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ESDRAS ET NÉHÉMIE (LIVRES DE)


cantiques, 1. IV, P. G., t. xiii, col. 1264, 196. Qu’entend-il par II<’livre d’Esdras, Esdras B ou notre Néhéniie actuel (les passages cités en proviennent) ? Il nous donne lui-même la réponse dans le canon qui se trouve dans le commentaire du ps. i : le onzième livre selon les Hébreux, y est-il dit, est Esdras I et II, qui n’en forment qu’un seul, appelé Ezra. P. G., t. xir, col. 1084. Les F’éres des conciles africains ignoraient-ils ce canon d’Origéne, c’est peu probable, et s’ils avaient voulu, comme c’est vraisemblable pour les deutérocanoniques, protester contre l’Esdras I et II de saint Jérôme, ils auraient indiqué clairement qu’ils entendaient par Hcsdnv libri duo, Esdras A et B, des bibles gi-ecques. Cf. Pope, T/if Ihird book of Fsdras and Ihf Tridentine canon, dans Journvd ol theological studies, 1907, p. 218-232.

L’omission d’Esdras dans le seul canon de Mommsen n’est que le fait d’une distraction du scribe, car la liste qui, d’après l’indication linale, devrait contenir vingt-quatre livres n’en compte que vingt-trois. Cf. Vigouroux, Dictionnaire de la Bible, t. ii, col. 152. Cependant, dans l’Église syrienne, les Chroniques, Esdras et Néhéniie avec Esther, ne faisaient pas primitivement partie du canon de l’Ancien Testament. Ils n’étaient pas traduits dans la Peschito, mais ils l’étaient toutefois au iV siècle ; dans les anciens manuscrits, ces livres sont distincts des protocanoniques. "Wright, Syiiac literatnrc, 2’^ édit., Londres, 1894, p. 4-5 ; B. Duval, La littéraiure syriaque, Paris, 1899, p. 38.

L’école d’Antioclie ne les admettait pas non plus. Diodore de Tarse ne les cite jamais. Saint Chrysostome n’y fait allusion qu’une lois. Au témoignage de Léonce de Byzance, P. G., t. lxxxvi, col. 13CC, Théodore de Mopsucste les excluait expressément du canon biblique, ainsi que les Paralipomenes, mais Théodoret les y admettait. On ignore les raisons pour lesquelles Théodore ne les admettait pas au nombre des livres canoniques. L. Dennefeld, Dcr aWcstamentliche Kanon dcr anliochenischen Scinde, dans Biblische Sludien, Fribourg-en-Brisgau, 1909, t. xiv, fasc. 4, p. 49-51 ; L. Pirot, L’œuure excgétique de Théodore de Mopsucste (lithog.), Bourges, 1911, p. 121 sq. Junilius, écho de Théodore de Mopsucste, exclut encore le I livre d’Esdras (y compris Néhéniie) du nombre des livres historiques divins et des Écritures canoniques de l’Ancien Testament. Iiistilula regularia divinx leijis, 1. I, c. iii, dans Kihn, Ihcodor von Mopsuestia nnd Junilius Ajricaïuis ats Exegcten, I-’ribourg-en-Brisgau. 1880, p. 472.

Ce sont les seules voix discordantes que l’on entende au milieu du concert de la tradition ecclésiastique sur la canonicité des livres d’Esdras et de Néhéniie.

III. MonE DE COMPOSITION.

Lcs livres d’Esdras-Néhémic racontent quelques événements importants de l’histoire de la restauration juive après la captivité, laissant de longues périodes, de 516 à 458, ou même 445, par exemple, sans aucun renseignement. La simple lecture y fait découvrir un ensemble de traits qui sont déjà une indication sur la manière dont l’ouvrage a clé composé ; voici les principaux : le brusque passage d’un sujet à un autre sans transition : Esd., II, 1 ; V, 1 ; Neh., i, 1 ; vii, 73 ; xii, 27 ; xiii, 14 ; ou i^ l’aide de formules aussi vagues que : après ces événements (passés quelejuc 60 ou 70 ans plus tôt), quand ces choses furent achevées, Esd., vii, 1 ; ix, 1 ; l’emploi intermittent de la première personne sans aucun mot d’explication ; l’insertion de deux fragments considérables rédigés en araméen, Esd., IV, 8-vi, 18 ; VII, 12 20 ; l’insertion de listes sans rapport immédiat avec le contexte, Neh., vii, G -73 ; XI, .3-36 ; XII, 1-26 ; la mention de personnages importants sans autre cxplication comme si déjà leur nom

s’était présenté dans un contexte antérieur, ainsi pour Zorobabel, Esd., ii, 2, pour Assuérus, Darius, Esd., IV, 5, 6 ; enfin le style et le vocabulaire sensiblement différents selon les passages. Il s’agit donc d’une compilation d’éléments d’origine et de nature diverses. Dans les grandes lignes du moins il est assez facile de les distinguer les uns des autres.

