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successeur de Pierre et vicaire du Christ, comme le Père et le chef de notre foi. Regrettez de n’avoir pas suivi dans le passé cette ligne de conduite et efforcezvous de vous réunir à lui et à l'Église romaine et de lui obéir en ce qui regarde le salut de votre âme. » Archives Vaticanes, Beg. Val., lii, n. 198, fol. 142.

Dans l’impossibilité de tracer, faute de documents remontant à cette l'époque, une histoire complète de l'Église géorgienne pendant les six siècles qui nous occupent, nous nous bornerons à signaler les faits les plus saillants qui sont parvenus jusqu'à nous Le catholicos Nicolas Il n’hésita pas, vers 1245, à se présenter devant le chef mongol Houlagou pour lui demander d’empêcher le pillage des églises et des monastères que ses chefs pratiquaient couramment sous prétexte de lever l’impôt. Cette démarche hardie réussit pleinement. Brosset, Histoire de la Géorgie, t. i, p. 541. En 1280, le même catholicos réunit un synode de tous les évêques pour réprimer les abus du roi Démétrius II (1273-1289) qui dissipait les biens ecclésiastiques. Ce fut en vain, car le prince continua ses rapines. Son exemple ne fut que trop imité par les seigneurs géorgiens. Le clergé était loin d’ailleurs de se montrer à la hauteur de sa tâche et ne manifestait pas une moindre avidité de richesses. Cependant, Démétrius revint à des sentiments plus chrétiens. Comme il avait cherché à se soustraire au joug du redoutable Houlagou, celuici lui ordonna de venir à son camp pour rendre compte de sa conduite. Démétrius s’y rendit, malgré les supplications du clergé et des fidèles, afin d'épargner à son peuple un châtiment terrible et mourut dans les supplices en victime volontaire. Brosset, op. cit., t. i, p. 608. L'Église géorgienne l’honore comme un martyr.

Georges V le Brillant (1318-1346) réunit, lui aussi, le catholicos et les évêques en un synode qui réforma le clergé, rétablit la discipline ecclésiastique, ramena les moines à l’observation de leurs règles et mit fin aux désordres qu’avait causés la domination des infidèles. La période de calme et de tranquillité que ses victoires avaient assurée à son pays ne dura pas longtemps. En 1386, Timour-Leng commençait les redoutables incursions qui devaient se renouveler pendant une vingtaine d’années. La religion fut de nouveau persécutée, les chrétiens martyrisés, les églises et les monastères pillés et dévastés. Alexandre I er (1414-1442) travailla à relever de leurs ruines et l'Église et l'État. A partir du milieu du xve siècle, nous ne savons à peu près rien de l'Église géorgienne jusqu’aux premières années du xvii c siècle, sauf les tentatives de rapprochement avec Rome et le succès de la mission catholique. Nous en reparlerons plus loin. Les luttes des Turcs et des Perses dont la Géorgie fut longtemps la victime accumulèrent les ruines et augmentèrent malheureusement aussi le nombre des apostats. En beaucoup d’endroits, le christianisme fit place à la religion du Prophète. Les rois et les nobles donnèrent d’ailleurs un exemple funeste en acceptant l’islamisme pour conserver leur situation. La religion nouvelle, mêlée aux restes du paganisme ancien et au christianisme, produisit cette » triple foi » dont parlent les missionnaires catholiques et les ambassadeurs russes. Khakhanoff, Histoire de Géorgie, Paris, 1900, p. 61. La corruption des grands fut bientôt égalée par celle du clergé. Les catholicos eux-mêmes n'étaient plus qu’un jouet entre les mains des rois imposés au pays par les Turcs ou les Persans. Vers 1625, les habitants de la principauté de Samtzkhé, dans la Géorgie occidentale, passèrent presque tous à l’islamisme qu’ils pratiquent encore aujourd’hui. Dubois de Monpéreux, Voyage autour du Caucase, Paris, 1839, t. i, p. 299. Un peu avant cette date, un certain nombre de catholiques

