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GREGOIRE I" LE GRAND


nous est resté, de compte fait, dans les trois recueils, 848 lettres de saint Grégoire. Il nous est aussi parvenu par une autre voie quelques lettres isolées ; mais leur authenticité ne saurait être admise en bloc. Rède le Vénérable seul. Hist. ceci, gentis AngL, I, 27, nous a transmis la réponse de saint Grégoire aux onze questions posées par l’archevêque de Cantorbéry, saint Augustin, Rcgislr., 1. XI, epist. iv ; on la tient aujourd’hui presque généralement pour apocryphe. P. Ewald et L. M. Hartmunn, Grcgorii I papæ Rcgistrum epislolamm, Berlin, 1891-1893, dans Monumenta Germanise historica. Epist., t. i-ii ; P. Ermini, SnlV Episiolario di Grcgorio Magno, note critichc, Rome, 1904. 7° Le Sacramentaire grégorien est le fruit d’une réforme profonde apportée par saint Grégoire dans le missel romain. Nous ne l’avons plus cependant sous la forme que le grand pape lui avait donnée. Tous nos manuscrits ne sont que des copies plus ou moins authentiques de l’exemplaire que le pape Adrien I er, entre 784 et 791, envoya en France, à la prière de Charlemagne. Dans le chant liturgique, saint Grégoire s’est aussi montré réformateur, en publiant un nouvel Anliphonaire. Le nom de chant grégorien rappelle, enfin, sa sollicitude pour recueillir les anciennes mélodies de l’Église et imprimer au chant ecclésiastique un caractère à part de gravité et de suavité. E. Bivell, Dcr Gregorianische Gcsang, Gratz, 1904.

Les huit hymnes qui portent le nom de saint Grégoire peuvent être toutes regardées comme apocryphes. Dreves, Theol. Quarlalschrijt, 1907, p. 548-562 ; 1909, p. 436-445. Sont également suspects ou plutôt apocryphes les Commentaires sur le I" livre des Rois, Y Explication du Cantigue des cantiques, l’Explication des sept ]>saumes de la pénitence, YHarmonic de quelques témoignages de la sainte Écriture.

Saint Patère a extrait des œuvres de saint Grégoire le Grand des explications que ce pape a données de tous les passages de la Bible Liber de expositione Veieris ac Novi Testamenti de diversis libris S. Grcgorii concinnatus, P. L., t. lxxix, col. 683-1136. Alulf a recueilli, de son côté, les explications que saint Grégoire avait faites des passages du Nouveau Testament. Gregoriale super Novum Testamentum, ibid., col. 11371424.

1 1 1. Doctrine. — Écrivain et orateur, saint Grégoire est un théologien très sûr. Point de hardiesses, point de singularités dans sa doctrine. Elle est le reflet exact généralement, quoique pâli, de celle de saint Augustin. Le glorieux pape ramène 1er, idées de son maître au niveau des esprits moyens de son temps, et les accommode au caractère tout pratique que peuple et clergé donnent alors à la religion. Comme saint Augustin, il relève l’autorité et les privilèges de la foi par-dessus la science et la philosophie, qui aussi bien lui sont opposées. Homil. in Evang., xxvii ; In Ezechiel., homil. v. Comme saint Augustin, il prêche la nécessité d’une grâce prévenante, même pour le commencement de la foi et des bones œuvres, Moral., 1. XVI, c. xxx, et enseigne la prédestination absolue et indépendante, Moral, 1. XXVII, c. vu ; 1. XXIX, c. lvii, lxxvii ; 1. XXXIII, c. xxxvin ; peut-être néanmoins n’admet-il la réprobation qu’après la prévision des fautes, I. XXV, c. xxxii ; 1. XXXIII, c. xxxix. II reconnaît à la passion du Sauveur une valeur salutaire et pénale. Jésus-Christ seul pouvait sauver l’humanité coupable et il s’est substitué à elle pour expier ses fautes. Il a pavé les droits du démon, dont la défaite a été complète. Voir J. Rivière, Le dogme de la rédemption, Paris, 1905, p. 272-276, 413-414, 439-141. Avec saint Augustin encore, saint Grégoire tient que les enfants morts sans baptême encourent des peines positives et le feu de l’enfer. Moral.. 1. IX, c. xxxii. Sans entrer dans les spéculations à la suite de l’évêque d’Hippone, il

