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ÉPICLKSE EUCHARISTIQUE


l)Our les gv’iitils, en m’acquillant du divin service de l’Évangile de Dieu, afin que l’olïrande des gentils soit agréée, élani sanctifiée dans te Saint-Esprit : » s’iç tÔ Etv.ai jAS >, ei-0"j ; 3Ybv Xppro-j’Ivio-oO eî ; -rà èBvi, , ispoupYoOvra tÔ e-JayyÉ/.tov toû 0ïov, "va -j-ÉvriTai rj TtpOTçopà T(ôv È9v(iiv £Ù7 : pô(7ûixTo ;, Ti>, : a5aévri âv nv£-J[j.aTi àyio). On voit avec quelle insistance l’Apôtre marque ici le caractère sacerdotal, liturgique en quelque sorte, de sa mission. Aussi n’est-il pas étonnant que ce texte biblique ait été utilisé, par exemple, dans la liturgie grecque de saint Jacques au cours d’une de ces oraisons d’offertoire que nous avons appelées des prolepses d’épiclèse. Brightman, op. cit., p. 47. Cf. Hoppe, op. cit., p. 97, note 225.

Un autre fondement scripturaire de l’épiclèse consiste dans le discours de la cène. Joa., xv-xvii. Le fait de voir unie, dans ce discours d’adieu, la pensée de la passion, de la résurrection, de l’ascension et de la Pentecôte, l’insistance de Jésus à parler de l’activité future du Saint-Esprit, le tout en relation directe avec l’eucharistie qui vient d’être instituée et avec la prière que le Sauveur recommande de faire « en son nom » , c’est-à-dire la divine liturgie, tout cela est bien de nature à porter à croire que le canon de la messe s’est inspiré de ce discours. Le sacrifice de l’autel constitue la grande tliéophanie de l’économie nouvelle. A cette théophanie eucharistique, les trois personnes divines ont leur rôle comme dans les thcophanies évangéliques : le Père, en qui est Jésus et qui est en Jésus, Jésus lui-même, prêtre et victime, et le Saint-Esprit qui est envoyé par le Père et qui rend témoignage de Jésus. Et cette théophanie eucharistique a pour but de produire entre le Christ et les disciples une union mystérieuse dont l’union des trois personnes divines entre elles est le type idéal. Qui ne voit que ces idées générales se retrouvent sous diverses formes au fond de toutes les anaphores et de toutes les formules d’épiclèse ? Notons, en passant, dans Renaudot, op. cit., t. ii, p. 136, 144, une épiclèse syriaque qui s’inspire visiblement, pour ime expression, de Joa., xvi, 14 : per illapsiim Spiri/us Sancli, qui a Filio tuo accipit snbslanlialiler.

Sans doute, des rapprochements de ce genre ne suffîsent pas à lever toutes les difficultes ; néanmoins, dans des questions aussi complexes, nous croyons qu’ils ont quelque valeur. « Les discours du Christ après la cène, a-t-on écrit avec raison, renferment toute la doctrine johannique (du Saint-Esprit) : ils préparent l’ère nouvelle qui va commencer, la vie de l’Esprit dans l’Église, et ils l’expliquent tout entière. > Lebreton, op. cit., p. 418-419. L’eucharistie devant occuper dans l’économie nouvelle une place prépondérante, quoi d’étonnant que le Sauveur, dans ses instructions suprêmes, y dévoile à ses apôtres Factivitc mj’stérieuse du Paraclet ? Sans doute, les apôtres ne comprirent pas tout de suite, dès le jeudi-saint, la portée des paroles du Maître. Mais Jésus ressuscité leur apparut plusieurs fois, durant les quarante jours qui précédèrent son ascension, « les entretenant du royaume de Dieu. » Act., i, 3. Ce simple mot de saint Luc nous ouvre de larges perspectives sur les enseignements complémentaires donnés alors par le Sauveur à ses disciples, comme pour réaliser ce verset de son discours d’adieu ; « J’ai encore beaucoup de clioses à vous dire, mais vous ne pouvez pas les porter maintenant. » Joa., xvi, 12. La tradition chrétienne primitive a compris parmi ces choses, dont le Christ ressuscité entretint les siens, des instructions spéciales sur le service eucharistique. S. Justin, Apol., I, lxvii, P. G., t. VI, col. 432 ; Eusèbe, Vita Constanlini. III, XLiii, P. G., t. XX, col. 1104. Cf. Clément de Home, / Cor.. XL, 4-5, P. G., t. i. col. 289. Le Saint-Esprit vint à la Pentecôte parachever l’instruction des dis ciples et leur rappeler tout ce que Jésus leur avait dit. Le Paraclet illuminateur les éclaira, entre autres choses, sur son activité propre et en particulier sur son intervention dans le mystère eucharistique. Sans préjuger la question des origines de l’épiclèse, nous croyons qu’il n’est pas téméraire de lui trouver dans le discours de la cène un fondement scripturaire de nature à en souligner une fois de plus l’importance théologique. Ce discours, outre qu’il accentue très nettement l’activité générale du Saint-Esprit, à côte de celle du Père et du Fils, dans la nouvelle économie du salut, nous semble, pour ainsi dire, situer spécialement son intervention dans le mystère eucharistique par rapport à la série des actes qui concourent à ce mystère. C’est pourquoi nous sommes porté à y voir le fondement scripturaire dont s’est servie la liturgie antique pour situer à son tour l’épiclèse dans la série des faits et des formules concourant au rite complet du sacrifice.

