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renoncer au schisme et à l’hérésie. Brosset, op. cit., t. i, p. 375. Cette tentative généreuse échoua complètement, ainsi que toutes celles que les Géorgiens essayèrent dans la suite.

La reine Thamar (1184-1212) s’occupa, elle aussi, de réformes ecclésiastiques. Elle réunit un concile, principalement dans le but de mettre fin aux abus introduits par le catholicos Michel. Nous ne connaissons malheureusement pas les décisions que prit cette assemblée, car ses actes ne nous sont point parvenus. Brosset, op. cit., t. i, p. 405. Beaucoup d'églises actuelles remontent au règne de la reine Thamar qui se plut à orner les sanctuaires. Parmi les chefs de l'Église de cette époque, deux se rendirent célèbres par leurs ouvrages, Arsène II (946-976) et Nicolas, démissionnaire en 1170.

IX. La vie religieuse en Géorgie.

Il est impossible de préciser la date à laquelle la vie religieuse fit sa première apparition en Géorgie. Cependant, nous ne croyons pas que le monachisme ait attendu plus tard que le v c siècle pour faire des conquêtes parmi les Ibères. En effet, il jouissait à cette époque d’une popularité très grande dans tout l’Orient. De plus, les apôtres et les organisateurs de l'Église en Géorgie n’avaient sans doute pas manqué d’utiliser un moyen aussi propre à assurer la diffusion de la vraie foi. Enfin, dès ce moment on signale des moines géorgiens en Palestine. En tout cas, la vie religieuse était en pleine floraison au vie siècle. Les treize missionnaires venus de Syrie, vers le milieu de ce siècle, lui imprimèrent un élan merveilleux. Le pays se couvrit de monastères que la piété des princes et des simples fidèles se plut à doter richement. Les plus célèbres furent ceux qu'établirent trois des missionnaires syriens, Jean, David et Chio. Saint Jean, chef de la mission, s'établit sur la montagne de Zaden, ce qui lui valut le nom de Zédadznéli. Son monastère fut détruit au xiie siècle par les Turcs Seldjoukides. .lordania, Chroniques, t. i, p. 73. Plus heureux que celui-là, ceux que fondèrent saint David Garedjéli à Garedja et saint Chio Mgviméli à Mgvimé, survécurent malgré les vicissitudes par lesquelles ils durent passer, à la suite des différentes invasions. Celui de SaintChio, très peuplé, fut de tous les couvents géorgiens le plus important, principalement à cause de l’influence qu’il exerça sur le développement de la science ecclésiastique et de la vie de piété. Celui de Guélati, près de Routais, fondé au xe siècle, peut seul être considéré comme son rival sur ce point. La vie religieuse devint tellement intense en Géorgie que, non contente de couvrir le pays de couvents, elle déborda encore sur l’empire byzantin, ainsi que nous le verrons un peu plus loin. En 1765, le prince Vakhoucht, fils de Vakhtang VI, comptait dans sa Description de la Géorgie, 79 monastères, ruinés pour la plupart : 16 dans le Samtzkhé, 48 dans la Karthlie, Il dans la Kakhétie et 4 dans l’Imérétie. Cf. Vaklioucht, Description géographique de la Géorgie, trad. de Brosset, Saint-Pétersbourg, 1842. Pour être complet, il faudrait ajouter à cette liste les couvents des autres parties du pays, comme la Mingrélie et le Lazique. Ces chiffres sont une preuve évidente de l’intensité que la vie chrétienne avait reçue au cours des siècles et de la ténacité avec laquelle les fidèles relevaient de leurs ruines sans cesse renouvelées les sanctuaires du monachisme. Nous ne possédons malheureusement que fort peu de chose sur ces nombreux monastères. Les bibliothèques de Tiflis et des autres villes de la Géorgie montrent bien avec orgueil un grand nombre de manuscrits qui en proviennent, mais ils ne contiennent que de très minimes détails sur la vie religieuse du pays.

