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rmiennes, et de plus j’ai des armes. Carel, Vie de leyra, p 154. Toute expédition devait avoir deux missionnaires pour juger les cas d’esclavage ; le plus souvent, assure Vieyra, il n’v en avait pas, et les interprètes trahissaient les Indiens. Ibid., p. 234. On peut constater la même chose, dit Las Casas, « par les intormations reçues dans les procès intentés contre des vice-rois et des gouverneurs qui tous ont cte des voleurs, des meurtriers, des méchants, et les plus mauvais des chrétiens, à l’exception de… » (il en nomme trois). Œuvres, t. ii, p. 12.

Quant aux gouvernements, les conseillers des rois, souvent pourvus de commendes, n’étaient guère a même de leur parler de désintéressement. Et puis, la raison d’État ? Dès l’abord, les commendes avaient été légitimées moyennant un demi-écu paye a la couronne par tête d’Indien. Plus tard, Avendano rapporte, 1. I, p. 1, 12, que Philippe IV avait promis d’abandonner les mines d’argent aussitôt que la guerre ne consumerait plus ses ressources. Enfin l’Amérique était fort loin, et l’asiento était fort lucratif.

4° Attitude des hommes d’Église vis-à-vis de cette conquête. Cf. Mar^raf, Kirche und Sklaverct, a qui nous avons emprunté un grand nombre de ces détails. — 1. Les religieux. — Les différents ordres religieux, chacun suivant les circonstances où il a été placé, ont résisté à la pratique et aux idées des conquérants espagnols.

Les dominicains ont la première place dans 1 ordre chronologique : la plus importante aussi, surtout avec Las Casas, le défenseur des Indiens. Des l’avent de 1510, à Saint-Domingue, Antoine de Montesino, porte-parole de tous ses frères et surtout de son prieur Pierre de Cordova, attaque la pratique des commendes et déclare ses auteurs responsables, coupables de péché mortel et indignes des sacrements, sauf amendement. On exige de lui une rétractation ; mais, au lieu de la donner, il confirme ses premières déclarations. De Madrid lui vient l’ordre de se taire : il se rend en Espagne. Son prieur l’y suit bientôt, sans rienobtenir ; les autres dominicainsde Saint-Domingue vont chercher des missions moins contrariées sur la côte de Cumana ; le rapt de quelques Indiens, commis par les Espagnols, et que les Pères ne purent faire réparer malgré leurs efforts, leur coûte la vie.

Las Casas, né à SéviUe (1474), n’était pas encore dominicain, lorsqu’il vint en Espagne en 1516. Prêtre depuis six ans, il avait passé deux années à Saint-Domingue, et depuis était conseiller du gouverneur a Cuba. L’appui des dominicains, Matienzo, confesseur du roi, et Diego de Dæza, archevêque de Sévillc, ne lui fit pas défaut. Dans un conseil, présidé par Ximenès (le roi Ferdinand venait de mourir et Ciiarles V était encore en Flandre), on convient d’un système d’une sorte de réductions, que d’ailleurs les intéressés empêchèrent de s’établir. Ce serait vers ce temps que Las Casas, d’après Herrera, aurait, en proposant l’emploi des nègres, déterminé une recrudescence de la traite. C’est alors du moins (en lo20) <iu’put lieu la conférence de Las Casas avec Quevedo. A la fin de l’année, Las Casas ayant gagné bien des svmpalhies à sa cause, s’embarque pour l’Ainérique ^uec 200 cultivateurs émigrants. En 1522, il se fait dominicain. Il parcourt le Mexique et le Pérou avec deux dominicains, Bernardino de Minaya et Pedro de Angulo, avec assez de ponhciir pour que les soldats refusent d’obéir au gouverneur Rodrigo de Contreras, qui voulait asservir les Indiens. Mendoza, vice-roi du Mexique, animé par Las Casas, se prononce contre l’esclavage. Las Casas se rend alors chez les Indiens du Tuzutlan et en deux ans (15371539), de ces pays que les Espagnols avaient appelés Tierra de guerra, il fait la Vera-Paz. En 1537, il tra duit et répand la bulle Veritas fpsa. Mécontent du gouverneur Pedro de Alvaredo, après un chapitre riominicain tenu à Mexico (1539), L^^fasas avec deux autres dominicains va en Europe. Il y obtient une série d’ordonnances favorables pour Vera-Paz : cinq ans durant, aucun laïque espagnol, sans 1 aveu des dominicains, ne pourra y entrer. Las Casas écrit alors La destmccion de las Indias, imprime seulement douze ans plus tard, réquisitoire formidable II écrit aussi alors les Vingt raisons pour^ l abolition des commendes. En 1543, Las Casas, eveque de Chiapa, revient en Amérique avec 14 dominicains : il annonce refus des sacrements et d’absolution à quiconque est infidèle aux nouvelles ordonnances Las Casas profita d’un synode tenu à Mexico, et obtint du viceroi qu’il laisse discuter ces questions par les théologiens. Les dominicains déclarent regarder 1 alîranchissement des esclaves comme obligatoire.

