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HÉNOTIQUE


triarche orthodoxe Calandion, déposé pour des raisons politiques ; par Martyrius de Jérusalem et par un certain nombre d’autres évêques, dont plusieurs ne signèrent que par faiblesse et par crainte de l’empereur.

En dépit de ces adhésions, « il arriva ce qui était inévitable : la division ne fit qu’augmenter. Les monophysites rigoureux devaient, comme les vrais catholiques, rejeter l’Hénotique ; et quant aux esprits plus souples, dans l’un et l’autre parti, cette formule ne suffisait pas pour les unir dans une croyance commune. » Hergenrôther, Histoire de l’Église, trad. Bélet, Paris, 1880, t. ii, p. 261. Malgré l’union apparente pioclamée à Alexandrie par Pierre Monge, un bon nombre de monophysites intransigeants « ne lui pardonnèrent pas sa modération relative vis-à-vis du concile de Chalcédoine » , ïixeront, Histoire des dogmes, Paris, 1912, t. iii, p. 108, se séparèrent de lui et reçurent le nom d’acéphales (sans chef) : ils reconnaissaient Timothée Élure comme le dernier patriarche légitime d’Alexandrie. Eustathe, Epist. ad Timolheun Scholasiicum, dans Mai, Nova colleclio, t. vu a, p. 277. Voir t. i, col. 308-309. Beaucoup d’évêques et de prêtres catholiques égyptiens se rendirent à Constantinople, espérant y trouver quelque appui. Us avertirent Acace des désordres d’Alexandrie. Liberatus, Breviarium, c. xvin. « Mais ils n’y reçurent de lui que des rebuts et de mauvais traitements, et trouvèrent qu’il soutenait Mongus en toutes choses ; de sorte qu’ils souffrirent à Constantinople une persécution très cruelle. « Tillemont, op. cit., p. 331. Un document nous apprend, en effet, qu’il y eut beaucoup de protériens (c’était le nom donné en Egypte aux catholiques, du nom du patriarche saint Protérius) qui combattirent pour la vérité jusqu’à la mort : -oàâo’i SèxcxI [J-é/pt 9 « vatou fatèp xrjç aktfiiiai oirjycovt’aavTO. Eclogse hisl. ceci., dans Cramer. Anecdota grsecae codd. manuscriptis Bihlioiheese reyiæ Parisiensis, Oxford, 1839, t. il, p. 106.

Ces champions de la vérité devaient nécessairement trouver auprès du pape l’appui et l’encouragement qu’ils n’avaient pas trouvés à Constantinople Acace, au contraire, ne pouvait obtenir de Rome que désapprobation et condamnation ; en conséquence, s’il persistait, provoquer le schisme. C’est ce qui arriva. On peut, avec Dufourcq, Histoire de l’Église du iiie au XIe siècle : le christianisme et l’empire, 4e édit., Paris, 1910, p. 276, résumer ainsi les faits qui aboutirent à ce triste résultat : « Acace prévoit que l’Hénotique ne contentera tout à fait personne. Il escompte la situation d’arbitre que lui feront les partis extrêmes. L’affaire de Jean Talaïa précipite la crise. Depuis Chalcédoine, Rome et Constantinople ont marché de concert ; le nom de Marcien est béni par les papes, il entre dans la légende ; quant à Basiliskos, qu’est-ce autre chose qu’un vil usurpateur ? Acace n’a-t-il pas donné des gages en déposant Pierre le Foulon ? Simplicius pourtant n’est pas sans inquiétudes : il a refusé de condamner Jean Talaïa et d’accepter Pierre Monge. Talaïa arrive à Rome (483) ; il précise les soupçons du pape, et lorsque celui-ci meurt (mars 483), il guide son successeur Félix III. Une ambassade romaine conduite par les évêques Vitalis et Misenus s’achemine à Constantinople : elle doit fortifier l’attachement de l’empereur pour Chalcédoine et régler la question d’Alexandrie. Mais les légats pontificaux, en butte tour à tour aux menaces et aux promesses, trahissent indignement leur maître. Félix, prévenu, les dépose ; il excommunie Acace et Pierre Monge, 28 juillet 484, il somme Zenon de choisir entre Pierre Monge et Rome. »

Du récit de Liberatus, Breviarium, c. xviii, P. L., t. lxviii, col. 1 026, il ressort que Talaïa avait fait appel au pape par lettre, dès avant son arrivée à Rome. Simplicius écrivit aussitôt à Acace. Celui-ci répondit qu’il ignorait Jean Talaïa comme évêque d’Alexandrie,

et qu’il avait reçu dans sa communion Pierre Monge en vertu de l’Hénotique de Zenon, pour obéir aux ordres de l’empereur concernant l’union des Églises. Cf. Tillemont, Mémoires, t. xvi, a. 28, p. 335-336, et notes 20-22, p. 763.