proclame simplement la présence réelle de Jésus-Christ dans l’eucharistie, Moral., . XXII, c. xxvi ; In Evang., homil., xiv, 1 ; xxii, 7, et il reconnaît à la messe le caractère d’un sacrifice expiatoire et propitiatoire, destiné non seulement à effacer les péchés des vivants, mais à soulager les défunts dans les peines de l’autre vie, bialog. . 1. IV, lv, lviii, clix ; 7/ ! Evang., homil. xxxvii, 8 ; le dogme du purgatoire est mis ici en pleine lumière. La question des anges a spécialement attiré l’attention de saint Grégoire. Selon lui, les anges sont des créatures entièrement spirituelles, sans corps, Moral., 1. II, c. vin ; 1. IV, c. vin ; Dialog., 1. IV, c. xxix ; ils sont inégaux en dignité, In Evang.. homil. xxxiv, 9, 13, et divisés en neuf ordres, Moral., I. XXXII, c. xlviii ; In Evang., homil, xxxiv, 7, ayant chacun ses prérogatives et ses fonctions. Les bons anges sont occupés à la garde de l’Église, des nations et des individus ; chaque peuple et chaque homme a son ange qui lui est préposé. Moral, 1. IV, c. lv. Les démons de leur côté nous font perpétuellement la guerre, Moral, 1. II, c. lxxiv ; mais ils ne peuvent nous nuire sans la permission de Dieu. Moral, 1. II, c. xvi. Saint Grégoire fait aussi ressortir, avec la maternité de la sainte Vierge, l’enfantement miraculeux du Sauveur, / ;) Evang., homil. xxvi.l, et il prêche le culte des reliques, sous la condition qu’elles soient authentiquement constatées. Moral, 1. XVI, c. lxiv ; Epist., 1. XL Le culte des images n’est point condamné absolument. Epist., 1. IX, epist. vi, lu ; 1. XI, epist. xiii. L’eschatologie de saint Grégoire, enfin, est imprégnée des idées de saint Augustin. Les âmes reçoivent aussitôt après la mort leur récompense ou leur châtiment. Moral, 1. IV, c. lvi ; 1. XIII, c. xlviii ; In Evang., homil. xix, 4 ; Dialog., 1. IV, c. xxviii. Elles tombent dans l’enfer éternel, si elles sont mortes sans avoir fait pénitence de leurs peccata capilalia, Moral, 1. XV, c. xxi, ou, si elles n’ont pas de fautes à expier, elles entrent au ciel, pour y jouir d’une béatitude sans fin. Moral., 1. XVIII. c. xc ; l. XXX, c. xvii. Les souffrances du purgatoire attendent les âmes qui n’ont pas suffisamment expié leurs menues fautes par la pénitence et l’aumône. Dialog., 1. IV, c. xxv, xxxix. Le purgatoire n’est donc pour l’homme après la mort qu’un état temporaire ; c’est dans le ciel ou dans l’enfer que la vie d’ici-bas trouve sa sanction définitive. Cette sanction ne sera complète qu’après la résurrection de la chair et le jugement dernier. Saint Grégoire croit, comme on croyait en général autour de lui, que la fin du monde et l’avènement du souverain juge sont proches. In Evang., homil., i, 5 ; iv, 2. A la résurrection de la chair succédera le jugement universel, Moral, 1. XVII, c. liv ; 1. XXXIII, c. xxxvii ; I. XXVI, c. l, li ; la sentence de chacun sera irrévocablement prononcée et son sort fixé à jamais.

L’édition complète des œuvres de saint Grégoire par les bénédictins de Saint-Maur, 4 in-fol., Paris, 1705, se retrouve, non sans améliorations, dans P. L., t. lxxvi. xxix.

L’antiquité nous a laissé trois biographies de saint Grégoire : l’une écrite en Angleterre dans les premières années du VIIIe siècle et restée inédite ; l’autre par Paul Diacre (Paul Warnelried), datant de la seconde moitié du viii c siècle, P. L., t. lxxv, col. 41-59 ; dont une édition critique a été publiée par le P. Grisar, Zeitschrift fur katholisehe Théologie, 1887, t. xi, p. 158-173 ; la troisième par Jean Diacre, composée à Rome en 872 ou 873, P. L., t. lxxv, col. 59-242.

H. Delehaye, Saint Grégoire le Grand dans l’hagiographie grecque, dans Analecla bollandiana, 1904, t. XXIII, p. 419-454 ; Lau, Gregor dcr Grosse, nach seinem Leben und seiner Lehre gesehildert, Leipzig, 1845 ; Ed. Clausier, Saint Grégoire le Grand, pape et docteur de l’Église, Paris, 1886-1891 ; Wotfsgruber, Die vorpapstticlie Lelenspcriode Grcgors des Grosses nach seinen Brie/en dargestellt. Vienne, 1880 ; Gregor der Grosse, Ravensburg, 1890 ; A. Inonx, St.