur le compte de ce mystérieux personnage.

Seule la publication des Philosophoumena, 1851, permettrait de retracer d’une manière certaine les phases principales de l’activité d’Hippolyte. Ce nom est appliqué, d’une manière fort impropre d’ailleurs, à un traité contre les hérésies dont la principale caractéristique est de rattacher chacune des erreurs contre le dogme chrétien à un système philosophique grec, préalablement bafoué. Le I er livre, exposé des opinions philosophiques, était connu et publié depuis 1710, par J. Gronovius, Thésaurus græcarum antiquitatum, t. x. En 1842, Minoides Mynas découvrit au Mont-Athos et apporta en France une partie considérable (peut-être tout le reste) de l’ouvrage conservé dans un manuscrit du xive siècle. Le tout fut publié, sous les auspices de Villemain, par E. Miller, qui attribua à Origène la paternité de l’œuvre : Origenis Philosophoumena, sive omnium hæresium refutatio, Oxford, 1851. Cette attribution fut vite contestée. Dès le début du traité, l’auteur se donnait comme évêque ; il avait pris une part active aux discussions qui avaient eu lieu à Rome lors de l’apparition du modalisme ; il s’était posé en adversaire du pape Zéphyrin, en rival du pape Calliste. Aucun de ces traits ne pouvait convenir à Origène, dont la vie est si connue. A qui attribuer les Philosophoumena ? Divers noms furent mis en avant : Tertullien, dont la situation à Carthage rappelait assez celle de l’auteur à Rome ; le prêtre ( ?) Caius, auquel Photius attribuait, bien qu’avec des restrictions, la composition d’un Labyrinthe. Or l’auteur des Philosophoumena commence son Xe livre en déclarant qu’il vient de détruire, dans les livres précédents, le labyrinthe des hérésies ; il fait allusion, 1. X, p. 32, à un traité Llspl T7jç tou ^xvtoç oùai’a ? antérieurement composé par lui-même. Et Photius avait lu en plusieurs manuscrits le nom de Caius à la marge d’un traité du même nom. Dôllinger eut le mérite de montrer dès 1853 que ces diverses hypothèses devaient être écartées ; résolument il désignait Hippolyte comme le seul auteur possible des Philosophoumena. Presque aussitôt sa démonstration rallia l’ensemble des critiques. A la suite de la découverte de l’épitaphe damasienne dont il a été question plus haut, J.-B. De Rossi, il est vrai, contesta les principales conclusions de Dôllinger. Hippolyte, partisan du schisme de Donat, martyr dans une persécution qui ne pouvait être antérieure à celle de Valérien, ne pouvait guère s’identifier avec un docteur romain, en pleine floraison à l’époque de Zéphyrin, auteur d’un schisme sous le pontificat de Calliste. Cette argumentation, qui a pour point de départ la vérité des faits rapportés par Damase, a, pendant quelques années, empêché plusieurs critiques de se rallier à la thèse de Dôllinger. Mgr Duchesne, dans son cours autographié sur les Origines chrétiennes, t. ii, p. 332-352, hésite encore à se prononcer pour l’attribution à