I. MiiMoiriEf^ ii’EsiJiiAS ET vE sÉuÉMiE. — Des portions considérables de l’un et l’autre livre se présentent sous forme de récits personnels, le scribe et le gouverneur nous rapportent eux-mêmes la part qu’ils ont prise à l’œuvre de restauration d’Israël ; tels sont les passages : Esd., VIT, 27-ix ; 15 ; Neh., i-vii, 73 a ; xii, ^ 27-43 ; XIII, 4-31 (quelques divergences parmi les critiques dans la délimitation de ces passages). Ce n’est là évidemment qu’une partie de leurs Mémoires, celle que le compilateur a jugée nécessaire à son but ; c’est ainsi que le récit d’Esdras apparaît privé de son commencement et de sa fin ; celui de Néhéniie s’ouvTe ex abrupto, et il est facile d’y constater des lacunes ; des gloses aussi pourraient être relevées çà et là. Cf. Bertholet, Die Bûcher Esra und Nehemia, Tubingue et Leipzig, 1902, p. xiv.

A ces passages reproduits intégralement, on en ajoute quelques autres également extraits des Mémoires, mais en partie remaniés, pas assez cependant pour ne pas trahir leur origine. Esd., vii, 1-10, qui n’est pas l’oeuvre du scribe (omission de ses ancêtres immédiats dans sa généalogie), est vraisemblablement un résumé du récit fait par Esdras lui-meme en tête de ses Mémoires pour leur servir d’introduction. Cf. les expressions des versets G et 9 et celles des versets 27 et 28. Le c. x, qui se distingue des précédents par l’emploi de la troisième personne et un récit parfois moins circonstancié (en particulier 16-17), pourrait bien lui aussi n’être qu’un résumé des Mémoires d’Esdras. Faut-il encore les chercher dans le livre de Néhémie auxc. vin et ix, à cause de la grande ressemblance de la prière des lévites, Neh., ix, avec celle d’Esdras, Esd., ix, et de certaines expressions déjà rencontrées sous la plume du scribe ? Quelques critiques le prétendent, Ewald, Bertheau, Schrader, Bertholet, Gautier. D’autres expliquent ces ressemblances par l’identité du sujet et par renqiloi, régulier déjà du temps d’Esdras, de queUiues tournures fréquentes chez le Chroniste. Driver, Introduction, . p. 550-551. D’autres rattachent ces chapitres à l’œuvre personnelle de Néhémie. Van Iloonacker, Nouvelles études sur la restauration juive après l’exil de Babi/lone, Paris et Louvain, 1896, p. 259-263. Bertholet et Gautier font de même pour Neh., x, xi, 3-24. Pour les particularités du style des INIémoires, voir Driver op. cit., p. 553 ; Mangenot, art. Néhémie, dans Vigouroux, Dict. de la Bible, t. iv, col. 1575-1570.

II. Df)i r.MESTS AiiAMÉEXs. — La correspondance de Réhuin avec Arlaxerxès au sujet de la reconstruction des murs, Esd., iv, 8-23, la correspondance de Thathanaï avec Darius au sujet de la reconstruction du temple, Esd., v, 6-vi, 12, le décret d’Artaxerxès en faveur d’Esdras, Esd.. vii, 12-20, enfin le récit qui relie ces documents, lettres de gouverneurs et réponses des rois, tout est écrit en araméen. Sans nous prononcer ici sur l’origine primitive de ces documents, disons que l’auteur d’Esdras Néhémie Irr, p eivpruntés, selon l’hypothèse la plus vraisemblable et reçue par le plus grand nombre, à un ouvrage historique rédigé en araméen, dont il lire librement plusieurs passages répondant à son but, lui-même connaissant d’ailleurs assez d’araniécn pour relier ces extraits par quelque transition dans la même langue, et pour remanier quelque peu le texte primitif. D’après Howcrth, Transactions o/ the ninthC.ongress of Orientalisls, 1893, p. 08-85, cette source araméenne ne