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HILDEGARDE (SAINTE)


purgatis et de pœnis [purgatorii] ereplis mox dalus est ; lux autem illa cœleslis, quam homo nec intueri nec discernere potest, gloriosis et virtuosis animabus, quarum virtuies ex vi divinitatis proccsserunt, mox prseparata est. Hildegarde se range donc parmi les partisans du délai de la vision béatifique ou, plutôt, du délai de la plénitude de la vision réservée aux justes ; cf. part. II, c. xxxiv-xxxvi. p. 77-79 ; on sait que l’Église ne s’était pas encore prononcée définitivement là-dessus. Voir t. ii, col. 657-696. El ! e admet que Dieu créa simultanément la matière de toutes les choses célestes et terrestres, et que les six jours de la Genèse sex opéra sunl, quia incceptio et compkiio singuli cujusque operis dies dicitur. xxxviii quæslionum solutiones, q. i, P. L., t. cxcvii, col. 1040. Elle donne au mot rationalitas les sens divers de « Verbe » , « inspiration divine » , « foi chrétienne » , » âme humaine » , « créature raisonnable » , etc. Cf. Pitra, p. 75, note 4 ; p. 249, note 2 ; A. Damoiseau, Documenta quædam sacrée Scripturse cum doctrina sanctæ Hildegardis de rationalitale collata, Gênes, 1894. Elle paraît exclure l’immaculée conception de Marie. XXXVIU quæstionum solutiones, q. xxii, P. L., t. cxcvii, col. 1047 ; cf. pourtant le Scivias, 1. II, vis. iii, col. 457. Elle exige la confession pour la rémission des péchés. Si quelqu’un n’a pas un prêtre à qui se confesser au moment de la mort, tune alii homini quem eodem tempore opportunum habet ea manilestei ; s’il n’a personne à qui les manifester, qu’il les confesse à Dieu coram démentis cum quibus eliam illa perpetravit. Scivias, 1. II, vis. vi, col. 549.

De ces opinions de sainte Hildegarde quelques-unes sont simplement curieuses ou ont été abandonnées. Le plus souvent elle suit le grand courant de la tradition catholique et touche à la théologie en théologien consommé. Citons-en un exemple mémorable. Un maître de l’université de Paris, Odon, plus tard abbé d’Ourscamp et cardinal-évêque de Frascati, consulta la bénédictine de Bingen sur la doctrine de Gilbert de la Porrée et de beaucoup, plurimi, affirmant que « la paternité et la divinité n’est pas Dieu » . Hildegarde répondit par une lettre où elle expose magistralement la doctrine qui allait être sanctionnée par l’Église. Cf.P.L., t. cxcvii, col. 351-353, et, mieux, Pitra, p. 539-541.

Les sciences.

La partie scientifique de l’œuvre

d’Hildegarde est inégale. « A côté de faits très bien observés, d’idées neuves, d’aperçus féconds, on rencontre, dit A. Battandier, Revue des questions historiques, Paris, 1883, t. xxxiii, p. 4*16, des recettes ridicules, des raisonnements presque absurdes et de véritables puérilités, pour ne rien dire de plus. » Cf., par exemple, ce qu’elle raconte du lion, de l’ours, de l’âne. Subtililates diversarum naturarum creaturarum, c. ni, iv, ix, P. L., t. cxcvii, col. 1314-1317, 1320. Des lacunes il faut rendre responsables, plus encore que la sainte, la science de son temps et, sans doute, aussi les altérations des copistes. Les mérites sont notables. Dans sa préface des Subtilitates, F.-A. Reuss, P. L., t. cxcvii, col. 1121-1122, écrit : « Il est certain qu’Hil dparde connaissait beaucoup de choses ignorées par les docteurs du moyen âge, et que les chercheurs de notre siècle, après les avoir retrouvées, ont présentées comme nouvelles. » Mais tout cela n’apparaît que par une longue étude. Hildegarde n’est pas un écrivain facile ; elle a son style, sa terminologie, bien à elle. Deux excès sont à éviter : d’une part, n’envisager que les éléments défectueux de ses œuvres scientifiques, et, d’autre part, donner à des expressions obscures, imprécises, une portée qu’elles n’ont pas et lui attribuer des découvertes qu’elle ne soupçonna point. A. Battandier, Revue des questions historiques, t. xxxiii, p. 415-420, signale quelques-uns des points qui ont été mis en lumière par la science moderne et que la sainte aurait devinés ou aperçus : l’action chimique et magnétique

des différentes substances sur les organes du corps humain ; les lois de l’attraction universelle ; le soleil, et non la terre, au centre du firmament ; la circulation du sang, etc. Peut-être pourrait-on voir, dans un passage du Scivias, 1. III, vis. xii, P. L., t. cxcvii, col. 730, où il est dit que, le monde fini, le soleil, la lune et les étoiles seront immobiles, quia finilo mundo jam in immutabililate sunl, un lointain pressentiment de cette conclusion qu’on a tirée de la loi de la dégradation de l’énergie, à savoir que l’univers tend vers une fin qui n’est pas le néant, mais le repos. Voir t. v, col. 2549-2550. Cf., sur la partie scientifique des œuvres de la sainte, les monographies citées dans notre bibliographie et les ouvrages indiqués par E. Michæl, Geschichle des deutschen Volkes vom dreizehnten Jahrhundert bis zum Ausgang des Mittelalters, Fribourg-en-Brisgau, 1903, t. iii, p. 421, note 1.

