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ETHIOPIE (ÉGLISE D’)


de SCS sentinienls et de sa conduite, il fit publier sa « confession de foi » motivée. Liidolf, Corn, hist., p. 237. Il y défend les erreurs des jacobites et repousse l’accusation de judaïsme en invoquant les raisons d’usages purement civils et indifférents au point de vue religieux. Il n’ignorait pas, cependant, mais il oublie les discussions non encore éloignées sur ces observances.

2° Ouvrages de polémique ; travaux liturgiques. — Les revendications des sectaires s’affichaient de jour en jour plus intransigeantes, comme en toute recrudescence des réactions. Les joutes de la polémique anticatholique provoquèrent la composition ou la traduction de traités dogmatiques : Fekuré-Malakot’ou Explication de la divinité ; Sawâna-jS’afs ou Refuge de l’âme ; Mazgaba-hûymdnot ou Trésor de la foi, qui sera réfuté plus tard (1642) par Atânâtios dans Maksafta-hûssetût’ou les Fléaux des mensonges. La renaissance à la vie nationale et religieuse se manifeste non seulement dans la polémique, mais aussi dans le culte liturgique. Le clergé se recrute et se relève, les écoles se rouvrent, les églises, au moins en partie, sont restaurées. Deux lettrés, instruits dans l’art du chant, les Azaj (.iéra et Raguël en facilitent le laborieux apprentissage par la notation de Dcgwa ou Anliphonaire, pour toutes les fêtes de l’année. On voit paraître alors le Ma^ûticfâ-Kan’dil ou Livre des cierges, qui n’est autre que le rituel de l’extrêmeonction et de la pénitence.

3° Oviédo et Mirtas. Dénonciation et condamnation de l’hérésie. Persécution. — Les guerres et la mort prématurée de Glaodios arrêtèrent ce double courant {4 avril lô59). Au commencement de la même année, un certain nombre de Portugais et d’indigènes catholiques se laissaient entraîner vers les errements du parti jacobite. Ce voyant, l’abouna Andréas (d’Oviédo) lança, le 2 février 1559, une dénonciation des erreurs des Abyssins et de leurs préjugés contre l’Église romaine, afin d’en prémunir ses ouailles. Il enjoint aux fidèles de son obédience de se tenir en garde contre ces erreurs, et aux l’.thiopiens d’y renoncer, sous peine d’excommunication, c’est-à-dire « d’encourir les jugements de la sainte Église et des autorités ecclésiastiques, soit pour leur châtiment en leurs personnes et en leurs biens, soit pour leur pardon dans la mesure de leur repentir. > D’.lnieida, dansBeccari, l. v, p. 391.

Le successeur au trône. Minas (1559-1563), excité par les dignitaires et les moines de son entourage, défendit au patriarche et ; ses compagnons de continuer leur enseignement et leurs controverses, et dans l’irritation causée par leur résistance, il les traita avec brutalité ; et, par un exil forcé, il les confina dans une province éloignée et. partant, inhospitalière. Les catholiques subirent une cruelle persécution. D’Almeida, dans Beccari, t. v, p. 391.

.Son fils, Sarsa I)an’i ; el (1563-1597), se montra moins défavorable et laissa le patriarche et les Pères s’établir à Frémona, non loin d’Aksum. D’autres Pères suivirent des groupes de familles portugaises qui allèrent se fixer dans la province de Dambéa, sur les bords du lac Sânâ.

Mais, si les préoccupations politiques détournèrent d’eux l’attention de la cour, les missionnaires se sentirent frappés au cœur par des mesures prises à Lisbonne et à Bome à l’égard de leur œuvre apostolique. Le roi de Portugal, dom Sébastien, désespérant de rien réussir en Abyssinic, pria le pape d’en retirer les jésuites et de les envoyer dans l’Inde et la Chine. Saint Pie V, par un bref du 2 février 1566, adressé au patriarche André d’Oviédo, lui donne ordre de se retirer dès qu’il le pourra faire en sécurité et de se rendre aux missions du Japon et de la Chine. Mais Oviédo, soit par l’espoir fondé sur les dispositions des

