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EUCHARISTIE DU IX^ A LA FIN DU XP SIÈCLE


clator, 1. 1, col. 878), qui s’inspire, P. L., t. cr, col. 1261, des doctrines de Paschase.

La fondation de Cluny, au début du xe siècle, contribue à l’expansion de ces doctrines. Cluny devient rapidement le principal foyer des études théologiques ; l’enseignement eucharistique de Paschase y est en honneur. Le second abbé de Cluny, saint Odon († 949) en fait un magnifique éloge, Collalionum, 1. U, c. xxxii’P. L., t. cxxxiii, col. 577 : Hœc et alia muUo plurà Paschasius ex dictis Palrum… conscripsil. Quse si guis, licet sciolus, legerit, lanta, credo, discet ut de hoc mysterio parum se eatenus cognovisse piitet. Gézon, abbé de Tortone, intercala (vers 950), dans son Liber de corporc cl sanguine Domini, presque tout le traité de Paschase. Cf. P. L., t. cxxxvii, col. 376, 387.

Rathier († 974), évêque de Vérone après avoir été nionie de Lobbes, ne se contenta pas de parler comme Paschase Radbert de l’identité du corps historique et du corps eucharistique du Christ, dans son Excerptum ex dialogo confessionali, c. xv, P. L., t. cxxxvi col 403-404 ; il termina cet écrit par des extraits, sinon par la reproduction intégrale du traité de Paschase sur 1 eucharistie, c. xi.ii, col. 444. Cf. la note de l’éditeur Diuis une lettre, il reprit les mêmes idées avec force, rejetant la présence purement figurative, affirmant la présence véritable et, en même temps que la persistance de la couleur et de la saveur du pain, son changement au corps du Christ, Episl., i, ad Palricum, col. 643648, cf. col. 404 : in carnem verso verissime pane. Cf avec les notes de l’éditeur, deux passages de Rathier que les anciens protestants voulurent tirer à eux, Excerptum ex dialogo confessionali, c. xiv, et De contemptu canonum, c. xix, col. 401-402, 509-510.

Un écrivain dont on s’est beaucoup occupe en Angleterre et dont l’identification n’est pas sûre, Aelfric, cf. Hurter, Nomenclator, t. i, col. 948-949 ; C. Schocl Realencyklopàdie, 3e édit., Leipzig, 1896, t. i, p. 222224, a publié trois recueils d’homélies’qui semblent antérieures à l’an 1000. Cf. A. Ébert, Histoire générale de la lillérature du moyen âge en Occident, trad. J. Aymeric et J. Condamin, Paris, 1889, t. iii, p. 550. Nous ne savons sur quels motifs se base l’éditeur de la Patrologie latine, t. cxxxix, col. 1475-1476. pour dire qu’une manus acatholica les a interpolés. Tels que nous les Usons, ils prouvent que la tradition de Ratramne n’était pas perdue. Cf. J. Bach, Die Dogmengeschichte des Mitlelalters, t. i, p. 215-217.

2- Deuxième controverse eucharistique au a/e siècle.

Au xi<e siècle, la controverse eucharistique porte directement sur la transsubstantiation et sur la présence réelle, qui n’avaient été mises en question que d’une façon exceptionnelle ou indirecte aux ix « et x<e siècles Berenger de Tours (vers 1000-1088) en est le protagoniste et le centre.

Le maître de Berenger, Fulbert de Chartres († 1029) parait concilier et réunir les points de vue de Paschase Radbert et de Ratramne. Cf. J. Bach, Die Dogmengeschichte des Mitlelalters, 1. 1, p. 218, 364-366. Il s’exprime orthodoxement sur l’eucharistie et dénonce des doctrines qui contiennent en germe l’erreur de Berenger. Voir t., 1, col. 723. Que fut au juste le « dogme pervers. relatif à 1 eucharistie, quod erat conlrarium omni bono et lam crescebat in sœculo, qu’enseigna Lcuthéric archevêque de Sens, et qui lui valut une lettre du’roi Robert le Pieux, dont le biographe de Robert, Helgaud de FIcury, dit que lus verbis præsul non bene dodus a rege pio et bono sapienter instruclus quicvit obmutuit et siluit a dogmate perverso, Epiloma vitæ régis Roberti pin P. L., t. cxli, col. 912. Nous l’ignorons. ers le même temps, les avant-coureurs du catharismc, les. manichéens. d’Ortéans (1022) et d’Arras (lU20), rejetèrent le sacrement de l’eucharistie. Cf les actes du concile d’Ortéans, dans Paul, moine de Saint DICT. DE TIlÉOf, . CATIIOL.