I. Œuvres. — La Patrologie latine, t. cxcvii, contient : 145 lettres, col. 145-382 ; le Scivias, col. 383-738 (d’après l’édition défectueuse de Lefèvre d’Étaples, Liber trium spiritualium virorum Hermæ, Uguetini et fratris Roberti, et trium spiritualium virginum Hildegardis, Elisabelhæ et Mechtildis, Paris, 1513) ; le Liber divinorum operum simplicis hominis, col. 741-1038 ; les Triginta oclo quæstionum solutiones, col. 1037-1054 ; l’Explanatio regulæ sancti Benedicli, col. 1053-1066 ; l’Explanatio sgmboli sancti Athanasii, col. 1005-1084 ; la Vita sancti Ruperti, col. 1083-1094 ; la Vila sancti Disibodi, col. 1095-1116 ; la Physica ou Subtilitates diversarum naturarum creaturarum, col. 1125-1352. Les Analecta sacra Spicilegio Solesmensi parata, t. viii, Nova sanctx H ildegardis opéra, Mont-Cassin, 1882, du cardinal Pitra contiennent : le Liber Dite merilorum, p. 1-244 ; les Expositiones quorumdam Evangeliorum, p. 245-327 ; 145 nouvelles lettres, p. 328-440, 518-582 (d’Hildegarde, ou adressées à Hildegarde, ou relatives à Hildegarde ; dans le nombre, le préambule de la Vita sancti Disibodi, p. 352-357 ; l’épilogue de la Vila sancti Ruperti, p. 358-368 ; la lettre De excellentia beati Martini episcopi, p. 369-378) ; les Carmina, p. 441-467 ; des fragments du Liber composite medicinæ de œgritudinum Causis, signis atque curis, p. 468-482 ; des variantes et suppléments aux écrits d’Hildegarde déjà édités, p. 489-495, 503-507, 600-607 ; des fragments de YIgnota lingua, p. 497-502. Pour la langue inconnue et les chants, voir J.-P. Schmelzeis, Dos Leben und Wirkenderheil. Hildegardis nach den Quellen dargestelt, nebst einem Anhang liildegard’scher Lieder mit ihren Melodien, Fribourg-en-Brisgau, 1879 (donne, avec un fac-similé, cinq de ces cantiques traduits en musique ordinaire) ; F. W. E. Roth, Die Lieder und die unbekannle Sprache der heil. Hildegardis, dans les Fontes rerum Nassaicarum, Geschichtsquellen von Nassau, Wiesbaden, 1880, t. l, fasc. 3 ; A. Damoiseau, Novæ edilionis operum omnium sanctx Hildegardis experimentum, Sampierdarena, 1893-1895, a publié une nouvelle édition du Scivias. Les bollandistes, Analecta bollandiana, Bruxelles, 1882, t. i, p. 598-600, ont imprimé un texte plus complet et des variantes pour la lettre De modo visitationis sua’, éditée par Pitra, p. 331-334. P. Kaiser a édité le Liber composite medicinæ de œgrititdinum causis, signis atque curis sous ce titre : Hildegardis causæ et curæ, Leipzig, 1903. Dom H. Herwegen, Revue bénédictine, Maredsous, 1904, t. xxi, p. 308309, a édité un épilogue, probablement écrit après coup, du Liber divinorum operum. Les lettres anciennement connues ont été traduites en allemand par L. Clarus (VolcU), Ratisbonne, 1854 ; le Scivias a été traduit en français (sur le texte de l’édition de 1513) par R. Chamonal, Paris, 1912. Mentionnons enfin le Spéculum fulurorum temporum, extrait des œuvres d’Hildegarde par Gebenon, prieur d’Everbach (1120), publié fragmentairement par Pitra, p. 483-488.

H. Sources. — Nous n’avons pas la biographie de la sainte qu’avait écrite son premier collaborateur, le moine Volmar. Mais nous possédons la biographie commencée par le moine Godefroy et continuée par le moine Thierry, P. L., t. cxcvii, col. 91-130, et celle de Guibert de Gembloux, dans Pitra, p. 407-414 : compléter les lettres de Guibert de Gembloux relatives à cette biographie publiées dans Pitra, p. 405-407, 414-415, par les textes publiés dans les.4na/ecfa bollandiana, Bruxelles, 1882, t. i, p. 600-608. Une Vie en forme de leçons pour l’office public (au nombre de huit) a été publiée par Pitra, p. 434-438. Cf., sur les anciennes Vies d’Hildegarde, les bollandistes, Bibliotheca i hagiographicalatinaantiquæ etmediœœtatis, Bruxelles, 1898-