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HÉRÉSIE. HÉRÉTIQUE


esse hsercticam, non excurrit Ecclesia extra ordinem formaliter revelalorum ; cum enim affirmalio posilivi et negalio contradictorii inler se converlantur, semper proponitur ipsa a Deo revelata veritas, sive sub forma canonis quo exhibetur id quod est a Deo dietum, sive sub forma censurée qua notatur id quod est contradictorie ei opposilum. Billot, De Ecclesia, q. x, th. xvii, § 2. Donc nier la convenance d’une note d’hérésie infligée par l’Église, c’est formellement commettre une hérésie, parce que cette négation s’oppose directement au dogme défini contradictoirement par la censure infligée. — 4. Contradictoirement. Certains auteurs, Salmanticenses, De fuie, disp. IX, dub. iv, n. 43 ; Kilber (Wirceburgences), De fide theol., n. 226 ; Jansen, Prœlectiones theologiæ fundamentalis, § 130, n. 2 ; Franzelin, De divina traditionc, th. xii, scholion iii, p. 158 ; Mazzella, op. cit., n. 458 ; Van Noort, op. cit., n. 259 ; cf. Censures doctrinales, t. ii, col. 2105, disent que toute doctrine s’opposant contrairement ou contradictoirement à la vérité révélée est hérétique. Vacant, Études théologiques sur les constitutions du concile du Vatican, t. ii, n. 619 ; Billot, loc. cit., et De virtutibus infusis, th. xiii, § 2, note, ne parlent que d’opposition de contradiction. D’autres auteurs enfin, Hurter, loc. cit. ; C. Pesch, Prælectiones dogmaticæ, t. i, n. 557, ne parlent que d’opposition, sans spécifier s’il s’agit de contrariété ou de contradiction. On doit préférer la façon de parler de Vacant et de Billot, quoique le langage des autres auteurs puisse facilement s’expliquer. On a rappelé, en effet, que l’Église, par là même qu’elle inflige la note d’hérésie à une doctrine, définit ipso facto une vérité de foi divine et catholique. Or, cela n’est possible qu’à la condition que cette vérité soit strictement la contradictoire de la proposition condamnée, en vertu de ce principe de logique : Opposilio contraria… est Ma quæ répugnât in verilate, non tamen in falsilale, ita ut dum contrariée nunquam possinl simul esse veree, bene tamen simul laisse. Jean de Saint-Thomas, Cursus philosophicus, 1. 1, Summularium, 1. II, c. xvi. Si donc la définition de l’Église porte sur une vérité révélée qu’elle propose comme telle à la croyance des fidèles, les propositions contraires et contradictoires seront nécessairement fausses et hérétiques ; exemple, cette vérité : le Christ est homme-Dieu étant de foi, seront hérétiques non seulement la contradictoire : le Christ n’est pas homme-Dieu, mais encore les contraires : le Christ est un pur homme, le Christ est un ange. Tel est le point de vue de Franzelin, Mazzella, etc. Mais si la définition de l’Église porte sur le caractère hérétique d’une proposition, par exemple, de celle-ci : le Christ est un pur homme, seule la contradictoire sera nécessairement vraie : le Christ n’est pas un pur homme ; les contraires pourront être simultanément fausses : le Christ est un pur esprit, le Christ est à la fois ange et homme, etc. Cf. Mazzella, loc. cit.

Ce premier caractère de l’hérésie-doctrine n’est pas contredit par saint Thomas, lequel, Sum. theol, IP II*, q. xi, a. 2, aflirme que l’hérésie peut exister de deux façons : directement et principalement, lorsqu’une doctrine s’oppose à un article de foi : indirectement et accessoirement, lorsque de la vérité niée découle la corruption d’un article de foi. Dans cette matière accessoire de l’hérésie, il ne s’agit, en effet, ni de conclusions théologiques, ni de faits dogmatiques, mais de vérités qui, n’appartenant pas, en soi, à la foi et aux mœurs, sont néanmoins objet de foi accidentellement, en raison de l’Écriture inspirée dont elles font partie ; les nier reviendrait à nier le dogme de l’inspiration. Saint Thomas s’explique lui-même clairement à ce sujet, Sum. theol., IP IP, q. i, a. 6, ad l um ; q. ii, a. 5 ; In IV Sent., 1. IV, dist. XIII, q. ii, a. 1, ad 6 U "’; In Episl. I ad Cor., c. xi, lect. iv ; cf. Billot, De virtutibus

infusis, th. x, § 3, et Dogme, t. iv, col. 1596-1597. Le caractère formel de l’hérésie, quelle qu’en soit la matière, reste donc toujours le même, c’est l’opposition a une vérité révélée. Cf. Suarez, .De fuie, disp. XIX, sect. n n. 6, 7.

