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ÉPHÈSE (CONCILE D’;


rôle au concile à ce légat de la foi, il lui adjoignit trois autres légats proprement dits, qui veilleraient à ne compromettre en rien la dignité du siège de Pierre. Sur la légation de Cyrille au concile d’Éphèse, voir la note de Tillemont, Mémoires, t. xiv, p. 76, 5-766.

C’est donc à tort que Nestorius a reproché à saint Cyrille d’avoir été à la fois son accusateur et son juge, d’avoir pris de lui-même la présidence du concile et d’avoir fait l’évêque de Rome, tout en n’étant que l’évêque d’Alexandrie. Le livre d’Héraclide, p. 106, 117.

VI. Légitimité de la condamnation de Nestorius. — Il s’est trouvé, au cours des siècles, des historiens et des théologiens qui ont avancé que la controverse nestorienne n’avait été qu’une pure logomachie. Xestorius, ont-ils dit, était tout aussi orthodoxe, sinon plus que saint Cyrille. Les quelques homélies, lettres et fragments que l’on possédait jusqu’ici de Nestorius suffisaient amplement à établir que ni Cyrille ni le concile d’Éphèse n’avaient bataillé contre une chimère. La récente publication du Livre d’Héraclide, en nous livrant le fond de la doctrine christologique de l’hérésiarque, ne permet plus le doute sur son opposition radicale au dogme catholique, et l’on se demande comment Béthune-Baker, qui a utilisé l’ouvrage en question, a pu arriver à une conclusion contraire dans son livre : iVestoriiis and his Teaching. a fresh examination of Ihe’vidence ; ivilli spécial référence to the neu-ly recovered Apologij of Nestorius, Cambridge, 1908.

Ce qui a peut-être fait illusion à Béthune-Baker, comme à tous ceux qui, avant lui, ont soutenu la thèse de la non-hétérodoxie de Nestorius, c’est que celui-ci s’exprime parfois comme un orthodoxe ; il affirme, par exemple, énergiquement la divinité du Christ ; il défend de dire deux Fils et deux Seigneurs ; il ne répugne pas absolument à admettre le terme Seotô/.o ;, pourvu qu’on ne lui attribue pas un sens arien ou apollinariste et qu’on ne l’entende pas dans Je sens de mère de la nature ou personne divine. Mais toutes ces affirmations se greffent sur d’autres affirmations hérétiques. Le Christ nestorien, dans son unité de prosôpon, est un composé de deux personnalités distinctes et complètes, celle du’Verbe et celle de l’homme, fondues dans une unité juridique et purement morale. Le livre d’Héraclide. p. 83-8."). Eu voulant écrire son apologie, Nestorius a écrit sa condamnation et a justifié du même coup la sentence portée contre lui à Éphèsc. Cf. L. Fendt, Die Christolegie des Xestorius, Kempten et.Munich, 1010.

A supposer, ce qu’il est bien difficile d’admettre iprès la lecture du Livre d’Héraclide, que Nestorius ait 11, subjectivement, une pensée orthodoxe, il faudrait néanmoins reconnaître que l’expression de cette pensée rend le son de l’hérésie ; et cela suffirait pour légitimer sa condamnation comme hérétique, du moment qu’il a refusé obstinément d’accepter la terminologie que l’Église adoptait et voulait lui imposer. L’infaillibilité de l’Église, en clTet, s’exerce sur le sens <les mots pris en eux-mêmes et dans leur contexte, et non sur la signification subjective que peuvent arbitrairement leur prêter ceux qui les emploient, l’ar ailleurs, c’est le droit du magistère ecclésiastique de choisir et d’imposer à tous les croyants les lormes et les formules qui lui paraissent les plus .iptes, vu les circonstances, à rendre l’idée dogmatique et à la préserver de toute altération. Sera hérétique au for externe, et justement considéré comme tel, celui qui refusera d’obéir à l’Église et continuera d’employer une terminologie qu’elle condamne : Mnnifestum est, dit fort bien le P. Billot, quod ad inidllihilrm coruin quir fidei sunt proposilioncm, mut

DICT. DE THÉOL. CATIIOL.

loties exigitur dcterminalio infallibilis circa fada exlra ambitum revclationis exislentia. Puta, … determinatio circa hanc vel illam loquendi formam an sit idonea ad exprimendum dogma ; nam quid ad me si id quod infedlibililcr sentis pôles fallibiliter exprimere ? Cf. J. I^cbon. Le monophijsisme sévérien, Louvain, 1909, p. 522525.

