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1809
1810
GREGOIRE XII — GREGOIRE XIII


une entente entre eux et son ami Grégoire, et de nommer un troisième pape, qui fut Alexandre V (26 juin 1409) ; ce qui produisit, vu la puissance de ceux qui étaient censément déposes, la coexistence de trois chefs dans l’Église ; coexistence qui fut maintenue par l’élection de Jean XXIII à la place d’Alexandre V mort le 3 mai 1410.

Le concile de Constance, ouvert le 1 er novembre 1414, sur les démarches de l’empereur Sigismond et avec le concours plus habile que sincère de Jean XX III, aboutit à de meilleurs résultats, grâce à l’attitude plus désintéressée cette fois et plus loyale de Grégoire XII. En effet, après que Jean XXIII eut été déposé par les Pères et qu’il eut accepté sa sentence, Grégoire XII se présenta comme le pape légitime, fit une nouvelle convocation du concile, et le 4 juillet 1415, par son ami Malatesta, notifia sa renonciation à la papauté. Alors les prélats de Benoît XIII se rallièrent à la majorité et celui-ci, déposé le 26 juillet 1417, dut se réfugier dans sa forteresse de Peniscola avec les trois seuls cardinaux qui lui fussent restés fidèles.

En récompense de sa condescendance, le concile décerna à Grégoire XII le titre de cardinal-archevêque de Porto, la légation à vie de la Marche d’Ancône et le droit de prendre rang immédiatement après le pape. Mais il mourut le 18 octobre 1417.

Martin V fut élu le Il novembre suivant.

Noël Valois, La France et le grand schisme d’Occident, Paris, 1901, t. in ; 1902, t. iv ; Ranke, Die rômische Pàpste, Ci’édit., t. i, p. 273 sq. ; Brosch, Geschichte des Kirchenstaats, ISSU, t. i, p. 247 sq.

A. Clerval.

12. GRÉGOIRE XIII, pape (14 mai 1572-10 avril 1585). Né à Bologne en 1502, Hugo Buoncompagno y étudia le droit à l’université. A 28 ans, il était reçu docteur. Professeur dans sa ville natale, il sacrifia quelque peu aux idées mondaines. Un fils naturel, le futur Giacomo, lui naquit à cette époque. Menant dès lors une vie exemplaire, il reçut la prêtrise. En 1538, Paul III l’appelait à Borne, pour lui confier les fonctions de juge au Capitole et d’abréviateur vice-chancelier de la Campagna. Sous Paul IV, Hugo fut associé comme dataire au neveu du pape, le cardinal Charles Caraffa. Pie IV le fit cardinal-prêtre du titre de Saint-Sixte et l’envoya au concile de Trente. Le 14 mai 1572. quand, sous l’influence du cardinal Granvelle, alors vice-roi de Naples, le cardinal Buoncompagno devenait pape avec tous les suffrages, au troisième jour du conclave, il était préparé à la tâche de réformation de l’Église, moins encore par ses dons naturels d’ailleurs remarquables, que par le milieu sévère, sérieux et grave créé dans la curie romaine par le concile de Trente. Le nouveau pape prit le nom de Grégoire XIII. L’ère de la mortification était ouverte au palais pontifical. Sous Paul IV, on s’en était aperçu. L’exemple de Pie V surtout avait eu un effet extraordinaire. P. Tiepolo, ambassadeur de Venise, le faisait remarquer en 1576 : « Rien n’a fait autant de bien à l’Église que cette succession de plusieurs papes dont la vie a été irréprochable. Tous ceux qui les ont suivis sont devenus meilleurs, ou du moins ont senti la nécessité de le paraître. Les cardinaux et les prélats fréquentent la messe avec zèle et cherchent avec soin à éviter tout scandale dans la tenue de leur maison. La ville entière s’efforce de sortir de la déconsidération où elle était tombée, et elle est devenue plus chrétienne dans ses mœurs et sa manière de vivre. On pourrait en lin ajouter que Rome, en matière de religion, approche de la perfection, dans les limites imposées à la nature humaine. » Seconda relatione dell’ambasciatore di Roma, clar. M. Paolo Tiepolo, ambasciatoreVeneto. K.S. 3 maggio 1576, cité par Ranke, Histoire de la papauté pendant les XVI* et xvii » siècles, trad. Haiber^ Paris, 1838, t. iii,

