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HÉNOTIQUE — HENRI


insinuations tendancieuses du collaborateur de la Grande encyclopédie. On y a vu l’attitude toujours identique de tous les papes qui se succédèrent pendant le schisme acacien, depuis saint Simplicius jusqu’à saint Hormisdas et à saint Jean I er : fermeté constamment semblable à elle-même, sur la doctrine et sur la discipline générale, logique rigoureuse et esprit de suite continu, dont l’aboutissant fut le triomphe définitif de l’Église romaine après trente-cinq années de la plus déplorable séparation : triomphe, au surplus, reconnu par l’Orient, en 519, lors de la souscription de la formule d’Hormisdas, où il était dit au début : quia in Sede apos.’olica cilra maculam semper est calholica scrvatareligio. Denzinger-Bannwart Enchiridion, n. 171.

En face de ces heureux résultats de l’attitude des papes, les funestes conséquences de l’Hénotique continuent, aujourd’hui encore, à juger devant l’histoire l’attitude du patriarche Acace, de l’empereur Zenon et de ceux qui furent leurs partisans. L’Hénotique avait, en réalité, partagé l’empire romain en deux communions ennemies. Lorsque, à l’avènement de Justin I er, la paix fut rétablie entre Constantinople et Rome, cette reprise des relations ne put guérir le mal sur tous les points. « Les arrangements pris à Constantinople étaient une chose, l’exécution dans les provinces orientales, une autre chose. Nous ne savons trop comment on s’y prit en Egypte ; ce qui est sûr, c’est que le concile de Chalcédoine n’y fut pas proclamé alors. En Syrie, avec quelques tâtonnements et beaucoup de prudence, on parvint à éliminer les évêques antichalcédoniens ; mais la plupart des moines résistèrent et se laissèrent chasser de leurs couvents plutôt que d’accepter les décrets impériaux… Telles furent les conséquences, directes ou indirectes, de l’Hénotique de Zenon. Hénotique veut dire édit d’union. On voit combien le nom répond à la chose. En deux patriarcats sur quatre, des organisations dissidentes, chancres ecclésiastiques dont on put constater les ravages quand Mahomet parut à l’horizon. Hors de l’empire, les trois Églises nationales de Perse, d’Arménie, d’Ethiopie, séparées de l’unité catholique. » Mgr Duchesne, Autonomies ecclésiastiques, Églises séparées, Paris, 1896, c. ii, § 2 ; réédition de 1905, p. 44, 57.

Rien ne saurait prouver plus péremptoirement combien Rome avait raison de ne point accepter l’Hénotique et les essais de conciliation entre orthodoxes et hérétiques. Les faits n’ont que trop confirmé ce que la vigoureuse logique des papes n’avait cessé de répéter à Acace et à ses partisans, à savoir que ce n’est pas en taisant la vérité que l’on étouffe l’erreur. Il n’est point besoin de chercher ailleurs la justification de la constante sévérité des pontifes romains à l’égard d’Acace et de ses successeurs, même orthodoxes, qui ne consentaient pas à rayer son nom des diptyques comme ayant été un fauteur d’hérésie. Les documents et les lettres des papes fourniraient ample matière au développement de cette justification ; on peut en voir quelques extraits dans Hergenrôther, Histoire de l’Église, trad. P. Bélet, Paris, 1880, t. ii, p. 264-269, sous ce titre : Apologie d’Acace ; Défense du saintsiège.

Sans répéter ici toutes les références semées ou cours des pages qui précèdent, nous nous bornerons ; ’i signaler un petit nombre de travaux qui peuvent être regardés comme de véritables monographies, même lorsque les titres ne semblent pas formellement l’indiquer.

H. de Valois, Observationes in Historiam eccles iasticam Evagrii, 1. I, De Pctro Antiocheno episcopo qui Fullo cognominatus si. et de synodis adversus eum collectis ; I. II, De duabus synodis romanis, in quibus damnatus est Acacius, Pans 1673, en appendice à l’édition d’Évagre, P. G., t lxxxvi, col. 2885-2900 ; Bebelto, De Henotico Zenonis, Strasbourg, 1673, cité par Moroni, Dizionario dierudizione storico-ecvlesiastica, Venise, 1843, au mot Eiwtico, t. xxi,

