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EUCHARISTIE AU XIP SIÈCLE EN OCCIDExNT


comme chez d’autres auteurs médiévaux, par la vogue des règles exégétiques de Tyconius, diverses fois résumées, mises en vers, etc., au moyen âge. Voir 7/a régula, de corpore hiperpiio Domini, dans Burkitt, The book of rules of Tyconius, dans Texts and sludies for biblical and patrislical literaturc, Cambridge, 1894, c. III, 1, p. 8. Innocent III l’invoque expressément. Voir plus loin. Enfin, signalons aussi la place faite par suite à l’incarnation, c. iii, col. 12501251, tout comme chez Odon de Cambrai, Nicolas d’Amiens et quelque peu aussi Guillaume de Saint-Thierry ; chez Rupert de Deutz, comme chez tous les mystiques, elle est fort importante. Voir plus loin.

Parmi les courts morceaux qui placent le mieux les essais de systématisation des Sommistes dans le milieu des questions débattues à ce moment, il faut mettre les quelques pages d’un abbé Abbaud, d’une abbaye non nommée et qui, dans son exposé De fraclione corporis Domini, va jusqu’aux extrêmes du plus grossier capharnaïtisme. Il attaque peut-être Abélard et, sûrement, l’un des dialecticiens Sommistes de son temps. C’est encore une fois à Mabillon que nous devons cette pièce intéressante dans l’histoire de la théologie eucharistique, il l’a tirée d’un manuscrit du monastère de Saint-Père de Chartres. P. L., t. clxvi, col. 1339 sq. ; Mabillon, Vetera analecta, Paris, 1723, p. 52-55.

Plus éloignée de ces controverses et par sa date et par son objet — le début la ferait ranger parmi les lettres de direction — est la lettre de Pierre de Blois, EpisL, cxL, P. L., t. ccvii, col. 416-422, à un jeune diacre d’Angleterre sur l’étude des sciences sacrées, oùil donne comme exemple de la profondeur des mystères les merveilles de l’eucharistie : exposé théologique fort remarquable, dans lequel l’auteur a bénéficié des progrès réalisés par les écoles pour l’expression des divers points du dogme : pane et vino transsubslanlialis. .. accidentia sine subjecio rémanent et apparent. Ibid., co. 420-421. La réponse de Baudouin de Cantorbéry († 1190), encore moine de Zordes (comté de Dorset), pensons-nous, à ce moment, est beaucoup plus développée, mais se ressent tout autant que la précédente de la marche progressive de la théologie. Liber de sacramento altaris seu Epistola, P. L., t. cciv, col. 641-774. Elle est adressée à Barthélémy, évêque d’Exeter, son protecteur, qui l’avait consulté. Notons toutefois qu’il s’y rencontre des répétitions, col. 674, 675, etc., des différences d’allures, tantôt exposé de foi, tantôt discussions dialectiques, fragments exégétiques, col. 687 sq., paraphrases liturgiques, col. 625 sq., etc., qui font planer un doute sur l’authenticité de certaines parties. Signalons, dans l’état actuel de la pièce, la défense du mot transsubstanliatio, tout comme celle de l’ôaoo’jcriov, malgré le silence de la sainte Écriture, col. 662, et les pages finales sur la théologie de la conversion, des accidents, etc., col. 770-773 : fragments d’un cours scolaire ou d’un cahier d’étudiant qui nous donne les échos d’un enseignement tel qu’on en trouve chez Roland ou la Summa. Baudouin nous a laissé, en outre, un Tractatus de sacramento eucharistise, où il insiste notamment sur la foi à ce mystère. Ibid., col. 408-410. Citons encore, parmi les cisterciens, Ernald de Bonneval († 1186), qui expose la doctrine eucharistique dans son De cardinalibus operibus Christi, c. vi, P. L., t. clxxxix, col. 1641-1650).