Déjà plusieurs moines orthodoxes, principalement les acémètes de Constantinople, et plusieurs évêques expulsés de leurs sièges s’étaient adressés au pape. Mansi, Concil., t. vii, col. 1137. Parmi ces évêques, dit Tillemont, op. cit., a. 45, p. 368-369, nous ne connaissons « que ceux dont Théophane nous a conservé la mémoire, qui sont Nestor de Tarse, Cyr d’Hiéraple, Jean de Cyr, Romain de Chalcédoine ou peut-être de Chalcide, comme l’a mis M. Valois, car tous les autres sont du patriarcat d’Antioche ; Eusèbe de Samosate, Julien de Mopsueste, Paul de Constantine, Mane d’Himère, André de Théodosiople : Zenon les fit chasser de leurs églises, sous prétexte qu’ils avaient favorisé les tyrans Léonce et Illus, mais en effet à cause de son Hénotique, dit Théophane. » Ces prélats, affirme explicitement Théophane, s’adressèrent au pape Félix, après la mort de Simplicius, et lui déclarèrent que le vrai responsable de tout le mal était Acace. Chrono q raphia, an. 478, Bonn, p. 204 ; P. G., t. cviii, col. 32L

C’est alors que Félix III envoya à Constantinople en qualité de légats les évêques Vital de Tronto dans le Picenum et Misenus de Cume en Campanie : ils avaient pour mission d’obtenir de l’empereur que Pierre Monge fût chassé d’Alexandrie, et d’inviter Acace à se justifier, dans un concile romain, des plaintes portées contre lui par Jean Talaïa. Epistolæ et acta Felicis papas III, dans Mansi, Concil., t. vii, col. 1028-1032, 1108. Le pape leur manda plus tard d’avoir à s’entendre avec Cyrille, archimandrite des acémètes. Arrivés à la cour byzantine, les légats se laissèrent gagner par la ruse et la violence, acceptèrent la communion d’Acace et de Pierre Monge, signèrent un jugement favorable à ce dernier, en un mot, trahirent leur mandat. Voir les détails circonstanciés de cette trahison, clans Tillemont, op. cit., a. 34, p. 348-350. Cf. Théophane, Chronographia, an. 482, P. G., t. cviii, col. 325.

Les lettres confiées par Zenon aux deux légats lors de leur départ renfermaient les éloges les plus excessifs à l’adresse de Pierre Monge, dont la condamnation antérieure était effrontément mise en question. Un fragment des lettres impériales a été conservé par Évagre, H. E., 1. III, c. xx, P. G., t. lxxxvi, col. 2637. Zenon renouvelle ses plaintes conlre « le parjure » Talaïa ; il affirme que personne ne songe à toucher au concile de Chalcédoine, lequel s’accorde entièrement avec celui de Nicée ; que Pierre Monge a solennellement accepté le IVe concile, qu’il y est sincèrement attaché ; que lui, empereur, a traité les affaires ecclésiastiques avec la plus grande modération, et qu’il s’est pleinement conformé aux instructions du patriarche Acace. Hergenrôther, Photius, t. i, p. 123.

Quant au contenu de la lettre d’Acace, nous le connaissons par les lettres subséquentes du pape Félix III, Epist., vi, ix, x, Traclatus super causa Acacii, dans Mansi, Concil., t. vii, col. 1053-1089 ; par le synode romain de 184, ibid., col. 1105-1109 ; par la correspondance du pape saint Gélase, Epist., xiii, ad episcopos Dard. ; Epist., xv, ad episc. Orient., dans Mansi, t. viii, col. 49-63 ; par Liberatus, c. xviii ; par le Breviculus historiée eutijehianorum, dans Mansi, t. vii, col. 1060-1065. Le patriarche byzantin soutient la légitimité de Pierre Monge, accuse de nouveau Talaïa, sans réfuter aucunement les accusations portées contre sa propre personne ; et il prétexte, pour se couvrir, la volonté de l’empereur, que d’autre part il se glorifiait d’avoir complètement en son pouvoir. Félix III, Epist. ad Zenonem, Tractatus super causa