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que était regardée en Espagne comme une vérité de la foi catholique et qu’elle avait sa place dans les symboles. Voir la Fides Damasi, dans Kunstle, Antipriscilliana, p. 47-48 ; la Fides Pbœbadii, ibid., p. 55 ; une Exposilio fidei, du V ou du vie siècle, ibid., p. 90 ; la Fides Isalis ex Jiidœo, ibid., p. 94-95 ; l’exposition de la foi du pseudo-Gennade, ibid., p. 103, et celle qui est attrijjuée à saint Grégoire le Grand. Ibid., p. 113. Et les conciles particuliers de Tolède et d’autres villes espagnoles, par exemple, de Mérida, en 666, Mansi, Concil., t. XI, col. 77 ; et de Braga, en 675, ibid., col. 154, en sanctionnant des formules composées par des docteurs particuliers, leur donnaient une valeur offîcielle, l’autorité d’une doctrine que l’Église reconnaît comme sienne.

D’autres conciles particuliers, tenus hors d’Espagne, se prononcent aussi nettement pour le Filioque. Le concile de Heathfield en Angleterre, convoqué en 680 par Théodore, archevêque de Cantorbéry, déclare reconnaître que le Saint-Esprit procède du Père et du Fils d’une manière ineffable, siciit prsedicaverunt mncli apostoli et prophetæ et doclores. Mansi, Concil., t. xi, col. 77 ; Hcfele, op. cit., trad. Leclercq, t. iii, p. 476. Le concile de Frioul, tenu en 796, sous Paulin, patriarcJie d’Aquilée, proclame que la relation du Saint-Esprit avec le Père doit être semblable à la relation du Saint-Esprit avec le Fils et il insère le Filioque dans le symbole. Mansi, Concil., t. xiii, col. 843 ; Hefele, op. cit., t. III, p. 1094. Le concile deVorms, qui réunit, en 868, les évêques allemands, traite au long contre les grecs la procession du Saint-Esprit et invoque tout particulièrement l’autorité de saint Augustin. Voici de quelle manière il exprime sa croyance au Filioque : Spiritum Sanctum crcdimus nec genilum vcl creatum, scd a Paire Filioque procedenlem, ambvrum Spiritum. Nec enim procedit de Paire in Filium, nec de Filio lantum procedit ad sanctificandam crecduram, sed ab utrisque procedcrc monslratur, quia charitas sive sanctitas amborum esse agnoscitur. Et nec Palris lantum, nec Filii lantum, sed simul Palris et Filii Spiritus dicitur. In relalivis vero personarum nominibus, Pater ad Filium, Filius ad Palrem, Spiritus Sanctus ad ulrosque refertur. Mansi, Concil., t. XV, col. 868 ; Hefele, op. cit., t. iv, p. 459460. Le concile de Bari, tenu en 1097, et dont les actes ne nous sont pas parvenus, consacre de longues discussions à la controverse du Filioque. Saint Anselme y met en pleine lumière la vérité du dogme latin, et le concile anathématise l’erreur de Photius.

Après ces conciles particuliers, nous avons trois conciles œcuméniques qui proclament la procession du Saint-Esprit ab ulroque. Le IV’= concile de Latran, tenu en 1215, sous Innocent III, dans le can. l, De flde catliolicu, déclare : Pater a nullo, Filius autem a solo Paire, ac Spiritus Sanctus ab ulroque pariler, absque initio semper et fine. Mansi, Conc ; 7., t. xxii, col. 981, 982 ; Denzinger-IBannwart, Enchiridion, n. 428. Le II" concile de Lyon, tenu en 1274 sous Grégoire X, exprime en termes énergiques la croyance de l’Église catholique au Filioque : Fideli ac devola professione falemur, quod Spiritus Sanctus eelernaliler ex Paire et Filio, non tanquam ex duobus principiis, sed Icmquam ex uno principio, non duabus spiralionibus, sed unica’spiralionc procedit. Hoc professa est liaclenus, prædicavit et docuit ; hoc firmiler lenel, prædicat, profitetur el docel sacrosancta romana Ecclesia, mater omnium fidelium et magistra : hoc habet orlhodoxorum Palrum atque doclorum latinorum pariler et græcorum incommutabilis el vera sententia. Sed quia nonnulli propter irrefragabilis prasmissse ignoranliam verilatis, in errores varias sunt prolapsi, nos hujusmodi crroribus viam præcludere cupientes, sacro approbanle concilio, danmamus et reprobamus omnes qui negare præsumpserinl œlernaliter Spiritum Sanctum ex Paire et Filio

procedere : sive etiam Icmerario ausu asserere quod Spiritus Sanclus ex Paire et Filio tanquam ex duobus principiis, et non tanquam ex uno procédai. Comlitutio Gregorii X, Mansi, Concil., t. xxiv, col. 81 ; Denzinger-Bannwart, n. 460.