Il ne faut également pas trouver d’opposition entre la notion théologique de l’hérésie, telle qu’elle vient d’être exposée, et la façon de parler de certains inquisiteurs et canonistes qui semblent admettre plusieurs sortes ou plusieurs degrés d’hérésie. Cf. Suarez, loc. cit., n. 6 sq., et Salmanticenses, op. cit., n. 44. Torquemada, Summa de Ecclesia, Venise, 1561, 1. IV, part. II, c. viii, distingue sept sortes de propositions de foi, donc sept sortes d’hérésies. Melchior Cano ramène à huit les règles de la foi dans son De locis, 1. XII, c. viii. On trouve des expressions analogues chez Pegna, dans ses scolies au Direclorium inquisitorum, part. II, comm. 26, 27, q. ii et m ; chez Alberghini, Manuale qualificalorum SS. Inquisilionis, Palerme, 1642, c. xiii ; chez A. de Castro, De jusla hæreticorum punitione, 1. I, c. iv ; chez Simanca, -De calholicis institutionibus, tit. liv. M. Garzend, op. cit., c. vi, a beaucoup insisté sur la façon de parler des inquisiteurs pour établir sa thèse fondamentale de la distinction théorique de l’hérésie théologique et de l’hérésie inquisiloriale. A notre avis, c’est à tort. Une simple remarque de Suarez, à qui cette façon de parler n’avait pas échappé, loc. cit., n. 7, éclaire tout le problème et la portée de la terminologie inquititoriale : Verumtamen, licet heec doclrina recte explicata majori ex parle vera sit et ad explicandam diversam gravilatem in peccato hæresisconferrcpossil, nihilominus, îi m m aliter loquendo, de proposilione hæretica quoad gradum falsilalis ejus, existimo in eo non distingui plures gradus secundum magis et minus, ut ita dicam, sed omnem proposilioncm heereticam esse œque falsam et heerelicam. Bien interprétée, la doctrine des inquisiteurs est en grande partie vraie ; laissant de côté lès exagérations et les erreurs de détail toujours possibles, les distinctions introduites restent fondées. Autre chose, en effet, est, dans l’hérésie, l’opposition à la foi — ce qui en constitue l’élément formel, toujours et partout le même — autre chose est le moyen par lequel on peut découvrir cette opposition, moyen qui varie selon les cas. Les distinctions introduites correspondent aux différents moyens par lesquels nous prenons connaissance de la vérité révélée : les lieux théologiques, redisons-le, ne sont pas les sources du donné révélé, comme paraît le supposer M. Garzend, mais les sources d’argumentation qui aident à le découvrir. Voir Fondamentale (Théologie), t. vi, col. 523. Plus le moyen de connaissance fait atteindre facilement le donné révélé, plus grave est la faute que doit juger l’inquisiteur : cela ne veut pas dire qu’il y ait des degrés ou des espèces différentes d’hérésie.

Deuxième élément : l’hérésie s’oppose à la vérité révélée authentique ment proposée comme telle par l’Église à la croyance des fidèles. — L’hérésie, d’après le concept général exposé plus haut, ne s’attaque pas directement au principe même de la révélation ; elle ne comporte directement qu’une corruption du contenu de la révélation. Le principe de cette corruption réside en ce que l’hérésie se formule à rencontre de la règle de foi instituée par Jésus-Christ, comme le moyen ordinaire qui doit conserver intact et proposer aux fidèles le contenu de la révélation : aliunde eligit sibi normam senliendi de rébus fidei et morum. Billot, De Ecclesia Christi, q. vii, th. xi. Sans doute, l’autorité de l’Église n’entre pas dans le motif essentiel et spécifique de la foi salutaire et théologale, et, par conséquent, même sans la proposition de l’Église, il reste possible de faire un acte de foi divine et salutaire. Voir Foi, t. vi, col. 163166. Mais l’enseignement de l’Église est la règle proposée communément aux hommes et dont ils ne doivent