Père-de-Chartres (f vers 1088), Veius Agano, I. VI, c. III, P. L., t. CLV, col. 265, et ceux du concile d’Arras* P. L., t. cxLii, col. 1270, 1271, 1278-1284. L’atmosphère était donc comme préparée aux hardiesses antieucharistiques au moment où Berenger commença de dogmatiser en public (vers 1047). Berenger a toujours nié la transsubstantiation. Il fut, au moins à certaines heures, partisan de l’impanation. A-t-il repoussé la présence réelle ? La question est difficile à résoudre. Il ne semble pas l’avoir combattue dans la première période de la lutte, jusqu’au concile de Rome (1059) ; dans la suite, sa pensée fut obscure, indécise, peut-être changeante et contradictoire. Il se peut qu’il ait nié la présence réelle ; il est certain que ses principes et ses paroles l’ont ébranlée. Parmi ses disciples, tous d’accord pour prétendre que le pain et le vin ne sont pas changés essentiellement, au dire de Guitmond d’Aversa, De corporis et sanguinis Chrisii vcritale in eucharistia, ’]. I, P. L., t. cxLix, col. 1430, alii nihil omnino de corpore et sanguine Domini sacramentis istis inesse sed tantummodo umbras hœc et figuras esse dicunt, alii vero, redis Ecclesise rationibus cedentes, ut quasi aliquo modo nobiscum esse vidcantur, dicunt ibi corpus et sanguinem Domini rêvera sed lalenter contineri et ut sumi possint quodammodo, ut lia dixerim, impanari. Et heme ipsius Berengarii subliliorem esse sentent iam aiunt. Sur Berenger et ses partisans, voir t. ii, col. 722-738 ; R. Heurtevent, op. cit., p. 165-216. Condamné par les conciles, Bérengerrencontra de nombreuxcontradicteurs, surtout bénédictins. Cf. L. Biginelli, 1 benediltinie gli sludi eucaristici nel medio evo, Tunn, 1895. Nous avons plusieurs lettres qui furent écrites contre lui ; les plus remarquables sont celles d’Adelman de Liège, d’Ascelin le Breton, du bienheureux Wolphelme de Brauweiler. Celle d’Adelman a été reproduite par R. Heurtevent, en appendice à sa thèse sur Durand de Troarn, op. cit., p. 287-303. Trois traites importants furent composés, au xie siècle, pour le réfuter. Le premier en date (vers 1058), mais non en valeur, est celui de Durand de Troarn. Voir R. Heurtevent, op. cit., p. 217-251. Du deuxième, qui a pour auteur Lanfranc (entre 1063 et 1070), et du troisième, qui est l’œuvre de Guitmond d’Aversa (vers 1075), Pierre le Vénérable a dit, Epistola sive traclalus ndversus petrobrusianos hscreticos, P. L., t. clxxxix, col. 788, que Lanfranc a écrit bene, per/edc, et Guitmond mclius, perfectius. Cf. le jugement de II. Bôlmier, Realencyklopàdie, 1899, t. VII, p. 235. Dans toute cette polémique, le nom de Paschase Radbert fut souvent prononcé. Pendant que Berenger le traitait avec mépris, cf. ses lettres à Alcuin et à Lanfranc, et un passage du P’livre de son De sacra cœna, conservé par Lanfranc, Liber de corpore et sanguine Domini, c. iv, P. L., t. cl, col. 63, 66, 412, sa lettre à Adelinan, dans Martènc et Durand, Thésaurus novus anccdolorum, Paris, 1717, t. i, col. 111, 113, son De sacra cœnaadversus Lanjrancum liber poslerior, c. xxxvii, Liv, Lxv, Lxviii, Lxxxiv, Bcrtiu, 1834, les défenseurs de l’orthodoxie s’inspiraient de Paschase devenu leur somme eucharistique. Lanfranc se déclarait fier de participer à ce que Berenger appelait la stupidité, vecordia, du vulgaire, de Paschase et du cardinal Humbert. Liber de corpore et sanguine Domini, c. iv, col. 414. Durand de Troarn, Liber de corpore et sanguine CItristi, c. X, P. L., t. CXLIX, col. 1389, appelait Paschase divini sacramenti scrutator diligenlissimus discus.sorque catholicus, en attendant qu’Alger de Liège, Gratien, Pierre Lombard, saint Thomas, etc., lui empruntassent des passages mis sous le nom de saint.Augustin. Au surplus, on ne se contente pas de reproduire Paschase tel quel. On complète sa documentation patristique, on améliore quelques-uns de ses arguments, on suit par intervalles Berenger sur le terrain de la dialectique où volontiers il s’engage, on aborde des questions de

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