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EPICLESE EUCHARISTIQUE


fepiclese, dans les Échos d’Orienl, 1909, t. xii, p. 129 sq., 222 sq.

Même doctrine dans saint Irénée : ni : iis ici la formule consécratoire est appelée " la parole de Dieu’, xbv Xôyov ToO 0£oû, et « l’invocation de Dieu » , Trjv iTTt’-xXïi’jiv Toû 0£oi, ou encore « la formule de l’invocation » , TÔv Xoyov T ? ;  ; è7 : tx), T|a-ew ;. Cont. hær., I, XIII, 2 ; IV, XVIII, 4, 5 ; V, ii, 3 ; P. G., t. vii, col. 580, 1028-1029, 1125-1127. Ce terme d’invocation, qui apparaît ainsi pour la première fois au iie siècle (cf. les Acla Thomæ, œuvre gnostique de la première moitié du iiie siècle, c. xlvi, édit. Bonnet, Leipzig, 1903, p. 116 ; Scheiwiler, Die Elemenie der Eucfiaristic in den ersten drei Jahrluinderten, Mayence, 1903, p. 153 ; Struckmann, Die Gcgenwart Christi in der hl. Eucliaristie nach den schrifllichen Quellen der vomizànischen Zeit, p. 107-108), ne désigne pas, chez saint Irénée, exclusivement du moins, l’épiclèse actuelle, mais bien tout l’ensemble de la formule eucharistique d’alors, autrement dit toute l’anaphore, tout le canon.

C’est avec ce sens que le mot revient, au iii<-’siècle, sous la plume de saint Firmilien de Césarée : celui-ci parle d’une pseudo-prophétesse qui contrefaisait le rit eucharistique en employant à cet eKctV invocation et la prière ou formule accoutumée : eti<un hoc fréquenter ausa est, ut et invocatione non conlemptibilisanctificare se panem et cueharistiam facerc simularet, et sacrificium Domino non sine sacramento solita ; prædiccUionis offerret. Parmi les lettres de saint Cyprien, Epist., Lxxv, P. L., t. iii, col. 1165 ; cf. t. iv, col. 413. Il a le même sens également dans un texte de saint Basile que l’on objecte souvent à la doctrine catiiolique sur la forme de l’eucharistie, mais qui nous paraît, au contraire, lui être entièrement favorable.

Avant de citer ce texte très imjjortant, signalons les expressions de signification identique employées par d’autres auteurs des cinq premiers siècles.

Pour Origène, In Matth., homil. xi, 14 ; Contr. Cels., VIII, xxxiii, P. G., t. xiii, col. 949 ; t. xi, col. 1565, et pour saint Grégoire de Nysse, Oral, catech., xxxvii, P. G., t. XLV, col. 96-97, c’est " la prière, les prières et actions de grâces, la jjrière faite sur le pain et qui le sanctifie » ; mais il faut ajouter que c’est aussi " la parole de Dieu et l’invocation » , selon la locution empruntée à I Tim., IV, 5 (otà Xô-pv ©soC /.% : i-nvjUK), ou simplement « la parole de Dieu dite sur le pain > ; hâtons-nous, d’ailleurs, de dire que saint Grégoire de Nysse précisera tout à l’heure que cette parole n’est autre que celle du Christ : « Ceci est mon corps, ceci est mon sang. » Pour Eusèbe, De laud. Constantin !, c. xvi, /’. G., t. xx, col. 1425-1427, ce sont " les prières et la mystérieuse ŒoÀoyia, ô ; ’vltyii-/ /.al aTioppriTou ŒoXoYJa ;. Sur ce dernier mot, dont la signification paraît être « doxologic’ou’action <le grâces â Dieu » , voir Cagin, Te Deuni ou illalio, p. 324 sq. Pour saint.thanase, Serm. ad bapti :., fragments, P. G., t. XX VI, coi. 1325-ir)26 ; cf. t. i.xxxvi, col. 2401, ce sont " les grandes et admirables prières et les saintes supplications >, Uziion ax’i êeriO-et ; …, aï iif(ilai Evya’i y.a’i àyca ; ly.içi’ai, après les<iuelles « le Verbe descend sur le pain et sur le calice.’Pour saint Ambroise, c’est " le mystère de la prière sacrée » , per sacræ orationis mijsterium. De ftde, IV, X, 154, P. L., t. XVI, col. 667, ’la bénidi.tio.i divine ; mais c’est aussi, et d’une manière très [jrécise, " la bénédiction du Christ et la consécration par les paroles du Christ. » De mi/steriis, ix, 50-54, P. L., t. XVI, col. 422-424. Pour saint Augustin, c’est " la prière mystique qui consacre » , prrrc mi/stica consr^ralum, J)r Trinitate, I. III, c. iv, 10, P.’L., t. xlii, col. 873-87 I ; pour saint.lérôme, ce sont’les prières » , precrs qui bus Christi corpus conficitur, ou encore « la solennelle prière » , solemneni orationem. Epist., cxLvi, ad Evangelum ; In Soph., ciii, P. L., t. xxii, col. 1193 ; t. XXV, col. 1375. Cf. S. Grégoire le Grand, Epist., IX, 12, P. L., t. Lxvii, col. 956, où les deux expressions 77 ! o, f posl preccni et mox post canonem, sont données comme absolument équivalentes ; Théodoret de Cyr(t458), Eranistes, ii, P. G., t. lxxxiii, col. 168, où la formule consécratoire est appelée « l’invocation sacerdotale » , lEpanx/i èth’xXïiti ?.

