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ESDRAS ET NÉHÉMIE (LIVRES DE)

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serait autre qiicles ântîTo/al ^auOio)-/ Tisp’t àva’JEij.âTt.)/ de II Mach., ii, 13.

/II. LISTES. — Les deux livres renferment un certain nombre de listes comprenant pour la plupart YOnumération de ceux qui participèrent à l’œuvre de la restauration juive : noms de ceux qui revinrent de Babylone à Jérusalem, d’abord avec Zorobabel, Esd., II, 1-70 ; Neh., vii, G-73 a, puis avec Esdias, Esd., VIII, 1-14 ; noms de ceux qui prirent des femmes étrangères. Esd., x, 18-41 ; de ceux qui reconstruisirent les murs de.Jérusalem, Ncli., m ; de ceux qui apposèrent leur sceau à l’alliance du peuple avec son Dieu, Neh., x, 1-27 ; de ceux qui s’établirent à Jérusalem et dans les autres villes, Neh., xi. 3-30 ; enfin liste des prêtres et des lévites. Neh., xii, 1-20. La nature même de ces listes et la façon dont elles sont introduites dans le texte permettent de croire qu’elles sont tirées de documents officiels, les Juifs, en efïet, ayant l’habitude d’établir et de conserver les listes des noms importants et de dresser des généalogies, Neh., vil, 5 ; le choix en a été dicté ici par le souci de justifier les droits politiques et religieux des vrais Juifs, ceux qui étaient revenus de l’exil et leurs descendants. A remarquer l’identité de la liste Esd.. ii, et celle Neli., vii, 1-73 a, malgré de nombreuses variantes, analogues à celles que l’on rencontre dans tous les morceaux reproduits à différents endroits de la Bible ; à noter aussi les abréviations et les modifications dont ces listes ont été l’objet, cf. Neh., ix, et I Par., IX, et la tendance du rédacteur h réduire les énumérations.

IV. ŒVVRE DU nÉDACTEun. — Tout ce qui n’a pas été compris sous les titres précédents n’est pas nécessairement l’œuvre personnelle du rédacteur ; mais ici, il devient plus difficile d’indiquer l’origine de ses informations. Esd., i, 13 a, est la répétition de II Par., XXXVI, 22-23 ; l’édit de C>tus, Esd., i, 2-4, suppose un original plus ou moins remanié et traduit en langage juif ; Esd., i, 5-11, est l’œuvre du rédacteur plus préoccupé d’énumérer les objets du culte et les dons reçus pour le service du temple que de narrer l’histoire du retour. A ce c. i ressemble pour la forme littéraire c. iii, 1-iv, 5, que l’on peut ainsi attribuer à la même main ; noter en particulier les expressions : offrir, hommes de Dieu, selon ce qui est écrit dans la loi de Moïse, iii, 2. Driver, op. cit.. p. 547. A la fin des documents araméens, le rédacteur reparaît pour .raconter comment, après l’achèvement du temple, la célébration de la Pâque s’est accomplie exactement selon les prescriptions de la loi. Esd., vi, 19-22. Dans le livre de Néhémie, l’œuvre du rédacteur apparaît moindre encore, pour ceux toutefois qui ne se re-Jusent pas à trouver trace des Mémoires d’Esdras ou de Néhémie dans les c.viii sq. Onpcutlui attribuer XII, 10, 11, 22-2n, nous faisant descendre à une époque plus récente que celle du gouverneur de Jérusalem, ainsi que xii, 44-xiii, 3, parlant des jours de ce dernier, comme d’un passé déjà lointain. De lui encore la disposition des différentes parties d’Esdras-Néhémie. disposition qui soulève tant de problèmes historiques et chronologiques. Driver, op. cit., p. 544-554 ; Siegfried, Esra, Nehemia und Esther, Gœttingue, 1901, p. 7-12 ; Bertholet, op. cit., p. xiii-XIV ; Fischer, Die chronologischen Fragen in den Biichcrn Esra-Nehemia, dans Biblische Stiidien, Fribourg-en-Brisgau, 1903, t. viii, fasc. 3, p. 1-19.

