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ÉPICLÈSE EUCHARISTIQUE


il a été dit par le Verbe : Ceci est mon corps, ’O apTOç… eù6ù ; Tipoç xb coni-x. Stà toû Âiyo’J (xêTaTtotoùp. £vo ;, xa6cbe e’prjTai ûmb to-j A(5you, ott toOto èo-n tô cà>|j.â noy. » 0/-aI. caiech., Xxxvii, P. G., t. XLV, col. 97. Ce texte est d’autant plus important au point de vue théologique, que l’on peut y voir une des premières affirmations de l’instantanéité de la consécration eucharistique. La même idée ressort du texte classique de saint Grégoire de Nazianze écrivant à saint Amphiloque : « N’hésite pas à prier et à intercéder pour nous, lorsque par la parole tu altires le Verbe, lorsque, par une section non sanglante, tu divises le corps et le sang du Seigneur, ayant la voix pour glaive. » EpisL, clxxi, P. G., t. xxxvii, col. 280. Nestorius, In Heb., iii, 1, se sert de la même comparaison quand il dit en parlant du sacrifice de l’autel : "…Le Christ est sj^mboliquement crucifié, égorgé par le glaive de la prière sacerdotale, » t ?i tîjç iepaxixriç eûxT|Ç (j.axatpa o-(paTTÔ(j.Evo ;. Loofs, Nestoriana, Halle, 1905, p. 241. Il n’est pas téméraire de supposer que ce glaive de la prière sacerdotale fait allusion aux paroles de l’institution et à leur efficacité consécratoire.’Voir aussi, pour S. Grégoire de Nazianze, Oral., xviii, 29, P. G., t. xxxv, col. 1020-1021. Cf. Césaire de Nazianze, Dial., iii, q. clx, P. G., t. xxxviii, col. 1132-1133.

Saint Basile ne fait que confirmer ces témoignages, loin d’y contredire, lorsque, dans son traité De Spirilu Sanclo. après avoir posé en principe l’existence dans l’Église, de deux sources, de la foi, l’Écriture et la tradition, il ajoute par manière d’application : « Les paroles de V invocation (xà xt, ; i-K’.y.’/.r^(j£u) ; pïifji.axa) dans la production (èttI xî) àvaSet’?ei) du pain eucharistique et de la coupe de bénédiction, qui donc d’entre les saints nous les a laissées par écrit ? Car nous ne nous contentons pas de ce que rapporte l’Apôtre ou l’Évangile, mais nous disons avant et après d’autres choses qui sont d’une gi-ande importance pour le mystère (itpo>iyo|j.sv v.a l7rtXÉY0[XEv ixepa, <i)Ç [i.tfàlTiV ïyo^za Trpb ; xb [J. ! j(7Xr|ptov xrjv layyv) et que nous avons reçues de la tradition non écrite. » De Spiritu Sancto, xxvii, 66, P. G., t. xxxii, col. 188. On ne saurait affirmer, selon nous, plus clairement que l’anaphore (car c’est bien elle sans contredit que désigne ici encore le mot s- ; y.), /i<^'0> formule eucharistique transmise dans son ensemble par l’enseignement oral, a son centre naturel dans le récit évangélique de l’institution, et donc dans les paroles mêmes du Sauveur transmises par les synoptiques et par saint Paul. Au sujet du récit de la cène et de l’importance que lui donne saint Basile, cf. De baptismo, I, m, 2, P. G., t. XXXI, col. 1576. Que diverses prières encadrent ce récit cwant et après, et qu’elles concourent puissamment au mystère, nous pouvons le dire tout comme saint Basile, sans cesser de voir dans les paroles divines la forme essentielle et unique de la consécration. Cf. Orsi, op. cit., p. 19, 72-74.

Nous résoudrons tout à l’heure dans un sens analogue la difficulté que certains auteurs croient voir dans certains passages des Catéchèses de saint Cyrille de Jérusalem. Mais comme celui-ci met particulièrement en relief l’intervention eucliaristique du Saint-Esprit, il nous faut auparavant indiquer les premières traces traditionnelles de cette idée et montrer qu’elle ne contredit point, pour autant, l’attribution de la consécration aux paroles du Christ.

