Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 6.2.djvu/469

Cette page n’a pas encore été corrigée
2169
2170
HÉNOTIQUE


nastère de Saint-Die. On savait bien qu’Acace, qui se sentait appuyé par Zenon, ne recevrait jamais la lettre du pape. Mais quelques moines de Saint-Die la lui firent tomber entre les mains un dimanche lorsqu’il était à l’autel (Théophane, an. 480, P. G., t. cviii, col. 324 ; Kicéphore, 1. XVI, c. xvii, P. G., t. cxi/vn, col. 152), ou qu’il y entrait pour célébrer les saints mystères (Liberatus, Breviarium, c. xviii), en l’attachant à son pallium. D’autres (Évagre, H. E., 1. III, c. xviii, p. G., t. lxxxvi, col. 2636) disent que cela se fit par un où plusieurs moines acémètes… Victor de Tunes dit qu’Acace reçut la sentence de sa condamnation par les moines acémètes des monastères de Bassien et de Die. Ceux qui étaient autour d’Acace ne pouvaient souffrir la hardiesse de ces moines, en tuèrent plusieurs, en blessèrent d’autres et en mirent quelques-uns en prison, comme Nicéphore nous en assure sur l’autorité de Basile de Cilicie. et Théophane dit à peu près la même chose. De sorte que ce n’est pas sans fondement que Baronius (an. 483, § 34) a mis ces moines au rang des martyrs. » Op. cit., a. 42, p. 361-362.

Les évêques orientaux tremblaient devant la puissance de l’empereur et les intrigues de son patriarche, qui agissait, dit Tillemont, op. cit., a. 45, p. 367, « avec une violence de tyran » . Théophane assure, Chronographia, an. 480, P. G., t. cviii, col. 324, que Zenon, poussé par Acace, forçait les évêques à signer l’Hénotique et à communier avec Pierre Monge. Victor de Tunes, an. 485, écrit que tous les évêques de l’Orient, hors un fort petit nombre, renoncèrent au concile de Chalcédoine par l’Hénotique et prirent part aux fautes des deux Pierre (Monge et le Foulon) et d’Acace, en entrant dans leur communion. Cf. Théodore le Lecteur et la Chronique de Nicéphore.

>< Le schisme acacien commence, qui consacre et organise l’autonomie byzantine. L’Hénotique devient le’mot d’ordre du parti ; sous ce prétexte doctrinal, l’Église byzantine commence de se former ; le personnel épiscopaf est renouvelé, vaincu, comme Vitalis, par les promesses ou les menaces ; la juridiction de Constantinople s’étend, s’affermit, se régularise ; durant les trente années que cette situation dure, Constantinople devient la vraie métropole de l’Orient : elle hérite d’Antioche comme elle a hérité d’Alexandrie. L’empereur et le patriarche maintiennent l’unité de la foi sur les bases établies par l’édit de 482 ; ils tentent de tenir la balance égale entre les monophysites, tout-puissants dans les vieux pays de Syrie et d’Egypte, et les catholiques, très solidement organisés dans la capitale et en Grèce. » A. Dufourcq, Histoire de VÉrjIise du IIIe au IXe siècle, 4e édit., Paris, 1910, p. 276. C’est, d’une manière générale, tout l’Orient séparé de Rome, à la réserve, écrit Tillemont, op. cit., a. 43, p. 363, « d’un petit nombre de personnes, qui demeuraient cachées sous la multitude des autres. »

Acace mourut en automne de l’année 489 (Cuper, Séries patriarcharum Conslanli.opolitarum, n. 234, dans Acla sanctorum, august. t. i ; Le Quien, Oriens christianus, t. i, p. 218), hors de la communion de l’Église romaine. Il laissa son diocèse dans un grand trouble. « Sans doute, écrit Hergenr, >ther, Photius, t. i, p. 126, il n’avait pas été condamné précisément comme hérétique, mais seulement comme fauteur d’hérésie ; toutefois il parut difficile de pouvoir expliquer sa conduite autrement que par une propension couverte au monophysisme, et c’est pourquoi il a mérité aussi le nom d’hérétique, qui lui a été attribué non seulement en Occident, S. Avit de Vienne, Episl., m, ad Gundebaldum ; Ennodius de Pavie, p. 483, mais aussi maintes fois en Orient. Liberatus, loc. cil. ; Nicéphore, Chron. ; Justinien, Confessio fidei secundo, dans Labbe, t. v, p. 587 ; Éphrem, moine, Chron., v. 9744, édit. Mai, p. 230 P. G., t. ex un. Son ambi tion sans limites, pour qui tout moyen, moral ou immoral, observation et violation des canons, semblait être tout à fait indifférent, S. Gélase, Episl., xiii, a servi d’exemple à beaucoup de ses successeurs, et il apparaît comme le véritable fondateur du patriarcat byzantin au point de vue de la juridiction réelle, telle qu’elle a été comprise dans les temps ultérieurs. » Hergenr ther, loc. cit. Cf. Le Quien, Oriens christianus, t. i, c. x, § 6 ; c. xi, § 5, p. 60-64.