de la même province, voyant que les Turcs ne persécutaient pas les Arméniens parce que ceux-ci leur rendaient de grands services en leur servant d’espions, embrassèrent le rite arménien pour se mettre à l’abri des vexations. Tamarati, op. cit., p. 478. Dans la Géorgie orientale, les Persans se conduisaient à peu près de la même façon que les Turcs dans la Géorgie occidentale. Abbas le Grand (1557-1628) surpassa tous les autres chahs par sa tyrannie et sa haine contre les chrétiens. Un jour de Pâques, il massacra plusieurs centaines de moines (5 000, s’il faut en croire les documents géorgiens) dans le monastère de SaintDavid de Garédja. Pour mieux ruiner la Géorgie, il déporta dans les différentes provinces de la Perse un million environ de chrétiens qui, petit à petit, perdirent leur foi pour embrasser l’islamisme (vers 1615). Archives de la Propagande, Pcrsia, Giorgia, Mengrelia e Tarlaria, t. ccix, p. 321 ; Pietro délia Valle, Viaggi, Bologne, 1687, p. 198 sq. Parmi les martyrs les plus célèbres qui moururent victimes de la persécution d' Abbas, il faut citer le roi Louarsab (1623), Brosset, Histoire moderne de la Géorgie, t. il, p. 51, et la reine Kétévan de Kakhétie (1624), Archives de la Propagande, Scritlurc riferite, Giorgia, t. i, p. 14, et le confesseur de cette reine, le moine Moïse. Figueroa D. Garcias de Silvia, L’ambassade en Perse, de 1617 à 1627, Paris, 1667, p. 134, 346.

A partir de cette époque jusqu’au rattachement de la Géorgie à la Russie, nous ne connaissons plus guère l'Église de ce pays que par les relations qu’elle entretint avec les missionnaires latins. Un des catholicos qui ont le plus fait pour assurer l’union avec Rome, Antoine I er (1744-1788), travailla d’abord à réformer le clergé et le peuple. Dans un synode qui réunit tous les évêques de Karthlie et de Kakhétie, il fit prendre les plus sages décisions pour améliorer les mœurs publiques, particulièrement en ce qui concerne les empêchements de mariage. Le zèle avec lequel il protégeait la mission catholique fut la cause de sa perte. A l’instigation du patriarche grec de Constantinople, Cyrille V, qui voyait d’un très mauvais œil toute tentative de rapprochement avec le monde catholique, le roi Téïmouraz le destitua et le chassa du pays, en 1755. Archives de la Propagande, Monte Caucaso, t. iv, p. 72. On lui donna pour successeur un certain Joseph (1755-1763), sous le pontificat duquel le roi Héraclius II réunit une assemblée d'évêques pour rétablir la discipline parmi le clergé. Le roi présenta onze articles de lois à l’assemblée qui les approuva à l’unanimité. La charte se trouve au Musée ecclésiastique de Tiflis, sous le n. 856. Antoine I er, réfugié en Russie, sembla oublier pendant son exil la faveur qu’il avait accordée au catholicisme, car il fit constamment profession de foi orthodoxe. Cependant il écrivit à la même époque un ouvrage sur le Miserere, dans lequel il se prononce ouvertement pour la primauté du pape. Il revint en Géorgie à la mort du roi Téïmouraz, en 1781, et occupa de nouveau le siège patriarcal jusqu'à sa mort, en 1788. Il fut le premier prélat géorgien à se rapprocher de l'Église russe et à en introduire les usages dans sa patrie. Ce zèle russophile lui valut même l’honneur de prendre place parmi les membres du saint-synode. Malgré cette conduite équivoque, il paraît cependant être toujours resté attaché à la foi catholique et les missionnaires latins nous affirment qu’il la confessa encore sur son lit de mort. Tamarati, op. cit., p. 384. Très érudit lui-même, Antoine I" donna une grande impulsion aux études ecclésiastiques en rétablissant les séminaires et les écoles. Son successeur, Antoine II (1788-1811), fut le dernier catholicos que la Géorgie ait connu.

XIII. La Géorgie occidentale. — De bonne heure, la Géorgie occidentale, appelée aussi Colchide,