Bien des traits se retrouvent et dans 1 histoire des dominicains et dans celle des jésuites : bannissement : Thomas de Saint-Martin, O. P., président de la cour de justice de Haïti (vers 1625), doit résilier son emploi et passer au Pérou. Adrien de Ufeldo, dominicain lui aussi, s’oppose à la mita ; il est déporte de Panama au Pérou (1633). En 1661, lors du soulèvement qui éclate à Saint-Louis contre les jésuites, soulèvement auquel le gouverneur s’est associé, Vie>Ta et ses frères enchaînés sont envoyés à Lisbonne. Dévoue ment complet : Barthélémy de Vargas, O. P. (, 1598), se iette aux genoux d’un Espagnol qui maltraitait un Indien. Valdivieso, O. P. et évêque de Nicaragua, avait à lutter contre les fils de Rodrigue de Contrerasil les menace de censures, et les excommunie ; ils viennent l’assassiner dans sa maison (26 février 1549)- le P. IMaceta, S. J., suivant un convoi d Indiens enlevés, sait persuader à un des otTiciers de lui abandonner sa part d’esclaves ; le P. Suarez offre sa vie pour qu’on relâche les Indiens.

D’autres noms mériteraient encore d être cites parmi les dominicains : Alfonso de Noregna refusait les sacrements aux esclavagistes. Garcia de "loledo avait inspiré au vice-roi du Pérou, son cousin, de très sages ordonnances ; Angulo avait obtenu une défense expresse d’extorquer aux Indiens des services gratuitsCasillas avait déterminé une sécession à 1 intcrieur’des indigènes et des missionnaires. Casillas avait dit naguère ces mots qui résument bien le rôe de son ordre : « Nous sommes venus pour travailler à l’instruction et à la conversion des sauvages, et pour leur assurer la liberté qu’on leur ravit. » Les violences, nrêtées au dominicain Valverde par Robertson, Histoire de /’An, ér, V/ » c, t.iii, p.300sq., ne concordent pas avec le récit du compagnon et secrétaire de Pizarres Xercs, dans sa Vcrdadcra relacion de la Conqmsta dcl

Les jésuites’étaient arrivés au Brésil en 1549, quatre missionnaires conduits par Nohrega. Dès l’abord ils refusèrent les sacrements i" ! quiconque détenait des indigènes dans l’esclavage et dans le concubinage Un des premiers gouverneurs, Mem de Sa, qui avait

1 voulu faire les Exercices de saint Ignace, était dispose à appliquer les ordonnances de 1550 et 1556, qui déclaraient les Indiens libres. L’enquête fut sommaire, et il fallut parfois se contenter d’un serment que les maîtres faisaient prêter à leurs Indiens, affirmant qu’ils avaient été légalement asservis. Sous le roi Sébastien (1557-1578), on organise une commission pour la vérification des titres de rcsclavage ; une visite aura lieu trois fois par an ; toute vente a besom

, d’une permission expresse ; le sort des fugitifs est déterminé ; le mariage des nègres avec les Indiennes, véritable élève d’esclaves, est prohibé.

Les réductions du Paraguay voyaient alors la trans-