p. 283 ; G. Wernsdort, De Henolico Zenonis imperaloris, in-4°, Wittemberg, 1695 ; Berger, Henotico. orientulia. Wittemberg, 1723 ; Tillemont, Mémoires pour servir à l’histoire ecclésiastique, Paris, 1712, t. xvi, p. 285-388, 756769 ; Histoire des empereurs, Paris, 1738, t. vi, p. 472-530, 645-647 ; B. M. de Rubeis, De una sententia damnationis in Acacium episcopum Constantinopolitanum post quinquennium silentii lala in synodo romana Feticis papæ III, dissertatio, in-8°, Venise ; P. E. Jablonski, De Henotico Zenonis, in-4°, Francfort-sur-I’Oder, 1739 ; Noël Alexandre, Historia ecclesiastica, sœc. v, a. 14, § 4 ; à. 16, De schismate Acacii ; diss. XVIII, De Zenonis imneraioris Henotico ; XIX, De causa Acacii, Venise, 1771, p. 86, 88-90, 265-273, J. Hergenrôther, Pliolius Patriarch von Constantinopel : Sein Leben, seine Schriften und das Griechisclie Schisma, Ralisbonne, 1867, t. i, p. 110-153, a un excellent chapitre sur Acace et le schisme acacien ; Wilh. Bcrth, Kaiser Ztno (Inaug.-Dissert.), in-8°, Baie, 1894 ; E. Revillont, Le premier schisme de Constantinople, Acace et Pierre Monqe, dans la Revue des questions historiques, 1877, t. xxii, p. 83-134.

L. Sala ville.

1. HENRI, hérésiarque. — I. Vie. II. Doctrine. III. Disciples.

I. Vie.

La vie d’Henri est mal connue. Rien ne prouve qu’il ait été d’origine italienne, comme on l’a affirmé et comme le répète encore G. Bonet-Maury. Les précurseurs de la Réforme et de la liberté de conscience dans les pays latins du xue au xve siècle, Paris, 1904, p. 32. Un passage de saint Bernard, Epist., ccxli, P. L., t. clxxxii, col. 435, a porté à croire qu’il naquit à Lausanne et lui a valu l’appellation, assez fréquente, d’Henri de Lausanne ; en réalité, ce texte indique seulement qu’Henri dut quitter Lausanne dans les mêmes conditions peu flatteuses qui marquèrent ensuite son départ du Mans, de Poitiers, de Bordeaux. Divers auteurs, tels que Hefele, Histoire des conciles, trad. Leclercq, Paris, 1912, t. v, p. 710, et T. de Cauzons, Histoire de V Inquisition en France, Paris, 1909, t. i, p. 244, le nomment Henri de Cluny ; or, d’après Albéric des Trois-Fontaines, Chronic, an. 1148, dans les Monumenla Germanise historien, Scriptores, Hanovre, 1874, t. xxiii, p. 839, et l’Exordium magnum cis/i rciense, dist. II, c. xvii, P. L., t. clxxxv, col. 1025, 427, Henri fut un « moine noir » , ce qui peut convenir à un cluniste, mais aussi à d’autres qu’aux clunistes. Saint Bernard le qualifie de moine apostat, ayant laissé l’habit de son ordre ; de même le biographe de saint Bernard, Geoffroy d’Auxerre, Sancti Bernardi vita, c. vi, n. 16, P. L., t. clxxxv, col. 312. Les Aclus pontificum Cenomannis in urbe degentium, dans Mabillon, Vetera analccta, Paris, 1682, t. iii, p. 312, en font un pseudo-ermite, et Hildebert de Lavardin, Epist., 1. II, epist. xxiv, P. L., t. clxxi, col. 242, le montre simulant par son habit la vie religieuse. Moine noir en rupture de vie religieuse et se vêtant d’un costume religieux d’ermite, en ces mots se résume tout ce que nous savons de ses origines.

Sur sa science les documents contemporains s’expriment diversement. Albéric des Trois-Fontaines le regarde comme un illettré. Hildebert de Lavardin dit qu’il se donna pour avoir des connaissances littéraires qu’il ne possédait point : les Actes des évêques du Mans précisent que c’était un beau parleur, dont on vantait la science, et que l’évêque du Mans, Hildebert de Lavardin, de retour de Rome, ayant su le i restige qu’il exerçait, le convainquit d’ignorance sur des choses élémentaires ; que, le novateur ayant répondu à une question d’Hildebert qu’il était diacre, celui-ci lui proposa de réciter ensemble le bréviaire, et Henri dut avouer qu’il en était incapable. Saint Bernard, de son côté, dit que le moine apostat et gyrovague se mit à mendier, cumque mendicare ccepissel, posuit in sumplu Evangclium (nain litteratus erat) et, vénale distrahens verbum Dei, evangelizabat ut manducaret. A travers ces textes on discerne que, s’il avait été

DiCT. DE T1IÉOL. CATH.

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