On remarquera que, dans la sentence portée contre Nestorius, les Pères d’Éphèse ont pris pour base de leur jugement les erreurs qu’ils ont découvertes dans ses écrits, ses lettres et ses discours, stopâuavtE ; oÙtôv

èx T£ -(iiv £7tl<Tro).â)V, xal è/t T(5v rj-jyypCÂ[l.[Li’Cl3} a’JTOC.

xxi iv. Tûv àoTi’d) ; Ttaf-’aOroC p/jÔÉVTJov… SuCTTeêrij ; çpovo-jvta. Mansi, t. iv, col. 1211. Leur intention n’a pas été de se prononcer directement sur les sentiments intimes de l’hérésiarque. Ils l’ont jugé simplement d’après ses écrits.

Ce ne furent pas seulement le pape Célestin, saint Cyrille et les Pères d’Éphèse qui trouvèrent que Nestorius enseignait l’hérésie. On peut dire que les Orientaux, qui firent au concile une opjiosition si obstinée, en étaient aussi persuadés. Ce qui le prouve, c’est non seulement le symbole d’union qu’ils signèrent quelque temps après, mais encore le silence significatif qu’ils gardent sur la personne et la doctrine de Nestorius dans les actes de leur conciliabule. On y voit à chaque page des accusations d’arianisme et d’apollinarisme à l’adresse de saint Cyrille, mais aucune justification de la doctrine de Nestorius. Jean d’Antioche et les siens sentaient fort bien que la position doctrinale de Nestorius n’était pas défendable. Jean ne l’avait-il pas lui-même invité, avant le concile, à se soumettre et à accepter l’expression Oso-ôxo ??

Il serait plus qu’étonnant qu’amis et ennemis se soient trompés en cette atlaire et que, resté incompris de tous ses contemi)()rains, l’infortuné Nestorius n’ait été saisi que par quelques rares esprits, plusieurs siècles après sa mort.

I. Sources.

Nous avons indiqué les principales en parlant des actes. Signalons encore le recueil de r.fricain Marins Mercalor, qui lit un voyage à ConstantiuDple. au début de la controverse nestorienne, et traduisit en latin plusieurs documents empruntés aux actes du concile d’Éphèse, A/nn’i Mercaloris opéra, cdit. I3aluzc. Paris, 108 1 ; édit. Garnier, Paris, l(17 ; {, reproduite dans Migne, P. /-.. t. XLViir, col. 6 !)<)-1211 ; lîironius, Aniidles, au. 430, n. 62 sq. ; an. 431, n. 7-13r. ; l’agi, Crilica. an. 430, n. lO : an. 431, n. 6-3(i ; Labhe, Concilia, t. iii, col. 1-1257 ; t. ii, col. lG2.ï-l(>28 ; Hardouin, Collcclin cnncil. t.i, col. 1271 sq. ; Mansi.f.’onn’/., t. iv, col..507 sq. ; t. v, col. 1-10C>2 ; Ch. I.enormant. Études sur les Iratjmenls coptes des conciles de.Virée et d Ëplièse, in-4, Paris, 1<S.">2 ; V. Loofs, estoriana. Die Fraçjmenle des Xestorius fiesammell, unlersucht and ticrausgegében. Halle, lOO.’i ; Xestorius, I.c livre d’Héraclide de Damas, traduit en français par F. Nau, avec le concours de Uedjan et de Brièrc, suivi du texte grec des trois homélies de Xestorius sur les tentations de Xolre-Seigneur et de trois appendices, in-8°, Paris, 1910 ; le texte syriaque a été édite par P. Bedjan, Paris, 1910 ; Socralc, 1. VH, c. xxixxxxiv, P. G., t. Lxvii, col. 801-817 ; Évagrc, H. E., I. I, c. ii-vii, P. G., t. Lxxxvr. col. 212.3-2444 ; Théodoret, Jlterelicarum fahnl. cowpendium, I. IV, c. xil, P. G., t. T.xxxiii, col. 43l-43() ; Liberatus, nreviarium causie nestorianorum et eulijciuanorum, c. il-ix, /’. I.., t. i.xvill. col. 971-1018.

II. TiiAVM.’X. —.1. Bruguier, Dispiilatio de supposiloin qun plurima haclenus inaudiln de S’estorio lanquam orihndoxo et de Ci/rillo Alexandrino aliisquc episcnpis in sqnodum coaclis lanquam hivrelicis demonslrantur, in-8°, Francfort, H>1.j ; M. T. Albinus, Ilistoria nestorianismi, in-4", Stralsund. 1<) : >."> ; I, ..Mlatius, V’i/i(/i<i « ’sqnoili Kphesinir el sanrii (’.qrilli de prorexsione Spiriliis ex l’aire cl Filio, Home, 1601 ; (i. C.alixtus, Disscrialio de liirresi ncslorianæiusquenpposiloroiiciliii /î ;)/ic.sin(), in-4°, Uelmsladt, 1640 ; Tilleniont, A/éoioi/rs pour servir à l’hisloirc eeclfsiaslique des six premiers siècles, Paris, 1709, 1. xiv, p. 267268, 747-778 ; M. lien/.el et I’. I.agerbohni, Vindiciæ con V. -