Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 5.djvu/485

Cette page n’a pas encore été corrigée

941

ETHIOPIE (EGLISE D’942

islamique préoccupait tous les esprits, à la cour impériale. L’idée des croisades, née des récits des gestes des Francs, les hantait comme un rêve, tardivement et très longtemps après que l’Europe eut abandonné la Palestine ; elle est entretenue par les prophéties des anachorètes, complaisamment dociles au Die nobis placentia ; elle est exprimée dans tous les messages des princes d’Ethiopie aux princes d’Occident. Alvarez, p. 79. Le roi Isaac, fils de Daouif I" (1414-1429), « écrivit aux rois des Francs, dit la chronique, pour les associer à son dessein. »

Aussi nous allons voir le rôle officiel très considérable du Mamher hiérosolymitain, près du Saint-Siège.

VL Concile de Florence. — 1° Double dclégaiion au concile de Florence. — Après le retour des grecs et des arméniens (1439), Eugène IV ne voyait plus à réconcilier que les jacobites de Syrie, d’Egypte et d’Ethiopie. Dans ce but, le franciscain Albert Sarchiano fut délégué en Egypte et en Palestine. Il ne pouvait pas penser à aller jusqu’en Abyssinie. D’ailleurs, le patriarche d’Alexandrie, Johanès, dont relevait l’Ethiopie, et l’abbé du couvent éthiopien à -Jérusalem, le Mamher Nicodémos, agent officiel de l’empereur Constantinos ou Zara-Jacob, traitèrent chacun de leur côté avec le légat, au nom de l’Église d’Ethiopie. L’empereur n’intervint pas personnellement en cette grave affaire. Mais, d’une part, le patriarche Johanès, par son droit primatial, agissait au nom de toute la prédication de saint Marc dont l’Ethiopie fait partie ; d’autre part, l’abba Nicodémos, dans sa lettre au pape Eugène IV, se porte garant des dispositions ou même des désirs de son souverain pour l’heureux succès de la réunion avec l’Église universelle. Mais il est impossible que Zara-Jacob n’ait pas été informé, durant les deux années que prirent les démarches de ses agents sûrs de sa confiance et de son entière adhésion. Virtuellement, l’acte était sien. Les démarches sont parallèles et simultanées <1440). Voir leurs lettres, Bibl.vatic., ms. Oltobonicnj n. 129, ç. 109, 116.

Le patriarche Johanès envoya du Caire l’abbé Andréas, prieur du célèbre couvent de Saint-Antoine, comme plénipotentiaire auprès du Saint-Siège et accompagné de douze autres moines. Assémani, d’après Giacomo, Vila lùigenii IV. Malgré les titres pompeux (le l’en-tête de la lettre patriarcale, la chrétienté copte figurait à peine, à cause des défections qui avaient entraîné les foules à l’islamisme dans l’Egypte, la Lybie et la Nubie. Seule, l’Éliiiopie restait intacte du patrimoine de la grande et glorieuse Église dite de saint -Marc. Aussi, seule, l’Ethiopie semblait-elle attirer le plus vif intérêt près du pape et des évêques du concile, et l’ambassade dont.Xndréas était le chef fut annoncée comme ambassade d’/Ethiopie par Eugène IV au concile, le 6 mai 1441. D’ailleurs, le délégué patriarcal le redira lui même en remettant ses lettres de créance : …nobis /Elhiojtilnis…

Transportés de Hhodes sur la flotte de Jean Moriccnc, l’abbé Andréas et son second, le diacre Pierre, avec toute leur suite, parurent le 31 août 1441 devant le concile de Florence.

L’affaire de la réconciliation des jacobites à l’Église romaine ne put pas s’effectuer aussi vite que l’eussent désiré les délégués africains. Les négociations furent confiées par le pape aux soins des commissions spéciales chargées de conférer avec ces députes touchant les points divers sur lesquels leur Église était en divergence avec les catholiques ; et ils étaient nombreux, on le verra par l’énumération des erreurs que condamne le décret conciliaire.

