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ESPRIT-SAINT

l’inviolabilité du symbole de Nicéc et de Constantinople, mais ils ne condamnent pas la procession du Saint-Esprit ab ulroqiie. Le VP déclare que le Saint-Esprit procède du Père, et le ¥11*= professe la même croyance.

Il en résulte de la manière la plus lumineuse que les conciles œcuméniques ne donnent aucun appui aux attaques de la théologie orthodoxe contre le Filioqnc. Il est surtout remarquable que le VI<= et le VII’= conciles ne font pas la moindre allusion malveillante à une doctrine bien connue déjà et répandue dans la théologie occidentale. Ils demeurent fidèles sans doute à la formule scripturaire : Ex Paire procedil, mais ils n’y ajoutent rien, de peur de soulever de nouvelles dissensions, de nouvelles luttes intestines dans l’Église d’Orient, ravagée par tant de schismes et d’hérésies. Cette fidélité à la doctrine des symboles de Nicée et de Constantinople, ce respect de l’ancienne formule ne signifient pas, cependant, que la procession ex Paire exclut la procession ex Filio.

A propos du Vile concile, il est utile de rappeler un détail que les théologiens orthodoxes préfèrent passer sous silence. En présence des envoyés du Saint-Siège, les Pères de ce concile lurent et approuvèrent la profession de foi de saint Taraisc, patriarche de Constantinople : « Je crois au Saint-Esprit, Seigneur et vivificateur, procédant du Père par le Fils. » Mansi, Concil., t. XII, col. 1122. On ne lit nulle part, dans les actes de ce concile, que la formule employée par le saint patriarche causât de l’étonnement ou provoquât les protestations des Pères. Et cependant cette formule exprime la doctrine contenue dans le Filioquc. Les polémistes gréco-catholiques y ont vu un témoignage favorable à la doctrine de l’Église romaine. Voir "Vekkos, Ad llieodorum Sugdrie, i, 8, P. G., t. c’xli, col. 30 i ; Epigrapliæ, i, ibid., col. G28 ; 73e deposilione sua, orat. ii, ’26, ibid., col. 1008 ; Constantin Méliténiol, De processione.Spirilus Sancti, i, 21, P. G., t. cxLi, col. 1077 ; Calécas, Aduersus yrœcos, i, P. G., t. CLii, col. 26. On est donc en droit de dire que le dogme latin n’est pas une nouveauté et que les conciles œcuméniques ont affirmé la procession du Saint-Es prit du Père sans nier cependant sa procession du Fils.

On pourrait tout au plus objecter que le concile d’Ephèse défend de rien ajouter au symbole. On répondra àcette objection à l’article Eii.ioqvk. Pour le moment, il suffit de rappeler que l’Église est toujours une société vivante et qu’elle n’a jamais renoncé et ne renoncera pas à sa mission de garder intact le trésor de la divine révélation. Si donc elle juge utile, pour la sauvegarde de ce trésor, d’insérer dans le symbole de nouvelles explications de la foi, elle n’innove en rien, mais elle continue l’œuvre des anciens conciles et elle exerce un droit que personne ne saurait lui contester sans renier en même temps sa divinité.’oir Franzelin, Examen Macurii, p. 78 ; Palmicri, La processione dello Spirilo Sancto : l’esegesi ed i concilii, Rome, 1901, p. 142.5.

2° Plusieurs conciles, œcuméniques ou parliculiers, onl défini comme vérité de foi catholique la procession du Saint-Esprit ex Filio. — Ces conciles, il est vrai, n’ont pas été convoqués en Orient. Il n’en faut pas conclure qu’ils soient sans autorité. Il y a des conciles tenus en Orient et auxquels les Occidentaux n’ont pris presque aucune part, et cependant l’Église latine a accepté leurs décret s. Pourquoi donc l’Église grecque devrait-elle ni( connaître l’autorité des conciles tenus en Occident, si elle n’a rien à objecter â la légitimité de leur convocation ? Si la théologie orthodoxe admet que les conciles tenus à Rome sous le pape saint Damase sont légitimes, parce qu’ils affirment que le Saint-Esprit est de l’essence du Père, Macaire, op. cit.,

t. i, p. 292, il n’y a pas de raison de déclarer que d’autres conciles postérieurs, convoqués dans la même ville, ne sont pas légUimes, parce qu’ils définissent que le Saint-Esprit procède aussi du Fils. Pour faire rejeter notre conclusion, il faudrait démontrer que les décrets de ces derniers conciles contredisent les décrets des conciles antérieurs, ce qui est inadmissible pour le Filioqnc, car, nous l’avons dit, aucun concile grec ne l’a condamné ou anathématisé.

