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HÉBREUX

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il a souffert à la place du coupable. Gal., iii, 13 ; Rom., vm, 3 ; II Cor., v, 15, 21. Dans l’Épître aux Hébreux, le sacrifice de Jésus-Christ remplace les sacrifices de l’ancienne loi ; or, s’il a une valeur supérieure, il a obtenu son effet de la même manière : pour gagner les faveurs divines, le juif détruisait un objet qui lui appartenait, Jésus a offert sa vie pour obtenir la rémission des péchés des hommes ; il a expié leurs fautes, il ne s’est pas substitué à eux. Enfin, l’Épître est seule à présenter Jésus-Christ comme le grand-prètre de la nouvelle alliance. Néanmoins, la christologie de l’Épître se rencontre avec celle de saint Paul en beaucoup de points. Le Fils est le rayonnement de la gloire de son Père et l’image de son être, Heb., i, 3 ; il est l’image de Dieu, II Cor., iv, 4 ; Col., i, 15 ; dans la forme de Dieu, Phil., ii, 6. Il est l’héritier de toutes choses parce qu’il a créé les siècles, et il porte toutes choses par la puissance de sa parole. Heb., i, 2, 3. Toutes choses ont été créées en lui. Col., i, 16. Il est JtpcoTOTOxo ;, Heb., I, 6 ; 71pwTdioxoç xrjç 7îocctt]ç xTt’ascoç. Col., i, 15. Le Fils de Dieu a été envoyé par son Père dans les derniers temps, Heb., i, 1, dans la plénitude des temps. Gal., iv, 4. Il a participé à la chair et au sang, afin d’anéantir celui qui a la puissance de la mort, Heb., ii, 1 ; Dieu a condamné le péché dans la chair, en envoyant son Fils êv citvoïwucm aapxd ;. Rom., vin, 3. Jésus s’est offert en sacrifice une seule fois, Heb., vii, 27 ; le Christ ressuscité ne meurt plus. Rom., vi, 9. Jésus a passé par les souffrances de la mort à la gloire. Heb., ii, 9 ; Phil., ii, 8-9. Il s’est assis à la droite de la grandeur dans les hauteurs, Heb., i, 3, et Dieu lui a dit : Assieds-toi à ma droite, i, 13 ; Dieu l’a assis à sa droite dans les cieux. Eph., i, 20. Il est supérieur aux anges. Heb., i, 4-14 ; Eph., i. 21 ; Col., ii, 10. Il a reçu un nom qui le rend supérieur aux anges, Heb., i, 4, qui est au-dessus de tout nom. Phil., ii, 9. Ses humiliations passées sont la mesure de sa gloire. Heb., ii, 8, 9 ; Phil., ii, 8, 9. Toujours vivant, il peut toujours sauver par ses interpellations ceux qui veulent arriver à Dieu, Heb., vii, 25 ; ressuscité, il interpelle pour nous. Rom., viii, 34. Il apparaîtra une seconde fois pour sauver ceux qui l’attendent, Heb., ix, 28 ; nous attendons la gloire de notre Sauveur. Tit., ii, 13. Le fond de la christologie de l’Épître est donc identique à celle de saint Paul au point que, si l’apôtre n’est pas lui-même l’auteur de la lettre, celle-ci est au moins l’œuvre d’un de ses disciples. — c. Rapports du chrétien avec Jésus. — Ils ne sont pas les mêmes pour saint Paul et pour l’auteur de l’Épître. Pour saint Paul, le Christ vit dans le chrétien, Gal., ii, 20, et le chrétien vit dans le Christ, Rom., viii, 1 ; I Cor., i, 30 ; les chrétiens sont les membres du Christ, I Cor., vi, 15 ; Eph., i, 23 ; m, 17, etc. ; le chrétien est transfiguré en l’image du Christ. Rom., viii, 29 ; II Cor., iii, 18. Selon l’Épître aux Hébreux, le Christ est assis à la droite de Dieu ; il officie au ciel comme grand-prêtre, et les chrétiens élèvent vers lui leurs cœurs par la foi. Cependant de làhaut, il nous regarde comme ses frères. Heb., ii, 11, 12 ; Rom., viii, 17. Nous sommes participants du Christ, Heb., iii, 14 ; I Cor., x, 16, 17, et cette participation suppose l’union la plus intime. Nos bonnos œuvres sont les siennes. Heb., xiii 21 ; Phil., i, 6 ; il, 13. — d. Notion de la foi. — Dans l’Épître aux Hébreux, la foi est le support, le fondement des choses que l’on espère, une preuve de celles que l’on ne voit pas, xi, 1. Voir col. 58 sq. Elle est donc un acte de l’intelligence. Cette notion intellectualiste de la foi se retrouve souvent en saint Paul. Gal., iii, 25 ; I Thés., iv, 13 ; Rom., x, 9. Mais, pour lui, la foi est aussi un acte de volonté, par lequel le croyant se donne à Jésus-Christ et vit en Jésus-Christ. Gal., ii, 19, 20. L’idée de l’union mystique du croyant à Jésus-Christ n’est pas exprimée dans l’Épître aux Hébreux. Cependant, la foi y apparaît

