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ENDURCISSEMENT


pour se convcrlir hic et mine, mais, du moins, a-t-il la grâce de prier et, par la prière, le moyen de se disposer à la justillcation.

D’autre part, il arrive le plus souvent que le pécheur endurci est bien éloigné de penser aux choses du salut et de la religion, il est donc évident qu’il n’est pas ; tout instant excité par la grâce à se convertir ; mais Dieu lui donnera en temi)S opportun l’illuminatioTi de l’intelligence et rinspiration de la volonté, sullisantes pour qu’il puisse se convertir s’il le veut. Le temps opportun, où Dieu d’ordinaire distribue ces secours, c’est à l’occasion des grâces externes : la prédication, la maladie, les épreuves, les bonnes lectures, toutes circonstances qui incitent l’homme à la pénitence.

On peut citer un grand nombre de passages de la sainte Écriture où il est dit que Dieu endurcit les pécheurs. Exod.. x, 1. Dieu dit : « J’ai endurci le cceur de Pharaon et des Égyptiens, afin de faire des miracles sur eux et d’apprendre aux Israélites que je suis le Seigneur. » Nous lisons dans Isa’ie, xxxiii, 17 : « Vous avez endurci notre cœur afin de nous ôtcr la crainte de vos châtiments. « .Saint Paul conclut, Rom., ix, 18, « que Dieu a pitié de qui il veut et qu’il endurcit qui il lui plait » . S’il y a, disent les incrédules, un blasphème terrible, c’est d’enseigner que Dieu est la cause du péché ; telle est, cependant, ajoutent-ils, la doctrine de Moïse, des prophètes, de l’Évangile et de saint Paul. Il n’y manque rien pour être un article de foi du christianisme, comme l’a soutenu Calvin.

D’autre part, saint Augustin, s’appuyant sur ces mêmes passages de l’Écriture, semble admettre que, dans certains cas. Dieu prive le pécheur endurci de toute grâce. Xe soutient-il pas contre les pélagiens que l’endurcissement des pécheurs est un acte positif de la puissance de Dieu ? Lorsque Julien lui répond que les pécheurs ont été abandonnés à eux-mêmes par la patience divine, et non poussés au péché par sa puissance, le docteur de la grâce persiste à soutenir qu’il y a encore un acte de patience et un acte de puissance. Conlra Julianum, 1. V, c. ni, n. 1.3 ; c. iv, n. 15, P. L., t. xLiv, col. 791, 793. Aussi les théologiens de l’école augustinienne admettent que l’état d’endurcissement comporte une privation complète de toute grâce de conversion. Contre ces différents adversaires, nous devons établir et démontrer la proposition suivante.

m. Dk : monsthation. — Personne, tant ((u’il est en vie, n’est endurci dans le mal au point de n’avoir pas la grâce, au moins médiatement suffisante, pour sauver son âme. Cette vérité catholique est fondée sur l’Écriture sainte, le témoignage des Pères de l’Église et la raison théologique.

Argument d’Écriture sainte.

« Je vis, moi, dit

le Seigneur Dieu ; je ne veux pas la mort de l’impie, mais que l’impie se détourne de sa voie et qu’il vive. Détournez-vous, détournez-vous de vos voies très mauvaises et pourquoi mourrez-vous, maison d’Israël ?… Mais si je dis à l’impie : tu mourras de mort, et qu’il fasse pénitence de son péché…, tous les péchés qu’il a commis ne lui seront point imputés. « Ezech., xxxiii, n, 14, 16. « Convertissez-vous et faites pénitence de toutes vos iniquités, et l’iniquité ne vous sera pas à ruine. » Ezech., xviii, 30. « Si vos péchés sont comme l’écarlate, comme la neige ils deviendront blancs, et s’ils sont rouges comme le vermillon, comme la laine ils seront blancs. » Is., i, 18. Ces expressions sont générales, elles n’admettent aucune exception et comprennent, par conséquent, les pécheurs endurcis. « Mais vous avez pitié de tous, parce que vous pouvez tout, et vous dissimulez les péchés des hommes à cause du repentir. Car vous aimez tout ce qui est et vous ne ha’issez rien de ce que vous avez fait… Vous êtes indulgent envers tous, parce que tout est ; vous, Seigneur

qui aimez les âmes. Sap., xi, 24, 39.’< Le Seigneur agit patiemment à cause de vous, ne voulant pas. même que quelques-uns périssent, mais que tous recourent à la pénitence. » II Pet., iii, 9. Cf. Luc, v, 31 sq. ; xv, 1 sq. ; I Tim., ii, 4 stj.