foules favorables à la réunion à l’Église catholique soit parce que les autorités turques lui fermeraient les routes de la mer Rouge, s’efforça défaire revenir le souverain pontife sur cette détermination. Les choses en restèrent là. D’Almeida, d ; uis Beccari, t. v, p. 423432. Le zélé patriarche mourut saintement à Frémona, en 1577 ; et les autres Pères finirent aussi leurs jours dans la paix, sous le poids de leurs travaux apostoliques (1577-1596). Le dernier, François Lobo, en mourant, laissait la mission catholique sans aucun soutien au milieu de l’épreuve. Un prêtre de (loa, Melchior de Silva, se dévoua à aller leur porter secours ; grâce à son teint indien, il put traverser les pays occupés par les Turcs, qui le prirent pour un bemian ; il rendit ses services aux catholiques jusqu’à l’arrivée du Père Pierre Paëz, en 1603.

2 « phase. — 1° Premiers succès. — Par un phénomène singulier, les successeurs de Sarsa-Dani ; êl, tout en bataillant les uns contre les autres pour s’emparer du trône, rivalisèrent pour ainsi dire de bienveillance envers le P. Paëz. Ils allèrent même plus avant, jusqu’à la conversion au catholicisme. Ils avaient noms Jacob, Za Dan iiq (1597-1607), et après eux Socinios (1607-1632) ! Le règne de ce prince fut l’apogée du triomphe de l’Église catholique en Ethiopie, mais, hélas ! triomphe éphémère, trop peu modéré pour une longue durée. Les succès merveilleux du P. Paëz étaient dus à ses vertus apostoliques et à une science multiforme et pratique au service de son zèle. On le voit amener progressivement l’empereur.Socinios de la conviction à la profession de foi, d’Almeida, dans Beccari, t. VI, p. 489 ; de la reconnaissance d’usages, ou abrogés, ou prohibés par le christianisme, à l’adoption des lois aussi sévères qu’essentielles de la morale évangélique. Cette évolution religieuse, dont le roi était l’axe, se fit autour de lui à la cour, avec des ménagements fort calculés par le prudent missionnaire.

Le monarque, en prenant possession du trône, vit beaucoup de vassaux, hier encore rebelles combattants, et soumis non sans rancœur ni mécontentements, et le moindre prétexte les eût trouvés prêts à la révolte. Le P. Paëz savait aussi bien que le roi combien l’amour-propre monacal, et, par lui aiguisé, l’amour-propre national étaient un obstacle inattaquable de front et que d’infinis ménagements réussiraient à peine à amoindrir peu à peu. Les questions de fond, quoicpie base du schisme, les eussent laissés assez indilïérenls, mais cette seule idée d’avoir à reconnaître que, depuis huit ou neuf cents ans, leurs ancêtres et eux-mêmes sont dans l’erreur, les blesse et les révolte. Monophysisme, sabbalisme, à tort ou à raison, étaient pour eux des choses sacrées, parce que traditionnelles : croyance ancest raie, observance ancestrale. A cheval sur ce principe du culte de la tradition, des us et coutumes de leurs pères, l’amour-propre de la race revêtait un fanatisme irréductible. De 1607 à 1622, on suit à travers ces obstacles la marche lente, mais sûre, de Socinios dans son royal dessein d’entraîner la cour d’abord, puis ses camps et tout son peuple dans sa conversion vers le catholicisme. C’est d’abord la simple, mais insistante manifestation de ses préférences personnelles dans les joutes des discussions religieuses, thème ordinaire des conversations aupalais. Celte pression par l’entraînement de l’exemple, de la préférence du roi et de la majorité des grands qui l’entouraient, favorisait puissamment les prédications infatigables des Paëz, Antoine l’ernandez, Antoine de Angelis, Louis d’Azevedo, etc., dans les camps et dans les centres <|uc les princes ouvraient à leur zèle. En 1613-1614, à la suite de vives controverses avec les plus entendus des lettrés et les plus renommés des moines, la cause de la vérité avait fait de telles conquêtes à la cour que le roi jugea le moment venu de