aussi comme un don du cœur, x, 22. Mais il y a d’autres ressemblances entre l’Épître et celles de saint Paul au sujet de la foi. C’est elle qui justifie, et le même texte d’Habacuc, ii, 14, est cité par l’apôtre, Rom., i, 17 ; Gal., iii, 11, et dans l’Épître, x, 38. L’auteur de celle-ci engage ses lecteurs à imiter ceux qui par la foi et la persévérance ont recueilli l’héritage promis, vi, 12. C’est par la foi que Noé devint héritier de la justice qui provient de la foi, xi, 7. La foi d’Abraham en une nombreuse postérité, provenant d’Isaac, est louée. Heb., xi, 17-19 ; Gal., iii, 6-9. Il y a donc des ressemblances de doctrine, même dans les points divergents, et dans les cas de divergence il n’y a pas opposition radicale, mais seulement point de vue différent.

On remarque d’autres ressemblances de doctrine encore entre l’Épître et les lettres de l’apôtre. On y trouve les mêmes règles pratiques de conduite et les mêmes recommandations : vivre en paix avec tous, Heb., xii, 14 ; Rom., xii, 8 ; profiter des grâces de Dieu, Heb., xii, 15 ; II Cor., vi, 1 ; pratiquer la patience, Heb., vi, 12 ; x, 36 ; xii, 1 ; Rom., v, 3, 4, etc. ; la prière, Heb., iv, 16 ; Eph., vi, 18, etc. ; l’hospitalité, Heb., xiii, 2 ; Rom., xii, 13, quoique ce ne soit pas pour le même motif. Par suite, il semble bien que, du côté de la doctrine, il n’y a rien qui aille directement contre l’authenticité paulinienne de l’Épître aux Hébreux. Dans chacune de ses lettres authentiques, l’apôtre exposa des doctrines nouvelles, celles qui allaient à son but immédiat ; il a pu agir de même en écrivant aux chrétiens de Jérusalem. Les nombreuses coïncidences de fond entre l’Épître aux Hébreux et les autres lettres de saint Paul seraient plutôt favorables à l’authenticité paulinienne. Les divergences ne me paraissent pas être, à elles seules, un argument décisif à rencontre. Elles prouvent seulement la différence de rédacteur, si on les joint aux divergences de style, qui sont les plus saisissantes. Elles restent cependant des indices clairs que le rédacteur de l’Épître était un disciple de l’apôtre.

2. De la forme.

Les différences de forme portent sur le vocabulaire et sur le style. — a) Vocabulaire. — Thayer a compté dans l’Épître 168 tMiaÇ XEyôjiEva. Le nombre en est égal à celui des Épîtres pastorales, mais il est supérieur à celui des Épîtres de saint Paul. Cf. B. F. Westcott, The Epistel lo the Hebrews, Londres, 1889, p. xliv-xlvi. Comparé à celui de saint Paul, le lexique de l’Épître comprend 292 mots, dont 162 sont des mots composés ; les 130 autres sont des mots d’usage courant, dont l’apôtre se serait servi s’ils avaient fait partie de son vocabulaire. Ce sont, par exemple, des conjonctions, prépositions et adverbes : 88ev, ÊâvTtep xaO’oaov, xaîtoi ; des mots, tels que Upsuç employé 14 fois et àpyiepeûç 17 fois dans l’Épître, et jamais par saint Paul. Les prépositions àsô, xata, [lexâ, les plus fréquentes dans l’Épître, diffèrent de celles qu’emploie surtout l’apôtre. Les verbes ne gouvernent pas le même cas : xoivedveïv gouverne le génitif, Heb., H, 14, le datif, Rom., xii, 13 ; xv, 27, et l’accusatif, Gal., vi, 6 ; xparreïv le génitif, Heb., iv, 14, et l’accusatif, Col., ii, 19. Le verbe eûayysXiXopiat est toujours employé par saint Paul à 3a voix moyenne ; il l’est deux fois à la voix passive dans l’Épître, iv, 2, 6. Saint Paul s’est servi 32 fois de l’optatif, qu’on ne retrouve qu’une fois seulement dans l’Épître. Celle-ci a des expressions particulières : iS’.acpepojTspov ovojjlï xkrpovo[leiv ; slvai eꝟ. 71axépa ; àpyïjv Xaiioâvsiv xaXsïaôai ; 7tpocj-Épyeaôat Opovài yâpitoç ; XE^cupcatAÉvoç enzà Ttov àfiapicoXàlv ; Œôç Çôiv ; ’((ov ô Xôyoç ; des termes ou des formules préférées : xpstTTcov, Il fois (dans saint Paul, seulement I Cor., xii, 31) ; Tvpoaép^saôai tôj QeG5, 5 fois (1 fois dans Paul, I Tim., vi, 3) ; teXeio’co, 9 fois (seulement 1 fois en Paul, Phil., iii, 12). Par contre, l’Épître n’emploie pas des mots caractéristiques, qui sont fréquemment sous