Entre temps, l’ambassade fit un pieux pèlerinage à Rome, le 9 octobre 1 141, pour y vénérer le chef des

apôtres et les saintes reliques qui sont le trésor de la ville. Quelques jours plus tard, ils étaient de retour i Florence. Dans l’intervalle, étaient également arrivés les religieux que l’abba Niodémos avait envoyés de Jérusalem. Cette seconde délégation parut devant les Pères du concile, le 2 septembre 1441. A la tin de son discours au pape, discours d’une allure sans gêne toute abyssine, mêlant la myrrhe à l’enccii-^, le premier des députés porteur de la lettre de créance du Mamher Nicodémos, disait : « …Notre abbé Nicodémos, votre serviteur à Jérusalem…. vous assure, avant tout, que l’empereur d’Ethiopie n’a sur la terre xlun de plus à cœur que de s"unir à l’Église romaine et de se soumettre à vos pieds sacrés, tant sont grands près de lui le nom de Rome et la foi des latins. »

Entre les deux délégations, la cause étant la même, cette deuxième venue fut réunie à la précédente présidée par l’abba Andréas, plénipotentiaire patriarcal au nom de la même Église. Card. H. Justîniani, €onc. flor., p. 3, n. 8.

2° Élaboration des décrets ; acceptation </ atte d’union.

— Ce ne fut que le 4 février 1442 que la double députation fut admise en séance publique et que fut proclamée la réunion de l’Église jacobite, copte et éthiopienne à la communion de l’Église universelle. Card. Justiniani, .ssémani. L’élaboration des commissions conciliaires avec les délégués coptes et éthiopiens avait établi les sujets de doctrine et de discipline sur lesquels les Églises jacobites avaient des opinions erronées. Un certain nombre avaient déjà été condamnées par les conciles incontestés auprès de tous les schismatiques d’Orient. Mais la libre pensée des sectes avait quand même laissé champ ouvert aux esprits et aux imaginations <lans l’interprétation des mystères de la foi. Ces erreurs donnèrent lieu à un décret spécial qui fut rendu, sacro approbvnle concilio florentino ; les décrets concernant les grecs et les arméniens y furent adjoints parce qu’il a été reconnu qu’Éthiopiens et coptes partageaient les mêmes erreurs.

Le décret d’union fut lu solennellenunli en latin et en arabe. Le député d’Alexandrie, l’abba Andréas, au nom du patriarche.lohanès, an nom des autres membres de la double dépntation debout près de lui et au nom de tous les jacobites d’ÉgMite et d’Ethiopie, fit l’acte d’acceptation dans la forme qui lui fut traduite en arabe. Décréta concil. ijrncr(di : ini, t. viii, p. 853.

L’union fut conclue. Hélas 1 ce ne fut qu’un jour dejfête entre des siècles de désolation, qu’un éclair radieux, déjà disparu, entre les ténèbres de la nuit séculaire d’hier et les sombres tempêtes d’un lendemain interminable !

Les jacobites d’Egypte et de Syrie suivirent la lâche défection des grecs. Ce fut alors un tel chaos de colères schismatiques et musulmanes que, dans l’exaspération et la terreur, les Églises furent emportées à la dérive. L’Église d’Ethiopie en subit les contre-coups..Makrisy relate que, en ltô4 (832 de l’hégire), des ambassadeurs éthiopiens, arrêtés à .lexandrie, furent mass.iens. La nouvelle de l’heureuse solution deFlorencc ne sera parvenuc à la cour de Zara-Jacob que comme celled’untriomphcavortédans un guet-apens de bandits à la frontière. Assurément, il n"a pas eu connaissance de la teneur du décret conciliaire ; les errements dont il fit des lois en sont la preuve. Voir plus loin.

3° Les croyaners entachées d’erreur de riù/tisc d’Élhiopie, constatées et expurgées par le concile de Florence.

— 1. Sur la divinité. — Avec le symbole des apôtreS, les Éthiopiens admettent un seul Dieu personnel, créateur de toutes choses visibles et invisibles. Mais leurs idées sont peu claires sur l’être divin. D’aucun