Bien plus, la sainte Écriture invite en termes formels et pressants les pécheurs endurcis à se convertir. « Convertissez-vous à mes remontrances… Parce que j’ai appelé et que vous avez refusé de m’enlendre, que j’ai tendu ma main et qu’il n’y a eu personne qui m’ait regardé, que ous avez méprisé tous mes conseils et négligé mes réprimandes, moi aussi, à votre mort je rirai. » Prov., i, 23. " Est-ce que tu méprises les richesses de sa bonté, de sa patience, de sa longanimité ? Ignores-tu que la bonté de Dieu t’invite à la pénitence ? Cependant par ta dureté et ton cœur impénitent, tu t’amasses un trésor de colère pour le jour de la colère et de la manifestation du juste jugement de Dieu. » Rom., ii, 1. Cf. Sap., xii, 20 sq. ; Act., VII, 51.

Argument des Pérès de l’Église.

Saint Augustin

traite de l’endurcissement dans son traité LUI, In Joa. Expliquant ce texte de saint Jean -.Proplerea non potercmt credere, quia iterum dixit Isaias : Excsecavit oeulos corum et induravil cor eorum…, Joa., xii, 39, il se propose l’objection suivante : « S’ils n’ont pu croire, comment y a-t-il péché pour un homme de ne fairs point ce qu’il ne peut pas faire ? In Joa., tr. LUI, n. 5, P. JL., t. XXXV, col. 1776, et il répond en ces termes : ’Ils ne pouvaient pas croire parce que le prophète Isaïe avait prédit ce résultat ; nais le prophète avait prédit cet événement parce que Dieu l’avait prévu. Si vous me demandez pourquoi ils n’ont pas voulu croire, je vous réponds : parce qu’ils ne voulaient pas, » n. 6. Cette impuissance à croire n’a rien d’étonnant en ceux dont la volonté est orgueilleuse au point d’ignorer la justice de Dieu pour rechercher leur justice propre… Lors donc qu’il est dit, ils ne pouvaient pas, entendez : ils ne voulaient pas ; de même qu’il est dit de Dieu, notre Seigneur : il ne peut pas se nier. Il Tim., Il, 13… Que Dieu ne puisse pas se nier, c’est la gloire de la volonté divine, que ceux-ci ne puissent pas croire, c’est la faute de la volonté humaine, n. 9. « Si donc ils ne pouvaient croire, ce n’est pas que l’homme ne puisse se convertir, mais parce qus l’obstination dans leur sens propre empêchait la croyance, » n. 10. Pourquoi Dieu ne leur donne-t-il pas une grâce efiicace qui les aide â croire ? « C’est, répond le saint docteur, à cause de la volonté perverse de ces hommes, » n. 6, 7. De tout ceci il ressort clairement que l’obstacle à la conversion des pécheurs endurcis, ce n’est pas le défaut de grâce sulfisante, mais bien la mauvaise volonté de ceix-ci qui résistent à la grâce.

Le même docteur, commentant les paroles de saint Paul aux Romains, i, 28, s’exprime en ces termes : ’1 Voilà l’aveuglement de l’âme, celui qui est afTIigé de cette cécité, est privé de la lumière intérieure de Dieu, mais pas entièrement, tant qu’il est en cette vie. Il y a, en effet, les ténèbres extérieures, qui se rapportent plutôt au jour du jugement ; alors tout homme qui aura refusé de se convertir, quand il en était temps encore, se trouvera séparé totalement de Dieu. » Inps. vi, n. 8, P. L., t. xxxvi, col. 94. De là, saint Augustin tire cette conclusion : < : Il ne faut jamais désespérer du salut du pécheur si obstiné soit-il, tant qu’il est en vie, et l’on a raison de prier pour celui dont on ne désespère pas. » Retract., 1. I, c. xix, n. 7, P. L., t. xxxii, col. GIG. Saint Prosper dit aussi : « Dieu ne barre jamais la route au retour cUi pécheur, jamais il ne prive quelqu’un de la possibilité de Liire le bien. » Resp. XV ad object. Vincent., P. L., t. li, col. 85. L’auteur anonyme de l’ouvrage : De voeationc yentium <i encore : « Xous croyons que le secours de la grâce n’est