Il ressort avec évidence du contexte de ces divers passages que de telles expressions, tout en désignant la prière eucharistique prise dans son ensemble, non seulement n’excluent pas les paroles du Sauveur, mais au contraire les impliquent nécessairement comme partie centrale de la formule complète. Sans doute, la liturgie avait déjà encadré ces paroles sacrées dans un ensemble de rites et de prières, comme Jésus avait voulu le premier donner pour cadre au divin banquet le rituel pascal. Mais tandis que nous connaissons seulement par de vagues allusions cet encadrement euchologique durant les premiers siècles, il est frappant de constater que saint Justin et saint Irénée assignent déjà clairement aux paroles évangéliques le rôle de formule centrale. Le premier s’exprime ainsi, immédiatement après la phrase que nous avons citée tout à l’heure : « En effet, les apôtres, dans les mémoires faits par eux et appelés Évangiles, ont rapporté que Jésus leur donna ce commandement. Ayant pris du pain et rendu grâces, il dit : Faites ceci en mémoire de moi ; ceci est mon corps. De même ayant pris le calice et rendu grâces, il dit : Ceci est mon sang, rt Apol., i, 66. Le second écrit en termes peut-être plus suggestifs encore : < Notre-Scigneur, donnant à ses disciples le commandement d’olTrir à Dieu des prémices de ses créatures, non qu’il en ait besoin, mais afin qu’eux-mêmes ne soient ni infructueux ni ingrats, prit le pain, qui est de la créature, et rendit grâces en disant : Ceci est mon corps. Et pareillement pour le calice, qui est aussi de la même créature…, il déclara que c’était son sang et enseigna l’oblation nouvelle du Xouvcau Testament. L’Église, l’ayant reçue des apôtres, l’offre dans le monde entier à Dieu qui nous fournit les aliments. » Cont. hær., IV, XVII. 5, P. G., t. VII. col. 1023-1024.

Saint Cyprien (t258) dit formellement que le prêtre tient à l’autel le rôle du Christ, souverain prêtre, dont il reproduit les gestes augustes : yjamsi Jésus Christus Dominus et Dcus nostcr ipse est summus sacerdos Dei Patris, et sacrificium Patri se ipsum primus oblulit, et hoc fieri in sui commemorationem pnccepit, utiqur ille sacerdos vice Christi vcrc fungitur qui id quod Christus fecit imitatur, et sacrificium verum et plénum tune offert in ccclesia Dca Patri, si sic incipiat offerre secundum quod ipsum Christum vidral obtulisse. Epist., L,

i, c. XIV ; cf. ibid., c. x, P.L., t. iv, col. 385386 ; cf. col. 381-382, où Cyprien cite tout au long le récit de la cène d’après saint Paul, pour conclure que nous avons à reproduire exactement la cène telle que le Christ l’a célébrée. Eusèbe de Césarée, parlant du sacrifice institué par.lésus ( ; iirist, le présente comme l’effet de ce qu’il appelle < les ineffables l)aroles du nouveau testament > : rà (iOjj.ôo> a ttov xat’QcJTÔv à7roppY, T(.)v Tr, ; xaivi, ; ôiaSi^x » ) ; Xdyiov toΠ; aùtoO napEÎîSo-j |j.aOr|Ta !  ;. Denwnslr. evang., viii, 2, P. G., t. XXII, col. 629.

Saint (irégoirc de Nysse, dans le même passage où, après Origène, il applique à l’alnnent eucharistique ce que saint Paul, I Tim., iv, 5, disait en général de toute nourriture " sanctifiée par la parole de Dieu et par l’invocation » , insinue clairement que cette formule désigne avant tout, à ses yeux, la parole transformatrice du Verbe : Ceci est mon corps : " Le pain est changé… aussitôt au corps par la parole, comme