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ENCHANTEMENT — ENCRATITES

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ou apprivoiser par dessiffl-ments ou)nirles inflexions de la voix. Quoique ces procédés soient très naturels, ils ont dû paraître merveilleux aux ignorants. On a vu des voyageurs ayant pris des oiseaux à la pipée être traités par les sauvages comme des enchanteurs. Dans ces moments d’admiration, il n’a pas été diffieile à » des hommes rusés d’en imposer ; uix simples, de leur persuader que, par des chants ou des paroles magiques, on pouvait guérir les maladies, détourner les orages, rendre la terre fertile, etc., aussi aisément cfue l’on rendait dociles les serpents et autres animaiix. Il n’en fallut pas davantage pour étaljlir l’opinion du pouvoir surnatiu’el des enchanteurs. Ce pouvoir prêt ernaturela-t-il réellement existé ? VoirM.GiE.

Dans l’Exode, vii, viii, lorsque Moïse fit des miracles en Egypte, il est dit que les magiciens de Pharaon « firent des œuvres semblables par des enchantements et des pratiques secrètes. » Ces pratiques pouvaient être des moyens naturels, des tours de main capables d’en imposer aux spectateurs. Y eut-il du surnaturel dans leurs opérations, rien ne nous oblige de le supposer et le récit de la Bible semble plutôt prouver le contraire. Voir Dictionnaire de la Bible, t. ii, col..597.

Toutes les superstitions étaient une conséquence naturelle du polythéisme et de l’idolâtrie : les philosophes païens en ont été infatués aussi bien que le peuple. On admettait généralement, dans le iiaganisme, qu’un homme pouvait avoir commerce aec les génies ou démons que l’on adorait comme des dieux, et obtenir de ceux-ci des connaissances supérieures ou opérer par leur recours des choses prodigieuses. Telle est la première origine des différentes espèces de magie.

IV. Espèces.

On a cru que par certaines formules d’invocation, per carmina, l’on pouvait faire dgir les génies, c’est ce que l’on a nommé charmes ; les attirer par des chants ou par le son des instruments de musique, ce sont les enchantements ; évoquer les morts et converser avec eux, c’est la nécromancie ; apprendre l’avenir et connaître les choses cachées, ce sont les différentes espèces de divination (augures, aruspices) ; envoyer des maladies ou causer du dommage à ceux auxquels on veut nuire, ce sont les maléfices ; nouer les enfants et les empêcher de croître, c’est la fascination ; diriger les sorts bons ou mauvais, et les faire tomber sur qui l’on veut, c’est ce que nous nommons sortilèges ou sorcellerie ; inspirer des passions criminelles aux personnes de l’un ou l’autre sexe, ce sont les philtres, etc. Tout cela dérive de L’erreur fondamentale du paganisme : l’existence de génies bons ou mauvais, sortes de divinités inférieures, pouvant agir sur les hommes et se mettre à leur service.. - ^., . ;, ;-rpil *i

V. CoND.wiNATioN. — A l’époquc de la prédication de l’Évangile, la magie et les prestiges de toute espèce étaient communs parmi les païens et chez les juifs ; les basilidiens et d’autres liérétiques en faisaient profession. Constantin, devenu chrétien, ne défendit d’abord que la magie noire et malfaisante, les enchantements pour nuire à quelqu’un ; il n’établit aucune peine contre les pratiques destinées à produire du bien. Mais les Pères de l’Église s’élevèrent fortement contre toute espèce de magie. Ils firent voir que non seulement ces pratiques étaient vaines et absurdes, mais que si elles produisaient quelque elTet, ce ne pouvait être que par rojiération du démon ; qu’y avoir recours ou y mettre sa confiance, c’était un acte d’idolâtrie, une espèce d’apostasie du christianisme. Ils recommandèrent aux fidèles de ne point employer d’autres moyens pour obtenir les bienfaits de Dieu, que la prière, le signe de croix, les l)énédictions de l’Église. Plusieurs conciles confirmèrent, par leurs décrets, les levons des Pères et prononcèrent L’excommunication contre tous ceux qui useraient