Le récit évangélique de la conception surnaturelle de Jésus en Marie de.Spiiitu Sancto, Matth., i, 18-20 ; Luc, I, 35, constitue un fondement scripturaire de l’épiclèse en vertu d’un raisonnement théologique, c’est-à-dire à raison de l’analogie entre l’incarnation et la transsubstantiation, attribuées l’une et l’autre par appropriation au Saint-Esprit. Cette analogie posée — et c’est là, peut-on dire, un postulat de la doctrine catholique — est-il surprenant que les Pères et les liturgies aient pris texte de ces passages évangéliques pour en tirer de suggestives applications à l’intervention eucharistique de l’Esprit divin ? On constate ces applications dans maintes formules d’épiclèse. Dans les textes syriaques, en particulier, les mots employés pour désigner la descente du Saint-Esprit surlesoblats eucharistiques sont les mêmes que pour exprimer sa descente sur la Vierge au moment de l’incarnation. Ils correspondent aux verbes grecs £7tipy_o[xai et ÈTr’.uxiâ’w mis par l’Évangile sur les lèvres de l’ange Gabriel annonçant à Marie le comment du grand mystère. Cf. Renaudot, op. cit., t. i, p. 224225 ; t. II, p. 88, 90-91, 512, 513. Voir aussi, entre autres documents analogues, une épiclèse du missel mozarabe, P. L., t. Lxxxv, col. 620.

A ces fondements scripturaires de l’épiclèse, il convient peut-être d’ajouter, au moins comme thème d’utilisation patristique, I Tim., iv, 4, 5 : « Tout ce que Dieu a créé est bon, et l’on ne doit rien rejeter de ce qui se prend avec action de grâces, parce que ceta est sanctifié par la parole de Dieu et par la prière. » La phrase de saint Paul ne saurait être restreinte à signifier l’aliment eucharistique. Il n’en est pas moins vrai que plusieurs Pères, entre autres Origène et saint Grégoire de Nysse, en ont fait directement l’application à ce dernier et ont employé la même formule pour désigner la prière transsubstantiatrice. P. G., t. XIII, col. 948-949 ; t. XLV, col. 97.^

Resterait à parler des termes evxap’ono’Tac, £-JÀo-YT |<Taç> employés par les synoptiques et par saint Paul dans le récit de la cène, et que plusieurs auteurs, surtout parmi les Orientaux, ont fait valoir en faveur de l’épiclèse. Nous allons essaj’er d’en déterminer la signification en examinant, d’après les textes sacrés, de quelle manière Jésus-Christ opéra la consécration eucharistique à la dernière cène.

IV. La formule de consécration eucharistique d’après l’Écriture s.inte : l.. consécration A LA dernière cène. — Comment Notre-Seigneur a-t-il accompli, au cénacle, le soir du jeudi saint, la transformation du pain et duTÏn en son corps et en son sang ? Par quels gestes ou par quelles formules ?


L’ensemble des théologiens et des exégètes, à quelques rares exceptions près, répondent que Jésus a