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ENFER D’APRÈS LES PÈRES


traite ex professa de la fin des peines, Clément déclare que Dieu punit les péchés ; il y distingue de plus les hommes incorrigibles et les guérissables : pour ceuxci, les punitions sont médicinales, mais il s’agit alors certainement des peines de cette vie. La même distinction se retrouve, S//o/n., VI, 14, t. ix, col. 333 ; I, 27, t. VIII, col. 920 ; VII, 2, t. ix, col. 413, 416. Voir t. iii, col. 186 ; W. de Loss Love, Clement of Alexandrin not an a fier dcath probalionist or nniversalist, dans Bibliolh. sacra, octobre 1888. Il est donc probable que S/ro ; n., VIII, 10, doit aussi s’entendre des châtiments d’ici-bas. Il pourrait, cependant, se faire que la redditio mali, définition de la punition, ait vraiment répugné un instant à la bonté idéaliste de l’alexandrin. Il se pourrait aussi que le philosophe d’Alexandrie ait vraiment commencé à platoniser sur ce point. D’après Photius, Bibliolheca, cod. 100, P. G., t. ciii, col. 384, dans les II ijpolijposcs, Clément aurait enseigné quantité d’erreurs, entre autres sur les migrations des âmes. Cependant Photius ne relate explicitement aucune erreur sur l’éternité de l’enfer. Cf.Eusèbe, H. E., 1. VI, 14, P. G., c. xiv, t. xx, col. 549 ; Le Noury, P. G., t. ix, col. 1474 sq.

D’ailleurs d’autres textes semljlent nettement affirmatifs au sujet de l’éternité de l’enfer. Clément parle d’abord fréquemment du salut éternel qu’on peut perdre et â jamais. Slrom., 1, 1 ; IV, 22 ; VII, 10, A G., t. viii, col. 733, 1345 sq. ; t. ix, col. 480 ; Exhorlalio odGrœcos, c. ix, t. viii, col. 184 sq. ; les pécheurs n’entreront pas au royaume des cieux, et ils se réservent le supplice que Dieu a préparé au diable et à ses anges. Il ne reste aux incrédules que le jugement et la condamnation, et sur Vliodie du Ps. xcv, 7-11, à la suite de raint Paul, Clément montre l’éternité immuable après le choix de Vhodie d’ici-13as, col. 196 sq. Dans J’homélie Qnis dives salvetur, où Clément parle comme docteur du peuple chrétien, il enseigne clairement la doctrine du salut éternel, c. i, P. G., t. ix, col. 604 sq. ; c. XXVI, col. 632 ; c. xxxiii, col. 640, où il est dit ciue la négligence du bien est punie par l’éternel supplice du feu. Enfin, dans un fragment, P. G., t. ix, col. 752, il déclare que les âmes des impies sont immortelles et qu’il leur serait trop avantageux de ne pas être incorruptibles, car Dieu les châtie par Je supplice éternel du feu inextinguible. Elles ne mourront pas et n’auront pas de fin à leurs maux. En résumé, les textes confus et équivoques qui semblent énoncer le salut de tous, doivent être expliqués d’après les nombreux textes clairs et explicites sur le feu éternel de l’enfer. Cf..tzbergcr, op. cil., p. 197 sq., 359 sq. l-^n dcliors de l’existence de l’enfer éternel, on trouve très peu de renseignements chez le contemplatif alexandrin sur la nature des peines éternelles : le plus souvent, il parle de la privation et de l’union divine, mais aussi du feu réel et matériel, constituant un su|)plice positif.

2. Orif/ène. — Quelle position a-t-il prise dans la question des peines de l’autre vie ? Pour l’ensemble, voir OniGftNE et Onicii.NisME.

Dieu, de toute éternité, a créé nécessairement des esprits, tous ceux qu’il peut gouverner ; il les a créés tous égaux. Le bien, ccpendant, dépend de leur liberté ; aussi beaucoup sont tombés, et pour les punir, Dieu a créé la prison du monde matériel. " Ce monde n’est pas autre chose que le lieu de purification des csprits l)annis dn ciel… A la fin tous les esprits retournent à Dieu ; quelques-uns devront encore subir dansl’autre monde une purification par le feu, mais, finalement, tous seront sauvés et glorifiés (âmes humaines ou dénions)..Mors le mal est vaincu, le monde sensible aura rempli son rôle, la matière rentrera dans le néant, l’unité primordiale de Dieu et de tous les êtres spirituels sera restaurée. Mais cette restauration de l’état

