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HABITUDES MAUVAISES


des mêmes actes ; 2° un certain intervalle entre eux, et aussi un certain rapprochement entre ces actes. Des péchés répétés, en effet, n’engendrent pas une habitude mauvaise, ni s’ils sont séparés par des intervalles trop grands, ni s’ils sont trop rapprochés entre eux : par exemple, commis dans le même jour, et ensuite s’ils ne le sont plus de longtemps. Trop rapprochés, ils peuvent même être, jusqu’à un certain point, regardés comme la continuation du même acte. Cf. Noldin, Summa (heologiæ moralis, tr. De sacramentis, 1.’, De psenitentia, c. ni, q. iii, a. 5, n. 407, 3 in-8°, Inspruck, 1908, t. iii, p. 472. On ne pourrait donc fixer mathématiquement combien il faut d’actes pour qu’une habitude mauvaise soit contractée par leur répétition, car cela dépend d’abord du caractère ou du tempérament du pécheur, ensuite de l’intervalle plus ou moins grand qui sépare chaque acte, enfin de la nature même du péché commis. Cf. Lehmkuhl, Theologia moralis, part. II, 1. I, De sacramento psenitentise, sect. iii, c. iv, n. 491, 2 in-8°, Fribourg-en-Brisgau, 1902, t. ii, p. 349 sq. Cet auteur fait cette juste remarque : quia frequenlius occurrit occasio internis peccatis consenliendi quani cxlerna perpelrandi ; imo jrequentius eliam urgerc possii tentalio solitaria peccata commillendi quant peccandi cum complice ; proplerea cum distinctione lequendum est : scilicel, 1° suflicere minorem numerum peccatorum exlernorum constanler post certum inicrvallum perpetratorum, quam peccatorum mère internorum ut censcatur contracta consueludo ; 2° facilius conlrahi consueludincm per uni] arment modum relabendi in eadem peccata, quam codem peccatorum numéro, si frequenlius quidem uno lempore commissa sunt, sed rarius et post pugnam alio tempore. Il faut considérer aussi que certains pécheurs pèchent et contractent l’habitude de pécher par des actes de la volonté parfaitement délibérés, c’est-à-dire par une perversion habituelle de la volonté ; d’autres, au contraire, pèchent et contractent l’habitude de pécher, uniquement par fragilité. Les premiers ne pèchent pas sous l’effet d’une passion véhémente qui s’empare d’eux subitement et surprend leur volonté ; mais ils pèchent froidement, d’une manière calculée et bien voulue. Par suite, ils arrivent très rarement à délester le péché voulu ainsi en pleine et entière volonté, et très librement accepté ou plutôt choisi. Les autres, au contraire, le détestent ordinairement, quand ils ne sont pas dans le feu de la passion, ou sous le charme fascinant de cette délectation qui les séduit et les entraîne comme malgré eux, suivant le mot de saint Anselme, nolenles in eadem vitia dejiciuntur. Opuscul. de similitudinibus, c. cxc ; P. L., t. clix, col. 701. Cette distinction est capitale par rapport à l’absolution et aux conditions qu’elle requiert chez l’habitudinaire. Cf. Marc, Institutiones morales alphonsianæ, part. III, tr. V, De psenitentia, diss. III, c. iii, a. 1, n. 1826, 2 in-8°, Rome, 1900, t. ii, p. 336 sq.

Saint Alphonse pense que cinq péchés commis par des actes externes en un mois, peuvent engendrer une habitude mauvaise, si entre ces actes s’écoule un certain intervalle de temps ; en matière de luxure, un nombre d’actes moins considérable encore lui païaît suffisant pour la constituer : in maleria fornicationum, sodomiarum et besliulilalum minor numerus habilum queit conslilucre : qui, verbi gratia, semel in mense fornicaretur per annum, benc hic habilualus dici potest. Cf. Praxis conjessarii, c. v, n. 70, Opéra moralia, édit. Gardé, 4 in-4°, Rome, 1905-1912. t. IV, p. 565. Beaucoup d’auteurs ont embrassé cette opinion. Cf. Gury-Ballcrini, Compendium Iheologiæ moralis, tr. De sacramentis, part. III, c. ii, § 2, n. 632, t. ii, p. 131 ; Scavini, Theologia moralis universa, tr. X, disp. I, c. iii, a. 2, S 2, ’3 in-8°, Naples, 1859, t. iii, p. 164 ; D’Annibale, Summula Iheologiæ moralis, 1. III, tr. III,

DICT. DE TU KOI. CATIIOL.