de pratiques superstitieuses. Citons les conciles de I.aodicée de 360, can. 3(), voir Hefele, Histoire des conciles, trad. I.eclercq, t. i, p. 1018, celui d’Agde de 506, can. 12, Hefele, t. ii, p. 997, le concile in Tnillo de 692, a. 61, Hefele, t. iii, p. 570, le concile de Rome de 721, can. 12. Ibid., p. 597. Les capitulaires de Charlemagne et plusieurs conciles postérieurs, le ! pénitentiel romain ont frappé d’anathéme et ont soumis à une pénitence rigoureuse, tous ceux qui auraient recours à la magie, de quelque espèce qu’elle fût.

( ; c serait une erreur flagrante de soutenir que les prohibitions et les censures de l’Église sont précisément ce qui a donné plus d’importance à ces pratiques ; que l’on aurait désabusé plus efficacement les peuples, si l’on avait eu recours à l’histoire naturelle et à la physique. Mais c’est cette étude même, mal dirigée, qui avait été la source du mal. Le polythéisme qui avait peuplé l’univers d’esprits, de génies, de démons, les uns bons, les autres mauvais, était né de faux raisonnements et de fausses observations de la nature ; le christianisme, en établissant la croyance en un seul Dieu, sapait cette erreur par la base. Les superstitions auraient été plus tôt détruites, si les barbares du Nord, tous païens, ne les avaient pas fait renaître dans nos contrées. La religion a plus contribue à déraciner les superstitions de la magie que l’étude de la physique ; les simples sont incapables de cette étude, mais ils sont très capables de croire en un seul Dieu. Voir Magie.

C. AXTOINE.

    1. ENCRATITES##


ENCRATITES. — I. Origine. II. Doctrine. IIL Opposition à l’encratisme hérétique.

I. Origine.

L’ascétisme chrétien.

L’ascétisme,

quand il est inspiré par des motifs raisonnables et dans le but de réfréner les passions, de mortifier la chair, d’expier le péché et de pratiquer la vertu, ne peut être que recommandé. De tout temps il a été pratiqué par certains hommes, même en dehors du judaïsme et du christianisme. Clément d’Alexandrie rappelle qu’avant les encratites, les allobiens, chez les Sarmates, n’habitaient pas les villes, n’avaient ni toit ni demeure, se revêtaient de simples écorces d’arbres, ne mangeaient que des glands et des baies, ne buvaient que de l’eau et n’usaient pas du mariage, Strom., I, 15, P. G., t. VIII, col. 780 ; que les brahmanes et ceux qu’on appelait les vénérables, tsplvo ; ’, parmi les Indiens, pratiquaient de semblables mortifications et d’autres encore. Strom., III, 7, col. 1161. Et certes, Jésus -Christ et ses apôtres ne s’étaient pas fait faute, comme en témoignent abondamment les Évangiles et les Épîtres, de recommander l’ascétisme sous de multiples formes. Et les premiers chrétiens, dociles à de tels enseignements, le pratiquèrent comme il convient, car rien ne cadre mieux avec les principes de la vie chrétienne, qui est une vie de mortification.

Premiers dangers.

Mais, malgré les plus sages

réserves, des excès étaient à craindre, même en cette matière, même chez des baptisés ; et surtout d’autres motifs que ceux d’une foi éclairée et d’une morale bien réglée pouvaient y pousser ; d’autres maîtres que les représentants légitimes de l’Église pouvaient en être les inspirateurs suspects. On l’avait bien vu du temps des apôtres, puisque saint Paul écrivait à Timothée : « L’Esprit dit clairement que dans les temps à venir, certains ab indonneront la foi, pour s’attacher à des csprits séducteurs et à des doctrines diaboliques, enseignées par d’iiypocrites imposteurs qui ont la marque de flétrissure dans leur propre conscience, qui proscrivent le mariage et l’usage d’aliments que Dieu a créés afin que les fidèles et ceux qui ont connu la vérité en usent avec actions de grâces. Car tout ce que Dieu a créé est bon, et l’on ne doit rien rejeter de