p. 332-333 ; t. iv, p. 527. Au moment où Grégoire XIII succédait à Pie V, il y avait à la cour un parti décidé à défendre cette austérité. Des jésuites, des théatins, et leurs amis, les Frumento, les Corniglia, l’intrépide prédicateur Francesco Toledo, et le dataire Contarell parvinrent à diriger l’esprit du pape dans les vues de son prédécesseur. Le nouveau pontife, cent ans plus tôt, par tempérament intellectuel et moral, par éducation, aurait régné d’une façon plus mondaine. On s’attendait, en ell’et, à le voir orienter le Saint-Siège dans une direction nouvelle : miliori quodam hominumque captui accommodaliori ratione. Cf. Commentarii de rébus Gregorii XIII (ms. de la bibliothèque Alberoni). Ranke, op. cit., t. iii, p. 234. De fait, dès le début de son pontificat, s’opposant aux partisans de la rigidité religieuse, il avait rappelé aux affaires les ministres de Pie IV. L’influence de la curie le dirigea dans une voie toute religieuse. Cf. Relatione délia corle di Roma a tempo di Gregorio XIII (bibliothèque Corsini, n. 714), 20 février 1574, très instructive à ce sujet. L’auteur dit de la disposition du pape : « il n’était ni scrupuleux ni dissolu, mais les choses mal faites lui déplai saient. »

Grégoire XIII, se souvenant des fortes paroles de son prédécesseur, sut d’abord se maîtriser lui-même, pour gouverner les autres. Rebelle au népotisme, malgré ses désirs de faire avancer son fils Giacomo et de l’élever à la dignité de prince, il se contenta de le nommer gouverneur du château Saint-Ange et gonfalonnier de l’Église. Les troubles des dernières années du pontificat contribuèrent à un regain d’influence pour le fils du pape ; mais son pouvoir ne fut jamais illimité. Les parents de Grégoire XIII n’eurent d’ailleurs pas plus de part à des faveurs irrégulières. Si deux des neveux du pontife furent nommés cardinaux, le troisième fut irrévocablement écarté. Le frère de Buoncompagno lui-même se plaignit de la papauté de Grégoire. Elle l’obligeait à des dépenses supérieures aux secours que lui allouait le pape. Le pontife resta sourd à ses plaintes ; il lui défendit même l’entrée de Rome. Fort contre ces abus, Grégoire XIII sut encore comprendre que la piété est utile à tout. Cherchant à surpasser la piété de Pie V, il dit la messe trois fois par semaine sans jamais l’omettre le dimanche pendant les premières années de son pontificat. Cf. Seconda relazione dcll’ambasciatore di Roma, M. Paolo Tiepolo, Car. 3 maggio 1576, citée par Ranke, op. cit., t. iii, p. 237.

Ses définitions.

1. Contre le baianisme. — Voir

Baius.L ii, col. 51-50. — 2. La profession de foi imposée aux grecs. — Grégoire XIII dut rappeler aux grecs les principales définitions du concile de Trente, sur lesquelles l’orthodoxie byzantine était restée jusque-là irréductible. La constitution Sanctissimus Dominus nosler, en même temps qu’elle demanda l’adhésion au symbole des conciles de Nicée et de Constantinople, fut un rappel des canons du concile de Florence sur l’union des deux Églises. La procession du Saint-Esprit ex PatreFilioque était affirmée. La constitution ajoutait les termes suivants relatifs au concile de Florence : lllamquc verborum illorum « Filioque » explicationem, veriledis deelarandee gratia, et imminente tune necessilale, licite ac rationabiliter symbolo fuisse appositam. Elle rappelait la légitimité du pain azyme et du pain fermenté pour la transsubstantiation du corps du Christ : les prêtres pouvaient s’en autoriser suivant la coutume de chaque Église. Grégoire XIII demandait encore la profession de l’existence du purgatoire, et de la valeur des suffrages pour les défunts. Il rappelait enfin la primauté apostolique du pontificat romain sur toute la catholicité avec une solennité impressionnante. Le dernier paragraphe publiait le concile de Trente chez les grecs : c’était l’adhésion complète à toutes ses définitions.