De sacramento pœnilenliæ, c. ii, a. 3, n. 337, 3 in-8°, Rome, 1889-1892, t. iii, p. 276. Plusieurs théologiens, et non des moindres, surtout parmi ceux qui sont ni peu plus anciens, sont d’avis, au contraire, qu’il faut de nombreuses chutes pour constituer une habitude mauvaise. Cf. De Lu go, DispuUdiones scholasticæ et morales, De pœnitentm, disp. XIV, n. 166, 7 in-fol., Lyon, 1633-1651 ; Salmanticenses, Cursus theologij ; moralis, tr. XVII, De juramento, c. ii, pr. ix, n. 167, 6 in-fol., Venise, 1728, t. iv, p. 201 ; Laymaim, Theologia moralis, 1. V, De sacramentis, tr. VI, De psenitentia, c. iv, n. 10, 2 in-fol., Venise, 1683, t. ii, p. 277.

On doit noter aussi que tout péché, par la répétition de l’acte peccamineux, n’entraîne pas toujours une habitude mauvaise, c’est-à-dire une plus grande facilité à le commettre. Cela est évident pour les péchés qui sont commis par l’effet de la crainte, de la violence, du respect humain, de la misère, de la nécessité, ou de quelque circonstance particulière de ce genre. Des auteurs sérieux nient même qu’une habitude vicieuse puisse résulter d’un acte peccamineux répété trois ou quatre fois. Cf. Palmieri, Opus theologicum morale in Buscmbaum medullam, tr. X, De sacramentis, sect. v, De sacramento pamilenlise, c. i, dub. ii, n. 218. 5°, 7 in-8°, Prato, 1889-1893, t. v, p. 121.

3° Quoi qu’il en soit, il est évident qu’il y a une très grande différence entre la manière dont les anciers théologiens, considérés comme des maîtres, ont conçu l’habitude mauvaise au point de vue de la multiplicité des actes nécessaires pour la constituer, et la manière dont la conçoivent beaucoup de théologiens récents depuis un siècle ou un siècle et demi. Il en résulte une conséquence très grave, et à laquelle il n’est que juste de faire attention : c’est que plusieurs de ceux-ci se tromperaient étrangement si, pour justifier leur doctrine au sujet de la façon dont il faut traiter les habitudinaires au tribunal de la pénitence, ils alléguaient une foule d’auteurs des plus respectables et dont le nom fait autorité, mais qui, malgré l’identité du terme employé, entendaient parler de tout autre chose. Voir Habitudinaires. Scavini, entre autres, Theologia moralis universa, tr. X, disp. I, c. iii, a. 1, § 2, q. ii, t. iii, p. 164, paraît être tombé dans cette méprise. Cf. Palmieri, Opus theologicum morale, tr. X, De sacramentis, sect. v, De psenitentia, c. i, dub. ii, n. 224, t. v, p. 124.

II. Le pénitent doit-il accuser les habitudes mauvaises en confession ? — 1° Selon le concile de Trente, sess. xiv, c. v, et canon 7, on n’est tenu d’accuser en confession que le nombre et l’espèce des péchés mortels. Or, l’habitude contractée de pécher, quoiqu’elle soit un vice, n’est pas elle-même un péché. D’autre part, un péché n’est pas plus grave, parce qu’il est commis par habitude ; et, y aurait-il même dans l’habitude du péché une circonstance aggravante, le pénitent ne serait pas, pour cela, obligé de la manifester, car, suivant l’opinion la plus probable et la plus commune, les circonstances qui aggravent notablement un péché, tout en le laissant dans la même espèce, ne doivent pas nécessairement être accusée- ;, Cf. S. Alphonse, Theologia moralis, 1. VI, tr. IV, De sacramento pœnilenliæ, c. i, dub. ni, a. 1, n. 467, t. iii, p. 478. Voir t. i, col. 573-575. II faut en excepter le cas où le confesseur poserait lui-même la question, afin de mieux connaître l’état du pénitent, se rendre compte de ses dispositions par rapport à l’absolution à recevoir, ci lui donner les remèdes convenables a sa situation. C’est ce qu’a décrété le pape Innocent XI, en condamnant la proposition suivante qui est la cinquante-huilkme de celles qu’il a proscrites le 2 mars 1679 : Non tenemur confessario inlerroganti fateri peceati alicujus consueludincm. Denzingei-Bannwart, Enchiridion, n. 1208. Cf. Elbel, Theologia

VI. - tu