Le concile de Florence (1439), tenu sous Eugène IV, après de longues discussions sur le Filioque, amène les I)rélats les plus illustres de l’Église grecque à reconnaître la vérité du dogme latin. Le Décret d’union d’Eugène IV pour les grecs définit et propose la procession du Saint-Esprit du Père et du Fils comme une vérité de foi catholique : In nomine sanctse Trinitatis, Palris et Filii et SpirJus Sancli, hoc sacro approbanle universali Florentino concilio, difjinimus, ut hœc fidei Veritas ab omnibus cliristianis crcdatur et suscipiatur sicque omnes profileantur. Quod Spiritus Sanclus ex Paire et Filio œlernaliter est, et essentiam suam suumque esse subsistens habet ex Paire, simul et Filio, et ex ulroque xtemaliter tanquam ab uno principio et unica spiralionc procedit. Déclarantes, quod id quod sancti doclores et patres dicunt, ex Paire per Filium procedere Spiritum Sanctum ad hanc intelligentiam tendit, ut per hoc signifieetur Filium quoque esse secundum grœcos quidem causam, secundum kdinos vero principium subsistentix Spiritus Sancli, sicut et Palrem ; el quoniam omnia quæ Palris sunt, Pcder ipse unigenito Filio suo gignendo dedil, præler esse Pcdrem : hoc ipsum, quod Spirilus Sanclus procedit ex Filio, ipse Filius a Paire œlernaliter habet, a quo etiam œlernaliter genilus est. Mansi, Concil., t. xxxi, col. 1030, 1031 ; Denzinger-Bannwart, n. 691.

A côté des conciles qui affument que le Saint-Esprit procède du Père, il y a donc des conciles qui proclament ouvertement que le Saint-Esprit procède du Père et du Fils. Ce que les premiers affirment d’une manière implicite, car la procession du Saint-Esprit du Père ne saurait se concevoir si le Saint-Esprit ne procédait pas en même temps du Fils, d’autres conciles le professent explicitement. La théologie orthodoxe n’oppose à l’autorité de ces conciles que le témoignage de Photius et de ses disciples. Point n’est besoin de montrer que l’autorité d’un homme fort érudit, voire même de toute une école théologique, ne saurait prévaloir contre les décisions promulguées et sanctionnées par des conciles généraux et particuliers, et, disons-le, par des conciles où les grecs ont eu le loisir d’exposer leurs principes théologiques, de défendre avec acharnement le sentiment de Photius, d’amonceler les objections les plus variées contre la doctrine catholique du Filioque. La théologie orthodoxe pourrait se plaindre seulement de ceci, que la définition d’un dogme, qui découle logiquement des principes de la théologie trinitaire grecque, leur soit venue des conciles d’Occident. Mais on est heureux de constater que les Orientaux, et en particulier le cardinal Bessarion, ont puissamment contribué à cette définition. Et en supposant même que les grecs n’eussent pris aucune part à cette œuvre du magistère infaillible de l’Église catholique, les conciles latins, qui ont défini et enseigné la procession du Saint-Esprit ab ulroque, ne mériteraient que la reconnaissance du monde chrétien. « La profession de cet article, remarque justement saint Bonaventure, est venue par l’Église des latins et elle résulte d’une triple cause, savoir : vérité de la foi, nécessité du danger, autorité de l’Église. La foi dictait cet article ; il était à craindre qu’on ne le niât, et les grecs étaient tombés dans cette erreur ; l’Église avait l’autorité et, par conséquent, devait la définir sans retard. » / ; i IV Sent., 1. I, dist. XI, a. 1, q. i.


IV. D’après les théologiens.

Arguments positifs.

La procession du Saint-Esprit du Fils résulte aussi des considérations spéculatives que les théologiens ont faites sur le mystère de la Trinité.