Son successeur, Flavita ou Fravitas, désigné aussi parfois sous le nom de Flavien II, sur l’élection duquel, d’après certains auteurs, Nicéphore, Chron., xvi, 18 ; cf. Cuper, loc. cit., n. 235-237, pèse un soupçon de fraude ou d’imposture, chercha à se faire reconnaître par Rome, en même temps qu’il entrait en relations avec Pierre Monge. Le pape Félix III exigea que les noms d’Acace et de Pierre Monge fussent rayés des diptyques. Epist., xiii, ad Zenonenr, xiv, ad Flavilani ; xv, ad Vetranum episcopum, dans Mansi, Concil. t. vii, col. 1097-1100, 1103. Mais Flavita mourut avant d’avoir reçu la lettre du pape, après un peu’plus de trois mois d’épiscopat, au début de l’année 490. Cf. Cuper, loc. cit., n. 240 ; Le Quien, op. cit., t. î, p. 219. Le moine Éphrem, dans sa Chronibue, P. G., t. cxliii, v. 9743-9744, l’appelle : àvtspoç, (3Xâ<j<p7]uo ;, o’.ocpuaiTïi ;, Axaxicp auu.uvouç xat dûaœpcov c ; 6aç.

Euphémius (490-496), qui lui succéda, reconnut, il est vrai, le concile de Chalcédoine, rétablit dans les diptyques le nom du pape, et renonça à la communion de Pierre Monge (t en 490) ; mais il refusa d’effacer des diptyques les noms de ses deux prédécesseurs, qui avaient été des fauteurs de l’hérésie. L’empereur Zenon étant mort en 491, son successeur Anastase (491-518) maintint l’Hénotique ; suspect lui-même d’hérésie, il favorisa les monophysites, quoiqu’il eût promis, le jour de son couronnement, de défendre les décrets de Chalcédoine. Le pape saint Gélase (492-496), qui succéda à saint Félix III, maintint toutes les justes exigences du saint-siège. Les négociations d’Euphémius avec Rome furent vaines ; vaines aussi les tentatives du pape pour gagner l’empereur. Celui-ci fit déposer Euphémius par des évêques de cour, qui durent à cette occasion confirmer l’Hénotique, et le remplaça, en 496, par Macédonius II, qui dut, lui aussi, signer l’Hénotique. Le pape saint Anastase II (496498) envoya à l’empereur des lettres et des légats pour le conjurer de ne point permettre que l’unité de l’Église fût rompue en considération d’un mort légitimement condamné. Tout en maintenant la radiation du nom d’Acace sur les diptyques, il reconnut la validité et la légitimité des baptêmes et des ordinations conférés par lui. Mansi, t. viii, col. 190 ; Denzinger-Bannwart, Enchiridion, n. 169 (saint Félix III, Epist., xiv, c. iv, et saint Gélase, Epist., iii, xii, avaient déjà parlé de la condescendance dont il fallait user envers ceux qui avaient été baptisés ou ordonnés par Acace) ; enfin Anastase II demanda que l’on mît fin à la tyrannie dogmatique, et que l’on rétablît la foi catholique à Alexandrie.

L’empereur, de plus en plus attaché à l’hérésie, écarta les légats et n’accéda à aucun des désirs du pape. Il tenta même audacieusement de mettre la main sur le siège de Rome, en poussant à la tiare l’archidiacre Laurent, « qui promettait de reconnaître l’Hénotique, c’est-à-dire de prendre le mot d’ordre à Byzance. » A. Dufourcq, op. cit., p. 277. Il échpua de ce côté, et ce fut le pape légitime, saint Symmaque, qui triompha, mais le basileus prit sa revanche en Orient par la protection qu’il accorda aux deux chefs fort habiles que le parti monophysite trouva alors : Sévère et Xénaïas ou Philoxène.

Bien que l’opinion fût alors très répandue en Orient, qu’un clerc peut régulièrement succéder à un évêqu 8