IV. Date de composition.

A quelle époque ces éléments de provenance aussi diverse ont-ils été réunis ? D’un certain nombre d’indices relevés çà et là se dégage la conclusion d’une rédaction assez tardive, postérieure à la domination persane. Dans Neh., XII, 10, 11, 22, la généalogie des grands-prêtres .-se poursuit jusqu’à Jeddoa ou Jedda, c’est-à-dire

trois ou quatre’générations après Eliasib, le contemporain de Néhémie, Neh., xiii, 4, 28 ; Josèphe, Ant. jud., XI, VII, 2 ; viii, 2, lait de Jedda le contemporain d’Alexandre le Grand ; de plus l’expression « aux jours de Jeddoa » indique elle-même un temps assez reculé dans la pensée de celui qui l’emploie. Darius le Perse, mentionné Neh., , xii, 22, est, selon toute probabilité, Darius Codoman, qui régna de 335 à 330. Sans doute, il reste possible que ces passages soient des gloses ajoutées par quelque scribe à un livre ayant déjà reçu sa forme définitive, Vigouroux, Manuel biblique, Paris, 1899, t. ii, n. 519, mais ces constatations s’ajoutent à d’autres qui ont décidé bon nombre de critiques, même catholiques, à reporter la date de composition d’Esdras-Néhémie après l’époque où vivaient les deux principaux personnages du livre. Ainsi le rédacteur semble si éloigné du temps dont il se fait l’historien, qu’il passe sous silence des périodes considérables, Esd., vii, 1, et cela sans remarquer pareille lacune. Pour lui, les jours de Néhémie, 445 et années suivantes, apparaissent dans un passé déjà lointain, presque autant que ceux de Zorobabel, un siècle plus tôt. Neh., xii, 46. L’expression, si fréquente sous sa plume, de « roi de Perse » , Esd., 1, 1, 2, 8 ; iii, 7 ; iv, 3, 5, 7, 24 ; vii, 1, se comprend à une époque où la suprématie persane n’était plus ; auparavant, en effet, elle aurait été superflue et d’ailleurs tout à fait contraire à l’usage, comme le prouvent de nombreux passages des Mémoires, où l’on dit simplement » le roi » , Esd., vii, 27, 28 ; viii, 22, 25, 3C ; Neh., 1, 11 ; 11, 1 sq. ; v, 4, 14 ; vi, 7, etc., etles titres donnés aux Achéménides dans les documents officiels : le grand roi, le roi des rois ou le roi. Driver, op. cit., p. 546, en note. Cf. aussi Aggée, i, 1, 15, et Zacharie, vii, 1. Les difficultés et invraisemblances chronologiques supposent, elles aussi, un rédacteur très éloigne des événements dont la succession lui échappe ; enfin la détermination de l’auteur corroborera encore la conclusion qui se dégage de cet ensemble de remarques et qui nous fait descendre aux années d’Alexandre. Kaulen, Einleitunj in die heilige Schrijl, Fribourg-en-Brisgau, 1890, p. 212 ; Pcit, Histoire des livres de l’.A.ncien Testament, Paris, 1902, t. ii, Y>. 377 ; Gigot, Specicd introduction io the study of the Old Testament, Kew York, 1903, t. i, p. 333 ; Ilolzhey, Die Biicher Esra und Nehemia, IMunich, 1902, p. 62-64 ; Fischer, op. cit., p. 1. Cf. Mangenot, art. Néhémie, du Dict. de la Bible, t. iv, col. 1577-1578.

V. Auteur.

A cqui faut-il attribuer la rédaction d’Esdra.s-Néhémie ? A en croire la tradition juive, le rédacteur définitif serait Esdras : « Esdras, est-il dit dans le Talmud, Baba balhra, fol. 15 a, écrivit son livre et continua les généalogies des Chroniques jusqu’à son temps. » Le sens de ce témoignage a été discuté ; s’agit-il de notre premier livre canonique d’Esdras, ou de l’ouvrage unique comprenant aussi Néhémie ? Des écrivains juifs, pour concilier l’affirmation talmudique et le titre du second liTe : Paroles de Néhémie, fils de Hacalias, ont restreint l’attribution au premier livre. Wogue, Histoire de la Bible et de l’exégèse biblique, Paris, 1881, p. 80-82. Hypothèse assez peu vraisemblable, étant donné l’unité primitive des deux livres et le caractère d’addition tardive du titre de Néhémie. Gigot, , op. cit., p. 330-331. La tradition chrétienne et, selon quelques-uns, la tradition juive (Talmud, lac. cit.), ont attribué le plus souvent les deux livres aux deux personnages dont ils jîortent les noms. Vigouroux, Manuel biblique, t. ii, n. 515, 519. L’existence de documents de provenance diverse ne contredirait pas l’opinion traditionnelle, les deux héros de la restauration juive les ayant eux-mêmes insérés dans leur œuvre ; quant aux traces de rédaction tardive, elles ne sauraient non plus