Au concile de Florence, les théologiens latins appuyaient le Filioquc sur l’autorité des conciles particuliers de Tolède, mais Marc d’Éphèse répondait qu’il ignorait ces conciles et qu’il ne croyait pas à leur authenticité. Mansi, Concil., t. xxxi, col. 1053. Il y a, en effet, une série de conciles tenus à Tolède, qui, ou bien proposèrent ouvertement comme vérité dogmatique la procession du Saint-Esprit du Fils, ou bien même, insérèrent le Filioquc dans le symbole. On cite tout d’abord un concile tenu à Tolède l’an 400, sous la présidence de Patronus, archevêque de cette ville. Hefele, op. cit., trad. Leclercq, t. ii, p. 122, 123. Dans sa profession de foi, il aurait déclaré que l’Esprit Paraclet n’est ni le Père ni le Fils, mais qu’il procède du Père et du Fils. Mansi, Concil., t. iii, col. 1003. Un autre concile, tenu en C, ’13, déclare dans sa profession de foi que le Saint-Esprit n’est ni créé ni engendré, mais procède du Père et du Fils. Mansi, Concil., t. x, col. 615. Une affirmation plus explicite et plus théologique de la procession du Saint-Esprit du Fils est renfermée encore dans la profession de foi du concile de Tolède de 675. La voici : Spirilum quoque Sanclum. …credimus esse… non genilum vcl crcalum, scd ab ulrisque proccdenlem, amborum Spirilum. Ilic cliam Spirilus Sanclus nec ingenilus, nec genilus creditur : ncc aul si ingenilum di.rcrimus, duos paires dicamus, aul si genilum. duus jilios prxdicare monslrcmur ; qui lamen ncc Palris tanliun, scd sinuil Pulris et Filii Spirilus dicitur. Xcc enim de Paire procedil in Filium, nec de Filio procedil ad sanctiftcandam crcaluram, scd simul ab ulrisque proccssisse monslratur ; quia carilas, sive sanctilas amburum agnoscitur. Mansi, Concil., t. xi, col. 133. D’autres conciles, tenus dans la même ville en 653, Mansi, t. x, col. 1210 ; en 681, ibid., t. xi, col. 1027 ; en 683, 17>id., t xi, col. 1062 ; en 69 1, ibid., t. xii, col. 96, insérèrent dans le symbole l’addition du l’ilioque. Remarquons toutefois que l’autorité de ces conciles, au moins des plus anciens, a été ébranlée de nos jours, et par de bonnes raisons. Le P concile de l’an 400 n’a pas eu lieu probablement, puisque sa règle de foi aurait seulement été envoyée à saint Léon le Orand, qui fut élu pape en 410. K. Kiinslle, Anlipriscillinna, p. 67-70 ; E. Mangenol, L’origine espagnole du Filioquc, dans la Revue de l’Orient clirélien, 1906, t. xi, p. 93. De même le concile de 447, d’après dom Morin, n’aurait aucun fondement historique. Pa.ttor et Syagrius, deux écrivains inconnus du ve siècle, dans la Hevue bénédiclinr, 1893, t. x, p..’387 ; Kiinstle, Antijiriscilliana, p. 40-41. La profession de foi du concile (le l’an 400 aurait été coniposée par Pastor, évêciuc de Calice, en 433. Il y a cependaut des érudits qui attribuent cette profession au concile de Tolède de l’an 447. Merkle, Das Filioquc auj dem Toletanum 447, dans Theologisclw Quartalschrilt, Tubingue, 1893, ]). 408-429. Enfin la profession de foi du concile de Tolède tenu en 630, profession qui emprunte quelques phrases au symbole Quicumquc, n’appartiendrait pas h ce concile, d’après Kiinstle, Antiprisrilliana, p. 70, 73, mais elle reproduirait une formule bien ancienne, datée probablement de l’an 400. K. Mangenot, loc. cit., p. 98 ; Leclercq, dans Hefele, op. cit., t. iii, p. 12591261. Nous n’avons pas à discuter ici les opinions émises par ces savants. Mais il est avéré que, dès le commencement du V siècle, la formule ex Paire Filio-