X. Les Géorgiens dans l’empire byzantin. — Les (zéorgiens suivirent le mouvement qui entraînait

les populations orientales, principalement celles de la Cappadoce, vers les Lieux saints. Dès la fin du ive siècle, un des leurs, Évagre, faisait déjà retentir l’Orient de ses démêlés théologiques avec saint Jérôme. Un siècle plus tard, Pierre l’Ibère, évêque de Maïouma, près de Gaza, qu’on accuse à tort ou à raison d’avoir favorisé l’hérésie eutychienne, faisait de nouveau connaître en Palestine la race géorgienne. Baabe, Pctrus der lberer, Leipzig, 1895. Les pèlerinages amenèrent tout naturellement la fondation des monastères. Procope, De asdiftciis, 1. V, c. ix, apprend que Justinien répara le couvent des Ibères dans la Ville sainte et celui des Lazes dans le désert de Jérusalem. Celui de la ville aurait été fonde sous le roi Vakhtang (446-499). Quant à celui des Lazes, on a voulu l’identifier avec le célèbre monastère de Sainte-Croix. S’il faut en croire les historiens géorgiens, c’est Pierre l’Ibère, fils du roi Bacour, qui fonda le couvent de Saint-Sabas. En tout cas, le nom de ce monastère revient à chaque instant sous la plume des chroniqueurs nationaux ; les princes lui envoient de riches présents, ce qui indique au moins qu’il y avait là des moines géorgiens. Il semble même qu’ils y possédaient une église particulière, comme les Arméniens. La conquête arabe arrêta forcément le mouvement qui portait les Géorgiens vers les Lieux saints. Le Commemorcdorium de casis Dei cl monaslcriis, dans Itincra Hierosolymilana, Genève, 1880, t. i, p. 302, signale cependant, vers 808, plusieurs de leurs moines au mont des Oliviers et à Gethsémani. Vers 1050, le roi Bagrat, curopalate, aurait reçu, grâce à l’empereur byzantin, la moitié du Calvaire et y aurait établi un évêque de sa nation. Palestine exploration fund, Quarterly statement, 1911, p. 185. Un peu avant la fin du même siècle, les Géorgiens bâtissent le couvent de Saint-Jacques le Majeur qui est depuis passé aux Arméniens. Quant au monastère de SainteCroix, il fut restauré (peut-être simplement fondé) vers 1040 par le moine Prokhoré, ruiné par les Turcs Seldjoukides trente ans plus tard et rebâti aussitôt après l’arrivée des croisés. Une légende, qui s’est très probablement formée à cette époque, y place le lieu où fut coupé l’arbre dont on fit la croix du Sauveur. Sainte-Croix fut un foyer de science ecclésiastique dont l’influence se faisait sentir fortement en Géorgie où ce monastère possédait de nombreuses propriétés. La bibliothèque patriarcale grecque de Jérusalem possède 147 manuscrits géorgiens qui en viennent. L'église est encore couverte de peintures et d’inscriptions laissées par les moines géorgiens. Ceux-ci conservèrent le couvent jusqu’en 1685, époque à laquelle ils durent le céder aux grecs. Leur conduite relâchée et les dépenses excessives qu’ils firent les obligèrent, en effet, à vendre successivement le Calvaire où ils avaient été les maîtres pendant trois siècles, le couvent de Saint-Jacques et huit ou dix autres qu’ils possédaient dans la ville de Jérusalem. B. Janin, Les Géorgiens à Jérusalem, dans les Échos d’Orient, 1913, p. 32, 211. On trouve encore des Géorgiens dans plusieurs autres monastères de Palestine, mais nous avons trop peu de renseignements sur eux pour en parler avec plus de détails. Nous avons vu que celui de SaintSabas eut toujours à leurs yeux une importance considérable. Poussant plus loin encore leur désir de la solitude, les Géorgiens allèrent jusqu’au mont Sinaï où leur présence se révèle encore de nos jours par un bon nombre de manuscrits. En Syrie, ils peuplaient plusieurs monastères, dans les environs d’Antioche. Ils s’y montrèrent même assez frondeurs vis-à-vis des patriarches pour que le pape Grégoire IX leur écrivît en même temps qu’aux Arméniens et aux grecs pour les faire rentrer dans l’obéissance, en 1239. Archives Vaticanes, Rcg. 19, fol. 40, n. 199. On trouve encore des moines géorgiens en Chypre, au mont Olympe de