primitif. 1710/.aTi<jTa(7t ;, n’est point la fin proprement dite du monde ; elle n’est que le terme d’une époque dans l’évolution sans fin, dans la constante alternance de la chute et du retour à Dieu. Bardenhewer. Les Pcrcs de l’Église, t. i, p. 281. Cf. Harnack, Lehrbiich der Dogmengeschichle, 3° édit., t. i, p. 603648 ;.tzberger, Gcschiclite der cliristlich. Eschatologie innerhalb der vornicânischen Zeit, p. 402-411 ; Prat, Origène et l’origénisme, dans les Études, t. cv, p. 592 sq. ; HuettOrigeniana.l. II, q. xi, P. G., t. xvii, col.998sq. ; Petau, De angclis, 1. III, c. vi, Dogmata theologica, Paris, t. IV, p. 101-105 ; Tixeront, Histoire des dogmes, 1. 1, p. 304, 306 ; Prat, Origène, Paris, 1907, p. 105-109. Trois points appartiennent directement à notre sujet.

a) Restauration universelle, àTcoxaTào-caTt ; roiv àTtâv-T (ov. — Elle est enseignée. De princ, 1. II, c. iii, n. 3, 4, 7, P. G., t. XI, col. 190 sq. ; c. x, n. 5, 6, col. 237, 238 ; 1. III, c. V, n. 4 (trad. de S. Jérôme), col. 328, n. 8 ; c. VI, n. 3, col. 335 (trad. de S..Jérôme) ; n. 6, col. 338-340 ; 1. IV, n. 23, col. 391 ; mais surtout 1. I, c. VI, col. 166 sq., dont voici l’analyse. Le problème est difficile et n’appartient pas aux choses, dont la définition dogmatique soit certaine. Ce n’est donc qu’avec crainte et précaution qu’il faut ici s’avancer. La fin doit ramener à l’unité et tout soumettre au Christ, comme disent l’apôtre et le psalmiste. Quelle est cette soumission ? Je pense, dit Origène, que c’est celle dont nous-mêmes désirons être soumis, à laquelle sont soumis les apôtres et tous les saints. La fin, en effet, répond au commencement. Or, dans le principe, tout était parfaitement un ; puis la variété vint avec les perfections ou les déchéances diverses. En haut, les anges en ordres différents ; puis les hommes qui peuvent se convertir dès ici-bas ; puis les démons irrémédiablement déchus, c’est-à-dire pour le monde présent, non absolument, comme on l’a parfois interprété. Kn effet, ne pourrait-il pas se faire que même les démons dans les siècles futurs redeviennent bons, puisqu’ils sont libres ? En attendant, tous sont à leur place, en sorte qu’ils seront rétablis en leur premier état, en divers temps, quelques-uns à la fin des temps seulement. Après avoir souffert de phis grands et de plus graves supplices, par des degrés divers, ils remontent à travers les séries angéliqucs jusqu’aux choses invisibles et éternelles.

Cette erreur n’est pas enseignée exclusivement dans le Ihp’c àpxwv, œuvre (le jeunesse. Après les condamnations disciplinaires et dogmatiques de 231 et 232 (synodes d’.Mcxandrie), Origène ne donna que quelques explications très insufiisantes : un ami aurait indiscrèlemeiit publié quehpies propositions jias assez réfléchies ; les hérétiques auraient altéré ses écrits ; voir la eitalion de sa lettre â ses amis d’Alexandrie, dans saint.lérôme, Apol. adn. Hufin., 1. II, n. 18, P.L., t. XXIII, col. 442, où le salut du diable est nié par Origène ; ibid., n. 17, col. 439 sq., saint.lérôme rejette cette interpolation des hérétiques, comme une fable impossible.

Les mêmes erreurs sont exposées dans les écrits postérieurs de l’Adamantius. De orationr, n. 27, a un doute en fax’eur de la conversion du diable lui-même ; n. 29, Dieu induit en tentation pour punir et finalement corriger, toutes les âmes sont en effet toujours libres, l’.G., t. xi, col. 520, 537 540. Contra Cclsnin (vers 248), I. V, n. 15, col. 1201 sq., pour réfuter un blasphème de Celse, prétendant (|iie le feu de l’enfer fait de Dieu un cuisinier, Origène se voit obligé de dévoiler une doctrine, moins adajilée aux simples qui ont besoin de menaces, et pour cela, ’îvoilée dans les l’^criturcs, mais claire pour un esprit instruit et attentif : le feu de l’enfer n’a d’autre Unique de purifier les méchants. 1. VI, n. 26, col. 1332, l’enfer médi-