2. Sermons.

Si la prédication de l’époque parle fréquemment de l’eucharistie, l’absence d’une fête du saint-sacrement (la fête du Corpus Christi n’apparaîtra, comme on le sait, qu’au xiii » siècle) ne place pas de sermons sur le sacrement de l’autel, dans le cycle liturgique ordinaire de l’année, excepté au jeudi saint ; encore beaucoup de ceux qui nous sont con servés pour ce jour ont pour sujet le lavement des pieds. Il n’y a pas lieu d’essayer de donner une nomenclature complète (impossible dans l’état actuel de l’inédit). Contentons-nous de citer ici quelques spécimens. Pierre de Celles (}- 1187) emploie diverses fois le mot de transsubstantiatio dans ses nombreux sermons, In cœnaDomini, serm. xxxv-xli, P.L., t. ccii, col. 740-770, voir plus loin, et y a des pages excellentes sur la doctrine eucharistique. Signalons encore le Serm., -Kxxix, in cœnaDomini, 6, qui parle surtout de la communion, le Serm., xxxx, 7, contient une espèce de résumé de la doctrine des écoles, et le Serm., xl, 8, où vient le mot Iranssubstantiare. Ibid., col. 761, 766.

Plusieurs, parmi ceux qui ont été faussement attribués à Hildebert de Lavardin, contiennent des passages qui méritent l’attention, surtout le fameux Serm., xciii, où intervient le mot transsubstantiatio dans une exhortation aux prêtres, P. L., t. clxxi, col. 776 ; il est l’œuvre de Pierre Comestor († 1184). Hauréau, Notices et extraits des manuscrits de la Bibliothèque nationale, 1887, t. xxxii, 2° partie, p. 41 (de l’extrait).

Un autre, qui a beaucoup de chances d’être composé par Geoffroy Babion, insiste sur les dispositions requises, Ser/n., liv, P. L., t. cl-xxi, col. 601-606 ; Hauréau, op. cit., p. 31, sur la conversion du pain et du viii, col. 501, par la toute-puissance divine, sur les effets de l’eucharistie, col. 603-604.

Les Serm., xvi et xviii, du cistercien Garnier de Rochefort († 1199, ou mieux, vers 1210), évêque de Langres, sont mêlés de beaucoup de symbolisme, mais reflètent les doctrines scolaires. P. L., t. ccv, col. 673, 686.

Un sermon, qui se rencontre dans les Deflorationes SS. Palrum, 1. I, P. L., t. clvii, col. 909-911, attribuées à Werner de Saint-Biaise (cette attribution est douteuse), soulève une question liée à celle de l’authenticité de certaines œuvres d’Honoré d’Autun. Cf. Kelle, dans Sitzungsberichte der k. k. Akademie der Wisscnschaften in Wien. Philos, histor. Klasse, 1901,

1902, 1903 ; Endres, dans Historisches Jahrbuch,

1903, t. XXIV, p. 827 ; Philosophisches Jahrbuch, 1903, t. XV, p. 455, etc. Il se fait remarquer par quelques emprunts aux textes des collections canoniques et ses passages sur la communion sous une seule espèce, col. 910, la conversion, col. 910, et la consécration par tous les prêtres bons ou mauvais, col. 911, etc. Notons ici en passant la note qui suit le m » sermon sur le jeudi saint : de separatione animæ et corporis in Christo, col. 914-916, et qui rappelle, outre un écho de Pierre Lombard, Sent., 1. III, dist. XXI, 1, les controverses auxquelles est mêlé, en Bavière, Gerhoch de Reichersperg.

Vers la fin du xiie siècle, en France, nous rencontrons Raoul l’Ardent, cf. Geyer, art. cit., dans la Tiibinger theologische Quartalschrift, 1911, qui a un substantiel sermon sur l’eucharistie, P. L., t. clv, col. 1833, etc., Homil., xlviii, in episl. et evang. dominica. Il s’y exprime nettement sur les accidents, col. 1834, le sacramentum communionis et la raison de cette dénomination, col. 1834, les paroles de la forme : Hœc est forma verborum quam dum sacerdos profcrt, sacerdos invisibilis panem convertit in corpus suum, col. 1835 ; des échos s’en rencontrent peut-être jusque dans la prédication allemande de ce siècle. Voir le sermon du prêtre Conrad, An dem Antlazlage, n. 30, dans Schônbach, Altdentsche Predigten, Graz, 1891, t. iii, p. 70.

Les sermons en langue vulgaire publiés par Schônbach contiennent beaucoup d’extraits empruntes plus ou moins textuellement aux maîtres des écoles françaises, à Pierre Lombard surtout, iftirf., p. 70, et