2° Attribution de la transsubstantiation à la fois cm Christ et au Saint-Esprit, mais en même temps affirmations formelles de l’efficacité consécratoire des paroles de l’institution. — L’attribution de la consécration au Saint-Esprit paraît dans la Didascalie, VI, XXI, 2 ; XXII, 2, édit. FunJ<. p. 370, 376, c’est-à-dire dès la seconde moitié du iii’e siècle. Voir les passages I

cités plus haut. Elle est aussi dans la pensée de saint Cjprien : « On ne peut pas consacrer l’oblation là où n’est pas l’Esprit-Saint, » nec oblatio sanctificari illic possit ubi Spiritus Sanctus non sit, dit l’évêque de Carthage, Epist., lxiv, 4, P. L., t. iv, . col. 392. A partir du iv<e siècle, les témoignages se multiplient.

a) En Orient. — En Orient, l’attribution de la transsubstantiation au Saint-Esprit est attestée par de nombreux textes au iv siècle. Saint Grégoire de Nysse parle de « la sanctification du Saint-Esprit v xbv àYiao-p.bv xbv xoO Ilvcûnaxoi ;, conférée au pain et au vin, en vertu de laquelle ils deviennent corps et sang du Christ. De bapl. Cbristi, P. G., t. xlvi, col. 582-Cf. Orat. in laud. fratris Basilii, P. G., ibid., col. 805. Mais pour Grégoire de Nysse comme pour Cj’prien de Carthage, cette affirmation doit se concilier avec leur témoignage concernant le récit de la cène et les paroles du Sauveur. Aussi bien, pour l’un comme pour l’autre, cette « sanctification du Saint-Esprit » n’est pas spéciale à l’eucharistie, bien qu’elle y produise sur les éléments un effet très différent de celui qu’elle produit sur ceux des autres sacrements. Le Saint-Esprit sanctifie également l’eau du baptême et l’huile de la confirmation ; c’est même à l’occasion’du baptême que saint Grégoire de Nysse prononce le mot àTxt’v.)>Ti<rii ;, en disant que les choses au moyen desquelles s’accomplit la régénération sont « la prière à Dieu et l’invocation de la grâce céleste, -^âptxoç oùpave’a ; inUir^ai ;, l’eau et la foi. » Et un peu plus bas, il mentionne encore » la prière et l’invocation de la puissance divine faite sur l’eau » , fjyji y.a’i ôuvâ[j.sto ; ôet’aç 57rtx), T|(7tç Itti toO jSxto ; yr/o^é’/r, . Orat. caiech. , xxxiii, P. G., t. XLV, col. 84. Cf. ibid., xxxvi, P. G., ibid., col. 92. Ces indications sont de nature à montrer que l’attribution de la consécration au Saint-Esprit n’est pas l’admission de la prière actuellement appelée épiclèse au rôle de forme. Les textes signalés visent plutôt uniquement à faire voir dans la transformation du pain et du vin un miracle de la puissance divine invoquée à cet effet et spécialement appropriée au Saint-Esprit, bien que commune aux trois personnes de la Trinité. Notons encore cette expression intéressante de saint Basile, Epist., viii, 2, P. G., t. xxxii, col. 249 : « Le Fils et le Saint-Esprit sont la source de toute sanctification. » La même expression se retrouve dans plusieurs liturgiesorientales. Brightman, op. cit., p. 525, note 12.

Saint Cyrille d’Alexandrie († 444) répète l’idée de saint Cyprien touchant le sacerdoce du Christ, en un texte qui, de plus, met en relief l’action trinitaire dans le rite eucharistique, fournissant ainsi à son tour la vraie base de solution pour la question de l’épiclèse. « Toute grâce et tout don parfait nous vient du Père par le Fils dans le Saint-Esprit. » In Luc, xxii, 19, P. G., t. Lxxii, col. 908. Cf. In Matih., xxvi, 27, ibid., col. 452 ; Adv. anthropomorph., Epist. ad Calosyrium, P. G., t. lxxvi, col. 1073 ; c. xii, ibid., . col. 1097, où il est affirmé que n les oblations faitesdans les églises sont sanctifiées, bénies et consacrées par le Christ ; » Ad reginas de recta fide oralaltéra, n. 44, ibid., col. 1396.

Saint Jean Chrysostome est le plus explicite de tous les Pères orientaux au sujet de l’intervention eucharistique du Saint-Esprit, en même temps que sur l’efficacité consécratoire des paroles du Christ. Il connaît l’épiclèse pour l’avoir employée dans la liturgie quotidienne ; il attribue avec insistance la transsubstantiation et le sacrifice à la vertu invisible du Saint-Esprit agissant par le ministère du prêtre. Desaccrdot., III, iv ; VI, iv, P. G., t. XLvin, col. 642, 681 ; Oral, de B. Philogonio, ibid., col. 753 ; De cœm. et cruce, 3, P. G., t. XLix, col. 397-398 ; De resurrecL